Bonsoir à tous,
Aux termes de l’article 1er, alinéa 1, de la loi du 27 juillet 1917 instituant les pupilles de la Nation (J.O. 29 juill. 1917, p. 5.892), étaient susceptibles d’être adoptés par la France les enfants « dont le père, la mère ou le soutien de famille [avait] péri au cours de la guerre de 1914, victime militaire ou civile de l’ennemi ».
Toutefois, « [étaient] assimilés aux orphelins les enfants, nés ou conçus avant la fin des hostilités, dont le père, la mère ou le soutien de famille [étaient] dans l’incapacité de gagner leur vie par le travail à raison de blessures reçues ou de maladies contractées ou aggravées par suite de la guerre » (L. 27 juill. 1917, art. 1er, al. 2).
Les enfants ainsi adoptés « [avaient] droit à la protection, au soutien matériel et moral de l’État pour leur éducation dans les conditions et limites prévues par la [loi du 27 juillet 1917] et ce jusqu’à l’accomplissement de leur majorité » (L. 27 juill. 1917, art. 1er, al. 3).
Aux termes de l’article 109 du décret du 15 novembre 1917 pris pour l’application de la loi (J.O. 22 nov. 1917, p. 9.377), la demande de reconnaissance, pour un enfant déterminé, de la qualité d’orphelin de guerre ou d’assimilé devait être présentée par son père, sa mère ou son représentant légal ; elle devait être introduite par voie de simple requête, dispensée d’enregistrement et de timbre, auprès du tribunal civil de l’arrondissement dans lequel était domicilié le requérant (Ibid.), cette juridiction étant seule habilitée à se prononcer sur l’adoption à l’exclusion de toute autorité administrative.
La demande devait mentionner les nom et prénoms, le lieu et la date de naissance, le domicile de l’enfant et du représentant, ainsi que de la qualité en vertu de laquelle ce dernier présentait la requête (D. 15 nov. 1917, art. 110, al. 1). En outre, elle devait énoncer les faits de guerre dont avait été victime le père, la mère ou le soutien de l’enfant, ainsi que les circonstances dans lesquelles ledit père, mère ou soutien avait péri ou avait été atteint soit de blessures, soit de maladie ou d’aggravation de maladie (D. 15 nov. 1917, art. 110, al. 2). Enfin, la demande devait être accompagnée de tous certificats ou autres pièces justificatives que le requérant jugeait utile de produire (D. 15 nov. 1917, art. 110, al. 3).
La demande, ainsi que toutes les pièces l’accompagnant, devaient être déposées par le requérant entre les mains du procureur de la République. Au besoin après enquête, portant notamment sur le fait de la guerre, dont avait été victime le père, la mère ou le soutien de l’enfant, et sur le degré d’invalidité résultant de blessures, de maladie ou d’aggravation de maladie, ce magistrat soumettait le dossier au tribunal en y joignant ses réquisitions (D. 15 nov. 1917, art. 111). Il en avisait alors aussitôt par lettre recommandée et sans frais le représentant légal de l’enfant (D. 15 nov. 1917, art. 112).
S’il le jugeait utile, et avant de se prononcer sur la demande en chambre du conseil, le tribunal saisi disposait de la faculté de procéder à une instruction complémentaire de l’affaire, dans les formes qu’il déterminait ; au préalable, il devait convoquer et entendre le représentant légal de l’enfant (D. 15 nov. 1917, art. 113, al. 1).
Au cas où le tribunal estimait nécessaire de faire procéder à expertise médicale pour lui permettre d’apprécier le caractère permanent de l’invalidité de la victime du fait de la guerre ou le degré de ladite invalidité, il désignait un médecin expert (D. 15 nov. 1917, art. 113, al. 2). Le praticien ainsi désigné procédait à ces constatations à la diligence du procureur de la République, puis rédigeait son rapport sur papier libre (D. 15 nov. 1917, art. 113, al. 3).
Les dispositions qui précèdent furent précisées et complétées par une circulaire du Garde des Sceaux en date du 7 janvier 1918 (J.O. 8 janv. 1918, p. 330), adressée aux procureurs généraux près les cours d’appel. Celle-ci indiquait notamment ce qui suit :
« Il est permis d’affirmer que le tribunal répondra pleinement au vœu du Parlement en se montrant très libéral dans ses appréciations. S’agissant d’une loi qui n’a point seulement pour but de sauvegarder des situations particulières mais qui est plutôt — surtout, pourrait-on dire — une loi de solidarité nationale et d’intérêt national, il ne convient pas d’en diminuer la portée par des distinctions que le texte n’a pas expressément établies. Il n’est pas douteux, par exemple, que les enfants naturels n’aient droit, comme les enfants légitimes, à participer aux avantages de la loi, puisque, alors même qu’il ne serait pas rattaché par les liens du sang à son soutien, victime de la guerre, le mineur peut solliciter son adoption par la Nation. De même n’est-il pas nécessaire que les parents ou le soutien aient péri ou aient été blessés sur le champ de bataille. Il suffit que la mort ou l’invalidité soit une conséquence, une suite de la guerre. »