Re: recherche d'un texte ,d'une poésie
Publié : ven. nov. 02, 2007 9:08 am
par noos
mes élèves participent à la cérémonie du 11 novembre. Ils sont donc à la recherche d'un texte, d'une poésie... en l'hommage des poilus, de l'armistice ou de la paix qu'ils pourront lire ou réciter; Merci de votre réponse
Re: recherche d'un texte ,d'une poésie
Publié : ven. nov. 02, 2007 10:11 am
par tinou 501
mes élèves participent à la cérémonie du 11 novembre. Ils sont donc à la recherche d'un texte, d'une poésie... en l'hommage des poilus, de l'armistice ou de la paix qu'ils pourront lire ou réciter; Merci de votre réponse
Voici un texte totalement inédit, écrit le 6 février 1917, par un chansonnier surnommé "Osk-Off" dont le fils, Raymond Offrion sera tué le 16 avril 1917, en même temps que le Commandant Bossut à qui était dédié cette "Marseillaise".
Pour les poilus de toutes les armes, La Marseillaise des Crocodiles.
Dédié à Monsieur le Commandant Bossut, entraineur des pousettes de la victoire.
A tous ses officiers, sous-officiers et volontaires courageux, emboités dans leurs alvéoles à mitraille, à flamme; à feu et à sang.
Arcueil, le 6 février 1917
1
Vaillants soldats de la Patrie
Poilus Robur tant admirés
Vous enterrez la barbarie
Sous les trains express chavirés (
bis)
Vous avez obstrué la marne
Naguère, par dessus les bords
des Teutons déconfits et morts
Ils n'aurone bientôt plus de carne.
Refrain
Aux armes citoyens,
Soldats des Nations
Que des prussiens
Le sang impure abreuve nos sillons.
Il y a 13 strophes de ce style.
J'ai un peu la flemme de taper cela à nouveau, mais une copie est facile à transmettre en copier coller hors du forum
A votre service
amicalement
Louis
Re: recherche d'un texte ,d'une poésie
Publié : ven. nov. 02, 2007 10:21 am
par Eric Mansuy
Bonjour,
En voici un autre, de la main du "prince des poètes"...
Bien cordialement,
Eric Mansuy
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LES CHASSEURS DE L’HILSENFIRST
A Henri Thuile et Louis Fléri.
Le camp rêve. – C’est la veillée de l’espérance. – On ne dort pas. On rêve. On écoute le val, un hibou, le cricri, des roseaux, les étoiles. On craint tout. On espère. On veille sur la France.
Il veille encor bien plus le soldat de grand’garde. Il a tout du fantôme : est-ce au loin qu’il regarde ? est-ce en lui-même ? il erre, il avance, il recule. – Il veille sur l’espace au fond du crépuscule.
Le cœur de Dieu bat sous la terre ? Mon Dieu, non. Aux horizons laiteux s’éveillent les canons. Ouste ! Lève-toi, soldat, lève-toi bien vite. L’aurore va grimper au pays de la schlitte.
Vers la dernière étoile haussant l’œil et le bec surpris par la diane et, sans avoir dormi, bâillant une vapeur dans le petit vent sec, le Chasseur qui se lève est tout ragaillardi par le son du canon, du canon matinal. Pas mal non plus le chant des coqs de Metzeral ! – Le canon fortifie le cœur. – Pour l’homme en bloc, le chant des Coqs Gaulois vaut un œuf à la coque.
Coqs et canons ! cela vous rend gais des chanteurs (dont la voix se prépare), oubliant à ce bruit l’ombre et les mauvais chuchotements de la nuit. – Suscitez, chants des coqs, des canons, des Chasseurs, au froid du ciel où monte une lueur dorée, sur les cristaux légers des cimes qui se dorent, entre les noirs sapins où rayonne de l’or, un soleil glorieux qui baigne la contrée.
Le beau globe enflammé, le cœur de Dieu se donne, se propage et transfuse et crée un jour sublime. On canonne au lointain. Mais ici l’on fredonne à la gloire du jour l’air de Sidi-Brahim.
Quelle force est en soi, de quelle plénitude, Vosges, sur le versant doré que nous tenons, lorsqu’on gravit l’aurore à ce chant vif et rude, et lorsqu’au cœur de Dieu bat le son du canon.
Il n’est permis, hélas ! que de se fredonner la chanson de bravoure en cet air canonné. Voix multiples ! voix des canons ! voix qui se fondent ! Voix unique à laquelle tous les échos répondent !
Tiens ? plus rien. Le silence et langoureux et long. Tandis que nous grimpons, la chanson du brin d’herbe nous fait taire. O le frêle hymne au soleil superbe ! C’est l’heure des parfums bleus et des papillons.
