Au détour d'un JMO (10) - Tir ami

Avatar de l’utilisateur
LABARBE Bernard
Messages : 3837
Inscription : mar. juil. 12, 2005 2:00 am
Localisation : Aix-en-Provence

Re: Au détour d'un JMO (10) - Tir ami

Message par LABARBE Bernard »

Bonsoir à tous,
J.Claude, je trouve ton intervention quelque peu exagérée...
peut-on comprendre un "tir ami", lorsque l'artillerie française tirait sur ordre, juste derrière les lignes françaises, pour empêcher les poilus de reculer... D'où la rancoeur des fantassins envers les artilleurs...
Et puis combien d'anciens poilus m'ont affirmé avoir souvent regretté de ne pas avoir vu, comme le prévoyait le réglement, les observateurs d'artillerie en première ligne !!! De cet absence résultait souvent des erreurs de tirs...

...tirait sur ordre, juste derrière les lignes françaises, pour empêcher les poilus de reculer. Des sources, lieux et dates !...
...les observateurs d'artillerie en première ligne. Désolé mais ce que des anciens poilus t'ont dit c'est n'importe quoi. Comment des artilleurs observateurs pouvaient-ils observer en étant en première ligne ?! Les observations se faisaient à partir de points élevés du front, à l'arrière des premières lignes forcément, arbres déchiquetés camouflés, (clochers d'églises mais ils furent vite ratatinés) ruses diverses, et bien entendu avions et ballons captifs.
Concernant les "bavures", les tirs amis alors là oui ! Mais je les attribue plutôt à des erreurs, qu'à des actes délibérés dans le dos des fantassins pour qu'ils ne reculent pas !
Le Général Percin évalue à 75 000 le nombre de ces "dommages collatéraux" dans les rangs de l'infanterie durant la guerre, exemples et sources à l'appui.
Le massacre de notre infanterie - Albin Michel - 1921
Concernant les tués par balles amies, je pense qu'il en a eu en effet, même si c'est marginal. Soldat rejoignant ses lignes sans connaitre le mot de passe et veilleur zélé, je passe sur les exemples, et même un tirailleur algérien tué par les siens alors qu'il tentait de déserter.
Il y a eu de tout et partout, alors de grâce, des faits précis.
Quant à la rancoeur des fantassins envers les artilleurs, ça dépendait du succès de leurs tirs sur l'ennemi...
Mais aussi des conditions de vie des uns et des autres.
Enfin j'abrège, beaucoup à dire sur ce sujet.
Cordialement,
Bernard
Merci et bonsoir,
Bernard
Avatar de l’utilisateur
Stephan @gosto
Messages : 5598
Inscription : dim. oct. 17, 2004 2:00 am
Localisation : Paris | Chartres | Rouen
Contact :

Re: Au détour d'un JMO (10) - Tir ami

Message par Stephan @gosto »

Bonjour,

Vaste sujet...

1. - Concernant ces fameux tirs d'artillerie française sur des troupes françaises et ordonnés par des officiers français : personnellement, je n'ai jamais rencontré ce cas au cours de mes recherches. Cependant, je me souviens que C. Chanteloube, qui fréquentait le forum il y a quelques années, m'avait transmis le scan d'un tel ordre. Il était signé, daté, et l'unité était précisée. Evidemment, j'ai, depuis, perdu ce document... Mais il était bien réel. Il faudrait l'interroger là-dessus. Cela étant, il est clair que nous sommes là face à un cas limite qu'il serait aventureux de généraliser.

2. - Observateurs d'artillerie en première ligne : il y en avait parfois, mais bien sûr cela dépendait certainement de la configuration de la 1ère ligne. Exemple : au 15.10.1914, extrait d'un rapport du chef de corps du 74e R.I. : "Un officier d’artillerie venu ce matin au poste des Carrières a exprimé le regret qu’il n’y ait pas en permanence en ce point un représentant de l’artillerie pour observer les coups et renseigner les batteries. La communication par téléphone étant maintenant établie entre les Carrières et la brigade de Saint-Thierry, le moment me paraît venu de réaliser cette liaison entre cet observateur et les batteries. Je crois qu’elle serait très fructueuse pour l’artillerie."

