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Re: 80 kilomètres à pied, ça use, ça use...
Publié : mer. juil. 23, 2008 12:28 pm
par francois mattart
Bonjour
une remarque, l'essentiel des poilus étaient des paysans dont le principal moyen de locomotion dans le civil était les pieds, donc, en principe la marche ne leur était pas inconnue.
C'est bien ce que j'explique
Pour revenir au raid Mont Blanc, il s'agit d'une compétition pour sportifs hyper entraînés.
N'oublions pas non plus le poids du barda et la capote en laine qui tient chaud...
C'est évident et c'est pourquoi j'ai écrit la moyenne du vainqueur et du dernier et que j'ai pensé aux équipements de l'époque...
Je maintiens ma réponse : oui c'est possible.
Maintenant si aucune trace n'est lisible dans un témoignage ou dans un JMO, pas facile de se faire une réalité de cette performance imposée.
Pour ce qui est des moyennes de la retraite de Namur ( direction La France ), une personne normale marche à du 4 kms. Des fantassins costauds, pressés par leur commandement, poussé par un ennemi, allégé par un bardat que l'on éparpille par ci par là, sur un terrain dont le dénivelé positif n'est pas important, peuvent tenir une bonne cadence 5.5km/h voir 6 km/h.
Pour ce qui est des détails de ces fameux 80kms ( en retard?, pourquoi ?,...) faut continuer de chercher, je ne fais qu'un peu de théorie pédestre vu qu'en godillot j'en connais un rayon.
Cordialement
François
Re: 80 kilomètres à pied, ça use, ça use...
Publié : mer. juil. 23, 2008 3:58 pm
par LABARBE Bernard
Bonjour à tous,
Des fantassins costauds, pressés par leur commandement, poussé par un ennemi, allégé par un bardat que l'on éparpille par ci par là, sur un terrain dont le dénivelé positif n'est pas important, peuvent tenir une bonne cadence 5.5km/h voir 6 km/h.
Durant la retraite, le barda n'était pas abandonné par petits morceaux ici ou là. Des rapports allemands le confirment. Et des soldats qui auraient jeté leur équipement auraient eu à en rendre compte devant la "justice militaire" de 14 qui était assez expéditive... Car un tel soldat ressemble fort à un fuyard selon l'expression employée à l'époque. Il y en a eu, mais finalement peu je pense. Ce barda qui pesait environ 30 kg (sac, musettes, fusil, munitions etc) c'était en août 14 la survie à ne surtout pas abandonner.
Des paysans robustes et habitués à la marche certes mais je rappelle le sujet,
80 kilomètres en une journée,
journée que, pour calculer large et pouvoir y croire, nous avons considéré comme 24h... Je ne pense pas que mon GP Raymond, jeune paysan landais (oui d'accord les Landes c'est plat...

) de presque 21 ans en août 14, et qui plus est soldat entrainé depuis huit mois, aurait pu supporter une chose pareille. N'oublions pas non plus comme déjà dit que les régiments étaient composés pour 1/3 de réservistes, et ceux là n'avaient plus d'entrainement depuis parfois longtemps. De plus, on parle toujours des paysans dans l'infanterie, majorité certes, mais une grosse minorité était composée d'ouvriers ou d'employés, bref tout sauf des paysans.
Cela dit, et à la lecture de l'extrait de l'historique cité par Arnaud, je cherche partout sur la carte les 80 km en 24h entre le débarquement et la Seille...
Ou alors ils se sont perdus et on tourné en rond toute une
journée, et vite !

A suivre...
Cordialement,
Bernard
Re: 80 kilomètres à pied, ça use, ça use...
Publié : mer. juil. 23, 2008 5:03 pm
par p Lamy
Bonjour,
Tout à fait d'accord avec vous, François, 80 km sont tout à fait plausibles.
Il m'est arrivé à plusieurs reprises de faire la marche Nancy-Metz organisée le 8 mai, chaque année.
Le départ a lieu à 5h30 le matin, de Nancy ou Metz alternativement chaque année. Et suivant la vitesse, si l'on court un peu ou si l'on marche toujours, on arrive en moyenne entre 15 h. et 20 h. l'après-midi pour une randonnée de presque 70 km par monts et par vaux, et les côtes de Moselle, cela grimpe fort parfois.
J'ai déjà vu la relation de telles marches, j'ai même rencontré un ancien malgré-Nous qui était au prestigieux IR 92 du duché de Brunswick. Le régiment est rentré en Belgique en août 14 pour finir à la bataille de la Marne début septembre, et tout ce trajet a été intégralement fait à pied en "poursuivant" les Français; cela représente aussi beaucoup de kilomêtres et des étapes quotidiennement répétées de sans doute plus de 40 km.
