Bonjour,
D'une lecture à l'autre, je viens de trouver un autre "pionnier" du rugby tombé au champ d'honneur. Et pour une fois, il ne s'agit pas d'un joueur... mais de Fernand BIDAULT, journaliste et principale "plume" rugby de "La Vie Au Grand Air", le grand hebdomadaire sportif de ce début de siècle.
Sa carrière littéraire m'est inconnue (rien sur Gallica, ni Abebooks...), mais devait être suffisamment appréciée pour que l'homme bénéficiât d'une notice biographique dans l'imposante "Anthologie des Ecrivains Morts à la Guerre" dont on parle ici sur le forum
pages1418/forum-pages-histoire/ecrivain ... 7399_1.htm. On y apprend (source : ce site
http://andrebourgeois.fr/ecrivains_mort ... guerre.htm ) que Fernand BIDAULT naquit à Orléans le 28/2/1879 où il fit ses études (second au concours général de philosophie en 1898), avant de prolonger sa scolarité au Lycée Michelet puis à la Sorbonne. Il publia divers essais dont plusieurs consacrés au sport. Incorporé au 331eme R.I., il fut blessé à Vauquois (Meuse) le 29 octobre 1914. Il fut ensuite transféré à l'hôpital de Neufchâteau puis à Mâcon où une erreur de soins causa sa mort.
nota : les lieu de son décès relaté dans "l'Anthologie..." n'est pas celui de sa fiche MPF... espérons qu'il n'y a pas de confusion...
re-nota : je viens de lire et d’apprendre ce que furent les combats à Vauquois… brr…
Dans "La Vie Au Grand Air", la signature de Fernand BIDAULT accompagne presque tous les comptes-rendus du championnat de Paris, des grands matchs du Championnat de France ou des premières rencontres internationales. Il écrit aussi des articles plus « vulgarisateurs » ou « pédagogiques » dans la presse généraliste pour faire connaître son sport favori. Je vous recommande la lecture de cet article de 9 pages copieusement illustrées dans la revue « Je Sais Tout » de février 1908 que j’ai mis en ligne ici:
http://www.scribd.com/doc/33424904/Fern ... 08-9-Pages
Dans un registre plus « pointu », Fernand BIDAULT est peut être l’inventeur des « stats » dont les reportages télé nous inondent… pour preuve, ce traitement jusqu’alors inédit de la finale du Championnat 1907 opposant le Stade Bordelais UC au Stade Français (14-3 pour les Acquitains
http://www.finalesrugby.com/match.asp?idMatch=16 ) :
Pour réaliser ce document, Fernand BIDAULT et son compère Maurice MARTIN, journaliste Bordelais, étaient monté sur le toit du Stade du Bouscat (près de Bordeaux) ! Cette silhouette est la seule photo que je possède de lui (normal, les journalistes sont du mauvais côté de l’appareil…). Si quelqu’un pouvait nous trouver son portrait ?
Au plan technique, vous noterez (agrandissement ici :
http://farm1.static.flickr.com/96/23713 ... 4ef3_o.jpg ) que ce match a compté 80 mêlées (pas de rucks à l’époque : tout placage sans transmission de balle s’enchaine par une mêlée…) et autant (89…) de touches (on pouvait alors taper directement en touche depuis n’importe où du terrain… ). A se demander combien de temps de jeu effectif comptait une partie de nos anciens…
Pas moins de 19 internationaux (présents ou à venir) sur la pelouse pour rappeler la domination de ces deux « Stades » sur cette décennie ovale… dont deux Morts pour la France : les Bordelais Marc GIACCARDY et LACASSAGNE.
En écrivant ces lignes, je réalise que ma liste d’internationaux MPF (
pages1418/forum-pages-histoire/Generali ... htm#t84471 ) est incomplète… il manque (au moins…) LACASSAGNE… En croisant les sources, je m’aperçois que le cas de LACASSAGNE est un poil compliqué ... sa fiche FFR, elle même tirée de « l’Encyclopédie » de Bodis et Laffont, indique : « Des sources le donnent tombé à l'ennemi pendant la 1ère Guerre Mondiale. Mais les certitudes manquent. S'agit-il d'Henri Lacassagne ? Trouva-t-il la mort dans un accident d'avion à la fin du conflit? Ou mourut-il bien après, à Créteil en 1966 ».
Toutefois, les explications proposées par Wikipedia (ébauche
http://fr.wikipedia.org/wiki/Henri_Lacassagne) semblent documentées et convaincantes, et sont corroborées par cet article du Miroir des Sports du 11 novembre 1925
http://www.finalesrugby.com/afficheDocu ... ument=1374. Wikipedia nous indique :
En réalité, Henri LACASSAGNE (Pierre Jean Henri pour l'état civil) est né le 27/12/1883 à Viella (Gers), a fait ses études secondaires au lycée Montaigne de Bordeaux où il a passé son baccalauréat en 1901 et découvert le rugby, un sport qu'il affectionnait particulièrement et dans lequel il excellait. Pendant les vacances scolaires il revenait dans son village et entraînait l'équipe de rugby qu'il y avait organisée. Après avoir fait son service militaire au 344ème à Bordeaux, poursuivi des études de commerce, et tenté une expérience sans lendemain en Amérique du Sud, il s'est établi à Nantes où il prit une participation dans une maison d'articles de sport (la maison Coutes et compagnie) et où il résida jusqu'en 1914.
