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Re: Mémoires d'un aviateur roumain

Publié : jeu. janv. 24, 2013 1:05 pm
par yox
Bonjour à tous,
je suis en train de travailler sur la traduction des mémoire du Commodor Constantin Nicolau (je lis assez bien le roumain). Et je vais vous livrer ici un résumé du livre par chapitre, au fur et à mesure de mes avancées.
Je vous livre les infos telles que dans le livre, sans commentaires additifs, sinon ceux de l'auteur lorsqu'ils me semblent important.


L’EPREUVE DU FEU
Les Mémoires de Constantin Nicolau

Edition Albatross - 1983

Avant Propos
par Dinu C. Giurescu

Livre écrit en 1981 par le Commodore C.D Nicolau, vétéran de 2 guerres, alors sous-lieutenant. Ce livre s’étend de juin 1916 à janvier 1918.
Constantin Nicolau a également rédigé la première monographie roumaine sur le sujet : Dossiers relatifs à la contribution de l’Aéronautique roumaine dans la première guerre mondiale – 204 p . 33 annexes.

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3 août 1914 : le Conseil de la Couronne de Sinaia se prononce pour la neutralité de la Roumanie.
18 septembre/01 octobre 1914 : convention secrète avec la Russie (avec accord du roi Carol Ier pourtant Hohenzollern)
14/27 août 1916 : la Roumanie déclare la guerre à l’Autriche-Hongrie.
S’ensuit la libération d’une partie de la Transylvanie dans les premières semaines. Puis une contre-offensive ennemie en Dobrodja (sud de la Roumanie) et sur la ligne du Danube entraîne la retraite des troupes roumaines engagées dans le nord. Les Roumains s’établissent en défense sur la ligne des Carpates. L’Olténie et la Munténie sont évacuées, y compris la capitale Bucarest.
En janvier 1917, le front se stabilise dans le sud de la Moldavie, dans les Carpates et sur le Siret jusqu’au delta du Danube.
Au cours de l’hiver 1917, s’ensuit la reconstitution de l’armée roumaine qui a beaucoup souffert, avec du matériel neuf fourni par les alliés via la Russie.
A l’été les combats reprennent avec intensité.
11/24 juillet 1917 : la IIème armée roumaine (général Avarescu) perce le front à Marasti.
Une deuxième offensive planifiée vers le sud-est est abandonnée suite aux événements en Russie (depuis mars). C’est d’ailleurs suite à ces événements que le commandement allemand déclenche une puissante contre-offensive dans le but d’occuper toute la Moldavie afin que la Roumanie se retire de la guerre.
24 juillet/6 août au 21août/3 septembre 1917 : batailles de Marasesti
Mai 1918 : traité de Bucarest
1er Décembre 1918 : Naissance de la Grande Roumanie par la réunion de territoires revendiqués par la Roumanie sur la Russie, l’Autriche-Hongrie et la Bulgarie.

L’été et l’automne 1916 ont représenté pour l’aviation roumaine une étape d’adaptation aux besoins de la guerre. Les escadrilles totalisent 30 appareils du type 1913-1914 de 6 modèles différents, avec tous les inconvénients que cela comporte.
Les pilotes et les observateurs ne sont pas formés de manière adéquate pour les missions de guerre. Le commandement lui-même ne semble pas savoir comment utiliser son aviation en appui du front.
Dans ces conditions, les pilotes effectuent de nombreuses reconnaissances, communiquant les mouvements de troupes et leurs dispositif tant en Transylvanie que sur la ligne du Danube et en Dobrodja.
A l’automne 1916 et surtout au cours de l’hiver 1917 de nouveaux appareils arrivent depuis l’occident par la Russie ou Salonique. La réorganisation de l’aviation roumaine et l’instruction de ses personnels se fait avec l’aide de la mission militaire française.
Au cours de la campagne de l’été 1917, l’aéronautique militaire roumaine opère dans deux directions en apportant son soutien aux opérations terrestres :
1/ reconnaissance photo sur tout le système défensif ennemi en vue de l’offensive de Namaloasa. De plus par ses observations, elle a rapporté que la préparation d’artillerie n’avait pas été assez efficace. Ce qui a permis de continuer le pilonnage un jour de plus et d’encadrer plus précisément les objectifs.
2/ L’apport de l’aéronautique militaire à Marasesti a été primordial. Alors que les moyens de communications terrestres étaient interrompus, ses équipages ont réussi à maintenir la liaison entre les premières lignes et les PC divisionnaires. Ce qui a permis des prises de décision rapides et adaptées à la situation.
Ordre du Jour n°96 du 12/25 août 1917 du général Grigorescu, commandant de la Iere Armée roumaine :
« Et les faits qui ont soulevé l’admiration de tous et qui ont montré le plus bel esprit de sacrifice sont ceux au cours des vols de liaison avec l’infanterie, lorsque, sans tenir compte du danger, je vous ai vu voler à très basse altitude ; au-dessus des lignes ennemies, pour pouvoir apporter des renseignements précieux au milieu de l’obscurité causée par le bombardement d’artillerie. Alors même que dans le bruit assourdissant, nous ne vîmes que vous, nous ne reçûmes que de vous les informations selons lesquelles les envahisseurs avaient été arrêtés, que les vagues ennemies s’étaient brisées et avaient reculées et qu’en même temps trois avions avaient été abattus, ce sont là la preuve du courage des aviateurs au combat.
Pour tout cela, j’apporte mes remerciements au commandant du Groupe, pour la capacité avec laquelle il a dirigé les missions aéronautiques, aux commandants d’escadrilles, aux pilotes et aux observateurs des aéroplanes et des ballons, pour la façon exceptionnelle avec laquelle ils ont travaillés avec les escadrilles et les ballons, pour le courage admirable et l’esprit de sacrifice dont ils ont fait preuve dédaignant la mort, aux mécaniciens pour le bon fonctionnement des avions, prêt à décoller à tout moment.
A travers moi, le pays entier vous est reconnaissant. »


Au cours des campagnes de 1916 et 1917 l’aéronautique militaire a effectué :
- 8 000 heures de vol
- 705 réglages d’artillerie
- 6 981 photos aériennes
- De nombreuses liaisons avec l’infanterie de première ligne
- Des missions spéciales

Statistiques de la chasse :
- 456 combats aériens
- 40 appareils ennemis abattus
- 14 victoires des aviateurs roumains
- 14 victoires des aviateurs français
- 1 victoire d’un aviateur britannique
- 1 victoire d’un équipage franco-russe
- 10 appareils abattus par la DCA

Statistiques de l’aérosatation :
- 1702 heures d’ascension
- 410 réglages de tirs d’artillerie
- Découverte de 281 batteries ennemies




(A suivre : La Préface)

Re: Mémoires d'un aviateur roumain

Publié : ven. janv. 25, 2013 9:50 am
par yox
PREFACE

Constantin Nicolau avait 20 ans en 1916. Il garde encore, au moment où il écrit ce livre, un souvenir douloureux des réfugiés de Munténie et d’Olténie, de l’épidémie de typhus et grippe qui ont prélevé autant de vie que les combats. Il a pris part, en tant qu’aviateur, aux combats de la Iere Armée au cours de l’offensive de Namaloasa et des batailles de Marasesti.


CHAPITRE I : ETE, AUTOMNE, HIVER DE L’INOUBLIABLE ANNEE 1916


A l’été 1916, termine le lycée au monastère Dealu, près de Tîrgoviste. Il y est entré sur concours. Créé en 1912 par Nicolae Filipescu, alors ministre de la Guerre, le lycée a pour vocation de former ceux qui voulaient devenir officiers. La discipline y est militaire et les professeurs y sont parmi les meilleurs du pays. Parmi ces enseignants, il y avait des officiers, des civils et même, pour l’enseignement physique et sportif, des spécialistes engagés à l’étranger.
Bon en sport, il fera partie de l’équipe roumaine envoyée aux Olympiades de la Paix à Paris en 1919.
20 juin 1916(*) : c’est la fin de l’année scolaire, avec la remise des diplômes. Puis il rentre chez son père (sa mère est décédée) pour l’été afin de préparer le baccalauréat qui aura lieu à l’automne.

14 août 1916 : la Roumanie fait connaître sa volonté de rentrer en guerre contre les puissances centrales. Mobilisation immédiate de 1 083 000 hommes, soit 15% de la population. Il sont répartis en 4 armées de 6 corps chacune. Soit
- 23 divisions d’infanterie
- 2 divisions de cavalerie
- 5 brigades de Calarasi (unités cavalerie qui correspondrait à nos chasseurs à cheval)
- 2 brigades d’artillerie lourde
- 1 régiment d’artillerie de montagne
- 1 division d’artillerie de montagne
- 113 pièces de DCA
- 1 brigade de gardes-frontière
- 1 régiment ferroviaire
- 1 régiment de pontonniers
- 1 bataillon de spécialistes du Génie
- 1 flotille du Danube
- 4 groupes d’aviaition.

Le 15 août 1916, l’armée roumaine lance une offensive en Transylvanie en 18 endroits. Elle est bien accueillie par la population roumanophone qui lui apporte son soutien. L’armée avance au cœur de la Transylvanie jusqu’à la fin du mois.
Malheureusement ce succès est sans lendemain. Sur le front sud, les alliés ont tardé à lancer l’offensive promise dans le but de fixer les troupes germano-bulgares. Alors Mackensen attaque et s’empare de la tête de pont de Turtucaia (19-24 août). Il y a de nombreuses pertes roumaines.
L’offensive roumaine en Transylvanie est donc arrêtée et après les batailles de Sibiu (13-15 septembre), Praid-Sovata (16-20 septembre), Petrosani (18-20 septembre) et Brasov (24-25 septembre), l’armée entame une difficile retraite.

Le 15 septembre 1916, Nicolau débute les cours à l’école d’officiers d’artillerie, alors transférée à Iasi en Moldavie. Elle est installée dans la caserne du régiment de Rosiori (hussards rouges) où il retrouve 12 de ses camarades de Dealu. L’école est composée de 4 batteries, 2 pour les officiers d’active, 2 pour les officiers de réserve. L’école renferme de plus une compagnie d’élèves du Génie.
Constantin Nicolau est affecté à la 2ème batterie (officiers d’active), commandée par le capitaine T.
La batterie est divisée en 4 groupe, il fait partie du 4ème.
Le programme des cours est très chargé, et quand il n’y a pas cours il y a instruction. La discipline est de fer.

Fin septembre et courant octobre, les communiqués du GQG annonce une puissante offensive allemande d’abord à Oituz (28septembre-14 octobre) puis à partir du 30 septembre à Predeal, Rucar et Dragoslavele. On annonce aux élèves que le front s’est stabilisé en Dobrodja, car les troupes russes ont remplacé les troupes roumaines exsangues. Ces dernières passent en réserve et s’apprêtent à faire face à une attaque venant des Carpates.
A la mi-octobre arrivent les prémices d’un rude hiver.
Les communiqués annoncent la résistance héroïque des troupes roumaines contre une attaque ennemie dans les Carpates. Et elles ont dû céder du terrain à Dragolsavele, en aucun endroit le front n’a été percé. En revanche, les alliés n’ont attaqué ni à Salonique, ni ailleurs. Les Roumains ont l’impression de servir de paratonnerre aux Alliés.
La première quinzaine de novembre, les attaques ennemies commencent dans les passages des Carpates. Il y a des durs combats à Tîrgu-Jiu et le front cède. Le groupe de Cerna lutte héroïquement mais perd le contact avec le reste de l’armée.
Du 3 au 14 novembre, de puissantes offensives germano-austro-hongroises dans les vallées de l’Olt et du Topolog se terminent par l’occupation des villes de Rîmnîcu Vîlcea et Curtea de Arges. Les Roumains tentent de constituer une ligne de résistance sur l’Olt, mais sans succès.
A Cîmpulung les troupes fatiguées et accablées ont perdu toute capacité de riposte. L’offensive alliée ne vient toujours pas.
Le 10 novembre, Mackensen réussi à franchir le Danube à Zimnicea, et les Bulgares à Giurgiu.
Le GQG roumain prépare une offensive sur l’Arges et le Neajlov. Mais le 23 novembre, Bucarest est occupée par l’ennemi. Les réfugiés affluent alors en masse à Iasi.

A la mi-décembre il est envisagé de transférer l’école de Nicolau à Odessa, mais sans suite.

Tous espèrent la stabilisation du front sur le Siret, le long de la ligne stratégique Focsani-Namaloasa et sur les passages des Carpates. C’est ce qui se produit. Les offensives germano-austro-hongroises sont stoppées.

Janvier 1917 : une épidémie de typhus fait des ravages tant dans l’armée que chez les civils. Un ami élève-officier de Constantin, Grigore Zadik, contracte la maladie. Ce qui mène Nicoalu à lui rendre visite à l’hôpital où il est confronté aux dégâts occasionnés par la maladie.

Fevrier 1917 : l’hiver est de plus en plus rude, il y a des problèmes d’approvisionnement et les civils autant que les militaires souffrent de privations.
Un jour, par -25° C, toute l’école assiste à la dégradation du général Socec, accusé de défection au cours de la bataille de Bucarest (novembre 1916). Il avait alors replié sans ordre sa division. Il a été condamné à la prison et à la dégradation publique. Cette humiliation est vécue par les élèves comme un acte totalement inutile et inhumain. Plus tard le procès sera révisé et le général acquitté.

Au mois d’avril, on fait savoir aux élèves qu’ils auront un congé à partir du 15 du mois et qu’ils devront rejoindre leur affectation le 29. Chacun doit choisir son affectation en fonction de son rang de sortie. Nicolau est surpris de voir que parmi les choix proposé il y a des places pour l’aviation, qu’il s’empresse de choisir avec 2 autres de ses camarades de Dealu. Et ce à la grande stupeur des officiers de l’école.

Constantin passe ensuite sa permission dans sa famille à Roman. La ville est le siège du commandement de l’armée russe de Moldavie et toutes les maisons sont occupées par des officiers russes ou des réfugiés.

