Forum PAGES 14-18

Bonjour à tous,

Le livre que certains attendaient est sorti :

"Fusillés - Enquête sur les crimes de la justice militaire", de Jean-Yves Le Naour, éd. Larousse, 332 p., 20 euros.

Quatrième : "Là-bas, aux abords de Souain, en mars par un froid matin, ils ont assassiné mon papa...
écrit la petite Jeannette, dont le père, le caporal Maupas, est fusillé le 17 mars 1915. Fusillé aussi, François-Marie Laurent, pour ne connaître que le breton et n'avoir pas compris les ordres qu'on lui donnait en français. Fusillé, Jean Jaeglé, pour avoir porté presque le même nom qu'un espion allemand. Fusillés, les soldats de Verdun accusés par un médecin trop zélé de mutilations volontaires... De 1914 à 1918, plus de 2 300 soldats français ont été condamnés à mort, et 600 environ effectivement exécutés.
Le plus souvent, dans un seul but : galvaniser l'énergie des troupes. Dans la plupart des cas, l'effet produit fut exactement inverse, l'écoeurement et l'indignation de leurs camarades éclatant au grand jour devant des condamnations aussi arbitraires. Alertées, informées et encouragées par les récits de ces compagnons d'infortune, parfois bien postérieurs aux faits, les familles ont cherché, dans l'entre-deux-guerres, malgré la honte qu'elles ressentaient et les pesanteurs administratives, à réhabiliter ces hommes morts pour rien.
A travers archives et témoignages, cet ouvrage poignant de Jean-Yves Le Naour, historien reconnu de la Première Guerre mondiale, est un monument à la mémoire de cinquante victimes d'une machine militaire devenue inhumaine."

Bonne journée,

Jérôme

bonsoir à tous,
A première vue pas grand chose sur les fusillés de 1917. Certes, on rappelle toujours qu'ils sont beaucoup moins nombreux que les années 14 et 15, mais bon quelques cas étudiés étaient possibles.
Un bon livre cependant à première vue avec une cinquantaine de biographies de fusillés, certain célèbres comme Bersot par exemple ou Maupas.
J'ai commencé à le lire hier soir en alternance avec le Feu de Barbusse que je relis avec beaucoup de plaisir. ( il faut toujours revenir à Barbusse !)
Bonne soirée à tous,
Bruno

Bonsoir à tous, bonsoir Bruno,

J'ai commencé à le lire hier soir en alternance avec le Feu de Barbusse que je relis avec beaucoup de plaisir. ( il faut toujours revenir à Barbusse !)

Si tu le veut bien j'aimerais beaucoup avoir ton avis sur ce livre !

Amicalement,
Frédéric

Bonsoir à tous,
J'ai vu, pas plus tard que ce midi ce bouquin en librairie.
Je passerai sur l'exploitation de ce sujet, mais je butte toujours sur ce type d'affirmation : "Fusillé aussi, François-Marie Laurent, pour ne connaître que le breton et n'avoir pas compris les ordres qu'on lui donnait en français".
Pour ce que je sais de l'histoire de France, et venant moi même du pays (très) profond, il me semble que les hussards noirs de la République ont professé l'éducation publique voulue par Jules Ferry jusqu'au fin fond de la Bretagne (et même plus loin d'ailleurs). De plus, le langage technique militaire est relativement simple (et a vocation à l'être) et s'apprend à l'instruction, si je ne m'abuse. Je n'ai d'ailleurs jamais entendu parler d'un tirailleur algérien ou somali fusillé pour n'avoir pas compris un ordre donné en français par un adjudant (Aïe, J'ai tort de dire ça, je vais donner des idées à Djamel Debbouze).

Bonne soirée.

Jacques

Bonsoir à tous,
Bonsoir Frédéric,
C'est toujours avec émotion que je lis tes messages, Frédéric, toi qui m'a beaucoup aidé il y a quelques temps à reconstituer le parcours de mon Arrière grand père Eugène Decriem et qui a avec tes enfants fleuri sa sépulture à Glorieux! Merci Frédéric, je n'oublie pas ces actes-là! depuis j'ai pu faire changer la plaque et venir quelques fois à Verdun ( malgré l'éloigneemnt géographique du Gers)
Sur le livre Fusillés, j'en suis à la première partie:" vingt ans de combats pour la réhabilitation" ( je suis à la page 85) et honnetement, c'est plutôt bien car il s'agit là d'une bonne synthèse sur les débats entre les politiques et les militaires sur les enjeux du pouvoir et la répression utilisée. On voit se dessiner la panique des politiques en aout-septembre 14 et laisser les mains libres à l'armée puis essayer de reprendre le contrôle, en butant sur l'argument militaire: c'est la guerre donc attention à ne pas affaiblir l'armée française. rebelote en juin 17 après les mutineries.
Ensuite, après guerre les déchirures politiques autour des fusillés, la gauche et parfois, c'est à noter certains députés du bloc national ( droite) voulant faire la lumière.
Avec , c'est amusant certains arguments utilisés dans ce fil!!!!
lorsque le député communiste andré Berthon parle sur des cas comme Chapelant, VIngré, Herduin et Millant, la droite lui lance : comment jugent les Soviets?
Je recommande la lecture de ce livre pour ceux qui comme moi ne connaissent pas dans le détail tous ces enjeux et ces débats!
Bonne soirée à tous,
Un salut particulier à Frédéric!
Bruno

