Bonjour à tous
Bonjour Alain
Si vous considérez que le sort réservé à un militaire condamné à mort puis fusillé par un peloton d'exécution suite à un jugement d'un conseil de guerre est une exécution sommaire : oui mais c'est alors également le cas du soldat Paudrière du 236e RI qui a été terminé sa vie sous la lame de la machine de monsieur Guillotin, ce soldat ayant été condamné à mort par la Cour d'Assises de Rouen en avril 1917. Cela serait également le cas pour toutes personnes guillotinées suite à un jugement civil.
Ni le code de justice militaire (à ma connaissance), ni l'article 52 du service de place ne parle d'exécution sommaire pour les militaires jugés par les conseils de guerre.
Une des rares allusion au terme sommaire a été faite par le rédacteur de la loi du 18 mai 1875 qui écrit :
l'instruction pourra être aussi sommaire qu'on le jugera convenable et les formalités ordinaires ne seront remplies que si on a le temps de les appliquer.
Cela ne concerne que l'instruction du dossier de procédure.
Concernant l’utilisation de l'article 121( par exemple) et ses conséquences, c'est tout autre chose.
Il faut rappeler ce que nous avons dit dans l’article sur Robert : l’objet de cet article du Prisme n’est pas la présentation du jugement des soldats Dapoigny, Leneveu, Colard et Portier, mais la recherche de la cause du décès du soldat Robert.
Nous étions alors dans la préparation de l’article sur l’année 1918, le cas du soldat Robert nous questionnait : Robert avait-il ou non été jugé par un conseil de guerre. Nous ne pouvions pas nous contenter d’un « peut-être » ou nous reposer sur les dires affichés dans le livre cité ci-dessus sachant que la population des militaires français fusillés par les conseils de guerre temporaires au cours l’année 1918 est assez faible par rapport aux années précédentes.
Donc l’objectif de l’article était de montrer que Robert n’avait pas été jugé par un conseil de guerre en présentant quelques éléments du dossier sans aller jusqu’à l’étude cas.
Les textes alors en vigueur « autorisent » plusieurs manières pour « forcer l’obéissance » ou faire respecter la discipline :
- le passage en conseil de guerre devant des juridictions comme les conseils de guerre spéciaux qu’on peut qualifier de « juridictions d’exceptions » mais la période était également une période exceptionnelle. Qu’on soit ou qu’on ne soit pas d’accord avec le fonctionnement avec ces juridictions, elles « travaillaient » avec un cadre plus ou moins bien formalisé : des documents, un avocat, des juges, un commissaire-rapporteur, la possibilité ou pas de faire un recours en révision, la possibilité ou pas de faire un recours en grâce. On pourrait parler d’un « vernis » de justice dans certains cas mais qui avait le mérite d’exister.
- pour ceux qui n’ont pas été jugé, Prime parle d’exécutés sommaires ou d’abattus suivant le cas car tout ce formalisme est absent, pas de document, pas de juge, pas d’avocat, pas de commissaire-rapporteur, rien. L’article 121 permet ainsi d’exécuter un individu en quelques instants sans aucune procédure. Joffre rappelle ainsi le 1er septembre 1914 qu’on peut se servir de cet article. Tout cela est très sommaire.
Bien avant la publication d’articles sur notre blog, le général Bach qualifiait ainsi ces militaires français qui n’étaient pas passés devant un conseil de guerre.
Pour Prisme, il est important de bien distinguer ces catégories, non seulement sur un aspect pratique, cela permet de savoir à la seule lecture de ce qualificatif si le militaire a été jugé ou pas. Mais c’est surtout sur le fond que c’est important : l’exécuté n’ayant eu la moindre possibilité d’afficher son opinion devant un juge, un commissaire-rapport ou un avocat. Contrairement au code de justice militaire, l’article 121 a été « fourni » par le pouvoir exécutif depuis 1830.
D’ailleurs, l’article 2 de la loi d’amnistie du 9 août 1924 qui « réhabilite » les militaires passés par les armes sans jugement, ne demande aucun document justifiant l’innocence du militaire, aucun.
L’article sur Robert n’étant pas une étude de cas, nous n’avons pas cherché quel avait été le déclencheur pour Robert et pour le caporal qui l’a tué. C’est un des rare cas où c’était possible dans la mesure ou les pièces d’un dossier de procédure évoquait les faits mais avec une lacune : pas de « récit » bien évidemment de la part de Robert et de Keraudren. Chacun peut proposer une opinion, suivant sa sensibilité, suivant sa vision des évènements.
Cordialement
Yves
https://prisme1418.blogspot.com/