Re: Transcrire une correspondance en respectant
Publié : sam. févr. 24, 2007 12:11 am
Bonsoir,
Un désordre assez grave dans mes équipements informatiques m’a incité à travailler sur des documents que j’avais remisés dans le dernier recoin, le plus inaccessible de mon fourbi. Il faut bien s’occuper.
Il s’agit de la correspondance d’un jeune artilleur lourd, pas du tout enthousiaste, mais terriblement amoureux d’une jeune fille de son village. Nous sommes dans la région de Saint-Marcellin.
Cette correspondance est celle de jeunes gens qui se sont promis l’un à l’autre et qui ont déjà bien avancé dans leurs engagements…
Ce qui m’ennuie ce sont ces deux points :
*Dois-je transcrire les mots d’amour, ceux-ci d’ailleurs se répétant pratiquement dans chaque lettre ? En première approche, cela me gêne et n’apporte rien sinon cette angoisse répétée de ne pas vivre l’amour, de ne pas vivre librement son destin.
*Le langage. L’orthographe est assez maltraitée mais la langue est savoureuse. Mon grand père devait à peu de choses près s’exprimer ainsi, avec cet accent si doux, comme avaient souvent les gens des campagnes du Dauphiné ou de la Savoie puisqu’il s’agit de ces régions. Je suis tenté de demander à un parent patoisant de lire tout cela. Mais il faut que la transcription soit lisible par des amis d’autres nations. Alors qu’en pensez vous ?
A titre d’exemple voici une lettre remaniée « à ma façon » afin qu’elle soit lisible. Je maintiens les tournures et tente d’avoir une orthographe à peu près correcte.
La 11e batterie de 95 du 5e RAL est à Septmonts, notre soldat s’occupe beaucoup des chevaux et des approvisionnements en munitions.
Bonne lecture et merci pour vos avis précieux concernant la méthode et la façon.
Cordialement
JCP.
Le 26 décembre 1914, Septmonts.
Chère petite femme,
Je profite d’un petit moment pour te souhaiter la bonne année et une bonne santé en attendant le plaisir de pouvoir se mettre ensemble au plus tôt et d’être heureux, ça sera bien mieux que la guerre. Enfin j’espère bien que le jour viendra d’être auprès de toi, de pouvoir [voir] tes beaux yeux si charmants et tes lèvres si roses qu’y me semble de les voir là devant moi mais malheureusement que c’est pas vrai. Enfin ça viendra bien une fois. Il faut pas te faire du mauvais sang, on n’y avance rien.
A présent on reçoit des colis pour l’étrenne du jour de l’an, il y en a qui reçoivent du saucisson, du chocolat, de tout, et j’en profite entre camarades. On a touché des caleçons, des tricots, des chemises, enfin on est bien habillé à présent qu’y fait froid. La nuit il gèle fort, je suis toujours dans la grand ferme de l’Evêque. On disait qu’on devait aller en Alsace, mais non on ne sait rien. L’ordre est pas encore venu et on n’y tient pas s’en aller. On est trop bien, on couche à l’écurie avec les chevaux alors c’est chaud malgré toutes nos peines on est heureux là où on est. Les obus tombent pas, on est trop loin de l’ennemi, il y a que pour ravitailler qu’on craint, autrement on est tranquille, on passerait bien la guerre où on est. Enfin. Je crois que ça sera bientôt fini heureusement, ça serait pas trop tôt, et je crois que je suis pas tout seul pour le dire.
Enfin. Pas plus grand-chose à te dire que j’attends de tes nouvelles. Je sais pas si tu as reçu de la nouvelle adresse. Je t’ai écrit toujours deux ou trois jours pour le plus tard. Je passe jamais trois jours sans t’écrire et tu me dis que tu [reçois] pas régulièrement mais c’est pas de ma faute, tu peux me croire, je te mens pas. Voilà le reste de mon papier. Si j’en trouve point demain je pourrai pas t’écrire Aujourd’hui j’ai demandé de partout. J’en ai point trouvé. On en touche mais pas assez. Enfin. Je termine en te serrant cordialement la main et daigne recevoir le meilleur de mon cœur que c’est tout pour toi. […].