Lors de la retraite, toujours à pied :
"...A quatre heures de l'après-midi nous retraitions du bois et repartions dans l'autre sens en remontant vers le nord.
Nous nous arrêtâmes vers minuit pour prendre quelques heures de repos; à quatre heures du matin, après avoir quelque peu dormi (il nous avait été interdit de monter les tentes), nous repartions pour une seconde journée de marche en retraite, jusqu'à quatre heures de l'après-midi. Il nous était défendu d'entrer dans les maisons durant les courtes haltes ou de toucher au raisin dans les vignobles traversés..." - (Témoignage recueilli en 1990 après d'un vieux Monsieur de 97 ans)
Les étapes longues et les nuits courtes permettaient de réussir de tels exploits pour une armée de soldats- paysans pour l'essentiel et rompus à l'effort physique, la "bagnole" n'existant pas à l'époque pour la plupart...
Cordialement.
P. Lamy
Re: 80 kilomètres à pied, ça use, ça use...
Publié : mer. juil. 23, 2008 5:34 pm
par Stephan @gosto
Bonjour tout l'monde,
Sans s'occuper de la faisabilité ou non d'une telle marche, je pense qu'elle ne cadre pas avec les déplacements du régiment à cette période. Rien ne correspond dans le J.M.O. du 90e R.I. à un tel déplacement en une journée.
Pour se faire une idée de la cadence de marche du 90e R.I., je vais citer un autre combattant de ce régiment. Sans doute n'était-il pas dans la même compagnie que notre marathon man, mais bon, le régiment, si j'en crois le J.M.O. n'était pas éclaté sur 100 km2.
Voici en résumé ce que dit M. Carpentier pour le déplacement de la journée du 11 août 1914 :
- Arrivée à Lay-Saint-Christophe à 16 heures.
Il précise ensuite : "Voilà treize heures que nous marchons".
Soit 13 heures pour faire une trentaine de bornes à tout casser...
Enfin, dodo à l'ouest de Bouxières, à quelques 7 kms de là.
Le lendemain, 12 août, l'étape du jour les mène de Bouxières à Lanfroicourt, sur la Seille, via Leyr ;
soit une douzaine de kilomètres...
Jérôme se chargera sans doute d'étudier le parcours de chaque compagnie du 90e pour nous annoncer les grands vainqueurs de ces étapes d'août 14 ! Mais je pense que l'on peut oublier les 80 kms...
Amicalement,
Stéphan
Re: 80 kilomètres à pied, ça use, ça use...
Publié : mer. juil. 23, 2008 5:35 pm
par LABARBE Bernard
Re à tous,
Bonjour p Lamy,
Il m'est arrivé à plusieurs reprises de faire la marche Nancy-Metz organisée le 8 mai, chaque année.
Le départ a lieu à 5h30 le matin, de Nancy ou Metz alternativement chaque année. Et suivant la vitesse, si l'on court un peu ou si l'on marche toujours, on arrive en moyenne entre 15 h. et 20 h. l'après-midi pour une randonnée de presque 70 km par monts et par vaux, et les côtes de Moselle, cela grimpe fort parfois.
Heu... Comment dire... Vous aviez 30kg sur vous par un été torride ? Le 8 mai c'est trop tôt. Quel âge avez-vous ? Vous vous remettez dans le contexte et avec les bonshommes de l'époque ? Ils ne couraient pas même un peu, et ne marchaient pas toujours... Les haltes !
Plus sérieusement, les 40 km cités par le témoin de l'IR92 ça fait quand même la moitié de 80... Au passage, L'IR92 ne faisait-il pas partie de la 1ère Armée Von Kluck lors de la retraite ? Car si la Vème armée française est celle qui a marché le plus, sur sa gauche se trouvait VK qui ne rêvait que de l'enrouler mais pour cela il fallait la dépasser. Ah ce forum est fou... Je m'égare....
Cordialement, j'ai mal aux pieds.
Bernard
Re: 80 kilomètres à pied, ça use, ça use...
Publié : mer. juil. 23, 2008 5:38 pm
par LABARBE Bernard
Le temps de taper, de m'absenter, de revenir, et Stephan a porté l'estocade...
A bientôt pour l'enterrement de première classe du "témoignage" en question...
Bernard
Re: 80 kilomètres à pied, ça use, ça use...
Publié : mer. juil. 23, 2008 7:26 pm
par p Lamy
Bonjour,
Je faisais une comparaison, avec ma marche...comme le raid Mt Blanc.
Effectivement, je n'avais pas un Lebel de 1m30, ni de baïonnette pour m'y prendre les pieds, ni le reste du barda.
