Picardie - Une des dernières "rue Pétain" rebaptisée

jmn02
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Re: Picardie - Une des dernières "rue Pétain" rebaptisée

Message par jmn02 »

Bonjour à tous,

Est-ce un signe des temps ? Un pays qui oublie son histoire, qui la renie, la refoule, en un mot qui n'est plus capable d'être fier de son histoire et de l'assumer, est un pays qui est vraiment au fond du gouffre...

J'habite non loin de Parpeville, village de l'Aisne, qui porte une des dernières plaques de rue au nom de "Pétain". Pris ainsi en effet, les esprits moralisateurs et bien pensants, me rétorqueront que c'est inadmissible qu'à l'aube de la deuxième décennie du XXIe siècle, il se trouve encore des communes pour honorer la mémoire du Chef de l'Etat français et du régime de Vichy. Certes ! A ce détail près qu'en étant un peu curieux, et en parcourant les rues de petit village, on découvre qu'il existe aussi une rue Joffre, une rue Foch, une rue Clemenceau, une rue Wilson, une rue du poilu... En fait, chaque rue de ce village axonais rappelle la Grande Guerre et le nom d'un des "héros" ayant contribué à la victoire des armées françaises en 1918, ou, pour dire les choses autrement, ayant permis la défaite des armées allemandes et la victoire finale des Alliés. Parpeville est situé non loin de Guise, où la 5e Armée du général Lanrezac arrêta la marche de la IIe armée allemande, un certain 28 et 29 août 1914. Le village fût occupé pendant près de quatre ans par les Allemands et ne fut libéré que dans les combats qui dégagèrent également Ribemont, Origny-Sainte-Benoîte et Mont-d'Origny (théâtres de la bataille de Guise de 1914), en octobre 1918. Dès lors, qu'y a-t-il de choquant à ce que ce village ait eu envie, aux lendemains de la Grande Guerre, de commémorer le souvenir des chefs, militaires et politiques, français et alliés, mais aussi des combattants qui ont conduit à dégager cette commune du joug ennemi et à la libération des dix territoires français envahis par l'Allemagne ? Il n'y a rien à voir dans tout cela avec l'homme du 17 juin 1940, du 10 juillet 1940 et moins encore avec celui du 24 octobre 1940. Rien d'ambigu ou de malsain à honorer le commandant en chef de l'armée française en 1918, au même titre, que le commandant en chef des armées alliées (Foch), le chef du gouvernement français, le président des Etats-Unis et le simple combattant français.
Pourquoi renier cette histoire ? Qu'a-t-elle de honteuse ? Il faudra un jour arrêter de s'acharner à vouloir toujours créer des amalgames, qui n'ont aucun sens et qui ne servent qu'à embrouiller les esprits et à semer la confusion, notamment chez les plus jeunes, dont un certain nombre peine déjà à faire la différence entre 1914-1918 et 1939-1945 (résultat d'une doctrine qui tend à réduire toujours davantage la place de la Grande Guerre dans les manuels scolaires). Ce qui est vraiment malsain dans tout cela, c'est ce mélange des genres et des périodes historiques. Les âmes sensibles le seraient moins, si on prenait encore la peine de faire un peu de pédagogie et d'expliquer, au lieu d'alimenter de vaines polémiques sans objet. Ainsi, tant que nous y sommes, pourquoi ne pas débaptiser toutes les rues Joffre également, puisque des études récentes ont démontré son inconséquence et l'état d'impréparation de l'armée française, lesquels ont conduit aux plus grands massacres de combattants français, lors de la bataille des frontières en août 1914, entraînant des pertes en vies humaines plus importantes même que celles de Verdun pour toute l'année 1916 ? Et que Joffre est l'auteur de toutes les offensives meurtrières et infructueuses de l'année 1915 et encore de l'inutile offensive de la Somme de 1916 ? Laissons donc à ces communes le choix de maintenir ou non le nom de leur rue et le souvenir qui s'y rattache. Les politiques et les représentants de l'Etat, me semble-t-il, ont bien d'autres problèmes à régler dans ce pays, et de plus sérieux que ceux-là...

Bonne journée.

