Re: La Garde de nuit à l'Yser
Publié : sam. avr. 28, 2012 2:26 pm
Bonjour à tous,
En ce moment, chez l’excellent Philippe Meyer, sur France Inter, encore quelques pépites, dont La Garde de nuit à l’Yser :
Un rien de lumière, lueur éphémère,
Rampe encore sur terre au long des boyaux ;
La nuit tombe, tombe, après dans la tombe,
Et la mort en trombe pour bien des héros.
C’est l’heure indicible où l’humaine cible
Frissonne impassible au fond de son cœur,
Et c’est l’heure obscure où sous notre armure
S’insinue, sûre, la main de la peur.
Va, légers mes contes, l’angoisse se dompte
Et le sang remonte orgueilleux et vif
Un doigt sur la gâchette, le soldat furète
Et par la nuit guette d’un œil attentif.
Les canons rugissent, Les balles ratissent
Les abris gémissent sous les coups du fer,
Et plus cela barde, et plus on bombarde
Plus belle est la garde au bord de l’Yser.
Clarté fulgurante, fleur éblouissante,
Traînée sanglante dans le ciel tout noir,
C’est une fusée qui monte irisée,
De l’enfer lâchée comme un feu d’espoir.
Alors tout se fige, alors Ô prodige,
Par le seul prestige de cet œil ouvert,
Tous les nerfs se tendent, les armes se bandent,
Et les cœurs attendent l’holocauste offert.
Mais le vent se lève, là-bas vers la grève
Il assaille et crève le manteau des cieux,
Des nues s’affaissent, fuient, se dépècent,
Des étoiles naissent en clignant des yeux.
Et soudain, très belles, de lugubres ailes,
Des ailes mortelles, passent en vrombissant
Quelques gothas passent, ils passent voraces,
Jalonnant sa trace de flaques de sang.
Et le temps s’enrouille et la mort se saoûle
Du sang qui s’écoule en flots monstrueux,
Grisée de tumulte, la camarde exulte,
Et son geste insulte aux plus valeureux.
Elle arrive, lente, lâche, patiente,
Immonde, démente, implacable et lasse,
Et sa main fantasque, dédaignant le casque,
Glisse sous le masque le poison des gaz.
Enfin l’accalmie, une voix ranime,
Une voix bénie s’élève soudain,
Le gars taciturne sent dans l’air nocturne
Le clocher de Furnes qui s’émeut lointain.
Il s’émeut, et chante la chanson vivante,
Pleure de détente du prochain éveil,
La nuit se lézarde, l’aube les blafarde,
Finie la garde, voici le soleil.
Bien cordialement,
Eric Mansuy
En ce moment, chez l’excellent Philippe Meyer, sur France Inter, encore quelques pépites, dont La Garde de nuit à l’Yser :
Un rien de lumière, lueur éphémère,
Rampe encore sur terre au long des boyaux ;
La nuit tombe, tombe, après dans la tombe,
Et la mort en trombe pour bien des héros.
C’est l’heure indicible où l’humaine cible
Frissonne impassible au fond de son cœur,
Et c’est l’heure obscure où sous notre armure
S’insinue, sûre, la main de la peur.
Va, légers mes contes, l’angoisse se dompte
Et le sang remonte orgueilleux et vif
Un doigt sur la gâchette, le soldat furète
Et par la nuit guette d’un œil attentif.
Les canons rugissent, Les balles ratissent
Les abris gémissent sous les coups du fer,
Et plus cela barde, et plus on bombarde
Plus belle est la garde au bord de l’Yser.
Clarté fulgurante, fleur éblouissante,
Traînée sanglante dans le ciel tout noir,
C’est une fusée qui monte irisée,
De l’enfer lâchée comme un feu d’espoir.
Alors tout se fige, alors Ô prodige,
Par le seul prestige de cet œil ouvert,
Tous les nerfs se tendent, les armes se bandent,
Et les cœurs attendent l’holocauste offert.
Mais le vent se lève, là-bas vers la grève
Il assaille et crève le manteau des cieux,
Des nues s’affaissent, fuient, se dépècent,
Des étoiles naissent en clignant des yeux.
Et soudain, très belles, de lugubres ailes,
Des ailes mortelles, passent en vrombissant
Quelques gothas passent, ils passent voraces,
Jalonnant sa trace de flaques de sang.
Et le temps s’enrouille et la mort se saoûle
Du sang qui s’écoule en flots monstrueux,
Grisée de tumulte, la camarde exulte,
Et son geste insulte aux plus valeureux.
Elle arrive, lente, lâche, patiente,
Immonde, démente, implacable et lasse,
Et sa main fantasque, dédaignant le casque,
Glisse sous le masque le poison des gaz.
Enfin l’accalmie, une voix ranime,
Une voix bénie s’élève soudain,
Le gars taciturne sent dans l’air nocturne
Le clocher de Furnes qui s’émeut lointain.
Il s’émeut, et chante la chanson vivante,
Pleure de détente du prochain éveil,
La nuit se lézarde, l’aube les blafarde,
Finie la garde, voici le soleil.
Bien cordialement,
Eric Mansuy