Avec la fin de l’hiver, le moral remonte. Les unités roumaines se reconstituent en Moldavie, pour combler les pertes des combats et du typhus). Pour cela du matériel neuf arrive de France, via la Russie. L’instruction quant à l’utilisation de ces matériels est menée par les officiers français de la mission Berthelot qui est en Roumanie depuis l’automne 1916.
Le 22 avril, Nicolau apprend qu'il doit se présenter à son régiment d’artillerie d’affectation dont la base arrière est à Vaculesti, près de Dorohoi, puis de là, se rendre l’école d’aviation de Botosani. Lorsqu’il arrive dans le bureau du Colonel Paul Micioara, à la base arrière du régiment, celui-ci lui fait comprendre que l’aviation est un mauvais choix

(A suivre : CHAPITRE 2 / L’ECOLE D’AVIATION DE BOTOSANI)


(*) Nicolau utilise les dates du calendrier julien

Re: Mémoires d'un aviateur roumain

Publié : dim. janv. 27, 2013 12:43 pm
par yox
CHAPITRE 2 : A L’ECOLE D’AVIATION DE BOTOSANI

Le 2 mai 1917, Constantin se présente à l’école d’aviation située à Botosani.
A la déclaration de la guerre, l’aviation était constituée en un « Corps de l’aviation », équipé d’environ 45 appareils.
Chiffre ramené à 30 si on enlève les appareils trop fatigués par les vols d’entraînement.
Des avions avaient été commandés en France, mais jusqu’alors aucun n’était arrivé.
Les 30 appareils disponibles sont répartis en escadrilles affectées aux armées.
Il y a un groupe d’aviation par armée à raison de deux escadrilles par groupe et 3 à 4 appareils par escadrille.
Sur ces 30 avions, ceux qui ne sont pas affectés aux armées, appartiennent au Groupe 3, mis à la disposition du corps d’aviation de Bucarest.
D’un point de vue technique ces appareils datent des années 1913-1914 et sont dépassés à l’entrée en guerre de la Roumanie. Ils sont fragiles, leur moteurs sont peu fiables, ils ne sont pas armés. Ils sont prévus pour le réglage de tir et le bombardement.
L’ennemi, lui, est équipé de modèles plus récents aux performances supérieures, armés et avec un personnel bénéficiant de 2 ans d’expérience de guerre.

Au début de l’automne 1916 et au cours de l’hiver le matériel aéronautique commandé en France commence à arriver. Les nouveaux appareils sont du niveau technique de 1915.

Au cours de décembre 1916 la Direction de l’Aéronautique est créée au sein du GQG. Elle est commandée par le colonel de Vergnette de la mission française. Il a sous ses ordres direct :
- 1 service de l’aviation (major C. Fotescu)
- 1 service de l’aérostation (major I. Iancu)
- 1 réserve générale de l’aéronautique – RGA (major Adamovici)
- 1 service « d’aerologie » (ainsi que se nommait le service météo à l’époque)

Au début de l’année 1917, l’aéronautique militaire roumaine est réorganisée en 3 groupes :
- 1er Groupe d’aérostation (major A. Sturza) affecté à la IIe Armée
o Escadrille 1 de chasse
o Escadrille 2 d’observation
o Escadrille 6 d’observation

- 2e Groupe aéronautique (major av. A Popovici) affecté à la IVe Armée russe
o Escadrille N3 de chasse
o Escadrille N4 d’observation

- 3e Groupe aéronautique (major av. N. Capsa) affectée à la VIe Armée russe
o Escadrille N10 de chasse
o Escadrille F5 d’observation

Début 1917 sont créée en plus deux escadrilles à disposition directe du GQG :
- Escadrille F7 d’observation
- Escadrille BM 8 de bombardement

Le 1er juillet 1917 sont créées les unités suivantes :
- Escadrille F9 observation
- Escadrille N11 de chasse
- Escadrille C12 de reconnaissance lointaine

Et début août 1917, l’escadrille N10 de chasse voit le jour.

Toutes les escadrilles sont dotées d’avions neuf arrivés de France :
- Farman 40 (observation)
- Nieuport 13 et 17 (chasse)
- Breguet Michelin (bombardement)
- Caudron (reconnaissance lointaine)

En vue de leur passage sur le nouveau matériel, les pilotes roumains ayant déjà l’expérience du front sont renvoyés à l’entraînement à Bîrlad (où a été évacuée l’école de pilotage).
Dans le même temps, en janvier 1917, une école d’observateur aérien est créée à Bîrlad.
Les observateurs d’active y sont rassemblés afin d’être formés sur les nouvelles méthodes de travail.

Au fur et a mesure que les pilotes terminent leur entraînement sur le nouveau matériel et que les observateurs sont opérationnel, les escadrilles, formées au début de l’année avec une majorité de personnel français, peuvent progressivement être encadrées par du personnel roumain, devenant ainsi mixtes.
Plus tard il sera possible de former 2 escadrilles encadrées exclusivement de personnel roumain : la F9 d’observation et la N11 de chasse.
Arrivés dans leurs unités, les personnels roumains se perfectionnent avec l’aide de leur camarades français.

En février 1917, les écoles sont transférées à Botosani, plus en retrait du front, sur un plateau au nord de la ville.
Lorsqu’il se présente à l’école, Constantin Nicolau a le grade d’élève-adjudant (elev-plutonier), grade qu’il avait à sa sortie de l’école d’artillerie. A Botosani, il côtoie, entre autre T. Alimanescu et D. Grumazescu (d’anciens camarades de Dealu), ainsi que Gh. Stîpeanu et l’elev-plutonier de réserve Constantin Motas (biologiste, assistant à l’université de Bucarest).

Le slt av. Motas
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Dans le cadre des écoles de l’aviation, commandées par le Cpt C. Berioniadi, outre les écoles de pilotage et d’observation se trouve une école pour officiers de transmission. L’école d’observateurs est commandée par le Cpt. Français de Laparelle.

Le Cpt de Laparelle
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Les cours de l’école d’observation débutent avec une quinzaine d’élèves. Presque tous viennent de l’artillerie. Les instructeurs sont tous des officiers français. Il y a d’abord les cours théoriques puis le vol de validation et d’adaptation à bord d’un Caudron G3. Les pilotes de l’appareil étant les instructeurs de l’école de pilotage.

Constantin Nicolau fait son premier vol avec l’adjudant aviateur Gogu Stefanescu (instructeur) qui lui fait subir une petite série d’évolution pour le secouer un peu. Montée à 1200 m, descente en virage moteur calé avec remise de gaz de temps en temps. Tous les élèves ont droit au même traitement et à l’issue du premier vol quelques-uns d’entre eux reprennent le chemin de leur unité d’origine. Nicolau proteste auprès du Cpt de Laparelle quant à la méthode employée, mais ce dernier lui explique qu’un candidat qui n’a pas confiance en lui et qui n’est pas plus passionné par le vol que par le fait d’arborer les insignes d’aviateur sur sa poitrine est une perte de temps pour l’armée. En effet selon lui, un tel individu ne pensera qu’à survivre au vol et non à accomplir sa mission de manière consciencieuse. Nicolau ne dit plus rien, il a compris la justesse du raisonnement.

Avec leur expérience sur le front Ouest les instructeurs français n’ont pas de mal à intéresser les élèves aux cours et aux exercices pratiques.
La partie théorique est réduite au nécessaire. Elle comprend :
- Toute la gamme des connaissances requises par les reconnaissances tactiques en avion
- Le tir d’artillerie avec observation d’avion étendue à toutes les variantes possibles
- Liaisons entre les premières lignes d’infanterie et les PC
- Photo aérienne avec mode opératoire, étude et analyse des clichés.
- Transposition des travaux photos sur des plans directeurs
- Techniques de travail avec des postes radio
- Combat aérien
- Tir à la mitrailleuse
- …

Les missions
Les reconnaissances dans le champ tactique ont pour but de définir les activités de l’ennemi sur 10-15 km de profondeur en arrière du front des grandes unités (division et corps d’armée) qui demandent la mission. Il s’agit d’observation à vue ou photographique à des altitudes variant entre quelques centaines de mètres et 3 000 m, en fonction du temps et de la DCA. Les missions à très basse altitude se font plutôt à l’aube pour bénéficier de l’effet de surprise. Dans le cas d’un front stabilisé, les équipages photographie le dispositif ennemi. Cela se fait d’abord à petite échelle, au cours d’un vol entre 1 200 et 2 000 m. Ensuite les photos sont assemblées sur un tableau panoramique pour avoir une vue d’ensemble du dispositif. Afin d’obtenir un assemblage parfait l’appareil doit garder la même altitude et la même direction ce qui en fait une cible facile. Après analyse des photos assemblées, les dispositifs ennemis sont restitués sur des plans directeurs au 1/20 000. Si des objectifs importants sont décelés sur les clichés, ils sont photographiés de nouveau à basse altitude (250-700 m) avec des appareils photos à focale de 0,50 cm ou 0,75 cm. Soumises à un examen stereoscopique, ces photos font aussi un relevé des soldats dans les tranchées. Au cours de ces missions, les lignes amies sont également photographiées afin d’en vérifier l’efficacité du camouflage.

Exemple de restitution sur plan directeur au 1/ 20 000
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Le réglage des tirs des batteries d’artillerie de champs et des batteries lourdes. En général l’objectif est préalablement photographié et étudié. Les vols de réglages s’effectuent entre 1 000 et 2 000 m. Les observateurs communiquent par télégraphie sans fil avec un poste au sol qui transmet par téléphone aux instances concernées les infos recueillies. Les réponses du poste sont signalées à l’avion aux moyens de panneaux blanc disposés selon un code prédéfini.

En ce qui concerne les missions de liaison entre les premières lignes et les PC divisionnaires, elles ont lieu pendant les attaques et les contre-attaques, lorsque les communications terrestres sont interrompues. A ce moment-là, il est signalé par fusées de couleur aux troupes de premières lignes de marquer leurs positions par des panneaux sur le sol afin que les observateurs aériens puissent tracer les positions sur des plans directeurs et d’en communiquer les coordonner par TSF. C’est une mission difficile car l’altitude, entre 200 et 500 m, expose les équipages au feu des mitrailleuses terrestres.

En période de crise, on recourt aux missions de surveillance de secteur. Surtout lorsqu’une attaque ennemie est envisagée ou au moment d’une contre-attaque. L’avion signale par TSF l’activité ennemie. Si le besoin s’en fait sentir on peut demander à l’avion de faire des réglages d’artillerie sur des objectifs dévoilés via le poste au sol.
Tous les avions d’observation sont équipés avec des postes d’émission TSF et communiquent en Morse. Les PC d’artillerie divisionnaire ou de corps d’armée sont aussi équipé de postes, manipulés par des officiers spécialistes qui relaient par téléphone les renseignements transmis par les observateurs.

En cas de disfonctionnement TSF, les équipages communiquent par message lesté. Le rapport est glissé dans un tube en aluminium équipé d’une flamme colorée aidant à suivre la trajectoire de sa chute.

A l’école, les exercices de tir s’exécutent d’abord avec une « pétarde »sur l’aérodrome de l’école puis ensuite avec les troupes au sol et des tirs réels au polygone de tir.

De Laparelle s’entretient avec chacun de ses élèves, les suivant avec attention au fur et à mesure de leur apprentissage.

Le 20 mai 1917, au cours d’un exercice en vol devant tous les élèves, le sous-lieutenant français Cordonier part vérifier le fonctionnement d’un poste TSF en vol. L’appareil en perte de vitesse, décroche et s’écrase. Cordonierest tué. C’est le premier accident auquel assistent les élèves, deux d’entre eux quittent l’école dont un des camarades de Nicolau de Dealu.

Tous les jours entre 15h et 18h, les élèves suivent des cours théoriques dans le centre ville.

Alors que Nicolau est à l’école le front sud s’est stabilisé.

Constantin évoque les problèmes de logement, tant la ville est pleine d’école d’officiers et de réfugiés civils. Il loge avec son camarade Motas. De temps en temps, ils se rendent à l’école de pilotage voisine où ils voient les nouveaux s’entraîner sur pingouins.

Début Juin, ceux qui ont réussi l’entraînement de tir et de liaison avec l’infanterie sur l’aérodrome avec la pétarde, passent à la phase suivante : réglage d’artillerie à tir réel au polygone et liaison avec les troupes d’infanterie.

S’il goûte les missions de tirs d’artillerie, Nicolau a plus de mal avec le travail de la section photo totalement nouveau pour lui. Il reste convaincu qu’il n’a pas retenu grand-chose « malgré tout l’insistance et la bonne volonté inépuisable de l’instructeur francais Caradec ».

Le 1er juin 1917, la direction de l’école se concentre sur les élèves qui sont en avance quant à l’assimilation des cours et les épreuves pratiques de vol. Pendant ce temps l’armée roumaine se concentre sur le front sud de la Moldavie. Le 10 juin 1917 on informe les élèves qu’au milieu du mois une première équipe d’observateurs formée par l’école sera envoyée au GQG à Iasi pour affectation dans une unité destinée au front.
Et le 15 juin au matin, Constantin et son camarade Motas sont convoqués chez le cpt de Laparelle qui leur annonce qu’ils ont été choisis pour partir. Dans l’après-midi, il partent pour Iasi.

(A suivre : CHAPITRE 3 / A L’ESCADRILLE F 7)

Re: Mémoires d'un aviateur roumain

Publié : mar. janv. 29, 2013 9:16 am
par yox
CHAPITRE 3 : A L’ESCADRILLE F7

Constantin Nicolau décrit en début de chapitre les trains bondés et la lutte pour y pénétrer. Certains voyageurs s’installent même sur les tampons entre les wagons. Après une nuit sans sommeil dans le train, Motas et lui se présentent au GQG à Iasi à 9h le lendemain matin.

Ils sont reçus par le cpt G. Maicanescu. Ils apprennent qu’ils sont affectés à l’escadrille F7. Jusqu’alors cette escadrille était à disposition du GQG, mais elle vient de passer au 2e Groupe aéronautique qui opère au profit de la Ière Armée.
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Leur ordre d’affectation précise qu’il doivent se rendre au cours de la matinée à la Réserve générale de l’aviation (RGA) pour percevoir leur équipement de vol, avant de prendre le train pour Tecuci dans la soirée et de se présenter le lendemain, 17 juin, au 2e Groupe.

A la RGA, ils sont accueillis par le major Eugen Adamovici, commandant l’unité et son adjoint, le cpt français Samua.
Adamovici ordonne au cpt Dobrescu de leur donner le nécessaire de vol.

Le commandement de la RGA
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Le soir, les 2 observateurs prennent le train et arrivent à l’aube à destination. Dans la matinée, ils se présentent au 2e Groupe aéronautique, commandé par le major av. Andrei Popovici. Ancien officier de cavalerie, celui-ci fait partie des pionniers de l’aviation. Le major donne des ordres pour qu’on montre leur quartier aux 2 officiers en attendant qu’ils rejoignent leur escadrille le lendemain. Le PC de cette dernière se trouve sur le terrain à l’ouest de la ville.

