Bonjour,
C'est à la demande du Général Estienne que Louis Renault fit réaliser une étude d'organisation d'un atelier de réparation.
L'expérience acquise avec les chars Schneider et St Chamond avait amené le Commandement à décider la mise en place d'une structure spécifique de réparation des chars Renault, structure intégrée à l'AS et placée entre le niveau SRR des Groupements de chars et les usines de fabrication des chars Renault.
Le renvoi en usine des chars endommagés au combat ne s'était pas révélé suffisamment performant avec les chars Schneider et Saint Chamond, et le rythme de production et le volume de chars type Renault, en cours de fabrication, ne permettait pas aux industriels de se charger de cette mission supplémentaire.
Après l'attaque allemande de Mars 1918, et avec la décision prise de faire sortir de la zone des Armées tout ce qui concernait la mise en oeuvre du Renault FT, le camp de Bourron (au Sud de Fontainebleau) avait été choisi pour devenir le nouveau centre d'AS et le lieu d'implantation de cet atelier de réparation des chars légers.
Dans une lettre (préalable à cette note rédigée par l'ingénieur Mahieu), Louis Renault précise au Général Estienne que cette orgnisation devrait permettre la réparation en 10 heures de 5 chars par jour. Ce rythme était susceptible d'être amélioré, une fois l'atelier rodé, et sous réserve d'une bonne alimentation en pièces de rechange. Le bon approvisionnement de l'atelier impliquait aussi une navette journalière entre Bourron et les usines Renault de Billancourt.
L'atelier fut construit avec des éléments de hangar métallique de type Meaux. Il mesurait 130 m x 29 m avec une surface de montage de 1320 m² et d'appentis de 900 m².
3 voies étroites de 60 parallèles le parcourait sur toute sa longueur, voies qui étaient reliées entre elles par des aiguillages permettant le déplacement des chars le long de la chaine d'entretien.
L'affectation à Bourron d'une compagnie américaine du Mecanicals Corps est liée à la mise en service de cet atelier.
Réparation des chars légers Renault
Etude du 20 Août 1918 (de l'ingénieur Mahieu) ayant pour objet l'installation d'un atelier de démontage et de remontage
Seront réparés dans cet atelier les chars nécessitant une révision générale, ou le remplacement :
- de la boite
- des démultiplicateurs du moteur
- de l'essieu
- des barbotins
- des supports de centrage
- d'une des toles de la carcasse n° C - E - T - U - V - W - X - Y - S - AS
(Ces lettres correspondent vraisemblablement aux différentes plaques de blindage normalisées composant le Renault FT).
Méthode de travail :
Les chars de cette catégorie devant être complétement démontés, la méthode de démontage et de remontage la plus rapide est celle qui consiste à présenter les chars successivement en des temps égaux devant des équipes spécialisées faisant continuellement les mêmes travaux.
C'est ainsi qu'après une étude approfondie du temps de montage, nous sommes arrivés à cette conclusion qu'un char peut être complétement monté en 10 heures.
Pour ce faire il sera présenté sur chariot devant cinq équipes différentes.
Déshabillage du char :
1° opération : Démontage de la tourelle, de la toiture, de la queue et des deux planchers
Temps : deux heures
Equipe : trois hommes
2° opération : Démontage des commandes, radiateur, réservoir d'éssence, tuyauterie.
Temps : deux heures
Equipe : trois hommes
3° opération : Démontage des chaines, des longerons et des deux toles extrèmes arrière.
Temps : deux heures
Equipe : quatre hommes
4° opération : Enlèvement de la boite, du moteur et de la friction d'embrayage, des commandes verticales et des
deux démultiplicateurs intérieurs.
Temps : deux heures
Equipe : trois hommes
5° opération : Démontage de l'essieu et des supports de centrage.
Temps : deux heures
Equipe : deux hommes
Il ne reste plus que la caisse de protection démunie de ses organes.
Si des toles détériorées doivent être remplacées, le travail doit être effectué sur des voies de garage en dehors du montage à la chaîne. Ce travail est fonction de l'avarie des toles et du genre de toles à remplacer. Le remplacement des toles avant peut être fait assez rapidement mais, s'il s'agit des toles arrières, le travail entrainera le rétablissement de la ligne d'arbre.
Pour monter toutes les toles et la ligne d'arbre, il faut deux hommes travaillant cinq heures.
La remise en état de la caisse de protection étant faite, le char peut être remis en montage.
Les opérations se suivront en sens inverse du démontage, les temps sont les mêmes, mais le personnel est plus important.
Il faudra :
1° opération : 3 hommes
2° opération : 5 hommes
3° opération : 4 hommes
4° opération : 4 hommes
5° opération : 3 hommes
Pour démonter et remonter cinq chars par journée de 10 heures, il faut donc disposer en tout de trente quatre monteurs, plus le personnel de maitrise.