Combien, de nos regards émus sous le doux jour, la Nature est aimée, tandis que nous grimpons ! Nous ne faisons pas plus de bruit que du velours. Mais enfants de la terre, ah ! nous la respirons !
D’abord nous respirons l’humus, la vieille terre. Bientôt nous respirons la terre de bruyère. Nous respirons le fonds de la patrie cachée. Puis nous baisons la France au nu de ses rochers.
Grimpe en te retournant, ô mon fils qui te lasses, hume le paysage et tu seras content ; hume encor ! tu vas mieux, tu n’es plus haletant. Cela te fait du bien de respirer l’Alsace.
Nous montrons aux pensées de bonnes joues vermeilles, promenons la narine au tout fin fond des mousses : ainsi l’on grimperait, ivre, jusqu’au soleil... Hélas ! bon Dieu des fleurs que ta Nature est douce !..
Anémones, pensées, violettes sauvages, ô fleurs de notre enfance, aurons-nous le courage d’errer à sa chaleur jusques au cœur de Dieu ? Le hêtre et l’if sur nous marient leurs ombres bleues.
C’est peu : maigre futaie. Sur un tapis de faînes, eh ! houp ! genoux nerveux, oubliez donc vos peines. Le bataclan est lourd, gamin ? Houp ! on s’entraîne ! Sur un tapis d’aiguilles suis tes poignets qui saignent.
Le bosquet se disperse et flambe la clairière. Qui donc nous inventa le soleil et la guerre ? –« Combien de fois, sergent, j’ai rêvé de mon lit à ces Vosges d’azur et de mélancolie ! »
Mais le granit rutile... oh ! ces pentes désertes ! Nous avons soif et la rosée monte au Seigneur. La bruyère asséchée épuise sa rougeur. Une cascade, au loin, arque son jet inerte.
Ciel !.. un torrent nous luit sous la verte épaisseur des grands pins. La forêt comme une ruche ouverte, irisée de rayons obliques, – ô fraîcheur ! – bée de tous ses ravins. Nous devenons alertes.
La forêt ! la forêt ! plus rien au-dessus d’elle que ton seuil de grès rouge, abîme sidéral. – Air vierge !... entendez-vous les coqs de Metzeral ?.. Courage ! nous montons jusqu’aux cieux éternels, d’où nous verrons la plaine d’Alsace au grand large, et Munster et Colmar, Neuf-Brisach et le Rhin et la sombre Allemagne aux affreux burgs en marge ; et puis nous descendrons... « Stop ! ! les Chasseurs alpins ! »
Le capitaine grogne : il y met tout son cœur. « Me croyez-vous des ailes ? Ah ! mais, il faudrait voir. Vous êtes bougrement ailés, mes diables noirs, et même bougrement zélés pour le quart d’heure.
» On me continuera ce beau feu ? Je J’espère. En attendant, souffrez que je me désaltère. Ta gourde, mirliflore !... Vide ?.. Et le torrent !... Captez-le moi. N’oubliez pas votre parent, votre père. C’est moi, bagasse ! le bon père, et qui viens d’accepter pour vous le tralala, le haut chic de jeter les Prussiens en enfer. « Pour vaincre ou pour mourir, ma compagnie est là, colonel ! » Mes gaillards, j’ai répondu de vous. N’est-ce pas, j’ai bien fait ? Les beaux yeux tout de même, que c’est comme un bouquet de flammes. – Assez de flemme ! Homme au long col, tu n’as pas fini ton glouglou ?
» En avant ! – Hé ! lascars ! que voit-on par le bas ? – « On dirait un serpent d’azur... » – « Ou de soldats. » – « Et puis un autre, un autre... » – Et là-haut, sapristi ! » – « Ça grouille blanc et gris, ça grouille tout petit. »
– « Français en bas. Prussiens en haut. Nous au milieu. Que vous disais-je ? eh bien ! n’êtes-vous pas heureux ? Laissons grouiller. Comme un vénérable Munster, cette noble montagne est dévorée des vers.
» La manœuvre n’est pas ici, non ! mes zélés. C’est nous qui devons recevoir la dégelée, – tenir ! Le pic lance au galop des vapeurs grises. Les voilà, mes enfants, les vrais chevaux de frise ! »
– « Capitaine, aurons-nous la guerre ? » – « Ah ! curieux. Mais non, voyons, et les diplomates –môssieu ! – qu’en faites-vous ? » – « On nous obuse. » – « Croyez-vous ? » – « Nous sommes repérés. » – « C’est pour faire joujou.