Les officiers sont logés en ville chez l’habitant. Tecuci est également surpeuplée du fait du cantonnement des militaires et des réfugiés.

Le lendemain, Nicolau et Motas se présentent à l’escadrille F7. C’est une unité mixte franco-roumaine. Ils sont reçu par le lieutenant aviateur (locotenent av.) Cicerone Olanescu, adjoint du commandant de l’unité. Il gère la partie administrative plus la troupe constituée de soldats roumains. Les mécaniciens de l’unité sont en majorité français.
Olenascu, un peu distant, briefent les deux nouveaux dans les grandes lignes. Ils leur expliquent que l’escadrille jusqu’alors à la disposition du GQG a exécuté seulement des missions spéciales. Parmi elles, la reconnaissance photo de tout le front ennemi face à la IVe armée russe.
Au cours de l’hiver, après un bombardement surprise effectué par l’ennemi sur le terrain de Tecuci, l’escadrille, en représailles à bombardé par deux fois le terrain ennemi de Focsani. Chacune des missions comprenait 4 appareils. L’escadrille a été citée deux fois à l’ordre du jour de la IVe armée russe (les 26 et 30 mai 1917).

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Ensuite ils se présentent au baraquement des observateurs où ils font la connaissance du lieutenant français Jacques Houlon, chef des observateurs. Il y rencontrent également les observateurs suivant : cpt. Gr. Gafencu, slt. av. Gh. Creteanu, slt. Teodor Dumitrescu (chef de la section photo), ainsi que deux officiers de liaison russes.
Le lt Houlon est spécialisé dans les missions de reconnaissance.

Accueil mitigé et distant. Seul le slt Dumitrescu les accueille chaleureusement, les prend sous son aile et leur fait faire le tour de l’unité.

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Les hangars sont montés sur le côté est du terrain. Derrière les hangars se trouvent les baraquements et les masures abritant les services ainsi que les dortoirs des mécaniciens et de la troupe.
Ils visitent ainsi une des masures qui abritent le service photo. La baraque est divisée en une salle de travail et un labo photo. Sur les murs de la salle de travail se trouvent des plans directeurs de grande et petite échelle. Ils représentent des positions ennemies sur la rive droite de la Putna, face au front de la IVe armée russe. A cela s’ajoutent des assemblages photos des lignes ennemies et de ses positions d’artillerie. Sur un autre mur, des assemblages photo des positions importantes du dispositif ennemi photographiés entre 500 et 1 000 m avec une focale de 50 cm. Le tout complété par des photos panoramiques. Les nouveaux emplacements repérés sont tracés sur plans directeurs avec une couleur différente et la date du cliché. L’évolution des travaux de fortification ennemis est tenue à jour quotidiennement.

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Les assemblages sont le fruit du slt Dumitrescu. Arrivé en février 1917 à l’escadrille, il a d’abord effectué quelques vol avec le slt Tanase puis ensuite avec l’adjudant Du Plan et début avril, presque exclusivement avec le cpt André Goulin. Les photos aériennes de l’équipage Goulin-Dumitrescu ont été publiées comme un modèle du genre par la revue l’Illustration et d’autres revues françaises.

Dumitrescu se souvient de son arrivée à l’escadrille et de sa première mission photo au sud de la Putna à 600 m. Les pilotes français et roumains hésitent à voler avec un observateur sans expérience du front. Nicolae Tanase, un pilote vétéran de 1916, accepte. L’équipage effectue donc la mission et rentre au terrain afin que l’observateur puisse changer la boite (Cette boite ne permettait qu’un seul cliché de 18X24 cm - NOTA : quelqu'un pourrait-il confirmer ou infirmer cette info ?). Puis l’équipage redécolle vers l’objectif, même direction, même altitude, avec le même accueil de la DCA. Un obus explose juste sous l’avion et le crible d’éclats. Tanase parvient quand même à ramener l’appareil et lorsque Dumitrescu descend de la carlingue pour voir l’état dans lequel est l’avion, il s’agenouille et plaque ses paumes au sol pour bien vérifier qu’il est bien là. Le lendemain l’équipage repart pour la même mission qui est un succès

Dans le cadre de sa section, Dumitrescu bénéficie de l’aide du dessinateur-cartographe Marcel Imbs (un célèbre dessinateur alsacien), du chef de laboratoire Durazzo (le meilleur photographe de Bucarest), plus deux photographes.

Le sergent Idier (alias Marcel Imbs)
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Les deux nouveaux font alors connaissance avec les appareils. Les avions ont abrités dans 3 hangars.
Le premier est celui de l’escadrille F7 (Farman 40).
Le deuxième hangar abrite les Caudron G-4 de l’escadrille C12 (reconnaissance d’armée). Ils sont destinés à la reconnaissance lointaine et parfois à des missions de protection.
Dans le 3e hangar il y a des Nieuport type BB 13, dotation de l’escadrille N3.

De retour à la salle des observateurs, ils se présentent au cpt Goulin, le chef d’escadrille. Une trentaine d’années, titulaire d’un des premiers brevets de pilote international, il a deux ans d’expérience sur le front Ouest avant d’arriver en Roumanie.
Serrant d’abord la main à Motas, qui a l’air plus âgé, il s’apprête à faire de même avec Nicolau. Scrutant le visage poupin de ce dernier il lance au cpt Gafencu ; « voyez-vous maintenant on m’envoie des gosses ! » et de lui tendre la main d’un air extrêmement condescendant. S’adressant de nouveau à Gafencu pour traduire, il demande à Constantin pourquoi il semble si intimidé. Sans attendre la traduction, ce dernier répond dans un français acceptable qu’il est intimidé parce que dans une situation inhabituelle et qu’il est contrarié parce qu’il n’est pas un gamin. Il a 20 ans. Le cpt Goulin accuse le coup et après une courte pause change de sujet. Il demande aux 2 nouveaux venus de bien se familiariser avec le matériel qu’ils vont avoir à utiliser car pendant un moment il n’y aura pas de mission en vol, l’escadrille étant appelé à changer de secteur. Il souligne que l’unité va être prochainement appelée à remplir d’importantes missions au profit de la Iere armée roumaine qui se prépare à l’offensive.

Le Cpt Goulin
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Le lt francais de Mailly Nesle se présente à Nicolau. Il excuse son capitaine en avouant à Nicolau qu’il donne l’air d’avoir 15 ans. Le reste de l’escadrille vient se présenter aussi
- Slt Gh. Creteanu
- L’adjudant français du Plan
- L’adjudant français Louis Bourgeois (qui ne semble pas avoir plus de 18 ans selon Nicolau)
- Le slt Wilmetz (en charge des problèmes radio)
- Le slt russe Nardevell
- Le slt russe Saulus

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Le fait que Nicolau parle le français contribue beaucoup à son intégration parmi eux.

Peu après, le cpt français Bernard, commandant l’escadrille C12 (qui dépend administrativement de la F7), les cpt observateurs Rivière et Meyer, et les lieutenants aviateurs Bonneton et Bretonière qui constituent le personnel navigant de la C12)


Re: Mémoires d'un aviateur roumain

Publié : jeu. janv. 31, 2013 11:06 am
par yox
CHAPITRE 3 (SUITE)

A midi, tout le personnel se rend à Tecuci, au Groupe où Nicolau fait la connaissance avec le personnel de la N3 :
- Cpt Maurice Gond, commandant l’unité
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- Adjudant H. Manchoulas

- Adjudant Revel-Tissot
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- Sgt Jean Texier
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- Sgt Tresch

- Cpl M. Theron

- Sgt av. Poli Vacas, un roumain avec un visage d’enfant timide
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Marcel Imbs lui explique que les 4 premiers ont chacun un ou deux appareils ennemis à leur actif. A l’exception du Cpt Gond tous sont très jeunes.
Ensuite repas au mess. Le cpt Goulin préside à table. A sa droite le cpt Bernard,et à sa gauche le cpt Gafencu. Le reste par ordre de grade, Motas et Nicolau en dernier.

dans les jours qui suivent, en attendant de pouvoir voler, les 2 nouveaux venus s’entraînent à manipuler la TSF, au tir à la mitrailleuse, à l’interprétation et à la restitution des photos aériennes sur plans directeurs.
On les informe que l‘escadrille à reçu des dispositions et a commencé à photographier les positions de défense allemandes dans la région de Namoloasa.

Dans les jours qui suivent Dumitrescu, pourtant débordé de travail, continue à dispenser de précieux conseils à Motas et à Nicolau. Il explique à Constantin qu’il fera ses premiers vols avec le lt Olanescu. Les pilotes français ne voleront avec les "bleus" (littéralement bourgeons) que lorsqu’ils les auront jugés suffisamment entraînés.
Nicolau se rapproche également du lt Houlon, dont il tire de précieux conseil pour les missions à venir.

Les aviateurs les plus anciens de l’escadrille accordent peu d’attention aux nouveaux. Cela attriste ces derniers, mais au fond Nicolau le comprend.

Un matin Nicolau est convoqué chez le cpt Goulin. Ils le trouvent en compagnie de Gafencu et de Mailly. Goulin l’informe qu’il vient de recevoir ses qualifications de l’école d’observateur et s’excuse de l’avoir jugé trop hâtivement.

De retour à la baraque des observateurs, il y trouve l’adjudant N. Tanase, revenu d’un congé médical. Dumitrescu lui explique qu’il est de ceux qui se sont distingués à l’automne 1916 dans de nombreuses missions aériennes. Il a participé aux missions de bombardement des navires fluviaux postés près de Persina et sur le front de Dobrodja. Il faisait partie de l’escadrille commandée par le lt V. Alexandru, affectée à la tête de pont de Turtucaia.
Il a effectué son premier vol de reconnaissance des positions ennemies avec comme observateur le major Badescu, sous-chef d’état-major du commandement. La mission a pour but de localiser les batteries d’artillerie ennemie qui pilonnent efficacement les troupes roumaines. En dépit d’une forte DCA, les deux hommes parviennent même à repérer le lieu d’ascension du ballon qui règle les tirs d’artillerie. De retour Tanase est obligé de se poser à Oltenita, car le terrain de Turtucaia est soumis à un intense feu d’artillerie. La situation est alors grave, l’artillerie roumaine ne pouvant riposter efficacement. De plus il n’y a aucune liaison entre l’avion et le sol. Tanase et son observateur habituel, le sergent Marcovici frustrés de ne pouvoir rien faire, trouvent alors une solution pour calmer leur soif d'action : en bordure du terrain se trouve une briqueterie, avec autant de briques qu’ils pouvaient en souhaiter. L’équipage en charge autant qu’il peut dans l’avion puis décolle en direction du lieu d’ascension du ballon ennemi. Ce dernier à l’apparition de l’avion roumain, commence à descendre en vitesse. Marcovici commence à larguer une partie des briques sur le lieu de l’ascension et le reste sur les batteries ennemies. Probablement surpris l’ennemi suspend son tir. Satisfait du résultat l’équipage recommence plusieurs fois pendant deux jours.

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Le 24 juin 1917, il est signifié au personnel de l’escadrille F7 de se préparer à faire mouvement, en vue de s’installer le lendemain sur le terrain de Calmatui, au sud de Tecuci.



(A suivre : CHAPITRE 4/ SUR LE FRONT DE NAMOLOASA)

Re: Mémoires d'un aviateur roumain

Publié : lun. févr. 04, 2013 7:14 pm
par yox
CHAPITRE 4 : SUR LE FRONT DE NAMOLOASA (1ère Partie)


Les voilà installé sur le terrain de Calmatui.
Les hangars abritant les appareils de la F7 et de C12 sont situés à la limite sud du terrain, dans l’alignement de ceux-ci, les bureaux des escadrilles, la salle des observateurs et la section de photo-aérienne. De l’autre côté des hangars l’atelier mécanique, le dortoir, le mess…
A la limite nord du terrain se trouve la F9, qui vient d’être créée sous le commandement du cpt français Rougni. Il a pour second le cpt Stefan Petrescu. Le personnel navigant est formé d’aviateurs roumains.

Le 28 juin 1917 tout le personnel du groupe est convoqué au PC de la Iere Armée. Là, ils sont reçus par le major français Gabriel Cochet, adjoint tactique de l’aéronautique de la Iere Armée. Le major leur expose la mission de l'Armée :
- Rupture du front allemand dans le secteur Fundeni-Namoloasa, entre le pont Huroaia et Olaneasca, suivie d’une avance en force en direction de Rîmnicu-Sarat, afin de tomber dans le dos de la IXè armée allemande qui occupe le front s’étendant de l’aile droite de la Ière armée roumaine jusqu’à Muncel, où commence l’aile gauche de la IIè armée roumaine.
Cette dernière doit dans le même temps lancer une attaque afin de fixer le dispositif ennemi entre Muncel et Tirgu-Ocna.
De même que la IVè armée russe qui occupe le front entre les deux armées roumaines.

Quant à l’Aéronautique :
- Escadrille F7
o effectif 8 équipages
o base : terrain de Calmatui
o affectée au 3è CA
o Mission : reconnaissance et photo du secteur d’attaque, réglage des tirs d’artillerie de champ, liaison avec l’infanterie au moment de l’attaque

- Escadrille F9
o Effectif 8 equipages
o Base : Terrain de Calmatui
o Affecté au commandement de l’artillerie lourde
o Mission : reconnaissance et photo de la zone d’action de l’artillerie lourde, réglage de tir des batteries

- Escadrille N3 et N11
o Effectifs : 7 équipages chacune
o Base : Terrain de Cioara
o Affectées au commandement de la Ière armée
o Mission : reconnaissance lointaine, destruction de l’aviation ennemie, interdiction des missions de reconnaissance ennemies dans la zone de l’armée, protection des missions de reconnaissance aériennes, réglage d’artillerie et liaison avec l’infanterie

- Escadrille C12 de reconnaissance
o Effectif 4 équipages
o Base : terrain deCalmatui
o Affectée au commandement de la Ière armée
o Missions : reconnaissance lointaine, photo des secteurs et des lieux qui intéressent l’armée

- Les Cies 1, 4 et 5 d’aérostation
o Affectées à l’artillerie lourde
o Missions : surveillance du secteur d’action des groupes auxquels sont affectés les Cies, observation du tir de toutes les batteries lourdes, observation des tirs des batteries de champ ou de démolition (rupture ?), agissant dans le même secteur.

