MARIE ALFRED
Brick-goélette de 159 tx JB 133 tx JN appartenant à l’armateur G. de BOUTRAY, domicilié à Granville.
Chez Lacroix, ce voilier ne figure ni dans la liste des voiliers caboteurs en 1914, ni dans celle des voiliers caboteurs coulés en 1917.
Au vu du lieu d’inscription de l’équipage, il pourrait s’agir d’un brick goélette armé à Lannion ou Paimpol, ayant peut-être effectué la pêche à la morue et devenu caboteur.
Liste d’équipage
GEFFROY Yves Capitaine Lannion
LE DU François Matelot Paimpol
BERTHOU François Matelot Lannion
GUILLOU Alexandre Matelot Paimpol
LE ROY Louis Mousse Paimpol
La perte de MARIE ALFRED
Le voilier revient d’Ibiza (Baléares) et a fait une escale au Ferrol. Il se dirige sur Fécamp avec un chargement de 216 tonnes de sel.
Le 12 Août 1917, il se trouve par 49°10 N et 04°19 W à 20 milles de l’île de Batz quand un sous-marin sans pavillon est aperçu à 2 milles environ.
Mer peu houleuse. Vent de SW.
Le sous-marin ouvre le feu et un seul coup sur les douze tirés atteint la goélette, mais brise net le mât de misaine.
Le capitaine fait mettre en panne et évacuer. La chaloupe reçoit l’ordre d’accoster le sous-marin et le capitaine et deux hommes sont gardés à bord, tandis que trois Allemands prennent leur place et vont sur le voilier. Ils prennent sextant, chronomètre, baromètre et vivres et posent deux bombes cylindriques longues de 30 cm et d’un diamètre de 10 cm, à l’extérieur de la coque, de part et d’autre du grand mât. Le canot s’éloigne, les bombes explosent et le voilier coule très rapidement.
Sur le sous-marin, le commandant interroge le capitaine Geffroy : « D’où venez-vous, où allez-vous, que transportez-vous, avez-vous des armes, de la poudre, des munitions, un canon ? Dites toute la vérité, car nous allons à bord et si, contrairement à ce que vous dites, nous trouvons des armes, tout l’équipage sera fusillé. »
Au retour du canot, les Allemands remontent dans le sous-marin, les Français rembarquent et font route sur la côte, tandis que le sous-marin s’éloigne vers le nord.
Ils débarquent à Perros Guirec le jour même à 19h00 sans autre incident.
Description du sous-marin
Le capitaine Geffroy dit que ce sous-marin, d’environ 60 m de longueur, est tout à fait identique à l’UB 23 qu’il a vu lors de son escale au Ferrol, quelques jours auparavant, et dont il possède la photo.
Il reconnaît en particulier les filières de 4 m sur l’extrême avant, sans doute des coupe-filets. Il avait aussi un canon de 88, peut-être escamotable à l’intérieur du sous-marin.
En plus du commandant, il a vu une douzaine d’hommes sur le pont, en vêtements de cuir.
Conclusion de l’officier enquêteur
La conduite du capitaine a été très correcte. Ni sanction, ni récompense. Peut conserver la faculté de commander.
Le sous-marin attaquant (UB 40)
C’était effectivement un sous-marin de la série UB, l’UB 40 de l’OL Hans HOWALDT. Le même jour il coulera aussi le PAULINE LOUISE.
Hans Howaldt, né le 12 Novembre 1888 à Kiel et décédé le 6 Septembre 1970 à Bad Schwartau, commanda successivement UC 4, UB 40 et UB 107. Promu Kapitänleutnant le 18/01/18, il aura coulé 65 navires et reçu la croix « Pour le Mérite » le 23 Décembre 1917.
(On peut voir sa photo sur uboat.net)
Le sous-marin UB 23
Ce sous-marin de la flottille de Flandres, commandé par l’Ol Hans Ewald NIEMER, avait été gravement endommagé par le patrouilleur HMS PC 60, le 26 Juillet 1917, au large de Lizard. Il était entré à La Corogne le 29 Juillet et avait alors été interné au Ferrol. C’est là que les hommes du MARIE ALFRED avaient pu le voir, et se procurer la photo que voici :

Au dos de la photo figure le texte suivant :
« Cette carte appartient au capitaine de la MARIE ALFRED, Monsieur Geffroy, de Lannion, qui souhaite qu’on la lui retourne lorsqu’on n’en aura plus besoin. Elle représente le sous-marin B 23 (sic) interné au Ferrol. Elle a été prise le 29 Juillet 1917 à La Corogne. »
C’est donc probablement un cliché pris au moment de l’entrée du submersible dans la baie de La Corogne. Il semblerait qu’il n’ait jamais été rendu au capitaine Geffroy…

Cdlt