Cordialement,

Jean-Michel
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sylvain80
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Re: Picardie - Une des dernières "rue Pétain" rebaptisée

Message par sylvain80 »

Bonjour

Ce qui est inquiétant ici c'est que l'on confond mémoire, histoire et repentance (quel vilain mot). Une rue Pétain, ou même du général Pétain n'est guère choquant, pat contre une rue Maréchal Pétain me dérange davantage... Honorons le général et héros de verdun, oublions et condamnons l'action du maréchal politicard aigri de Vichy.
Ma grande inquiétude en tant que prof. d'histoire c'est que certains sous prétexte de protéger la mémoire du général ne cherche à réhabiliter l'homme à la francisque. Méfiance donc tant de cette repentance qui accable notre civilisation et notre histoire occidentale de tous les maux que des raccourcis historico-politico-fumeux.

Cordialement

Sylvain80, 14-18 en Somme
sylvain80
jmn02
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Re: Picardie - Une des dernières "rue Pétain" rebaptisée

Message par jmn02 »

Bonjour,

Le vrai grand problème de ces affaires de "noms de rues qui dérangent", c'est que "l'allusion à son futur déplorable" (futur du général Pétain en l'occurrence ici) n'est pas faite par les municipalités qui ont baptisé leurs rues du nom de Pétain après la Première Guerre mondiale. Loin, très loin s'en faut !

On comprendra au contraire, qu'aux lendemains de la plus grande des guerres que l'on ait jamais connu, des communes, comme celle-ci, ont voulu non seulement honorer le "vainqueur de Verdun", mais aussi le chef militaire qui a redressé l'armée française, en limitant le nombre d'exécutions de combattants, après la dramatique affaire des refus d'obéissance collectifs d'avril-mai à juillet 1917 (appelés plus communément "mutineries"), et qui commandait les armées françaises durant la cruciale année 1918, année 18 qui, après bien des incertitudes, vit finalement la victoire des armes alliées.

Il s'agissait bien d'honorer ce personnage-là (à l'exclusion de tout autre référence), dans le contexte d'immédiat après-guerre, où, on l'a bien sûr oublié aujourd'hui, le général, puis Maréchal Pétain jouissait d'un prestige et d'une aura extraordinaire. Cette aura, il l'a bien sûr partagé avec des généraux comme Foch, comme Debeney, comme Franchet d'Esperey, comme Haig, comme Pershing, et tant d'autres que j'oublie ici de citer, qui étaient aussi les chefs victorieux ayant terrassé les Impériaux allemands. Dans le cas de Parpeville, le fait est d'autant plus indiscutable que toutes les rues font référence à quelques-uns de ces "artisans" de la victoire de 1918.

Alors pourquoi, aujourd'hui, près de 100 ans après les faits, aller chercher et prêter aux municipalités des interprétations, prétendument ambigües, qu'elles n'ont jamais eues ? Et pourquoi toutes ces révisions de l'Histoire ?

Débaptiser cette rue pour la renommer par exemple "rue du vainqueur de Verdun" aurait-il un sens ? Assurément non. D'abord parce ce terme serait bien trop restrictif pour résumer le seul rôle du commandant de la 2e armée française en 1916, puis du commandant en chef de 1917 et 1918. Ensuite, parce que, si on veut aller dans le sens des esprits bien pensants, ou tout simplement des gens que l'évocation de ce nom choque - mais dans ce cas devraient-ils s'intéresser à d'autres sujets que celui des conflits mondiaux, car ce nom en est indissociable quoiqu'on en dise -, une rue du "vainqueur de Verdun" serait tout aussi inappropriée, vu que c'est précisément sur ce "slogan" que le maréchal Pétain (et non plus le général Pétain de 1918) a établi les piliers du régime du Vichy et de sa politique de collaboration avec le régime hitlérien !

La vérité, c'est que nous (la société française) sommes toujours victimes du "syndrôme de Vichy" qu'a si bien explicité Henri Rousso dans son livre, et que nous n'assumons toujours pas cette page de notre histoire (pas plus que les Allemands n'assument la période nazie d'ailleurs). Et nous préférons encore voir disparaître ces symboles qui dérangent notre conscience, plutôt que de les regarder bien en face et de les assumer. Le refoulement du nom de Pétain trahit bien plus sûrement notre mauvaise conscience liée à l'acceptation presque générale en juin 1940 du régime de Vichy, de la politique de collaboration avec l'Allemagne nazie, par la plupart des Français (nous savons qu'ils furent une minorité à rejoindre spontanément la France Libre du général de Gaulle ou l'Afrique du Nord, et qu'il faudra attendre la fin de 1942 et le courant de 1943, pour voir les mouvements de résistance grossir et monter en puissance. 1943 ! Trois ans après la naissance de ce régime : cela sous-entend que beaucoup de Français se sont douillettement réfugiés derrière ce régime et la figure de ce Maréchal vieillissant, mais peut-être pas si déclinant qu'on voudrait le croire... Tout cela, mis en relation avec la politique de ségrégation raciale, de traque des Juifs, des camps d'internement, de déportation, d'exécutions d'opposants politiques, de résistants, et finalement d'extermination, a de quoi évidemment déranger les consciences individuelles et la Conscience Nationale. De Gaulle, lui même, en réinstaurant, dès 1944, au nom de la réconciliation nationale, la IVe République n'a-t-il pas cherché à faire table-rase de ce passé encore si présent à ce moment-là, et tellement dérangeant (comme est dérangeante, aujourd'hui, la question de la guerre d'Algérie... Paradoxalement, les Français ont beaucoup moins de cas de conscience pour la guerre d'Indochine... Allez comprendre... Peut-être le Vietnam est-il plus loin de nous, et les enjeux politiques et économiques, il est vrai, sont tout différents) ?