Autre exemple, l'excellent témoignage que l'artilleur P. Arnould donne dans le troisième volume de ses souvenirs de guerre, et dans lequel il détaille ses nouvelles fonctions, savoir : observateur et liaison artillerie / infanterie. Et clairement, il est souvent en toute première ligne. Cela n'empêchait nullement les autres modes et points d'observation tels que ceux rappelés par Bernard.

3. - Sur les tirs d'artillerie fratricides accidentels : rien à dire, je pense que tout le monde à rencontré moulte exemples de ces sales bavures. Au 74e R.I., ils en ont souffert dès août 1914, et à quasi tous les engagements suivants, il y aura couacs et morts de ce fait. Le bouquin de Percin, comme le rappelle Bernard, vaut le détour...

4. - Sur les fusillades entre fantassins français : là aussi, malheureusement, je crois que c'est le lot de toute guerre. Patrouilles, embuscades foireuses, manipulations d'armes, etc. les accidents de ce type se rencontrent malheureusement assez régulièrement. Plusieurs exemples au 74e.

5. - Sur la méthode de Jean-Claude, je regrette aussi bien souvent l'absence de sources, de documents venant étayer des déclaration qui paraissent, pour le coup, un peu abruptes.

Bonne soirée.

Stéphan
ICI > LE 74e R.I.
Actuellement : Le Gardien de la Flamme

Image
ALVF
Messages : 7005
Inscription : mar. oct. 02, 2007 2:00 am

Re: Au détour d'un JMO (10) - Tir ami

Message par ALVF »

Bonsoir,

Je lis avec consternation la vieille affirmation de tirs ordonnés par des généraux sur leurs propres troupes "pour les empécher de reculer", on trouve aussi la mention "pour les faire avancer" dans la même littérature inspirée par des considérations qui n'ont que de lointains rapports avec le souci de la vérité.
Le général Percin lui-même, dans son livre "Le massacre de notre infanterie" n'a pas repris cette affirmation, il se contente de rappeler en 75 pages d'annexes de multiples "tirs amis" sur notre infanterie dont beaucoup d'ailleurs sont invérifiables ou reposent sur le témoignage d'un seul témoin, ce qui est peu.Ce général qui avait beaucoup à se faire pardonner après la guerre se fit une spécialité d'attaquer à peu près toute la hiérarchie, et surtout les artilleurs, dans des "brûlots" pas toujours bien documentés mais qui firent la joie des anti-militaristes et pacifistes de toute tendance qui se réjouissaient d'avoir rallié à leur cause un général connu à l'époque!
Il est utile de rappeler que le général Percin s'est "illustré", bien avant la guerre, en qualité de chef de cabinet du général André, ministre de la guerre, lors de l'organisation de la vaste entreprise de "fichage" des officiers, connue sous le nom "d'affaire des fiches" qui en dit long sur certaines moeurs politiques de l'époque.Pendant la guerre même, le général Percin se "distingua" encore à Lille qu'il abandonna lamentablement en laissant des milliers de fusils, des canons et des munitions alors que la ville n'était pas encore menacée et qu'il fallut des initiatives civiles et militaires locales pour soustraire ces matériels à l'envahisseur.Cet exploit lui vallut un limogeage immédiat et le général Percin voua dès lors une haine farouche au Colonel (et futur général) Buat alors chef de cabinet du ministre de la guerre, artisan de ce limogeage.Buat étant devenu le grand-maître de l'artillerie en fin de guerre, on comprend un peu mieux la haine de Percin pour son ancienne arme!
Les tirs trop courts de l'artillerie ont été trop nombreux, certains ont des causes techniques, d'autres s'expliquent par l'incompétence d'officiers ou de pointeurs.J'ai pour ma part lu des dizaines de rapports d'enquête sur ces tirs amis car il est faux d'écrire que ces graves incidents n'étaient pas étudiés.Il y a certes des périodes de tirs intensifs où ces incidents sont noyés dans la masse des événements.
Il est par contre vrai que des observateurs de l'artillerie règlent des tirs en première ligne, les exemples abondent (comme les pertes d'observateurs en première ligne), on connait même des exemples de colonels commandants de régiment d'artillerie tués en première ligne en vérifiant le tir de leurs batteries.
Venons en maintenant à la forme "d'accusation suprême", c'est à dire un ordre d'un officier général ordonnant de tirer sur ses propres troupes.Cette accusation est un "classique" de la littérature anti-militariste ou pacifiste des années 1930 essentiellement (à une époque où on ne se posait pas franchement les mêmes questions de l'autre côté du Rhin!).
Il faut donner des exemples précis, citer des noms, des dates, des lieux ou au moins des commencements de preuves.
J'ai eu la chance de consulter de multiples archives privées et des commentaires écrits non destinés à la hiérarchie d'officiers d'artillerie de tous grades (jusqu'au grade de général inclus) et n'ai jamais trouvé une allusion à de pareils faits, alors que les commentaires sur les "erreurs" des états-majors sont souvent très virulents et les jugements "ad hominem" très durs (bien plus durs que sur ce forum!).Il est vraiment étrange de ne trouver aucune trace de semblables événements qui auraient marqué les exécutants bien plus que les combats les plus durs.
Si donc il existe des témoignages sérieux, sortez les et nous jugerons sur pièce!
Cordialement,
Guy François.
Avatar de l’utilisateur
armand
Messages : 2912
Inscription : dim. déc. 24, 2006 1:00 am