Pendant la guerre de 1914-1918, après une première blessure et une longue convalescence, il a été affecté en 1917 à l'école de tir aérien de Cazaux, puis à la 46ème escadrille du 2ème groupe d'aviation en tant que mitrailleur et s'y est couvert de gloire. En effet, une première citation à l'ordre de l'Armée dit de lui "Excellent mitrailleur, d'un courage et d'un sang-froid au dessus de tout éloge, grièvement blessé au cours d'un combat contre 15 avions ennemis, a bravement surmonté sa douleur et, par la précision de son tir, permis aux appareils qu'il protégeait de continuer sa mission."(Ordre général n° 9000 du 12 août 1918). Hélas, le 14 septembre 1918 à 9 heures un quart (d'après la lettre écrite à sa veuve par son lieutenant), dans le ciel de Saint-Benoît (Haute-Marne), a lieu un combat aérien au cours duquel il reçoit une première balle dans la poitrine. Cette première blessure n'est pas mortelle puisqu'il continue à mitrailler l'avion ennemi qui va s'enflammer et s'écraser au sol, mais une seconde rafale tirée d'un autre avion allemand l'atteint cette fois-ci à la tête, et lorsque le pilote, indemne, réussit à poser son appareil à Saint-Mihiel (Meuse), son coéquipier avait cessé de vivre. Deux mois après cette mort glorieuse, le Général PÉTAIN décernait une seconde citation à l'ordre de l'Armée au sergent-major LACASSAGNE Pierre Henri, du 59ème régiment d'infanterie, mitrailleur en avion C.46 : "Excellent mitrailleur, d'un courage et d'une adresse remarquables. Le 14 septembre 1918, au cours d'une mission de protection de bombardement particulièrement difficile, a engagé vaillamment la lutte contre 7 monoplaces ennemis et a abattu l'un de ses adversaires. A été peu après atteint très gravement. Une blessure antérieure. Une citation." (Ordre général n° 10812 du 23 octobre 1918).
Après la guerre, le village de Viella honorait la mémoire de son héros en donnant son nom au premier terrain de sport de la commune
Au plan sportif, Henri LACASSAGNE montre un superbe palmarès : champion avec Bordeaux en 1904, 1905, 1906 et 1907, finaliste en 1908 – contre le SF… - . Il compte au nombre des premiers internationaux (carte d’international n°9… sur laquelle il se prénomme « André »… d’où les confusions… ) retenus pour le France – Nouvelle Zélande inaugural du 1er janvier 1906.
Après ses années SBUC, LACASSAGNE s’installe professionnellement à Nantes où il jouera (avec ses anciens coéquipiers Laporte, Thil, Hourdebaight) sous les couleurs (rouge, vert, blanc…) du Stade Nantais. Il pose ici (médiocre photo du journal "Plein Air"...) en 1911 aux côtés de son capitaine Percy Bush, « superstar » Galloise du début du siècle, et unique international Britannique à avoir rejoint notre championnat avant l’ère moderne ! La photo de droite (carte postale) est meilleure mais, à votre avis, où est Lacassagne ? 2eme debout à gauche ? (photo haute déf :
http://www.flickr.com/photos/rugby_pion ... otostream/ )
@+
Post-scriptum : ce billet est déjà bien long... mais il faut que je rajoute ces quelques lignes de Fernand BIDAULT. De fait, j'ai appris sa disparition durant le conflit au détour d'un livre récent (« Rugby en toutes lettres », Atlantica). BIDAULT y évoque, en 1912, ces jeunes femmes amatrices de rugby... et des joueurs... Les anciens joueurs qui passent par ici pourront s'y reconnaître !
« Elle est exaltée, frénétique, partiale jusqu’à l’extravagance. Elle ne rate pas une partie. Elle a adopté le club de son ou de ses amis ; juchée sur une chaise, elle répand en conseils héroïques : « Rentre-z’y dans le chou ! Te laisse pas faire, Marcel !… Crève-le, c’t’asticot-là, mon Jules !… ». Selon la couleur chère à son cœur, elle acclamera Guillemin le Massacreur, orgueil des bleu-ciel-et-blanc (Racing Club de France), ou le massif Redelsperger, le poids lourd des bleus-et-rouge (Stade Français) ; ou encore le colossal Cadenat, Tartarin des noir-et-blanc (SCUF)… Au coup de sifflet final, elle se précipitera pour embrasser son Jules ou son Marcel sur la ligne de touche. Le baiser sur la touche est le meilleur, au dire des poètes. »
edit 10/5 des détails supplémentaires sur la bio de Henri Lacassagne ici
http://fr.wikipedia.org/wiki/Discussion ... Lacassagne dans "l'arrière boutique" de Wikipedia, où le contributeur indique ses sources, qui paraissent fiables, entre Gers et Meuse. Merci à lui ! J'ai profité de ce passage chez Wikipedia pour y ajouter sa photo avec l'Equipe de France lors de ce fameux France-All Blacks de 1906 (zoom de
http://www.flickr.com/photos/rugby_pion ... otostream/ )
