Bonjour à tous,
Un cas concret, extrait de
Chargez les mulets ! (qui doit dire quelque chose à Stéphan

) ; vous aurez ici un aperçu de l'action, de l'impression des témoins, et de ce qui a pu en subsister dans un JMO.
Bien cordialement,
Eric Mansuy
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"Le J.M.O. de l’artillerie de la 66e D.I. nous éclaire sur le rôle et l’action des artilleurs :
« Le 17 [
mars 1915] de 13 heures 30 à 15 heures 35, préparation par l’artillerie de l’attaque des tranchées ennemies de l’Hartmannswillerkopf situées devant le 13e bataillon de chasseurs.
Tir de bombardement sur ces tranchées par le 220 du Kuhlager et par le 155 C d’Ostein devant le front du 7e bataillon de chasseurs.
En même temps, la batterie de 155 C du Kattenbachthal et la batterie de 95 du Wolfskopf (sous-lieutenant Berge) tirent sur les rassemblements ennemis dans le ravin en arrière de Rehfelsen et sur les lacets du chemin montant à l’Hartmannswillerkopf.
Les batteries de 155 L sont contrebatteries.
La batterie de 155 L de Grumbach a tiré sur la batterie de Weckenthal ; la batterie de Blanschen n’a pas tiré.
Les batteries légères étaient en surveillance sur l’infanterie ennemie et ont exécuté quelques tirs de barrage.
L’opération projetée n’a pas réussi : les tranchées ennemies occupées un moment par nos chasseurs ont dû être évacuées ensuite devant des retours offensifs.
Blessés : un maître-pointeur de la 27/37, deux téléphonistes du 9e Régiment d’Artillerie à Pied blessés légèrement. »
En effet, « l’opération projetée n’a pas réussi », et le témoignage du docteur Houlbert, médecin-auxiliaire du 13e Bataillon de Chasseurs Alpins, montre bien les raisons de cet échec :
« Le 17 mars, dans la matinée, l’ennemi arrose les positions du Col d’énormes mines. Un abri, qui heureusement venait d’être évacué, est littéralement écrasé. Une attaque est prévue pour l’après-midi dans le secteur des 1ère et 6ème compagnies ; elle a pour but de s’emparer des ouvrages en avant du « Fortin ».
Le tir de l’artillerie est malheureusement trop court, mais il est impossible de communiquer par téléphone avec les batteries. Un 220 tombe sur le « Fortin » occupé par une section d’attaque ; deux autres obus, quelque temps après, tombent dans nos tranchées et tuent 17 gradés et Chasseurs. Bien que les tranchées ennemies n’aient reçu aucun obus, la 1ère compagnie s’empare du boyau allemand venant vers le « Fortin », mais elle doit bientôt l’évacuer. Toute la nuit, fusillade très intense. Pertes : 35 tués, 43 blessés, 6 disparus. »
Une fois de plus, les pertes sont lourdes chez les assaillants en regard des résultats obtenus. Qui plus est, l’action de l’artillerie au cours du déroulement de l’attaque, et les difficultés apparues dans la liaison entre fantassins et artilleurs, permet de voir émerger quelques tensions entre les deux armes, tensions qui subsisteront d’ailleurs au fil des opérations en montagne, que ce soit dans ce secteur ou ailleurs dans les Vosges. Car si pour le docteur Houlbert, le tir de l’artillerie a été trop court, l’aspirant Henri Martin, du 9e Régiment d’Artillerie à Pied, fournit une autre explication :
« Comment cet accident est-il arrivé ? Des gargousses de poudre différente ? Un coup de vent contraire retardant les projectiles ? On ne sait pas au juste.
Les alpins n’auraient pas dû se trouver là, à 40 mètres du but, pendant qu’on tirait encore. Quarante mètres, c’est trop près. Des coups courts sont inévitables. La dernière fois il n’y avait pas eu d’accident chez nous et la précision du tir leur avait donné trop de confiance. C’est malheureux, malheureux ! »