- La Cie 2 d’aérostation
o Affectée au 6e CA et au groupe d’artillerie de démolition (rupture ?)
o Missions : surveillance du champ de bataille, observation du tir de toutes les batteries se trouvant dans le secteur de l’attaque, liaison avec l’infanterie

- La Cie 3 d’aérostation
o Affectée au 3e CA
o Missions : similaires à celle de la 2e Cie.

Cochet ajoute que l’action de l’artillerie doit débuter le 9/22 juillet 1917 et l’attaque doit commencer le 11/24 juillet. Il attire l’attention des commandants d’escadrille sur le fait que les vols d’observation doivent être limités jusqu’au 6/19 juillet afin de ne pas éveiller les soupçons de l’ennemi.
A l’issue de la conférence d’état-major, Cochet informe Nicolau qu’il a reçu des ordres à son sujet et qu’en dépit de ses excellentes références il va probablement devoir retourner dans son arme d’origine. Il doit se présenter sans tarder au chef d’état-major. Sans plus d’explications.

Le major Cochet

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Abasourdi, Nicolau se présente immédiatement au commandement de l’armée, au bureau du chef d’état-major qui le reçoit personnellement. Le général Zadic, le connaît depuis qu’il est enfant. Il lui montre une note du ministre de l’intérieur qui par le biais du ministère de la défense demande que Constantin soit reversé à son régiment d’origine. Tout cela à la demande de son père qui connaît bien le ministre. Ce dernier déclarant que son fils n’est pas majeur et qu’il est passé dans l’aviation sans son consentement. Le jeune aviateur parvient à fléchir le général et reste dans l’aviation. Ce qu’il s’empresse de rapporter au major Cochet qui le renvoie au cpt Goulin. Ce dernier au récit des événements ponctuera l’affaire d’un « ça c’est quelque chose ! ».

Le général Zadic

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Goulin informe Constantin qu’il travaillera au profit de la 13e division et qu’il devra effectuer comme première mission une reconnaissance des lignes sur le front de la 13e DI et des positions de défense ennemies. L’avion sera piloté par le lt Cicerone Olanescu.

Nicolau s’attelle à la tâche et commence à préparer sa mission. Une bonne partie des ouvrages constituant le front ennemi avaient déjà été photographiés par l’équipage Goulin-Dumitrescu et restitués sur plans directeurs.
Le front occupé par les 13e et 14e divisions est d’environ 7 km et s’étend de Namoloasa à Cringeni, la 14e étant entre Namoloasa et Gîrlesti et la 13e dans le prolongement.
Le dispositif ennemi qui leur fait face est constitué d’une première ligne située à quelque centaine de mètres seulement des tranchées roumaines. La deuxième ligne ennemie se trouve à 2,5 km en arrière et la dernière ligne de défense à 4,5 km en arrière de la deuxième.
Le lt Olanescu informe Nicolau que la mission devra être exécutée au-dessus des lignes ennemies, le 1er juillet 1917 à 05h30. Il n’y aura pas d’escorte, la chasse étant retenue pour une autre mission.
Le slt Motas, affecté à la 14e division, a une mission similaire à remplir. Il effectuera également sa mission avec le lt Olanescu.

Deux jours plus tard à 05h00, Constantin est au pied de l’appareil qu’il doit utiliser pour la mission. Le plein est fait, le moteur est chaud et vérifié. Il tente de faire bonne figure devant les mécaniciens qui le scrutent du regard. Il installe dans la carlingue la planchette avec le plan directeur, sur lequel sont inscrits tous les détails du secteur ennemi qu’il doit reconnaître. Il y dépose également une paire de jumelles. Constantin vérifie ensuite les bandes et les cartouches de la mitrailleuse, la mitrailleuse elle-même. Ensuite il enfile sa combinaison de vol, et commence à faire les cents pas autour de l’avion. Il tente de calmer sa nervosité en attendant le pilote.
Ce dernier apparaît. Il le gratifie juste d’un « bonjour », met sa tenue de vol et grimpe dans la carlingue. Olanescu demande enfin à son observateur s’il est prêt, à la réponse affirmative il essaye encore une fois le moteur puis fait retirer les cales. Les mécaniciens saisissent ensuite l’avion par les ailes pour le faire pivoter, puis Olanescu le fait rouler jusqu’en début de piste, par vent de face et décolle.

L’équipage effectue deux tours de terrain, afin de tester la TSF, et Nicolau indique à Olanescu la direction de vol. L’appareil continue son ascension et à 1 200 m, il se trouve au-dessus du village de Hanul Conachi, juste en arrière du front.
Nicolau commence sa reconnaissance, commençant par l’endroit où le Rîmnicu se jette dans le Siret et en allant vers Gîrlest-Crîngeni. Arrivé à l’est de Crîngeni, l’équipage fait demi-tour et longe le front. Constantin n’a pas de mal à se repérer par rapport au plan directeur et s’attelle à mettre à jour le dispositif ennemi. Pas de grosse modification sur les premières lignes. Olanescu fait de nombreux aller-retour sur le long des tranchées ennemies pour permettre à Nicolau de travailler.
Cela fini, l’équipage se dirige vers la deuxième ligne ennemie pour le même travail, et vers la troisième pour reconnaître les emplacements d’artillerie. Dès qu’il franchit les lignes, l’avion est accueilli par des tirs de DCA. Les tirs sont assez intenses et Constantin en a le souffle coupé.
Sur la troisième ligne ennemie il aperçoit de nouveaux ouvrages non répertoriés sur le plan directeur, ni préalablement photographié. De même pour certains emplacements d’artillerie. La DCA se rapproche de plus en plus, et parvient même à un moment à encadrer l’avion. Alors qu’il s’apprête à une ultime vérification, Nicolau sent Olanescu lui taper sur l’épaule. Ce dernier lui dit qu’il faut rentrer, puis vire et prend la direction du retour. En peu de temps, ils sont au-dessus des lignes roumaines, les nuages de DCA se raréfient.
Nicolau demande à Olanescu de retourner au-dessus des lignes ennemies afin de bien mémoriser le dispositif, mais ce dernier refuse et lui dit d’utiliser les jumelles pendant qui se remettra à longer le front au-dessus des lignes amies.
Après l’atterrissage, Olanescu le prend a part et lui dit : « Le bleu ! Ne franchit les lignes ennemies que lorsque c’est indispensable, et quand tu voleras avec moi, c’est ainsi que nous procèderons de toutes les façons.»

Photo d'une batterie

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L’après-midi Motas vole avec Olanescu également au profit de la 14e division.

Le soir, Nicolau, Motas, le slt français Wilmetz, sous la conduite du lt Houlon prennent contact avec les chefs du bureau des opérations des 2 divisions ainsi qu’avec le commandant de l’artillerie, en vue d’établir les prochaines missions et leur ordre de priorité. Comme besoin immédiat : des photo verticales et panoramiques des premières lignes et emplacements d’artillerie amis et ennemis face au front du 3e CA. De même un mode de fonctionnement avec les poste-antenne et les batteries est mis au point en vue des futures missions de réglage d’artillerie. Ces derniers auront lieu le 8 juillet.
Sur la route du retour la chaussée est embouteillée par des troupes roumaines en mouvement vers le sud. Nicolau constate que même dans les villages, les paysans savent qu’une offensive se prépare et se demande comment les Allemands ne le sauraient pas.

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Au matin du 2 juillet, l’aviation allemande bombarde la gare de Tecuci et la détruit. Deux trains de munitions sont incendiés. De même les gares d’Ivesti et hanulConachi sont bombardées. Preuve que l’ennemi se doute de quelque-chose.
Le même jour à 11h, tous sont sur le terrain lorsqu’un Farman 40 apparaît et exécute une série d’évolution d’une rare élégance, en limite de vitesse. Il s’agit du cpt Mircea Zorileanu. Il est cordialement accueilli par Goulin et Du Plan.
Le slt Dumitrescu explique à Constantin que le visiteur, de l’escadrille F2, est un spécialiste du bombardement. Et qu’il effectue presque quotidiennement des missions sur des objectifs ennemis face à la IIe armée.

Le lendemain matin, Motas et Nicolau sont dans la salle des observateurs en attente d’un ordre de mission, lorsque des explosions assourdissantes ébranlent la baraque. L’officier de service entre en coup de vent et annonce que deux avions ennemis viennent de bombarder le terrain. Il leur ordonne de se rendre aux tranchées-abris aménagées en bordure du terrain. Comme les bombes n’ont pas touchés la baraque et qu’un deuxième passage est peu probable, les deux observateurs décident de ne pas bouger. Les bombes larguées dans la précipitation sont tombé sur le pigeonnier et en bordure de l’aérodrome. Aucun appareil n’a été touché.

Le 3 juillet au matin, Teodor Dumitrescu fait des photos de l’ensemble des premières et deuxièmes lignes du 3e CA et du centre de résistance ennemi de Gîrlesti.
Au repas de midi et du soir, il n’y a pas l’ambiance habituelle. Tout le monde semble préoccupé. Nicolau affirme que l’absence des pilotes de chasse se fait sentir. Leur gouaille manque.

Les équipages qui ont volé ce jour-là rapportent que la DCA ennemie devient de plus en plus violente et que la chasse a eu du mal à contenir l’aviation ennemie plus nombreuse.
L’étude des photos des positions ennemies montre de façon claire que l’ennemi concentre une puissante artillerie face au front de la Iere Armée roumaine. Ce qui laisse supposer qu’il est au courant de l’offensive en préparation.

Le soir même, le poste de réception TSFde l’escadrille capte un communiqué allemand annonçant la rupture du front russe suite à une offensive allemande en Galicie et en Bucovine. Les troupes allemandes sont en pleine percée. La IXe armée russe qui tient le front des Carpates est menacée d’encerclement. La stupeur est générale.

Dans l’attente de l’heure H, les observateurs se concentrent sur l’étude du secteur ennemi, d’après les photos d’ensemble et de détails prise verticalement ou en panoramique, mises à jour quotidiennement. En étudiant les clichés, ils tentent de déceler chaque nouvel ouvrage, chaque changement survenu dans le dispositif par rapport aux photos précédentes.
Les plans sont tenus également à jour (par des couleurs différentes). Ils sont diffusés régulièrement aux commandements concernés.
Le slt Dumitrescu, « as » de la photo aérienne est très sollicité et se sent extrêmement fatigué. Il avoue à Imbs qu’il se trouve dans un état fébrile, mais qu’il n’ose le dire au cpt Goulin de peur que celui-ci croie qu’il ne veut plus voler. Tous les observateurs sont inquiets qu’il lui arrive quelque chose car il est irremplaçable...

(A suivre : Chapitre 4 - 2eme partie)


Re: Mémoires d'un aviateur roumain

Publié : mar. févr. 12, 2013 6:54 pm
par yox
CHAPITRE 4 : SUR LE FRONT DE NAMOLOASA (2ème Partie)

Le 7 juillet les ballons des 5 compagnies d’aérostation rattachées à la Iere Armée, font leur apparition sur le front.
Les ballons sont de type Caquot, ancrés sur un camion muni d’un treuil à moteur pour descendre rapidement le ballon en cas d’attaque de l’aviation ennemie. La liaison de l’observateur avec le camion se fait par téléphone. Une mitrailleuse et un parachute complètent l’équipement de la nacelle. La défense du ballon est assurée par une section de mitrailleuses installée à proximité du camion.
Le lieu d’ascension est en général à environ 4 km en arrière du front, l’altitude variant entre 800 et 1200 m en fonction de la météo. En condition de visibilité normale, l’observateur muni de puissantes jumelles peut surveiller le front sur une profondeur de 8 à 16 km en arrière des lignes ennemies. Les missions peuvent parfois durer tout le jour.

A l’aube du 7 juillet, l’escadrille apprend que le cpt Gond a abattu un appareil ennemi qui effectuait une reconnaissance vers Bîrlad.
Au cours de la matinée, Nicolau prend contact avec le poste-antenne et les batteries d’artillerie pour lesquelles il doit effectuer deux missions de réglage le lendemain. Ce afin de mettre au point les détails des missions.

Le soir, les équipages apprennent que les ballons des compagnies d’aérostation 2 et 5 ont été attaqués par un ennemi extraordinairement agressif. Celui de la 5e Cie a été incendié, le lt obs. A. Secarescu a pu sauter en parachute et s’en sortir indemne.
Les attaques de l’aviation ennemie ont eu le soutien de l’artillerie qui à matraqué la position du camion-treuil.

Etant donné que les deux escadrilles sont installées sur le même aérodrome, les équipages de la F7 rencontrent ceux de la F9, récemment créée. Les missions de cette dernière consiste en des réglages d’artillerie lourde et des reconnaissance photo des objectifs de sa zone d’action.
Au début les missions de réglages de la nouvelle escadrille ont été laborieuses et peu efficaces, en partie à cause du poste-antenne et du manque d’expérience des observateurs à peine sortis de l’école de Botosani. Nicolau souligne qu’il faut tout de même citer le cpt Gh.Marinescu, très demandé pour les reconnaissances. Ainsi que la bonne humeur du lt Virgil Radulescu et du slt Marcel Popescu qui mettent une bonne ambiance au sein de cette unité.

Le 8 juillet, à 6h, Constantin décolle avec le lt Olanescu comme pilote. Mission : réglages d’artillerie. Après vérification de la TSF, ils prennent la direction du front. Une première pour lui et pour les artilleurs. Le vol se fait à une altitude de 1 200 m. Le ciel est bien dégagé. Pas d’appareils ennemis en vue. La patrouille de protection fait son apparition. Olanescu rouspète après les gars de la chasse qui ont encore du se lever plus tard.
Scrutant le secteur, il n’y a aucun mouvement ennemi à signaler. Pas même un ballon. Le Farman franchit alors les lignes ennemies afin d’aller identifier les objectifs et bien entendu il est accueilli par une puissante DCA. Nicolau prend ensuite contact avec le poste-antenne. Comme convenu, il commande le feu de la première batterie. Par rapport à son plan directeur, la salve de 4 coups tombe 200 m au-delà de la cible et une centaine de mètre à droite. Il donne les corrections et continue le réglage. A la troisième salve l’objectif est encadré.
Avec la deuxième batterie, les choses se passent de la même façon. Cela semble même trop simple à Constantin. Au bout d’1h45 la mission est terminée. Constantin aperçoit alors 2 avions à l’horizon. Il s’empresse de ranger l’antenne et s’empare de la mitrailleuse. Le pilote qui a vu lui aussi les appareils lui fait signe de se calmer. Ce sont des Nieuport. La patrouille de couverture.
Le lt Olanescu devient nerveux et demande à Nicolau s’ils peuvent rentrer, où s’il a encore à faire. Ce dernier lui fait comprendre que la mission est terminée, mais lui demande si avant de quitter le front, il peut refaire un tour derrière les lignes ennemies afin de mieux pointer le détail des défenses sur les arrières du front allemand. Olanescu est excédé et fatigué mais accepte. Ils viennent juste de franchir les lignes que Nicolau jette un œil au poste-antenne. Ce dernier signale « avions ennemis ». L’observateur s’empare alors de la mitrailleuse, geste qui n’échappe pas à Olanescu. Constantin lui montre le signal au sol du poste-antenne et les deux scrutent le ciel. Ils n’aperçoivent cependant rien du tout. Leur escorte a disparu et le poste-antenne maintient le signal « avion ennemis ». Jetant un coup d’œil en-dessous, en direction des lignes amies, Nicolau aperçoit soudain un appareil volant vers eux et le désigne au pilote. Ce dernier vire vers les lignes roumaines et descend brusquement jusqu’à 500 m. Entretemps la DCA roumaine, prend l’allemand pour cible et il rejoint ses lignes. A l’atterrissage, Constantin note avec satisfaction qu’Olanescu semble content du comportement de son jeune observateur au cours de la mission.