Un désordre assez grave dans mes équipements informatiques m’a incité à travailler sur des documents que j’avais remisés dans le dernier recoin, le plus inaccessible de mon fourbi. Il faut bien s’occuper.
Il s’agit de la correspondance d’un jeune artilleur lourd, pas du tout enthousiaste, mais terriblement amoureux d’une jeune fille de son village. Nous sommes dans la région de Saint-Marcellin.
Cette correspondance est celle de jeunes gens qui se sont promis l’un à l’autre et qui ont déjà bien avancé dans leurs engagements…
Ce qui m’ennuie ce sont ces deux points :
*Dois-je transcrire les mots d’amour, ceux-ci d’ailleurs se répétant pratiquement dans chaque lettre ? En première approche, cela me gêne et n’apporte rien sinon cette angoisse répétée de ne pas vivre l’amour, de ne pas vivre librement son destin.
*Le langage. L’orthographe est assez maltraitée mais la langue est savoureuse. Mon grand père devait à peu de choses près s’exprimer ainsi, avec cet accent si doux, comme avaient souvent les gens des campagnes du Dauphiné ou de la Savoie puisqu’il s’agit de ces régions. Je suis tenté de demander à un parent patoisant de lire tout cela. Mais il faut que la transcription soit lisible par des amis d’autres nations. Alors qu’en pensez vous ?
A titre d’exemple voici une lettre remaniée « à ma façon » afin qu’elle soit lisible. Je maintiens les tournures et tente d’avoir une orthographe à peu près correcte.
La 11e batterie de 95 du 5e RAL est à Septmonts, notre soldat s’occupe beaucoup des chevaux et des approvisionnements en munitions.
Bonne lecture et merci pour vos avis précieux concernant la méthode et la façon.
Cordialement
JCP.
Le 26 décembre 1914, Septmonts.
Chère petite femme,
Je profite d’un petit moment pour te souhaiter la bonne année et une bonne santé en attendant le plaisir de pouvoir se mettre ensemble au plus tôt et d’être heureux, ça sera bien mieux que la guerre. Enfin j’espère bien que le jour viendra d’être auprès de toi, de pouvoir [voir] tes beaux yeux si charmants et tes lèvres si roses qu’y me semble de les voir là devant moi mais malheureusement que c’est pas vrai. Enfin ça viendra bien une fois. Il faut pas te faire du mauvais sang, on n’y avance rien.
A présent on reçoit des colis pour l’étrenne du jour de l’an, il y en a qui reçoivent du saucisson, du chocolat, de tout, et j’en profite entre camarades. On a touché des caleçons, des tricots, des chemises, enfin on est bien habillé à présent qu’y fait froid. La nuit il gèle fort, je suis toujours dans la grand ferme de l’Evêque. On disait qu’on devait aller en Alsace, mais non on ne sait rien. L’ordre est pas encore venu et on n’y tient pas s’en aller. On est trop bien, on couche à l’écurie avec les chevaux alors c’est chaud malgré toutes nos peines on est heureux là où on est. Les obus tombent pas, on est trop loin de l’ennemi, il y a que pour ravitailler qu’on craint, autrement on est tranquille, on passerait bien la guerre où on est. Enfin. Je crois que ça sera bientôt fini heureusement, ça serait pas trop tôt, et je crois que je suis pas tout seul pour le dire.
Enfin. Pas plus grand-chose à te dire que j’attends de tes nouvelles. Je sais pas si tu as reçu de la nouvelle adresse. Je t’ai écrit toujours deux ou trois jours pour le plus tard. Je passe jamais trois jours sans t’écrire et tu me dis que tu [reçois] pas régulièrement mais c’est pas de ma faute, tu peux me croire, je te mens pas. Voilà le reste de mon papier. Si j’en trouve point demain je pourrai pas t’écrire Aujourd’hui j’ai demandé de partout. J’en ai point trouvé. On en touche mais pas assez. Enfin. Je termine en te serrant cordialement la main et daigne recevoir le meilleur de mon cœur que c’est tout pour toi. […].