Bonjour à tous,
Je viens de terminer la première partie, la seconde sera consacrée aux 50 cas de fusillés ( malhaureusement, souvent les plus connus).
Cette première partie montre bien les débats passionnés des années 20 sur fond de clivage politique. La droite couvre l'armée, le parti communiste fait de la question de la réhabilitation des fusillés une arme antimilitariste et surtout antinationaliste. Le combat du député communiste Berthon sur Milant et Herduin est admirable de persévérance. Les socialistes sont tiraillés entre la justice et la réhabilitation et l'exercice du pouvoir ( 1924: cartel des gauches). Du coté Droit, les députés ne sont pas unanimes non plus. En général, ce sont ceux qui sont anciens combattants qui soutiennent les propositions de la gauche de réhabilitation. Une galerie de personnages s'offre aux lecteurs: du coté de la réhabilitation des fusillés, Les communistes Berthon, Marty puis les socialistes meunier Valière; de l'autre le ministre Maginot odieux lorsqu'il répond à Blanche Maupas pour ne pas évoquer le sujet de la réhabilitation de son mari.
A noter un court sous-chapitre sur la brève tentative avortée de punir et poursuivre les coupables des crimes des conseils de guerre ( l'affaire de Vingré et le jugement de Paulaud, sous-lieutenant coupable dans cette triste histoire). Le Naour termine ce sous chapitre par ces mots terribles:
LES CRIMINELS DE GUERRE NE SERONT PAS INQUIETES. ( P. 92)
A méditer
Bonne journée à tous,
Je continue mes observations sur ce livre plus tard, mais vraiment un bon livre.
Bruno

Bonsoir,

On peut trouver un éclairage intéressant dans la presse d'après-guerre, par exemple ici au sujet des procès de 1934 (il y est question d'un soldat breton qui n'avait pas su expliquer l'origine d'une blessure) :
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5 ... .image.f10

Cordialement.

Bonsoir à tous,
La suite de mes commentaires sur le livre ( excellent) de Le Naour sur les fusillés. la seconde partie intitulée CINQUANTE CAS DE FUSILLES REHABILITES présente de nombreuses histoires connues ou finalement beaucoup moins mais toutes sont hallucinantes. Les crimes des conseils de guerre et de certains militaires sont là, flagrants, monstrueux, et on reste parfois pantois, on pense même à du roman et pourtant l'auteur renvoie aux sources ( en notes) à mon avis à lire absolument. C'est d'ailleurs écrit de manière agréable, un ton sobre, avec parfois une pointe de révolte personnelle de l'auteur entre les lignes.
voici donc la table des matières de cette seconde partie:

REFUS D'OBEISSANCE
Lucien Bersot
La mutinerie de Flirey
Les quatre caporaux de Souain

ABANDON DE POSTE
Les martyrs de Vingré
Eugène Bouret
Fernand Inclair
Marius Marcel, rescapé de l'ouvrage pruneau
Camille chemin et Edouard pillet

LES FOUS ET LES SIMPLES D4ESPRIT
Alfred Loche
Joseph Gabrielli
Jean-Baptiste Bourcier
Hildevert Marcadet

DES CIVILS EN CONSEIL DE GUERRE
Les époux Moreau
Louis Sandt
Jules Strimelle
Jules Copie
Nicolas Mertz
Jean Jaeglé

MUTILATIONS VOLONTAIRES
les mutilés de verdun
Alexandre Crémilleux
Elie Lescop
La mort héroique des zouaves Garçault et Chochoi
Auguste Gonsard
François-Marie Laurent
Marcel Loiseau

EXECUTIONS SOMMAIRES
Gustave Henri Herduin et Pierre Millant
Augustin santerre
François Waterlot
Victor Marchand

LES RECALES
Jean-Julien Chapelant, fusillé sur son brancard
Aristide Gauthier
Léonard Leymarie
Frédéric Wolff

et en conclusion,
Comment enterrer les cadavres?

beaucoup de ces tristes histoires méritent à être connues, certaines le sont, d'autres, non.

Bonne soirée à tous
Bruno

Bonsoir à tous,
Bonsoir Pierre,

COMMENT ENTERRER LES CADAVRES?

Ce titre surprenant est bien le titre de la conclusion de ce livre interressant à plus d'un titre.
Voilà la conclusion de Jean-Yves Le Naour:

"Comment comprendre, en France, que l'on puisse reconnaitre qu'on avait "trop exigé" des hommes " que les fautes du commandement avaient envoyés au massacre", sans aller jusqu'à la réhabilitation de ceux dont on a admis qu'"ils ne s'étaient pas déshonorés"?

Après la question des fusillés par erreur, réglée en grande partie depuis l'entre-deux-guerres, celle de l'ensemble des fusillés se pose donc pleinement. Pour que la mémoire de la Première Guerre mondiale soit réellement une et fédéretrice, pour que les Français communient autour de leur histoire, il faudra en passer par là. On pourra alors, avec l'enterrement des cadavres qui nous hantent, tourner la page de la grande Guerre et l'oublier pour de bon en l'exorcisant par des commémorations." ( P. 323)

Voilà la conclusion et la méthode de cet historien brillant pour enterrer les cadavres des fusillés: réhabiliter tous les fusillés!
A vos réactions ( en ce qui me concerne sur un autre fil, j'avais aussi défendu cette position mais évidemment, ce n'est que mon avis )

Bonne soirée à tous
Bruno

Bonjour,
Remarquable intervention de Pierre Mercadal à laquelle je souscris entièrement.
CC