Plan directeur du secteur de la Namoloasa
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Au cours de la même matinée, le cpt Goulin et le slt Dumitrescu effectuent des photos du centre de résistance ennemi de Gîrlesti ainsi que les positions amies et ennemies de Fundeni.

Le soir, Nicolau, avec d’autres aviateurs de l’escadrille, accompagne le cpt Goulin au PC des 13e et 14e divisions pour planifier les missions des 9, 10 et 11 juillet. Alors qu’ils se trouvent au bureau des opérations de la 13e DI, l’ennemi déclenche un puissant bombardement qui s’étend des premières lignes aux positions d’artillerie. Les batteries roumaines ripostent. Le bombardement s’intensifie.
En ce qui concerne les missions à venir : deux équipages devront se tenir prêt en permanence afin d’exécuter sur ordre des surveillances de secteur, des réglages ou des reconnaissances photos.
Les aviateurs se rendent ensuite à la 14e DI, dont les requêtes sont similaires.
Vers 20h, le bombardement ennemi cesse brusquement. Les batteries roumaines se taisent également. Les Français pensent que les Allemands ont agi ainsi afin de pousser l’artillerie roumaine à se découvrir.

Le soir, le communiqué allemand capté sur le poste de l’escadrille annonce que les troupes russes des fronts de Bucovine et de Galicie ont reculé d’une centaine de kilomètres.

Le 9/22 juillet 1917, débutent les préparations d’artillerie. En début de matinée, tout le personnel navigant se trouve soit dans la salle des observateurs, soit à la section photo. Tous préparent fébrilement les missions en attendant les ordres de décollage.

Depuis l’aube, l’artillerie roumaine pilonne les positions ennemies. Les Allemands ripostent et le duel d’artillerie est si puissant que les vitres du terrain vibrent. Les visages des aviateurs sont fermés et tendus.
Le cpt Goulin ordonne au slt T. Dumitrescu de se tenir prêt à partir pour faire des photos panoramiques à grande échelle des premières lignes des 13e et 14e DI. Ensuite, il donne les ordres pour les missions suivantes qui devront être exécutées dans le courant de la journée.

Nicolau est convoqué chez le commandant d’escadrille qui lui explique que, dans l’après-midi, il devra exécuter une mission de réglage et de contrôle de tir au profit de la 13e DI, comme convenu la veille. Son pilote sera encore le lt Cicerone Olanescu. « Encore ! », s’exclame Constantin qui s’étonne d’avoir toujours le même pilote. Il obtient pour tout commentaire un « Bien sûr » appuyé de Goulin. Ce dernier précise que tous les vols seront protégés par la chasse. Nicolau se sent encore mis en quarantaine par les pilotes français qui le considère comme étant trop jeune ou trop inexpérimenté. C’est donc Olanescu qui fait le pilote pour Motas et pour Nicolau. Et elles vont être nombreuses au profit des 13e et 14e DI. Mais Nicolau, tout à la préparation de sa mission, n’a pas le temps de s’arrêter à ces considérations.
Il se rend à la section photo et se muni des clichés quadrillés des cibles, en vue de déterminer les déviations des obus. En chemin vers le labo, il a croisé le slt Dumitrescu allant vers son appareil avec un appareil photo. Extrêmement fatigué, méconnaissable.

Peu après, arrive Motas qui part avec Olanescu faire un réglage pour la 14e division.

Après avoir préparé sa mission, Nicolau se rend sur le terrain accompagné de Idier, afin d’attendre le retour des équipages. Le premier à apparaître est celui de Goulin et Dumitrscu. Le capitaine, d’habitude fort avare de parole déclare : « C’est un bombardement qui me rappelle les grandes préparations d’offensive sur le front français. ». Dumitrescu ajoute un laconique : « c’est terrifiant ! ».

Lorsque vient l’heure de la mission, c’est avec un lt Olanescu extrêmement fatigué que décolle Nicolau. Alors qu’ils s’approchent des lignes, ils assistent au tonnerre de fer et de feu qui s’abat sur sol. Olanescu vole à 1500 m et le bruit des explosions est tout de même assourdissant. Ils arrivent dans le secteur de Hanul Conachi. Les 3 lignes ennemies sont battues par le feu des batteries roumaines. De même que les lignes roumaines sont contrebattues par les tir allemands avec une égale intensité. Vers le sud en arrière des lignes ennemies, le centre de résistance ennemi de Gîrlesti n’est plus qu’un brasier, secoué par des explosions.

Afin de pouvoir identifier les objectifs pour le réglage et le contrôle des tirs, l’équipage doit perdre de l’altitude. Nicolau doit régler les tirs sur un nid de batteries qui se situe au sud-est de Crîngeni, entre les premières et deuxièmes lignes ennemies. Il doit également contrôler quelques tirs de deux batteries roumaines sur les deuxièmes nœuds de tranchées de la deuxième ligne de résistance qui se situe aussi au sud de Crîngeni. La fumées et la poussière soulevées par les tirs d’artillerie rend l’identification et le réglage difficile, voire impossible. Coup de chance un vent léger déplace la fumée et avec l’aide des photos du secteur qu’il a prise avec lui, Nicolau parvient à se repérer. Avec l’accord du pilote, ils descendent à 800 m.
Avant de franchir les lignes ennemies, Constantin scrute le ciel, il aperçoit, arrière du front, 2 ballons ennemi protégés par 3 avions. Au-dessus du Farman, l’escorte est bien là. Se retournant vers son pilote, il le trouve pâle et tendu.
En route vers l’objectif, l’avion est secoué par les trous d’air, provoqués par le souffle des explosions. La DCA se met de la partie. Après identification des objectifs, Olanescu ramène l’avion au-dessus des lignes roumaines et Nicolau prend contact avec le poste-antenne. Le réglage commence… et fini plus rapidement que Constantin ne le pensait. Il passe ensuite au contrôle des tirs. De tension et de fatigue, ses jambes tremblent. Une fois terminé, il demande au pilote de faire deux passages le long du front afin de voir l’effet des bombardements sur les tranchées amies. Mais le lt Olanescu, en pilote avisé lui fait signe que la mission est terminée. A l’atterrissage, ce dernier le prend à part et lui dit que son attitude ne relève pas du courage mais de l’inconscience. Nicolau pense alors que si Olanescu en parle aux autres, personne ne voudra voler avec lui
.
Le cpt Goulin arrive sur ces entrefaites est demande à Olanescu comment s’est passé la mission. Ce dernier, au grand soulagement de Nicolau, réponds que tout s’est déroulé normalement.

Un des Nieuport de la N3 : le "chat noir" de l'adjudant Texier
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Le 10 et le 11 juillet, les équipages sont sollicités jusqu’à épuisement, surtout pour des réglages.

Le 10 juillet, le slt Dumitrescu s’évanouit en descendant de l'avion au retour d’une reconnaissance photo.

L’étude des dernières photos montre que la destruction des systèmes de défense ennemis est incomplète. Cela est immédiatement rapporté à la Ière armée. Cette dernière décide de prolonger de 24 heures les préparations d’artillerie.

En Galicie et en Bucovine, l’offensive austro-allemande n’a pas pu être stabilisée.

La préparation d’artillerie continue donc le lendemain, et les tirs allemands, en revanche faiblissent.

Le communiqué du soir annonce que dans le secteur de Marasti, la IIeme armée du général Avarescu a lancé son offensive comme prévu. Les Roumains ont gagné du terrain. Les combats vont continuer jusqu’au 19 et conduiront à la rupture du front ennemi sur une largeur de 30 km.

Malheureusement, le haut commandement russe ordonne à ses armées du sud de cesser tout préparatif d’offensive. En conséquence l’offensive de la Namoloasa est ajournée.
Dans les jours suivant, la météo devenant mauvaise, les équipages bénéficient d’un peu de repos. Quelques-uns d’entre eux, partent rendre visite aux compagnies 3 et 5 d’aérostation à l’est de Blehani. Le cpt met à leur disposition la camionnette de l’escadrille pour le trajet.
La 3e cie est commandée par le lt Scarlat Radulescu. Au sein de cette cie se trouve le lt Mihail Vitu, décoré le 11 juillet pour avoir découvert le même jour 8 batteries d’artillerie lourde en pleine action.
A la 5e Cie, le slt Aurica Secarescu, raconte son premier saut en parachute : Absorbé par l’observation du secteur ennemi, il a soudain entendu des sifflements. Les mitrailleuses de DCA, chargée de la défense du ballon se sont déchaînées et il a vite compris qu’il était attaqué par un avion. Ce dernier surgissant du soleil, il l'a vu au dernier moment. Il a juste eu le temps de tirer une rafale sur l’appareil ennemi, puis avant que le ballon ne prenne feu il a abandonné la nacelle et s’est bien reçu sur le sol.

Nicolau apprend aussi que le 10 juillet le ballon de la 4e cie a été attaqué à deux reprises. A la dernière attaque le câble a été sectionné et le ballon est devenu libre. Il a commencé à s’élever et se diriger vers les lignes ennemies. Le slt Dan Badarau a sauté de la nacelle crevant dans le même temps le ballon pour ne pas qu’il tombe aux mains de l’ennemi avec les documents se trouvant dans la nacelle.
L’aérostier s’est bien reçu et la nacelle est tombée dans les lignes roumaines.

Le 15/28 juillet, des reconnaissances aériennes signalent des mouvements de concentrations de troupe dans la zone au nord de Focsani, face à la IVeme armée russe.
Entretemps, l’escadrille a reçu l’ordre de déplacer tous les jours deux avions et leur équipage sur le terrain de Tecuci. Au cours du déplacement, tous les matins, un observateur doit faire une reconnaissance du secteur ennemi de la Putna.
C’est ainsi qu’un matin, Nicolau se retrouve à effectuer une reconnaissance du secteur, entre la voie ferrée Focsani-Marasesti et le Siret. Normalement le secteur dépend de la F4 qui travaille pour la IVème armée russe. La DCA ennemi réagit sporadiquement et Constantin aperçoit juste un avion allemand qui patrouille dans le secteur de la côte 1001 au nord de Focsani.
Le secteur est surveillé par des ballons. Deux d’entre eux se trouvent au nord de la voie ferrée Focsani-Marasesti, et commencent à descendre à l’approche de l’appareil roumain. Comme Constantin ne voit pas d’objectif approprié, il largue quelques projectiles de 75 sur le ballon le plus à l’est. Sans résultat. (à chaque vol, il prend obligatoirement ces obus de 75 - sic).

Le 17/30 juillet, l’ennemi attaque dans le secteur de Putna Seaca et les troupes russes se replient légèrement sous la pression. L’attaque ne reprend pas le lendemain.

Le dernier communiqué allemand leur apprend que la situation en Galicie et en Bucovine est très grave. L’aile droite de l’armée russe des Carpates est menacée d’encerclement. La conséquence directe de cette menace est l’arrêt de l’offensive de la IIème armée roumaine.

Afin de contrecarrer l’avance austro-allemande en Bucovine le haut commandement russe décide de constituer un groupe de forces, dont doit faire partie la IVème armée russe qui tient le front de Putna, entre le Siret et la village de Muncel. La Ière armée roumaine devant reprendre le front à sa place. Les unités de la Ière armée roumaine doivent se déplacer de nuit en direction de Tecuci.

La 5e division du général Razu est la première grande unité à traverser le Siret afin de remplacer la 34e division russe. Elle se déploie sur la rive nord de la Putna, du Siret jusqu’à la voie ferrée Focsani-Marasesti. La permutation se fait dans la nuit du 24 juillet.

Le 23 juillet, deux nouveaux pilotes se présentent à l’escadrille :
- L’adjudant A Sisu
- L’adjudant Stefan Iliescu (Chibrit : surnom « Allumette »)

Nicolau remarque que cela va alléger la tâche du lt Olanescu.

L'Adjudant A. SISU
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(A suivre : CHAPITRE V : LES BATAILLES DE MARASESTI)

Re: Mémoires d'un aviateur roumain

Publié : mer. mars 13, 2013 1:41 pm
par yox
CHAPITRE V : LES COMBATS DE MARASESTI (1ère partie)

A l’aube du 24 juillet/6 août les puissantes explosions des bombardements font trembler l’air. A 05h30, Nicolau décolle avec l’adjudant A. Sisu comme pilote. Avec d’autres équipages, ils se dirigent vers Tecuci en suivant la ligne du Siret.
Ils évoluent à environ 500 m d'altitude. En arrivant à la confluence du Siret et de la Putna, Nicolau réalise tout de suite de quoi il est question. Les Allemands bombardent violemment les positions et les batteries russes sur la Putna.
Puis ils se posent à Tecuci. Là, tout le monde pense que l’attaque est imminente et se demande si les Russes sont en mesure de résister.

Vers 09h30 l’équipage adj. R. Vîscea/lt Ermil Gheorghiu (de l’escadrille F4, affectée à la IVè armée russe) se pose à Tecuci et rapporte au Grupul 2 Aero que les lignes de la 34e division russe sur la Putna ont été enfoncées et que les troupes se replient en désordre.
Le Cpt Gafencu (escadrille F7) est immédiatement envoyé pour vérifier et à son retour il confirme l’information. Sur le front le bombardement continue. Au repas de midi, la popote du groupe est silencieuse. Outre le manque de nourriture, les équipages apprennent que dans la ville voisine, les civils commencent à faire leurs bagages.