Pour réparer les carcasses, attendu qu'elles ne seront pas toutes entièrement démolies, deux équipes de neufs hommes suffiront.
A ces chiffres, il faut ajouter cinq hommes pour le nettoyage des pièces et six manoeuvres, soit au total 59 hommes, plus le personnel d'encadrement et les manoeuvres.
Enfin il faudra tenir compte du personnel nécessaire à l'habillage des chars et à la mise au point.
Disposition de l'atelier des réparations importantes
Le plan est établi conformement aux idées directrices de monsieur Renault. Il permet de se rendre compte de la disposition théorique d'un montage à la chaine, appliquée aux chars d'assaut.
Les chars sont placés les uns derrière les autres, sur des tréteaux lequels reposent sur les chariots plats disposés sur rails. Ils entrent par la voie A, et les chariots sont successivement poussés sur rails en regard des box centraux où les attendent les équipes spécialisées. Toutes les deux heures la chaine avance.
Au centre, il y a cinq box centraux garnis d'établis avec tiroirs pour les outils des hommes, deux étaux, un bac pour le lavage des pièces, des casiers pour leur classement, et des boites portatives dans lesquels seront disposées les pièces démontées de chaque char. Les boites doivent porter les numéros des chars afin d'éviter le mélange des pièces.
Il en résulte, que nous ne rencontreront dans chaque box que le même genre de pièces.
Celles-ci ayant été démontées, elles sont lavées et examinées par le chef compétent. Les pièces défectueuses sont écartées et dirigées vers un département spécial où des techniciens jugeront des retouches à y apporter. Dans la caisse portant le numéro du char, les pièces défectueuses seront immédiatement remplacées par des pièces bonnes, reclamées au magasin des rechanges.
Les chars sont deshabillés sur la voie A-A', les toles sont remplacées, s'il y a lieu, sur les voies de garage E-E', et les chars sont remontés sur la voie B-B'. Ils se représentent donc devant les box à l'extrémité opposée à celle ou ils ont été démontés, et les monteurs, lors du passage du char, retrouveront dans la boite portant son numéro, les pièces lavées ou renouvelées nécessaires à son remontage.
Douze potences munies de palans permettent de lever les pièces lourdes, et une voie transversale avec des chariots plat doit servir au transport des tracks complets.
Ces appareils de levage sont à conseiller, en l'absence de pont roulant.
Pour déplacer les boites garnies de pièces, les moteurs, les boites de vitesse, si la pavement est bon, les chariots genre Cowan sont à conseiller.
Les boites de vitesse, les démultiplicateurs et les moteurs doivent être réparés à l'usine par des spécialistes, mais les autre organes pourront être réparés dans des ateliers qui pourront être établis à proximité des montages.
La voie D-D' servira à l'évacuation des pièces avariées et à la livraison des pièces de remplacement.
Le travail à l'intérieur des chars, nécessitant l'emploi de lampes portatives, il faudra prévoir deux prises de courant à proximité de l'endroit ou stationnent les chars.
Recommandations générales
Les chars doivent être lavées à grande eau avant leur entrée aux atelier de montage. L'installation d'un lavoir est à envisager.
Après le montage, ils doivent subir un essai sur trétaux durant une demi-heure et un essai sur terrain durant une heure au moins.
Il sera nécessaire de prévoir des quantités de rechanges différentes de celles qui nous ont été demandées, afin de satisfaire
aux besoins de semblables ateliers.
Enfin, il sera utile de prévoir les rechanges en boulons, écrous, tôles, tourelles et pièces de tourelles.
En commentaire.
Si effectivement l'atelier de Bourron fut mis en place sur cette base, il ne parait pas que, l'éternel problème des pièces de rechange, ait effectivement permis de tenir un rythme aussi soutenu de réparation. Les quelques photos (en carte postale) de chars Renault, en attente sous les arbres près du hangar, semblent le prouver. Il s'agit de photos prises à l'automne 1918.
La remise en état des chars, envisagée dans ce document, va jusqu'au remplacement des plaques de blindage du chassis. Cette opération nécessitait un dérivetage des cloisons.
Ce domaine n'est malheureusement pas abordé dans le document. Il pose la question qu'un sujet du forum Landships vient de lancer sur :
- les parties rivetées et boulonnées du chassis du Renault FT,
- l'identification des périodes de modifications (et des pays modifieurs) par les types de rivets utilisés
- la modification des parties rivetées ou boulonnées.
La note ne parle pas de forge dans l'atelier, à priori nécessaire pour porter les rivets au rouge.
Deux photos (parking et ateliers) sont visibles dans le livre "les chars d'assaut" de Dutil aux pages 221 et 225
Source du document : SHD Vincennes (carton 16N2140)
Michel
Char Renault FT - L'atelier de réparation AS de Bourron
Re: Char Renault FT - L'atelier de réparation AS de Bourron
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