Ce fil a le mérite de témoigner combien la passion, même après la disparition de la plupart des acteurs de cette époque, est aujourd'hui encore ardente...

Toutes ces réflexions posent une question bien plus cruciale : n'est-il pas un peu trop facile de ne vouloir assumer que les pans de notre histoire qui nous arrangent ? L'Histoire, avec ses morceaux de bravoure et ses épisodes moins glorieux, est un tout indivisible !

Le problème de la plupart de nos contemporains est qu'ils pensent et qu'ils jugent les évènements du passé avec leur regard d'hommes du XXIe siècle. Pourtant, tous les historiens professionnels, ou de formation, savent qu'il faut, le plus possible, replacer les évènements dans leur contexte et les penser avec le regard et l'état d'esprit des gens contemporains aux évènements auxquels on se rapporte. Et qu'il faut surtout, et par-dessus tout, se garder de juger ces évènements historiques ! (ce qui n'interdit pas en revanche de les décrire et de les analyser)

Il est devenu un lieu commun à force de le rabâcher un peu partout (dans la presse, les colloques, les ouvrages...), qu'avec la construction européenne et avec la politique d'assimilation de populations issues de l'immigration, certains sujets, qui ne posaient aucun problème à la conscience des Français il y a encore une ou deux décennies, sont devenus totalement tabous aujourd'hui. C'est le cas en particulier de l'emploi des troupes coloniales pendant le Premier et le Second conflit mondial (que le méchant officier colonisateur allait faire massacrer inutilement en masse devant les mitrailleuses ennemies) ou, entre autres exemples, de l'occupation allemande, avec ses actes de collaboration politique et économique (nationaux et locaux, nonobstant une collaboration plus "intime et charnelle" avec les soldats ennemis, encore très peu étudiée, parce que bien plus dérangeante encore) et sa cohorte d'exactions en tout genre (là encore pendant les deux premiers conflits mondiaux)...

Et l'on assiste aujourd'hui à des tentatives de réécriture de l'histoire, que l'on essaie de rendre plus acceptable pour la bonne conscience de tous, simplement parce qu'au fond de nous mêmes, nous refusons aujourd'hui de regarder chaque pan de notre histoire, replacé dans son contexte, pour ce qu'il est, "droit dans les yeux", sans préjugés, sans haine, et sans parti pris...

Encore une fois, et au risque de me répéter, il s'agit de bien insister sur le fait que la décision de baptiser cette rue du nom de Pétain, général victorieux de 1918, a été prise aux lendemains de la Grande Guerre, donc bien antérieurement à la défaite de 1940 (autre sujet que nous n'assumons toujours pas non plus aujourd'hui) et à la création du régime du Vichy : il s'agissait tout simplement de célébrer les généraux victorieux et de tenter de soulager, d'une manière certes fort symbolique, le profond traumatisme de la population lié à un chiffre de pertes humaines qu'aucune guerre n'avait précédemment égalé (combien d'hommes ne sont jamais revenus dans le village qu'ils avaient quitté en 1914, 1915, 1916, etc ?). Ajoutons à cela, dans le cas de la commune de Parpeville, qu'ils s'agissait sans doute aussi d'atténuer le souvenir des vicissitudes liées à plus de quatre années d'occupation allemande, de septembre 1914 à octobre 1918.

Il n'y a par conséquent aucune autre lecture, aucune autre interprétation à aller chercher dans ce nom de rue, qui ne fait en aucun cas l'apologie du Maréchal Pétain, ni à plus forte raison du régime de Vichy et des drames qui ont découlé de sa politique collaborationniste avec les nazis.

