Bonsoir Patrice,
Oui le sujet est particulièrement intéressant et comme tu le dis, les 3 opérations étaient simultanées donc la LE n'était pas vraiment concernée sauf pour ceux qui restaient au corps. Le nombre des "provinciaux annexés" à la LE n'était pas le plus important, loin s'en faut. A la veille de la guerre, la réputation de la LE n'était pas bonne.... Tout à changé au cours de la guerre au fil des succès du R.M.L.E.
A propos de la Légion et des "provinciaux-annexés", j’ai ressorti un carnet de chant qu’avait rédigé une grand-tante de mon épouse. Durant la guerre, elle avait été infirmière à l’hôpital de Bagnères de Luchon. Elle soignait les hommes, les écoutait et notait ce qu'ils chantaient. Elle a noté une cinquantaine de chants (55 très exactement) sur ce cahier. Il y a de tout, des chansons de la colo, de l’Armée d’Afrique, des chansons d’amour… bref des chants de ces pauvres bougres qu’on envoyait à l’abattoir et qui souffraient à l'hôpital. Elle s’appelait Camille Puisségur et est décédée de la grippe espagnole au lendemain de la guerre. Dans ce carnet, il y a deux chants typiquement légion : un sur Garibaldi et un sur ces soldats que nous évoquons :
"LE LÉGIONNAIRE "
I
Depuis longtemps la raison du plus fort
Tenait courbés deux bons vieux de l’Alsace
Et dans leur cœur opprimé par le sort
L’amour de France était toujours vivace
Lorsque son fils atteignit dix-huit ans
La pauvre mère murmura les mains jointes
«Vas-vite en France t’engager mon enfant
tu ne dois pas servir les casques à pointes !»
Refrain
Lorsqu’à Nancy au bureau d’recrut’ment
Il vint, joyeux, signer son engagement
Le sergent dit : «R’gardez moi c’te caboche ;
Dans leur pays, lorsque ça n’a plus de pain
Ça vient chez nous copionner son prochain
Pour la Légion c’est encore un salle boche»
II
En algérie son accent alsacien,
Dont il n’avait jamais pu se défaire
Le faisait prendre pour un vulgaire prussien
Et détester des autres légionnaires
Les rengages ne pouvaient le sentir
Il avait beau suivre la droite route
Tous les prétextes étaient bons pour punir
La têt’ carrée, le mangeur de choucroute !
Refrain
Il écrivit souvent à sa maman
«Je suis heureux car dans mon régiment
On me dorlott’, on n’me fait pas d’reproches»
Puis essuyant les larmes qui coulaient
Le pauvre gas pensait : «elle mourait
Si elle savait qu’on m’appelle l’aboche»
III
Les légionnaires sont partis au Maroc.
Un jour surpris par une fusillade,
Le capitain’ voulant éviter l’ebac
Tomb’ malgré lui sous l’feu d’une embuscade
Mais l’alsacien s’élançant comme un lion
Sauv’ l’officier pendant qu’les secours approchent
Quand l’colonel lui demanda son nom
Il répondit «on m’appelle l’aboche»
Dernier refrain
Devant tout l’monde son chef le décora
En s’écriant «rappelez-vous brav’s soldats
Qu’dans la Légion, il n’y a pas d’ifférence
Quand le drapeau vous conduit au succès
Il n’y a plus d’allemands, d’italiens ou d’anglais
Vous êtes tous des enfants de la France.

Voici les pages du cahier sur lesquelles sont inscrites les paroles...................... Tout est rédigé in-extenso, accents et prononciation comprise....... Un document précieux et très émouvant à mes yeux, surtout qu'avec la fin tragique.
Bien amicalement
Jean-Michel
PS : je n'ai aucune indication quant à l'air de cette chanson........... hélas !