Re: Le 11 novembre 1918 pour les auteurs.
Publié : ven. nov. 11, 2011 4:27 pm
Que c'est t-il passé ce jour pour les auteurs ?
Voici le passage Gabriel Chevallier, dans "la peur".
"Un matin vers six heures, un observateur nous réveille.
- Ça y est. l'armistice est à 11 heures.
- Qu'est ce que tu dis ?
- L'armistice est à onze heures. C'est officiel.
Nègre se lève, regarde sa montre.
-Encore cinq heures de guerre !
Il endosse sa capote, prends sa canne. Je lui demande :
- Où vas-tu?
- Je descends à St Amarin. Je déserte, je vais me mettre à l'abri et je vous conseille de passer ces cinq heures au fond de la sape la plus profonde que vous trouverez, sans en sortir. Rentrez dans le ventre de votre mère Terre et attendez l'accouchement.
Nous ne sommes encore que des embryons, au seuil de la plus grande gésine qu'on ait vue. Dans cinq heures, nous naîtrons.
- Mais qu'est ce qu'on risque?
- Tout ! On n'a jamais autant risqué, on risque de recevoir le dernier obus. Nous sommes encore à la merci d'un artilleur mal luné, d'un barbare fanatique, d'un nationaliste en délire. [...]
Nous attendons.
Onze heures.
Un grand silence. Un grand étonnement.[...]
Il semble que la terre exhale un long soupir. Il semble que de nos épaules tombe un poids énorme. Nos poitrines sont délivrées du cilice de l'angoisse : nous sommes définitivement sauvés.
Cet instant se relie à 1914. La vie se lève comme une aube. L'avenir s'ouvre comme une avenue magnifique. Mais une avenue bordée de cyprès et de tombes. Quelque chose d'amer gâte notre joie, et notre jeunesse a beaucoup vieilli."
"La peur",Gabriel Chevallier.
Voici le passage Gabriel Chevallier, dans "la peur".
"Un matin vers six heures, un observateur nous réveille.
- Ça y est. l'armistice est à 11 heures.
- Qu'est ce que tu dis ?
- L'armistice est à onze heures. C'est officiel.
Nègre se lève, regarde sa montre.
-Encore cinq heures de guerre !
Il endosse sa capote, prends sa canne. Je lui demande :
- Où vas-tu?
- Je descends à St Amarin. Je déserte, je vais me mettre à l'abri et je vous conseille de passer ces cinq heures au fond de la sape la plus profonde que vous trouverez, sans en sortir. Rentrez dans le ventre de votre mère Terre et attendez l'accouchement.
Nous ne sommes encore que des embryons, au seuil de la plus grande gésine qu'on ait vue. Dans cinq heures, nous naîtrons.
- Mais qu'est ce qu'on risque?
- Tout ! On n'a jamais autant risqué, on risque de recevoir le dernier obus. Nous sommes encore à la merci d'un artilleur mal luné, d'un barbare fanatique, d'un nationaliste en délire. [...]
Nous attendons.
Onze heures.
Un grand silence. Un grand étonnement.[...]
Il semble que la terre exhale un long soupir. Il semble que de nos épaules tombe un poids énorme. Nos poitrines sont délivrées du cilice de l'angoisse : nous sommes définitivement sauvés.
Cet instant se relie à 1914. La vie se lève comme une aube. L'avenir s'ouvre comme une avenue magnifique. Mais une avenue bordée de cyprès et de tombes. Quelque chose d'amer gâte notre joie, et notre jeunesse a beaucoup vieilli."
"La peur",Gabriel Chevallier.