» Tous à terre !... La guerre ?.. » – « Encore un obus ! flûte ! » – « Non, monsieur d’Estournelle est constant et si doux. Et le tribunal de La Haye ?.. on s’en fout ? Nous n’aurons pas la guerre avant treize minutes, moins douze. Allons, nos gars, je le dis sans vergogne, nous serons des héros, si tant est que l’on cogne. Visés par-ci ! visés par-là ! Foin du mystère ! Encore une seconde et nous aurons la guerre. »
Tenir une heure, là – c’est l’ordre – et puis forcer le Boche en ses tunnels qu’il faudra défoncer, – lui rendant par surcroît l’honneur qui lui est dû : la mort ! Patientez une heure, enfants perdus !
Et vous, tâchez de nous occire, ardentes cimes. Té ! vous faites long feu, fauchant des ribambelles d’arbres. Visez-nous donc, obus crétinissimes ! Jules, Jean, Paul et moi nous sommes immortels.
On croit mourir ? on est debout. On meurt ? on tient. On occupe le Boche et l’on a du maintien. Une tranchée s’impose, il faut bien se courber. « Jésus baissa trois fois les yeux », nous dit l’abbé.
Toute proche et crêtée de vapeurs se révèle, crépitante, la triple rangée de tunnels qui met du pied au front les arbres en sursaut et nous crache la mort lâche à pleins soupiraux.
Cela s’étage et vient trois fois hurler la mort aux hommes ? non, aux pins, à leurs aiguilles d’or. Et qu’est-ce, un ouragan de flammes et de fer, à qui creuse en rêvant la tranchée éphémère ?
En creusant la tranchée, vous rêvez donc, Chasseurs ? – « Oui. Un peu. Nous songeons à la vie azurée... à notre compagnon qui mourra dans une heure... aux pleurs lointains de nos mamans désespérées…aux mottes qu’on bêchait dans le petit jardin où passe l’angélus qui vient du Val de Loire : un jour, avec la bêche, on s’est blessé la main... et l’on a ri devant sa mère au désespoir...
Que fait-elle, maman ? A Dieu les tendres soins ! S’il faut mourir – mieux vaut se perdre en l’Éternel. Croyants ou mécréants, Dieu nous sera fidèle. » – Tous Le voient se pencher sur eux. Maman est loin.
Quoi ! plus de souvenirs ? non. Ils rêvent au Dieu qui fait tout et veut tout et les appelle et veut, qui Là-Haut fera d’eux une phalange insigne... quoique nul de mourir ne se trouve encor digne.
Le curé – bon géant, des « diables » honoré – leur dit la messe hier sous les feux du couchant. Hirondelles, corbeaux volaient bas dans les champs. Le rouge cœur de Dieu battait sur la contrée.
C’était l’heure où le ciel devient le paradis. Vers le repos du soir la corne retentit. Mais des pâtres fuyaient les nues amoncelées... quand le prêtre eut béni la guerre agenouillée, eut béni les soldats, leurs tâches, leur misère, mais aussi la beauté de la nature entière, les torrents, les ravins, le vol des oiseaux noirs, eut béni l’univers, les soldats et leur gloire.
Un orage éclatait lorsqu’il leva l’hostie. – Tous furent à genoux sous un grand courant d’air. Il semblait bien que Dieu mourût dans les éclairs. O visages en pleurs déchirés des orties, visages de soldats en pleurs, levés ensemble, que vos yeux reflétaient alors le saint exemple et qu’ils « juraient » la Mort au feu pour la Patrie – de tous ! comme sous la foudre est mort Jésus-Christ !
Les voix de nos canons ridant les hautes fagnes, d’un tragique Hosanna clamaient notre destin et l’on eût dit que répété dans les lointains le battement des cœurs remplissait la montagne.
A présent te voici, brave et tous cœurs donnés, te voici donc, Jeunesse, à périr condamnée qui sait ? – pareille au Dieu qui mourut sans murmure ? Non ! le ciel crie et se révolte la nature.
O nos enfants perdus, Chasseurs de l’Hilsenfirst ! – allons !.. tenez une heure !... deux !... Rien ne résiste aux Ayant-Dieu-pour-Écuyer ! Tenir ! combattre et vaincre ! Ah ! oui, tenir un jour, deux, trois… ou quatre...
Ils les tinrent : plusieurs déjà hurlaient de rage, mais les autres chantaient « Marlbrough » et, bien plus fort, notre curé géant l’air du Toréador. Que voulez-vous, c’était la fête du courage.
Longue fête ! – Un matin, des abîmes vermeils, bondit le chœur de nos clairons victorieux. L’air en tremblait d’amour jusques au grand soleil. L’air s’en réjouissait jusques au cœur de Dieu.
Lorsqu’on Les délivra, l’aurore était sublime. « Gueulons-nous, capitaine ? – Eh ! oui, sac-à-papier ? » On Les trouva chantant devant leurs prisonniers, à la gloire du jour, l’air de Sidi-Brahim.
Paul FORT
Poèmes de France
Bi-mensuel n° 19, 1er septembre 1915