L’après-midi, les aviateurs sont informés que l’ennemi a déclenché une attaque sur la 34e division russe avec des moyens supérieurs. Cette dernière surclassée s’est retirée (une partie de ses soldats sont passés sur la rive gauche du Siret, via les ponts de Ciuslea et Cosmesti). Après le passage le premier pont a été incendié par les Russes. Le deuxième est sauvé de la destruction par l’intervention des troupes roumaines. La division a perdu dans sa retraite presque toute son artillerie, les chevaux ayant été gazés au cours des bombardements. Les Allemands ont tenté de traverser le Siret à la suite des Russes, d’abord dans le secteur Padurea-Neagra (forêt Noire) au sud de Ciuslea, puis à Cosmesti. Ces tentatives ont été repoussées par les troupes roumaines. La situation est critique car l’offensive ennemie a surpris les roumains en plein déplacement.

Par une prudence (voisine de la panique selon Nicolau) l’escadrille N3 part pour le terrain de Bîrlad.
Le Cpt Goulin prend contact avec la 5e division dont le PC est établi à Cosmesti. Il apprend que les régiments 32 Mircea et 8 Buzau doivent commencer à traverser le Siret à la tombée de la nuit afin de prendre en charge le front tenu par les restes de la 34e division.

La division roumaine demande à l’aéronautique des missions pour le 25 juillet au matin :
- Repérer les premières lignes sur lesquelles se sont positionnées les unités roumaines
- Surveiller le secteur en permanence afin de signaler toute nouvelle tentative ennemie
- Signaler tout objectif important à l’artillerie divisionnaire

En début de matinée, Nicolau reçoit sa mission au profit de la 5e division. Peu après son arrivée à Tecuci il devra collecter les derniers renseignements sur la situation du front et exécuter sa mission. Son pilote sera l’adj. Av St. Iliescu.

En fin de journée, ils retournent à Calmatui, volant très bas au-dessus de la chaussée de Tecuci à Ivesti. Ils aperçoivent alors de nombreuses colonnes s’écoulant vers le nord.

Au repas du soir tout le monde est silencieux. L’ambiance est lourde. Nicolau et Motas décident de préparer leurs bagages, car selon eux, dans peu de temps ils vont avoir à retourner sur le terrain de Tecuci.
Constantin ne parvient pas à trouver le sommeil et passe une nuit blanche.

Au matin suivant, il reprend le chemin de Tecuci par la voie des airs. En chemin, il voit les dernières troupes de la 5e division traverser le Siret à Cosmesti. Les soldats saluent les aviateurs de leurs couvre-chefs. L’équipage se pose à Tecuci et prépare la mission du jour :
- Déterminer la limite de progression des unités de la 5e division (d’après les derniers renseignements la zone probable du front serait Ciuslea- Bizighesti)

Le plafond nuageux est bas. Le pilote est Stefan Iliescu : c’est son premier vol sur le front. Après le décollage, un tour de terrain pour vérifier la TSF, puis direction Cosmesti. L’appareil vole à environ 300 m. Sur la zone du front il n’y a pas d’avion dans le ciel. Nicolau reste vigilant, car il n’y a pas de protection de chasse. Le pilote prend un peu d’altitude. Après quelques passages au-dessus du secteur où il pense trouver les unités roumaines, Nicolau ne voit toujours rien. Il demande alors le marquage des lignes avancées par fusée. Rien ne se passe. Il réitère sa demande à plusieurs reprise et, enfin apparaissent des panneaux étendus sur le sol. Ils partent du Siret, de la droite du village de Furceni et passe au sud de Doaga, au nord de Strajescu, continuent par Gîrla Morilor, Moara Alba et le sud de Bizighesti.
Entre Doaga et Moara Alba on devine déjà des éléments de tranchées (à peu près continus). De là, vers Moara Rosie, de manière discontinue des trous font le lien (probablement des emplacements individuels).
Les allemands se sont cependant avancés le long du Siret de quelques 10 km. Et Nicolau est surpris de constater qu’ils occupent le village de Strajescu, qu’on lui avait dit occupé par les Russes.
Constantin esquisse la ligne de front sur le plan directeur. Le pilote est tendu, mais la DCA les ignore le plus souvent. L’observateur ébauche ensuite un communiqué qui décrit la situation et le transmet par TSF. En proie à une certaine tension, il a du mal à manipuler. Aussi pour plus de sûreté (il ignore l’état des communications au sol), il rédige un message lesté qu’il largue au-dessus du PC de la division à Cosmesti.
Revenus sur les premières lignes, il commence la surveillance du secteur. A l’Ouest de Padurea-Neagra, il aperçoit des troupes. Pendant ce temps, les tirs ennemis s’intensifient et en peu de temps les préparations d’artillerie donnent à plein. Nicolau peut ainsi identifier les batteries ennemies apparues sur de nouvelles positions après l’avancée ennemie qui a fait suite à la rupture du front. Une attaque semble imminente. Chez les Roumains les tirs d’artillerie jusque-là sporadiques s’intensifient. Nicolau rend compte par TSF. Après quelques passages le long du front, ils rentrent au terrain.

Le commandant de l’escadrille est satisfait des résultats de la mission. Le poste-antenne a très bien fonctionné. La mauvaise météo ne permet pas d’autres vols jusque dans l’après-midi.

Dans la soirée Nicolau apprend que le Slt Marin Popescu de la N11 (créée il y a juste un mois) a abattu sur la Putna un appareil ennemi en mission de surveillance.

Le lendemain, l’équipage Bonneton-Nadervell (C12 ?) parti en reconnaissance au profit du Corps d’Armée intervient pour aider un ballon roumain attaqué par un appareil allemand. L’allemand est abattu.

Un appareil envoyé en surveillance signale que les attaques ennemies sur l’aile droite de la 5e division (à la jonction avec la 71e division russe) sont paralysées par les tirs de l’artillerie roumaine. Pendant ce temps l’artillerie ennemie commence à bombarder le pont de Cosmesti.

Vers midi la division demande d’envoyer en urgence un autre équipage afin d’assurer une surveillance continue du secteur. Nicolau est désigné avec l’adj. Sisu comme pilote. Le cpt Goulin lui explique qu’il l’a désigné car c’est lui qui a identifié les lignes roumaines la veille et qu’il les connaît. La mission sera protégée par une patrouille de la N3.

Décollage vers 11h30. Au-dessus de Cosmesti, l’équipage scrute le ciel à la recherche d’éventuels avions ennemis. Plus haut, ils aperçoivent un F 40, qui opère certainement au profit de l’artillerie lourde. En arrière des lignes ennemies se balancent trois ballons et, plus loin, il voient un avion dans le secteur de la côte 1001.
Parvenu au-dessus de la zone de front de la 5e division identifiée la veille, le Farman se trouve à 800 m d’altitude. Les artilleries amies et ennemies tirent de toutes leurs pièces provoquant un grondement continu assourdissant. Le terrain en dessous d’eux, secoué par des explosions, est recouvert en partie par des nuages de fumée jaune-noir qui s’élèvent à haute altitude.
Nicolau demande à Sisu de descendre afin de mieux y voir. Ils descendent à environ 400 m le long de Gîrla Morilor. L’observateur se rend alors compte clairement d’après les explosions des projectiles que les positions ne sont plus les mêmes que la veille. Le même problème d’identification des lignes que la veille se présente. Nicolau tire trois fusées : sans résultat. Il tente alors de s’orienter par rapport aux explosions. Il devine au sud-ouest de Padurea Calin (forêt Calin) et au sud de la lisière de la forêt Prisaca, des éléments de tranchées avec un réseau de barbelés déjà installé. Le tout est battu par l’artillerie. Il s’agit assurément des premières lignes roumaines. Peu après les tirs d’artillerie ennemis s’allongent et, de Gîrla Morilor et du nord de Bizighesti, des vagues d’allemands se lancent à l’assaut.
Au fur et à mesure de l’avancée des attaquants, l’artillerie et les mitrailleuses réduisent leurs tirs et ceux qui parviennent jusqu’à ce qui reste du réseau de barbelés sont anéantis dans des combats au corps à corps avec les Roumains. En arrière, les colonnes de réserves qui arrivent rapidement à l’aide des attaquants, sont prises à partie par des tirs de flanc de l’artillerie roumaine. Elles essuient des pertes sévères. L’artillerie allemande effectue à son tour un tir qui retourne les lisières de l’ouest au sud de la fôret Calin et au sud de la forêt Prisaca, afin d’empêcher tout mouvement des réserves roumaines.
L’équipage se dirige vers le poste-antenne de la division (problème de portée ?) et rapporte la situation par TSF. Ensuite il retourne sur le front afin de suivre les combats plus loin sur l’aile gauche, dans le secteur de Doaga. C’est à ce moment qu’ils sont attaqués par un avion ennemi qu’ils n’avaient pas vu approcher. Sisu sans perdre son sang-froid, vire brusquement et, à la surprise de Nicolau, se retrouve dans le dos de l’attaquant. Nicolau utilise alors sa mitrailleuse, se fiant aux traçantes pour ajuster son tir. L’ennemi en mauvaise posture rompt le combat et s’éloigne en direction de Focsani.
De retour dans le secteur de Doaga, ils assistent au bombardement des villages de Strajescu et Doaga par l’artillerie roumaine. Les Allemands ripostent en matraquant la lisière sud de la forêt de Prisaca et relancent une attaque sur les tranchées improvisées roumaines au sud de cette lisière. Les vagues d’assaut progressent par bonds, suivis à distance par les colonnes de réserve. Les deux aviateurs sont impressionnés par l’ordre et le calme dont font preuve les attaquants soumis pourtant à un feu d’enfer en terrain découvert. Aucun d’entre eux cependant ne parvient jusqu’au réseau de tranchées roumaines. Nicolau rapporte la situation par message lesté, puis montant à 500 m l’équipage se dirige sur l’aile droite de la division où il n’y a rien à signaler.

Après quelques passages supplémentaires, retour au terrain. Là Nicolau découvre que les ailes et la carlingue sont transpercées d’impacts de balles. Certains très près de la place de l’observateur. Constantin entre alors dans une colère noire en vitupérant à l’encontre de l’escorte de chasse qui devait les protéger. Goulin, assistant à la scène, se fait traduire les propos de Nicolau et explose d’un « rire homérique » (sic).


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Sur le front, le bombardement continue et le soir les équipages apprennent qu’une nouvelle attaque allemande a eu lieu à la jonction de la 5e division roumaine et de la division russe. Cette dernière a été forcée de se replier sous le choc. La catastrophe a pu être évitée uniquement suite à l’intervention d’un régiment de la 9e division roumaine qui avait fait passer une partie de ses unités sur la rive droite du Siret.

Revenus à Calmatui pour le repas du soir, les équipages fêtent les vainqueurs des allemands abattus.

A l’aube du 27 juillet/9 août, ils sont de nouveau à Tecuci. La météo est mauvaise. Les équipages sont mis au courant de la situation sur le front. La 9e division a commencé depuis la veille à occuper le front. Elle s’est installée depuis le sud de la forêt de Calin, jusqu’à la voie ferrée Focsani-Marasesti. Sur la rive gauche du Siret, les batteries roumaines se sont mises en position de Cosmesti jusqu’à Movileni. Elles peuvent ainsi battre le flanc de tout le secteur compris entre Gîrla Morilor – Village de Doaga – Strajescu – Padurea Neagra (forêt Noire).

La vie des équipages est devenue une accumulation de temps de permanence et de moments de tension sans fin. Ils vivent au rythme des combats sur le front et des communiqués.

Dans la nuit du 27 au 28, les divisions roumaines subissent plusieurs assauts. Les attaques et les contre-attaques se succèdent jusqu’au jour mais l’ennemi ne parvient pas à percer. Il semble cependant qu’il y ait de grandes pertes de chaque côté.

Les 28 et 29 juillet voient l’offensive de la Ière armée. Mais le 28, les objectifs ne sont que partiellement atteints. La 5e division n’a pas pu occuper le village de Doaga et la 9e n’a pas été en mesure d’atteindre la rivière Susita. En partie parce que les défenses ennemies, bien que faites à la hâte, n’ont que partiellement été détruites par les préparations d’artillerie.

Le 29 juillet, les objectifs ne sont pas atteints non plus. La division russe, sur l’aile droite de la 9e division a été attaquée en force par les Allemands, une demi-heure avant le déclenchement des opérations roumaines. Les russes se sont repliés découvrant ainsi le flanc de la 9e division. La situation n’a pu être rétablie que grâce à l’intervention des réserves.

Sur ces deux jours, la F7 exécute des missions de reconnaissance photo des lignes ennemies faisant face aux divisions roumaines, des réglages d’artillerie, des contrôles de tir. De plus les équipages effectuent une surveillance permanente du champ de bataille et des missions de liaison avec l’infanterie pendant les attaques.

Afin d’identifier les premières lignes et suivre les phases d’attaque, les équipages doivent voler en-dessous de 300 m, en partie à cause des nuages de fumée qui recouvre le terrain. Ils parviennent avec difficulté à suivre ce qui se passe au sol. En plus du danger de la DCA, les vols se font dans un espace quadrillés par les projectiles d’artillerie amie et ennemie qui peuvent percuter à tout moment les appareils.
Au cours des deux jours, les missions se succèdent à un rythme effréné, amenant les équipages à la limite de l’épuisement. Les missions sont facilités cependant par la chasse qui assure une protection permanente.
La tension nerveuse et une dysenterie qui n’épargne personne affaiblissent sérieusement les aviateurs.
Les vols de reconnaissance et de surveillance de secteur, effectués sur les arrières de l’ennemi, signale de nombreux parcs, bivouac et mouvements sur la chaussée Focsani – Marasesti. Les premières lignes roumaines sont soumises à un bombardement incessant.

Au soir du 30 juillet/12 août, les aviateurs apprennent que la général Grigorescu, commandant le 6e corps d’armée à remplacé le général Cristescu au commandement de la Ière armée. On reproche à se dernier un manque de décision dans la conduite de l’offensive. Nicolau trouve cela injuste.