En ce sens, je ne vois pas pourquoi il s'agirait aujourd'hui de gommer définitivement le nom de ce général de la Grande Guerre, simplement pour alléger un peu le poids qui pèse sur notre conscience collective.

A chacun de nous de faire son examen de conscience, de faire la part des choses, de repousser les amalgames trop vite faits, et de ne surtout pas jeter l'opprobre sur une commune ou une municipalité, qui n'ont jamais eu aucune intention malveillante. Bien au contraire...

Cordialement,

Jean-Michel
JMN02
sylvain80
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Re: Picardie - Une des dernières "rue Pétain" rebaptisée

Message par sylvain80 »

... le politiquement correct et la bonne conscience ne s'accomoderont jamais d'une histoire sinon objective du moins honnête. Pétain c'est Vichy mais c'est d'abord et surtout Verdun n'en déplaise aux bien pensants.

Cordialement

Sylvain80
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carnot
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Re: Picardie - Une des dernières "rue Pétain" rebaptisée

Message par carnot »

Bonsoir à tous,
je n'aime pas trop intervenir sur le forum sur ce sujet mais je vais quand même le faire car je ne suis pas d'accord avec la majorité des intervenants ( après tout, c'est le droit de chacun me semble-t-il que de défendre une opinion à partir du moment où elle est respectable)
Pétain, c'est verdun en 1916 mais c'est aussi la répression des mutineries de 1917, les pouvoirs spéciaux de juin 17 afin d'accélerer les conseils de guerre et les fusillés sans recours!

On a dit que c'était une répression modérée et qu'il n'y aurait eu "que" quelques dizaines de fusillés!! C'est déjà trop! Qu'en pensent les familles de canel ( jeune ch'ti de 21 ans) de lasplacettes et de didier? ( pour ne citer que les fusillés du 18 RI)

Alors, voilà, c'est peut-être aussi politiquement incorrect de reconnaitre la responsablilité de Pétain dans cette répression ( Il est loin d'être le seul général et officier dans ce cas là).
Voilà quelques pensées alors que je suis passé en voiture mille fois devant la maison natale de Pétain, à cauchy à la tour, en me rendant au boulot durant plus de dix ans !

Bonne soirée à tous

ps: ce n'est qu'une opinion personnelle sur le pétain de la grande guerre, celui de 40-45 est déjà définitivement jugé et condamné ( du moins j'espère!!!)
Ne m'envoyez pas de MP désobligeants, c'est très désagréable . cela m'est malheureusement arrivé suite à une opinion!
sylvain80
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Re: Picardie - Une des dernières "rue Pétain" rebaptisée

Message par sylvain80 »

Bonsoir Carnot

ne vous inquiétez pas je condamne tout autant l'homme de Vichy que celui de la répression de 17, ce qui m'inquiéte c'est la focalisation sur un seul homme alors que pendant ce temps notre histoire fout le camp, il suffit pour s'en convaincre de jeter un oeil aux programmes des classes de collèges et lycées en histoire ou notre commune passion est réduite à la portion congrue mais on s'éloigne du débat initial.

pour résumer ma pensée, des rues pétain ou général pétain ne me dérange pas, des rues maréchal pétain là ça coince.

cordialement

Sylvain80
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Re: Picardie - Une des dernières "rue Pétain" rebaptisée

Message par sylvain80 »

Bonsoir

Est-ce à dire que parce que la majorité des Français ignore tout ou partie du rôle de pétain en 14-18 il faut l'oublier au profit d'une histoire "fast-food" genre pétain c'est Vichy? et bien pour moi qui suis titulaire d'une maitrise d'histoire et qui l'enseigne depuis plus de 10 ans je trouve cette démarche fort peu historique! En la poussant à l'extrême les Français connaissent plus Hitler qu'Adenauer donc on oublie celui-ci et on en parle plus de son rôle dans la reconstruction allemande et dans la construction d'une Europe en paix? Je caricature, bien sûr, mais votre remarque n'est ni historique, ni rigoureuse selon moi.

Et avant que chacun ne dégaine son "ah les affreux", pour info les Allemands amis du Maréchal fusillèrent un de mes oncles a^gé de 18 ans. Donc pas de leçon de quoi que ce soit ...