Re: Au détour d'un JMO (10) - Tir ami

Message par armand »

Bonjour

Je partage bien sur le point de vue qu'il faut étayer avec force documents et source à l'appui une idée. Je me pose un question d'ordre géneral sur cette methode. NB : sans idée préconçue sur le sujet en réference. Si le fait n'est pas "réglementaire" et je doute qu'il le soit, il y a peu de chance qu'il figure dans les documents officiels. Pour autant, ce n'est pas pour cela que cela n'a pu arriver. Donc le débat est ici : comment établir une "verité" en l'absence de source officielle et uniquement en présence de témoignanges éparses et parfois loin du centre de décision. Le point de Guy, sur d'autres sources non-officielles, apporte bien sur un début de réponse.

Cdt
Armand
Sur les traces du 132ème RI " Un contre Huit " et du 294ème RI (le "29-4")
Avatar de l’utilisateur
LABARBE Bernard
Messages : 3837
Inscription : mar. juil. 12, 2005 2:00 am
Localisation : Aix-en-Provence

Re: Au détour d'un JMO (10) - Tir ami

Message par LABARBE Bernard »

Bonjour à tous

- Les artilleurs observateurs en 1ère ligne, dont acte :jap:
- Les dommages collatéraux, le sujet a été abordé: pages1418/forum-pages-histoire/Generali ... 8700_1.htm
- Concernant Percin, merci Guy pour ces infos.
- Pour ce qui est de tirs volontaires je ne connais qu'une seule tentative car cela n'a pas été exécuté, l'affaire des caporaux de Suippes en 1915:
... Furieux, le général Réveilhac ordonne à l'artillerie de bombarder la tranchée française. Le colonel Bérubé commandant l'artillerie divisionnaire refuse de tirer sans un ordre écrit. Le général n'ose prendre cette responsabilité, mais exige une nouvelle attaque... (André Ducasse, La guerre racontée par les combattants, tome II)

Cordialement,
Bernard
Avatar de l’utilisateur
Alain Dubois-Choulik
Messages : 8742
Inscription : lun. oct. 18, 2004 2:00 am
Localisation : Valenciennes
Contact :

Re: Au détour d'un JMO (10) - Tir ami

Message par Alain Dubois-Choulik »

oui il y a eu des officiers assassinés par leurs soldats
Bonjour,
Les américains parlent -surtout depuis la guerre du Vietnam- de fragging, allusion à la fragmentation des grenades utilisées pour arriver à ses fins, l'éclat de grenade ne permettant pas une identification de la provenance, au contraire d'une balle.
Il y a un cas signalé lors de la GG coté US :"An unpopular sergeant was killed when one of his men came up behind him and dropped an unpinned hand grenade down his trousers." (Regan, G. Backfire: A history of friendly fire from ancient warfare to the present day. Robson Books, 2002) ; la grenade DF étant le stade III après la fumigène et l'étourdissante. :pt1cable:
Cordialement
Alain