Il n'en reste pas moins que les Poilus ou les
Landser ont beaucoup marché à cette époque
Pour le JR92 je regarde, on en reparle. Je crois de mémoire que c'était la 20e ID...
Cordialement.
P. Lamy
Re: 80 kilomètres à pied, ça use, ça use...
Publié : mer. juil. 23, 2008 7:37 pm
par armand
Bonjour
Extrait d'un carnet :
Partis le lendemain 27/08 pour SEPTSARGES, marche de 25 kilométres où nous avons rejoint le 132ème qui était replié pour se reformer avec son dépôt..
Le 3 marche de déplacement de 20 à 22 kilométres où nous avons pris les avants postes un peu au dessus de RECICOURT.
Le 5 départ de BULAINVILLE pour CONDE EN BARROIS à 15 kilométres de BAR LE DUC marche environ 17 kilométres Le soir départ de CONDE à 10h du soir où nous avons fait 23 kilométres pour nous préparer au combat dans PRETZ EN ARGONNE
Le 14 départ de ROSNES pour aller cantonner à SAINT ANDRE EN BARROIS où notre compagnie a pris les avants postes après avoir fait 25 kilométres .
Le 15 départ pour FREMEREVILLE LES VALLONS après une marche de 20 kilométres sous la pluie battante où nous avons cantonner.
Le 22 départ de BRAQUIS pour RUPT EN WOËVRE où nous avons fait une marche de 35 kilométres partis a 9h1/2 du soir arrivés a RUPT EN WOËVRE à 6h1/2 du matin.
Les distances ont du lui paraitre importantes pour qu'il les note dans ses carnets; et aussi la répetiton.
Souvenir personnel : Pendant "mon service" les marches de 20-30 km réels devenaient 40-60-80 km dans le ressenti et la narration des copains et l'expression de nos chefs "
dans l'armée les pieds c'est capital" faisait beaucoup rire les latinistes

Qui est ce qui parle latin ? corvée de ch.... demain matin
Cdt
Armand
Re: 80 kilomètres à pied, ça use, ça use...
Publié : mer. juil. 23, 2008 10:32 pm
par Arnaud Carobbi
Bonsoir à tous,
Pour ajouter d'autres témoignages pour se faire un ordre d'idée des distances parcourues par les armées en août et septembre 1914 :
276e RI (de Péguy) Armancourt à Villeron, en passant par Ravenel, Verneuil, Senlis, Luzarches du 30 août au 3 septembre, 150 km de retraite, dont une étape de
98 km en 40 heures.
51e RI : 22 août : à Virton (...)
3-4 septembre : Décrochage, encore ! vers Dommartin-sur-Yère :
45 km de marche épuisante, par une chaleur torride.
4-5 septembre : Nouvelle étape de
35 km pour gagner, au sud de la Saulx, le noeud ferroviaire de Blesmes, où nous recevons la consigne "Se faire tuer sur place plutôt que de reculer".
Source : La Première Guerre mondiale, Tome premier 1914-1916, Larousse, pages 88-89.
Il est important de rappeler que ces marches se faisaient dans le cadre de la retraite ce qui n'est pas le cas de cette marche du 90e RI. Pourquoi l'Etat-Major aurait-il brusqué ses troupes en août par une marche aussi épuisante avant même la première confrontation avec les troupes ennemies ? Le 90e RI allait prendre les positions prévues par les plans.
La Ière Armée allemande, sur l'aile droite, a parcouru
480 km en 18 jours. Une progression de 25 km par jour avait été prévue par le plan.
La retraite du BEF de Mons à Melun entre le 23 août et le 5 septembre a été rapide également, mais je n'ai pas de données précises.
Bien cordialement,
Arnaud
NB : Je soupçonne Bernard de vouloir tordre le cou à l'image des méridionaux qui exagèrent tout, en particuliers ceux autour de Marseille (au nord surtout, vers Aix...) !

Re: 80 kilomètres à pied, ça use, ça use...
Publié : mer. juil. 23, 2008 11:24 pm
par clery
Bonsoir à tous,
Autre témoignage fait par le général Colin concernant le 26ème RI en octobre 1914.
Le 3ème bataillon du 26ème RI effectue le 10 octobre une marche forcée de 14 heures pour venir renforcer les autres régiments du 20ème corps entre Bécourt (Somme) et Foncquevillers (Pas de Calais). Le régiment sort de 15 jours de combats dans la Somme.
Lorsque l'on fait l'itinéraire avec Mappy, 18 kms séparent ces deux villages.
On peut penser qu'ils ont longés le front, mais cela ferait une distance de 30 kms maxi. Ceci en 14 heures (dont une partie de nuit)
Et le 11 au matin, le bataillon attaquait Foncquevillers !!
Cordialement