Cordialement

Sylvain80
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Re: Picardie - Une des dernières "rue Pétain" rebaptisée

Message par jmn02 »

Bonjour Carnot, bonjour à tous,

Si l'on doit s'en tenir aux exécutions de 1917 pour justifier que le rôle de Pétain fut également opaque durant la Grande Guerre et que cela suffit en soi à faire définitivement disparaître son nom des rues des derniers villages qui en font encore mention, dans ce cas il faudra aussi à l'avenir songer à supprimer de nos villes et villages toutes les rues du général ou du maréchal Joffre, qui institua dès la fin août 1914 les cours martiales et autorisa explicitement les officiers à réprimer tout acte d'indiscipline ou de panique de la troupe par des exécutions sommaires, sur le champ, sans autre forme de procès, qui restent aujourd'hui mal connues, n'ayant laissé que peu de traces dans les archives de la guerre. Il fût également à l'origine de toutes les offensives meurtrières des années 1914 à 1916, qui coûtèrent la vie à tant de nos soldats pour des résultats presque insignifiants et qui finirent d'ailleurs par entraîner son discrédit et son remplacement par le tristement célèbre général Nivelle.

Le fait est que Pétain n'a pas plus du sang de nos poilus sur les mains, que Joffre n'en a eu de nos piou piou et également de nos soldats bleu horizon. On ne refait pas l'histoire...

Un autre fait indéniable est que Pétain, pas plus que Joffre, pas plus que Foch, pas plus qu'aucun autre chef de l'armée française n'étaient des enfants de coeur et n'avaient d'état d'âme. Ils portaient un intérêt tout relatif à leurs hommes, dont ils savaient le sacrifice inévitable dans toute offensive qui se livrait sur le terrain, sacrifice auxquels tous ont pleinement consenti, à des degrés certes très divers. De même, tous ont plus ou moins cautionné la justice militaire, avec les excès de zèle de certains tribunaux, qui ont débouché sur la tristement célèbre affaire Bersot, sur celle des des fusillés de Vingré, des caporaux de Souain, et de tant d'autres. Il était à l'époque couramment admis que la nécessité de maintenir la discipline militaire pouvait passer par ce type de dérapage. Aucun général n'a conçu le moindre remord de ces exécutions de combattants, pas plus en 1914 qu'en 1917. Ces officiers généraux pensaient autant à leur évolution de carrière qu'aux nécessités impérieuses de bouter l'ennemi hors de France, le premier objectif allant de pair avec le second. Et il nous a bien fallu ces caractères bien trempés, qui ne se laissaient pas submerger par les émotions et les états d'âme, pour amener finalement le sort des armes à pencher en faveur des Alliés. Tels sont les faits.

Pétain, en 1914-1918, fût un général ambitieux comme les autres, mais il ne fût ni plus salaud, ni moins soucieux de la vie des combattants que les autres officiers supérieurs et généraux de l'armée française. Les combattants de la Grande Guerre, pas plus que le reste de la populations (veuves et orphelins de guerre compris) ne retinrent pas les exécutions de 1917, mais bien le rétablissement du moral par un régime de permissions plus régulier et une amélioration notable du ravitaillement. Tous ne virent par ailleurs bien en lui, après 1918, que le "vainqueur de Verdun" et que celui de 1918 (conjointement à Foch, bien entendu). C'est le sens donné à l'apposition de ces plaques de rues, entre les deux guerres. Comme déjà dit dans mes précédentes interventions, rien d'autre à aller chercher. Renier ces noms de rues et les faire disparaître, c'est renier aussi le souvenir que les combattants gardaient après guerre de ce général victorieux.

Cordialement,

Jean-Michel
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Re: Picardie - Une des dernières "rue Pétain" rebaptisée

Message par sylvain80 »

Bonjour à tous

sans oublier le brave Mangin qui préconisait de "consommer" la force noire avant l'hiver sans quoi elle ne serait plus "bonne à rien"!

Cordialement

Sylvain80
sylvain80
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Re: Picardie - Une des dernières "rue Pétain" rebaptisée

Message par jmn02 »

Bonjour à tous,

Parpeville a finalement cédé à la pression politico-médiatique et à la tentation du "politiquement correct", face au poids d'un argument imparable : le risque de poursuite en contentieux, si un jour une personne mécontente passait par là...
Et la commune de Tremblois-les-Carignan, dans les Ardennes, s'apprête à emboîter le pas, pour ne pas être en reste et faire figure d'exception...

"Messieurs les censeurs, bonsoir!"... pour reprendre le coup de colère de Maurice Clavel quittant le plateau de l'émission "A armes égales"...