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Re: Mémoires d'un aviateur roumain

Publié : jeu. mars 21, 2013 12:31 pm
par yox
LES COMBATS DE MARASESTI (2eme Partie)

Conformément aux nouvelles dispositions, la Ière armée est subordonnée au général Ragoza, commandant la IVème armée russe.
Au fur et à mesure des missions d’observation, les équipages suivent l’évolution des combats au sol. Le résumé de leurs impressions est le suivant :
- Les Allemands ont eu tout le temps l’avantage de l’initiative et leur offensive a surpris la Ière armée en plein mouvement.
- Dans ses attaques l’ennemi a réussi à avoir à chaque fois la supériorité numérique en hommes et des concentrations d’artillerie assurant une plus grande densité de feu (si , en général, les tirs allemands sont moins précis que ceux des roumains, le manque de précision est compensé par la densité)
- L’aviation de chasse allemande est présente en permanence sur le front. Elle est très agressive vis-à-vis des ballons alliés, en revanche prudente lorsqu’il s’agit de s’en prendre au avions d’observation.
- En raison des nombreuses « défections » (sic) des Russes, la Ière armée n’a pas eu le temps de concentrer ses forces et a été obligée de détruire les divisions les unes après les autres dans d’épuisants combats défensifs.
- Le commandement roumain a eu la bonne idée d’installer son artillerie lourde sur la rive gauche du Siret, ainsi qu’une partie de l’artillerie divisionnaire. De cette façon, elle a pu effectuer des tirs en enfilade d’une redoutable efficacité qui ont paralysé ou fortement gêné les attaques de l’infanterie allemande face au 5e et 9e divisions et ont rendu impossible la réalisation d’une tête de pont le long du Siret, jusqu’à Cosmesti.
- Les Roumains sont sortis vainqueurs des corps à corps
- Les offensives alliées du 28 et 29 juillet ont usé l’ennemi et ne lui ont pas permis de reprendre les opérations en vue de percer le front.

Le 31 juillet/13 août, dès le début de la matinée, les bombardements allemands reprennent. Des reconnaissances aériennes rapportent que l’ennemi attaque en force, en particulier dans le secteur russe entre Razoare et Panciu.
Dans la soirée, on informe les équipages que les attaques contre les 5e et 9e divisions ont été repoussées. En revanche, sur l’aile droite de la 9e, les Russes ont cédé et l’ennemi est parvenu jusqu’à la ligne Marasesti – Panciu. La situation est grave pour les alliés.

De plus, le général Ragoza, estimant qu’il ne peut plus tenir les lignes qui ont été enfoncées par la dernière offensive allemande, décide un repli général. Il ordonne ainsi à la Ière armée roumaine d’abandonner ses lignes dans le cours de la matinée et de prendre position à environ 7 km au nord de Marasesti.

Le général Grigorescu, complètement surpris, argue que l’ordre est inexécutable en plein jour et demande au GQG de revenir sur cette décision, parce qu’il prend la responsabilité de résister sur sa position actuelle.
Le haut-commandement et le GQG, valide la décision et retire la Ière armée de sous les ordres de Ragoza. Grigorescu reprend le commandement de son armée et on lui subordonne même le 8e corps russe qui occupe le front entre Padurea Razoare et Muncel.

Le 7e corps russe va se retiré du front étant remplacé par les 10e et 13e divisions roumaine.

Le matin du 1/14 août, alors que Nicolau arrive à Tecuci, l’ennemi bombarde la rive gauche du Siret, le pont de Cosmesti. De plus des projectiles isolés tombent sur Tecuci. Selon Nicolau, c’est l’une des raisons qui fait que l’escadrille est toujours basée à Calmatui.

Un équipage envoyé en mission de reconnaissance au-dessus des divisions roumaines, rapportent que l’artillerie ennemie effectue des réglages d’artillerie sur les premières lignes de la 5e division. En revanche aucune attaque, ni mouvement de troupe n’a été aperçu.

Cependant vers 9h, les tirs d’artillerie ennemis s’intensifient. Il s’agit sans aucun doute de la préparation d’artillerie précédant une attaque. Il semblerait que les Allemands veuillent à nouveau tenter de s’emparer du pont de Cosmesti.
Dans la soirée, l’équipage adj. Sisu/Slt Pascanu, sorti en reconnaissance photo dans la région de Marasesti-Panciu, rapportent que le bombardement ennemi, très violent, couvrant de fumée toute la zone, ils ont dû descendre pour tenter d’y voir quelque chose. Ils ont pu se rendre ainsi compte que les positions de défense des divisions ont été retournées par les obus et qu’au nord de la forêt Prisaca ont lieu des combats. Sous la pression de l’ennemi les roumains ont abandonnés la forêt.
Le rideau des explosions s’étend plus au nord sur le village de Cosmesti din Vale, ainsi que sur le pont, afin d’empêcher le mouvement des réserves. Aucune liaison avec l’infanterie n’a été possible. Les deux aviateurs ont rapporté la situation au PC par message lesté.

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Avant de décoller pour rentrer à Calmatui, Nicolau apprend que dans l’après-midi, les Allemands ont encore durement attaqué à la jonction entre la 13e division et le 8e corps russe. Pendant le vol de retour, l’équipage fait un détour par Cosmesti. La forêt Prisaca et Cosmesti din Vale sont engloutis par les nuages de fumées des explosions de l’artillerie lourde.

Le lendemain, à l’aube, retour à Tecuci. Là, ils sont informés des événements de la veille. La veille à 19h30, les Allemand ont donc attaqués sur le front de la 5e division, et sont parvenu à percer. Au cours des combats et des contre-attaques désespérées, la division a été quasiment anéantie. L’intervention de la 14e division se trouvant sur la rive gauche du Siret, réussit cependant à stopper l’offensive ennemie et à rétablir le front entre le Siret et la lisière ouest de la forêt Calin (où se trouve l’aile gauche de la 9e division).
La forêt Prisaca a été perdue, mais le pont n’a pas été pris et à l’aube les troupes roumaines l’ont fait sauter.

Les jours suivants, l’escadrille surveille avec attention l’activité ennemie sur le front du 5e corps.

Le 3/16 août est « un jour de deuil pour l’aviation roumaine » (sic). L’adj. av. français Jean texier (N3) est grièvement blessé en combat aérien contre 3 appareils ennemis. Il réussit à ramener son appareil en arrière des lignes amies, mais après l’atterrissage il est retrouvé mort dans la carlingue. Sa disparition a été durement ressentie. Il avait à son actif deux appareils ennemis abattus.

Le même jour, le cpt Gond, commandant la N3, abat un avion ennemi, au-dessus de Bîrlad.

Ce qui reste de la 5e division, retirée du front pour être mis au repos et combler les pertes, passe sur la droite de l’aérodrome de Tecuci. Les chefs de la division ont souhaité défiler devant les équipages et les appareils afin de leur rendre hommage. Les aviateurs sont extrêmement touchés par ce geste.

Finalement l’escadrille reçoit l’ordre de retourner à Tecuci. Ce qui arrange les équipages qui gagne ainsi 2 heures de sommeil par jour.

Dans la soirée, le personnel navigant des escadrilles F7, F9, C12, N3, N11, les aérostiers, ainsi que les équipages de la F4 (retiré à la IVè armée russe et mis à la disposition de la Ière armée roumaine) est convoqué au groupe. On les renseigne sur la situation du front.
Ils apprennent ainsi que les troupes roumaines se préparent à la contre-offensive. La F7 est affecté aux divisions du 5e Corps d’armée (9e, 10e, 13e et potentiellement 14e). Avec la 4e compagnie d’aérostation (installée à Pufesti), elle doit satisfaire à toutes les demandes de réglage des batteries des Groupes d’artillerie lourde (installées au nord de la forêt La Razoare, en arrière de la côte 100).

La réunion se passe dans la bonne humeur générale elle permet à tous les aviateurs affectés à la Ière armée de se retrouver tous ensemble. Les pilotes de chasse ont amené avec eux , leur exubérance et leur bonne humeur habituelle.
Aux côtés des pilotes français, se trouvent les pilotes roumains de la N11, créée il y a tout juste un mois, sous le commandement du cpt Protopopescu et qui commencent à faire parler d’eux. On trouve ainsi le lt. V. Craiu, slt. Marin Popescu (qui a déjà remporté deux victoires), Slt. Egon Nasta, Slt. Marcel Dragusanu et l’adj. I. Muntenescu.

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Constantin avoue sa frustration face à la liberté de ces hommes, lui qui est tenu aux missions d’observations. (Détail intéressant sur ce paragraphe : En détaillant, pour expliquer sa frustration, le déroulement des missions de reco photo par rapport à celle de la chasse, il raconte qu’après chaque cliché, il est obligé de rentrer au terrain pour recharger l’appareil photo car les appareil avec des focale de 50 et 75 cm ne peuvent effectuer qu’un seul cliché.)

A l’occasion de cette rencontre, Nicolau, fait la connaissance du personnel de la F4, dont ceux de la F7 parlent avec admiration. Le commandant de l’escadrille est le cpt Haralmb Gossianu (surnommé « Nenisorul » : appelation familière qui correspond à peu près à « Tonton »). On raconte qu’il vole côte à côte avec ses subalternes, se réservant les missions les plus difficiles.
Comme les Farman ne peuvent pas toujours compter sur une protection de chasse, Gossianu s’est entraîné sur un BB Nieuport et exécute lui-même la protection des missions les plus difficiles. Ses hommes lui vouent un véritable culte.

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Le chef des observateurs de la F4 est le cpt Thauvin, en concurrence permanente avec le Slt Ermil Gheorghiu pour ce qui d’effectuer les missions avec Gossianu. Gheorghiu a été décoré de l’ordre de Mihai Viteazul (Michel le Brave) pour la bravoure dont il a fait preuve au cours de ses missions. Au cours d’une mission de réglage d’artillerie, il a reçu un éclat dans le foie.

Ordre de Michel le Brave
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Mais « l’as » des photos aériennes est l’adj. Pîrvulescu. Il y a aussi, l’adj. av. Tate Rotaru, « as » des missions spéciales.

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Le soir, les aviateurs fêtent la victoire du 3 août du Cpt Gond.

Les deux jours suivants, la météo est mauvaise. Il y a peu de vols. Nicolau rencontre les pilotes de la BM 8, venus en visite au Groupe. L’escadrille s’est installée sur le terrain de Frunzeasca (nord de Tecuci), mise à la disposition de la Ière armée pour des missions de bombardement.

A suivre : Les Combats de Marasesti (3eme Partie)


Re: Mémoires d'un aviateur roumain

Publié : mer. mars 27, 2013 7:55 pm
par yox
LES COMBATS DE MARASESTI (3EME PARTIE)

Les dernières reconnaissances montrent clairement que les Roumains et les Allemands travaillent fébrilement à la consolidation de leurs positions. De plus, face au 5e Corps on observe une activité intense, à peine camouflée.

Le 4/17 août, l’équipage St. Iliescu/Cpt Grigore Gafencu, en mission de reconnaissance photo face au 5e Corps, abat un avion ennemi.

L’étude des dernières photos montre que les Allemands massent de l’artillerie, en particulier face au 9e et 13e divisions.

Au repas du soir, alors que les vainqueurs du jour sont à la fête, de nouveaux visages font leur apparition. Le cpt Cezar Stiubei et l’adj. Gjebovici.

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Les derniers jours d’accalmie et la mauvaise météo ont permis aux équipages de se reposer. Non seulement la répétition des missions, mais aussi la dysenterie ont contribué à un épuisement général des effectifs. Pour traitement contre la dysenterie, il n’y a que l’alcool car ils doivent éviter de boire de l’eau. De même pour la jaunisse car ils n’ont même pas d’acide lactique. Jusqu'à présent, Nicolau a échappé à l’ictère (jaunisse), mais il a tout de même une apparence de fantôme.

A Tecuci, la panique de la population s’apaise, mais beaucoup de défont pas leurs bagages, restant prêts à partir. L’effet de surprise étant passé et au regard de la bonne tenue des troupes roumaines les jours précédents, les aviateurs sont convaincus qu’une victoire allemande n’est plus possible. Mais, ils ont conscience qu’une confrontation décisive est imminente, et le mot d’ordre du général Eremia Grigorecu est dans toutes les bouches « Pe-aici, nu se trece ! » (Par ici, on ne passe pas !).

Le personnel navigant de l’escadrille commandée par le Cpt Delas (jusque-là composée uniquement de français) a été complété avec des pilotes roumains :
- Adj. S Barbulescu
- Adj. C. Popa
- Adj. Stan Bucur
- Adj. Gogu Stefanescu

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Nicolau connaît ce dernier depuis l’école d’aviation de Botosani, c’est avec lui qu’il avait fait son premier vol.
Sur C. Popa (qui finira sa carrière comme « comandor » de réserve), il a lu un article de septembre 1916 du journal « Dimineata » (le Matin). Le quotidien relatait un vol de reconnaissance effectué au sud du Danube par l’équipage C. Popa/lt Papazol, dans des conditions très difficile, dont un problème moteur.

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Le matin du 6 août, tout le monde se retrouve dans la salle des observateurs. Exposé sur la situation du front : La Iere armée roumaine (dont fait partie de 5e Corps) occupe un front de Cosmesti din Vale à Muncel. La 9e division est déployée de Cosmesti jusqu’à la voie ferrée au sud de Marasesti. De Marasesti jusqu’au coin sud-est de la forêt de La Razoare se trouve la 13e division. Entre La Razoare et le village de Dumbrava, le front est tenu par la 10e DI. Dans la continuation se trouvent la 103e DI du 8e Corps russe.
En réserve d’armée, à Cosmesti, la 15e division.
En face se trouve la 9e armée allemande. 4 divisions en lignes et 4 en réserve.

Le commandant de l’escadrille ordonne ensuite qu’un équipage exécute une mission de surveillance de secteur au profit des 9e, 10e et 13e DI et qu’un deuxième fasse une reconnaissance de Corps d’armée du secteur ennemi face au 5e Corps. Des escortes de chasse seront fournies par la N3 et la N11.

Peu après le départ des deux équipages, un bombardement violent s’abat sur Tecuci. Le terrain est cependant épargné. Au fur et à mesure le bombardement s’intensifie. Il ne fait plus de doute que l’ennemi va attaquer. Les visages des aviateurs sont crispés de tension et de nervosité.
L’équipage envoyé en surveillance tarde à revenir, ce qui accroît la tension. Ils apprendront plus tard que l’appareil a été obligé de se poser sur la rive gauche du Siret suite à une panne moteur. Lorsque rentre le deuxième équipage, l’observateur bouleversé rapporte que les tranchées de première ligne des 9e et 13e divisions sont complètement retournées par les bombardements ennemis. Les postes antennes des divisions ne répondant plus aux demandes de l’observateur.