Les civils en zone occupée
Ma famille dans la grande guerre
Les Canadiens à Valenciennes
     "Si on vous demande pourquoi nous sommes morts, répondez : parce que nos pères ont menti." R. Kipling
Avatar de l’utilisateur
stcypre
Messages : 3864
Inscription : mar. avr. 18, 2006 2:00 am
Localisation : Saint-Gaudens 31800

Re: Au détour d'un JMO (10) - Tir ami

Message par stcypre »

Bonjour à tous,

Arnaud, une question:
Doit on faire confiance, au niveau des témoignages, à la littérature ou aux survivants d'un fait, d'une action !!!
Voyez vous j'ai eu la chance de connaître, de fréquenter pendant des années des survivants de cette guerre et à leur contact j'ai beaucoup appris.
Ces témoignages ont tous été confirmés par les nombreux livres (au cours de mes lectures ou faisant partie de ma bibliothèque). De plus n'étant pas tout à fait ignare, je sais parfaitement qu'un fait pour être crédible doit être confirmé par plusieurs autres témoignages qu'ils soient oraux ou écrits.
Ceci étant dit j'ai eu l'honneur d'avoir comme président national d'Asso. (Ceux de Verdun) un colonel d'artillerie de campagne (qui d'ailleurs n'hésitait pas à critiquer ceux de la lourde) et président régional un capitaine lui aussi d'artillerie qui reconnaissait que les "observateurs d'artillerie" n'étaient pas toujours à leur place ce qui disait-il avait "provoqué de nombreux accidents tristes parmi les fantassins"!!
Voila ce que je tenais à dire et je joins en commentaires 3 vues:
- une sur les fameux carrés de toile fixés dans le dos des fantassins.
- une sur les anciens poilus à Verdun.
Et celle de F. Viviès dernier survivant du fort de Vaux.
Cordialement.
J.Claude Image
la vérité appartient à ceux qui la recherchent et non à ceux qui croient la détenir.
humanbonb
Messages : 1943
Inscription : ven. juil. 08, 2005 2:00 am

Re: Au détour d'un JMO (10) - Tir ami

Message par humanbonb »

Bonsoir,
Voici un petit extrait d'un bouquin que je suis entrain de lire.

Jacques Dieterlen dans "Le Bois-le-Prêtre":
Un jour, les patroulleurs durent attaqués et regagnèrent précipitamment les lignes. lui, ne songea même pas à s'émouvoir. Il revint après les autres, aussi calme que s'il se promenait des ses vignes au flanc des coteaux ensoleillés de Champagne. Les sentinelles, ne sachant pas qu'il n'était pas rentré, virent une silouhette noir qui s'avançait lentement, et firent feu sur elle; lui, éclata de rire et rentra les mains de les poches."

Bonne soirée.
Cdlt JuLien.
Avatar de l’utilisateur
baude1967
Messages : 715
Inscription : lun. juil. 16, 2007 2:00 am

Re: Au détour d'un JMO (10) - Tir ami

Message par baude1967 »

bonjour
concernant les erreurs de tir de l artillerie j ai lu le livre du general percin ancien inspecteur de l artillerie avant la gg
le massacre de notre infanterie 1914 1918
il y parle des problemes de liaisons entre les armes, la formations des officiers et cites des temoignages de soldats concernant ces erreurs de tirs
entre autres
"un colonel d infanterie dont le regiment est arrose envoie un soldat pour avertir des erreurs de tirs avec une carte et des instructions ecrites
le commandant de groupe refuse de prendre connaissance des indications.
le soldat indigné le tue d un coup de revolver, on arrete le meurtrier mais on a jamais ose le faire passer en conseil de guerre"
pages 296
cordialement
pascal
Avatar de l’utilisateur
JeanMiche
Messages : 3114
Inscription : dim. janv. 11, 2009 1:00 am

Re: Au détour d'un JMO (10) - Tir ami

Message par JeanMiche »

Bonsoir à tous,

Un petit extrait du JMO du 229e RI page 20/61 qui confirme l'existence d'erreurs de tirs de l'artillerie.

Image

Image



Pendant deux heures, c'est long...
Mais puisqu'on vous dit que le moral resta excellent ....et surtout que tous sortirent de la tranchée !
De qui se moque t on ? Quid des dégâts collatéraux ?

Bonne soirée. Jean Michel
Cordialement Jean Michel
Répondre

Revenir à « Sujets généraux »