Voici le compte-rendu de cette affaire à travers ce remarquable journal qu'est l'Union, qui se fait si souvent l'écho des derniers évènements liés à la Grande Guerre et à ses conséquences jusqu'à nos jours, dans l'Aisne et la région Champagne Ardennes (toute ressemblance avec le pub gratuite serait purement fortuite et indépendante de la volonté de l'auteur de ce texte !) :

http://www.lunion.presse.fr/article/ais ... de-la-paix

http://www.lunion.presse.fr/article/ard ... ardennaise

http://www.lunion.presse.fr/article/ais ... parpeville

http://www.lunion.presse.fr/article/ais ... epuis-1919

Quel motif invoquerons-nous un jour pour faire disparaître les monuments aux morts et les cimetières militaires de nos communes et de nos campagnes (à propos, quelqu'un sait-il si la nécropole nationale de la Haute-Chevauché, en Argonne, est toujours menacée de disparaître du fait de la convoitises des forestiers ? J'ai le souvenir d'avoir visité les lieux il y a près d'une dizaine d'années et la responsable de l'office du tourisme que j'avais rencontrée à Clermont-en-Argonne à l'époque, m'avait signalé cette incroyable nouvelle... Je ne suis pas retourné, faute de temps, sur place depuis. Je ne sais pas ce qu'il en est et si cela est toujours d'actualité...).

Pour revenir à l'échange qui a eu lieu entre le préfet de l'Aisne et la maire de Parpeville, visible sur le lien ci-dessus, il eut été bien peu probable que quiconque dépose un jour plainte contre la municipalité, vu que depuis 1945 (où le sujet de la collaboration était bien plus brûlant qu'aujourd'hui, n'oublions pas que cette période d'après-guerre fut période d'épuration et des grands procès de collaborateurs) et jusqu'à ce début fatidique de novembre 2010, foule d'anciens résistants et de déportés, aussi bien que de témoins des années noires de l'occupation allemande, ont dû passer dans cette rue Pétain, sans sourciller, ni trouver quoique ce soit à redire (les gens étaient bien mieux éduqués et formés, bien que l'on allait bien moins longtemps à l'école, et eux, ne faisaient pas d'amalgames entre le soldat de la Grande Guerre et le Chef de l'Etat qui a trahi et compromis la France en la jetant dans le carcan de la collaboration avec le régime nazi)...

Mais on veut aujourd'hui une histoire bien propre et bien lisse... L'an prochain, on supprimera la Première Guerre mondiale du programme scolaire, qui sera fondu dans une problématique plus générale qui portera sur l'expérience combattante au cours des guerres du XXe siècle (cela a été confirmé par la contribution de Yann Chanoir, chargé de cours à l'université de Reims-Champagne-Ardennes et enseignant en lycée, lors du colloque de Vic-sur-Aisne, le 7 novembre dernier) : à n'en pas douter c'est la mort de la Grande Guerre dans les écoles et le début de nouveaux amalgames entre tous ces conflits du XXe siècle, qui ne seront probablement pas sans conséquence sur le souvenir de la Grande Guerre pour les générations à venir et sur la valeur qu'elles attacheront au patrimoine légué par les hommes de ce temps là, pendant et après guerre. Combien ne savent déjà plus ce qu'est le 8 mai 1945, le 11 novembre 1918... Et je ne parle même pas des dates des grandes batailles de la Grande Guerre qui donnent lieu aux réponses les plus surprenantes ! Quant à la localisation des lieux de bataille, je n'en parle même pas. Une des solutions à ces défaillances mémorielles était de les emmener sur le terrain pour prendre conscience de ce qu'était cette guerre et de ce que sont ces lieux, aujourd'hui encore. Mais même cette démarche pédagogique est fortement remise en question (et oui! déplacer des groupes scolaires sur les champs de bataille de la Grande Guerre, c'est une perte de temps, et surtout, ça coûte de l'argent !)... Que deviendront tous les lieux de mémoire de la Grande Guerre, si les écoles renoncent peu à peu à y emmener leurs élèves, pour économiser du temps et de l'argent ? On est en droit de craindre le pire pour la mémoire de la Grande Guerre et des vestiges de cette époque...

Je ne sais plus quel auteur disait : "Une nation qui oublie son histoire se condamne à la revivre"...

Triste France qui perd peu à peu la mémoire, et qui sélectionne la mémoire à conserver et celle à refouler...

Cordialement,

Jean-Michel


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