Vers 9h, le cpt Goulin, ordonne à Nicolau de se préparer pour continuer la surveillance de secteur. Il lui précise qu’en cas d’attaque ennemie, il doit bien surveiller les zones de liaisons entres les divisions. Constantin fait équipage avec l’adj. A. Sisu.
L’observateur connaît le secteur comme sa poche, car il a œuvré au profit de toutes les divisions qui ont successivement occupé la zone. Lorsqu’il arrive au-dessus de Cosmesti, ils sont à 1200 m.
Depuis le sud de la forêt de Calin, jusqu’à l’ouest de la forêt de La Razoare s’étendent deux tapis, presque parallèles de feu, de fumée et d’explosions qui recouvrent les premières lignes et les positions d’artillerie tant amies qu’ennemies. Des premières lignes ennemies, il aperçoit des fusées de rallonge de tir s’élever dans les airs. Peu après, les Allemands sortent de leurs tranchées et se lancent à l’attaque. L’artillerie divisionnaire et l’artillerie lourde roumaines établissent un barrage face aux positions allemandes.
Le village de Marasesti est la proie des flammes. En arrière des lignes ennemies, Nicolau découvre la masse d’artillerie visible grâce aux flammes sortant de la bouche des canons à chaque tir. Puis il voit les tirs de l’artillerie lourde roumaine commencer à encadrer les batteries allemandes. Peu après l’intensité du bombardement ennemi faiblit.
Constantin demande au pilote de voler plus bas, afin d’apprécier la situation des premières lignes, dans cet enfer de feu et de fumée. Sisu fait évoluer son appareil parallèlement au front. Les obus de DCA commencent à encadrer le Farman et Nicolau se demande comment ils ont encore le temps de leur tirer dessus. Le tableau qui se dessine sous ses yeux est inquiétant. De la droite de la 9e DI et sur tout le front de la 13e, les Allemands avancent par bond, en de nombreuses vagues, dans un ordre parfait. En arrière, en colonnes formées en petits paquets, viennent les réserves des unités de premières lignes et plus en arrière encore les réserves des grandes unités.
Il demande au pilote de survoler les réserves, qui avancent en groupes compacts. Là, il largue les 5 obus de 75 emmenés pour chaque mission. Ensuite après avoir scruté le ciel, il se concentre sur les secteurs des divisions.
Face à l’aile droite de la 13e division, le terrain est découvert, et les tirs l’artillerie roumaine le matraque. Parmi les nuages de fumée, il aperçoit les vagues ennemies qui, au fur et à mesure de leur avance, se raréfient et se dissolvent dans les explosions ou encore sont fauchés par les mitrailleuses.
Dans les premières lignes roumaines, il distingue des corps à corps entre les défenseurs et les Allemands qui sont parvenus jusque dans leur tranchée.

Au centre et sur l’aile gauche, la situation est difficile à suivre, car la progression allemande est couverte par des champs de blé. Même à la jumelle, il ne distingue rien. Alors, après avoir rentré l’antenne, ils descendent encore et encore afin d’arriver à voir quelque chose. L’appareil évolue maintenant à environ 200 m. L’avion est fortement secoué par les trous d’air provoqués par le souffle des explosions.
Nicolau envoie une fusée pour demander à l’infanterie de signaler ses premières lignes. Pas de résultat. Il essaye une deuxième fois. Mais les fantassins ne réagissent toujours pas, certainement afin de ne pas révéler leur position à l’ennemi.
Constantin, après un moment de flottement se ressaisit et se concentre sur ce qui se passe sous ses pieds. Entre les nuages de fumée qui couvrent tout le terrain, il s’aperçoit que les Allemands ont dépassés de beaucoup ce qui restait des ouvrages avancés roumains. Leurs troupes, masquées par les blés, avancent en 5 vagues qui progressent par bonds. La première a été stoppée par une lutte au corps au corps par les fantassins roumains, mais succombant sous le nombre, ils ont été obligés de se replier.
Nicolau tente de faire un croquis sur plan directeur de la situation, mais elle évolue rapidement. Les Allemands semblent partout. Le mieux qu’il puisse faire c’est d’indiquer une zone dans laquelle se sont repliées les troupes roumaines après les dernières tentatives de résistance. Constantin demande au pilote de remonter et déploie l’antenne afin de contacter le poste de la division. Pas de résultat. Alors, la main tremblante, il rédige deux messages rapportant la situation et, après être repassé derrière les lignes, il en largue un sur le PC de la division et un sur le PC du corps d’armée.
Le pilote s’inquiète de la face blême de Nicolau mais ce dernier, lui fait comprendre que tout est en ordre et lui demande de retourner vers les lignes. Là, nouvelle surprise, l’ennemi a dépassé le sud des vignobles de Negroponte et franchi la deuxième ligne de défense roumaine. L’aile droite de la 9e division a été poussée en arrière et l’ennemi est parvenu maintenant dans le secteur des gares de Marasesti et au nord de la fabrique de parquet. Là encore, les aviateurs assistent à des corps à corps. Le plus grave est que la liaison entre la 9e et la 13e division est rompue. Ainsi, à l’ouest de la voie ferrée, Nicolau aperçoit des groupes d’Allemands entre les deux divisions. En revanche, les tirs de l’artillerie allemande sont peu précis.

Constantin tente d’entrer en contact avec le poste antenne de la 13e division, sans plus de succès que les précédentes tentatives. Il rédige rapidement un message lesté qu’il largue au-dessus du PC de corps d’armée.
A 11h, les Allemands continuent d’avancer. Un peu moins de la moitié de la forêt de La Razoare semble occupée et les vagues d’assaut qui avaient pénétrés dans les vignobles de Negroponte se dirigent vers la côte 100. En arrière de celle-ci, se trouve la position des 15 batteries lourdes roumaines de la Ière armée et des 13 batteries russes.
L’artillerie alliée concentre alors son tir en arrière des vagues ennemis afin d’empêcher ses réserves de progresser. Nicolau est impressionné par l’ampleur du tir de barrage.

Soudain, l’adj. Sisu lui tape sur l’épaule et lui signale qu’ils sont en limite de carburant. Il prend alors la direction du terrain.
Là-bas, le cpt Goulin, les attends nerveusement car l’équipage tarde à rentrer. Après le rapport de Nicolau, il met ce dernier dans une camionnette et ordonne au chauffeur Pascu, dans son roumain approximatif, de conduire Nicolau rapidement au PC du 5e corps, afin d’y faire un rapport plus détaillé que le message lesté.

Vers 13h, il est avec le chef du bureau des opérations du corps où il dresse un tableau détaillé de la situation. Les messages sont bien arrivés et les informations confirmées en partie par les observateurs des ballons et complété par les rapports des unités au sol.
Dans tous les cas, les messages ont été d’un grand secours car les lignes téléphoniques ont été coupées. Nicolau apprend qu’il a été ordonné aux unités de réserve des 13e et 10e divisions d’attaquer, de part et d’autre, sur les flancs du saillant réalisé entre la voie ferrée et la forêt de La Razoare. Par la suite Constantin se rend chez le chef d’Etat-Major qu'il trouve fatigué et abattu. Ce dernier est dans l’attente de nouvelles à propos des mesures prises contre le saillant. L’observateur remarque au passage que les archives du corps sont emballées, signe d’un éventuel repli.
Nicolau se présente ensuite au commandant du corps qui semble très calme. Il rapporte à nouveau tout depuis le début. Le général dit qu’il est dans l’attente d’information concernant la contre-attaque ordonnée. Soudain, les deux hommes perçoivent le bruit d’un avion volant à basse altitude. C’est un F40 qui largue un message lesté.
A l’intérieur du tube, un croquis et une note. Elle rapporte que sous la pression de la contre-attaque, l’ennemi a commencé à se replier de la trouée faite entre la forêt de La Razoare et la voie ferrée Marasesti-Adjud.
Le visage du général s’illumine alors. Après un court laïus sur l’importance du moment qu’ils sont en train de vivre pour la nation il demande à Nicolau le nom du commandant de l’aviation. Constantin donne le nom du Major Andrei Popovici, commandant le groupe 2 Aéro. Le général lui demande alors de le féliciter de sa part et de lui apporter ses remerciements.
Nicolau retourne au bureau des opérations.

A 14h15 les rapports indique que l’ennemi sa retire.
A 15h30 la victoire est confirmée. La forêt de La Razoare a été reprise et l’ennemi a été repoussé des vignobles de Negroponte et de la gare de Marasesti.
Au bord de la fatigue nerveuse, avec la tension qui se relâche, les jambes Constantin se mettent à trembler. Il est surpris d’apprendre que le commandement de la Ière armée ordonne à toutes ses unités de s’arrêter sur la ligne qu’elles ont atteinte. En effet les unités ont enregistré beaucoup de pertes, les hommes sont épuisés et les réserve sont limitées.
Avant qu’il ne retourne à son unité, on donne un ordre de mission à remettre à son escadrille. Il faudra, le lendemain, reconnaître et photographier les positions alliées et ennemies sur tout le front, du Siret jusqu’à l’ouest de la forêt de La Razoare, suivre l’activité de l’adversaire de façon permanente.

Lorsqu’il rentre au terrain, la situation sur le front est déjà connue dans les grandes lignes. Les dernières surveillances de secteur depuis 14h ont tenu informé l’escadrille de l’évolution des opérations. Constantin transmet les remerciements et les ordres pour le lendemain.

A l’annonce des remerciements du général, le Cpt Goulin s’adresse alors à l’escadrille : « Les remerciements vous reviennent à vous tous, qui avez su faire votre devoir dans des conditions qui demandaient des efforts presque surhumains » (sic)

Ses camarades racontent à Nicolau qu’à midi, le roi a inspecté le Grupul 2 Aero. Tout le personnel navigant et aérostier disponible était présent.
Le slt Creteanu raconte à Constantin qu’au moment où le roi passait les troupes en revue, le slt Motas est apparu en tenue de vol, portant un énorme appareil photo à focale de 36 cm.
Le commandant du Groupe 2, le présente au roi et lui rapporte que Motas revient à peine d’une mission qu’il n’a pu mener à son terme, son avion ayant été gravement endommagé par l’explosion d’un obus de DCA. Le roi a alors regardé Motas avec admiration et lui a fait savoir qu’il était content qu’il s’en soit tiré indemne. Motas répond qu’il n’est pas satisfait car il n’a pas pu mener à bien sa mission et il montre au roi l’appareil photo qui a été cassé par un éclat.
Le soir, les missions sont réparties pour le lendemain. Le cpt Stiubei, dont c’est le baptême du feu, volera avec le lt Olanescu, « spécialiste » du vol avec les nouveaux.

Le lendemain, Nicolau souffre à son tour de la jaunisse. Il se rend tout de même au terrain, à la section photo afin de voir les dernières photos faites la veille. A peine est-il arrivé qu’il est convoqué chez le cpt Goulin. Ce dernier lui annonce que dans l’après-midi, il devra aller photographier les lignes ennemies face au 5e corps d’armée et ensuite surveiller le secteur. Son pilote sera à nouveau Sisu.
Comme il connaît bien le secteur, la mission est rapidement préparée. Dans l’après-midi le capitaine est présent sur le terrain. Il dit à Nicolau que, du fait de l’emport de l’énorme appareil photo, il ne prendra pas avec lui les 5 obus habituels.

Survolant le front, l’équipage est surpris par le calme relatif qui y règne. Il repère des ballons amis et ennemis. A part cela, aucune activité aérienne.
L’opération de prise de vues doit s’effectuer à 1200 m d’altitude. Pour bien faire, l’observateur et le pilote doivent travailler avec une précision de chronomètre, afin que les clichés successifs soient liés les uns aux autres permettant ainsi d’avoir l’ensemble des dispositifs en un seul passage. L’observateur donne une direction de vol au pilote. Ce dernier ne doit dévier ni de son cap, ni de son altitude, et ce quel que-soit la réaction de la DCA.
D’ailleurs au passage de l’avion, les canons anti-aériens se déchaînent. Préoccupé par la précision des clichés, Constantin ne s’en émeut pas outre-mesure. Sisu qui n’a pas les préoccupations de son observateur a plus le temps de « profiter » du spectacle.
Le vol au-dessus des lignes ennemies dure 20 mn. Ensuite, l’équipage passe à la surveillance de secteur. Le front est calme, si ce n’est des tirs sporadiques d’artillerie. Les deux armées s’emploient à consolider leurs positions. Après 2h30 de vol, Sisu amorce le retour au terrain.

Entre le 8 et le 15 août, le front connaît une période de calme. Cependant l’aviation est sollicitée en permanence, particulièrement pour la reconnaissance photo et pour la surveillance de secteur. Les équipages photographient aussi les lignes amies et il apparaît qu’en terme de camouflage les troupes roumaines ont fait des progrès évidents.

L’épidémie de dysenterie s’apaise. En revanche la jaunisse redouble. Le Cpt Stiubei, à peine arrivé, en est déjà victime. Cependant le moral des hommes est bon et il sont tout de même plus reposés.

Nicolau achète à un des français qui s’en va (note : il n’est pas précisé s’il quitte le Groupe ou l’escadrille) un appareil photo de poche.

Les aviateurs parcourent souvent à pied la route qui va de la ville à l’aérodrome. Souvent à la gare, ils rencontre des artistes qui travaillent sur des toile décrivant des scènes de guerre (à distance respectueuse des combats ironise Nicolau). Là, toutes les demi-heures, les Allemands tentent de toucher la gare ou la ville en tirant un obus. Le tir est tellement imprécis que cela ne semble déranger personne.
En ville, Nicolau fait la connaissance de Petrascu et Braescu. Ce dernier possède des vignes et leur fait souvent cadeau d’une bouteille de vin.

Un jour, Constantin reçoit une lettre de son père, qui lui écrit qu’il ne le reconnaît plus comme étant son fils, car bien que mineur, il s’est engagé dans l’aviation sans son contentement. Nicolau va voir alors le laborantin de la section photo, « Mos » (grand-Père) Durazzo. Il lui demande de le photographier de profil et de face, puis il envoie la photo à son père en lui disant qu’il se porte bien et lui demandant de reconsidérer sa décision. La nouvelle fait vite le tour et peu après Imbs vient voir l’observateur pour lui repprocher de ne pas l’avoir choisi pour lui tirer le portrait. Bientôt toute l’escadrille est au courant et attend la réaction du père de Constantin.

A SUIVRE : LES COMBATS DE MARASESTI (4eme PARTIE)