Re: Huit mois dans les lignes allemandes, Raymond Pître I
Publié : jeu. mai 03, 2007 12:53 pm
Bonjour à tous,
Jacky Tessier que je remercie infiniment m'a transmis un texte très intéressant sur le périple de Raymond Pître, jeune soldat au 28e RI.
Je livre ici ce récit en épisode. N'hésitez-pas à me faire part de vos remarques.
[g]Huit mois dans les lignes allemandes
Le récit d'un jeune soldat du 28e RI, Raymond Pître,
originaire d'Aveny, canton d'Ecos (Eure) [/g]
Disparu le 27 août 1914, il donne de ses nouvelles le 15 mai 1915
Lorsque l'héroïque armée française vers la fin d'août 1914 dut céder à la pression de l'énorme torrent des Barbares qui avaient envahi la Belgique et le nord de la France, elle battit en retraite à marches forcées de 30 à 40 kilomètres par jour, jusqu'au moment où sur la Marne, elle s'immobilisa comme un mur à la voix du général Joffre.
L'ennemi voulut percer le mur d'airain. Il s'y brisa et dut reculer jusqu'aux endroits où il avait préparé des tranchées dans lesquelles il s'est terré comme le sanglier dans sa bauge.
Les boches se cramponnent, s'accrochent jusqu'au jour où nos poilus les délogeront et dès lors l'Allemagne verra poindre la débâcle fatale.
Alors que nos régiments reculaient à marches forcées, beaucoup de soldats harassés de fatigue, les pieds en sang, durent s'arrêter au revers des routes et furent faits prisonniers.
Il en fut parmi ces braves traînards qui parvinrent à se cacher, puis à se procurer des vêtements civils et ils attendirent le moment propice pour revenir en France. Les journaux nous ont donné les récits de rescapés qui pendant tout le temps où ils demeurèrent dans les lignes allemandes ne purent donner de leurs nouvelles à leurs familles.
Ces derniers jours, nous avons eu la bonne fortune de rencontrer à Evreux un de ces rescapés qui est originaire d'une commune de l'arrondissement des Andelys. Depuis le 15 août, il n'avait pas donné de ses nouvelles à sa famille et c'est seulement le 15 mai dernier, c'est-à-dire après 9 mois que ses parents ont reçu de lui une lettre datée de la Hollande.
Ce rescapé est M. Raymond Pître, âgé de 22 ans, soldat de la classe 1913, dont le père est chef-cantonnier à Aveny, petite commune du canton d'Ecos.
M. Raymond Pître qui appartient au 28e d'infanterie et était caserné lors de la déclaration de la guerre au fort de Daumont (Seine-et-Oise) est un blond normand, aux moustaches à peine naissantes et à la physionomie sympathique. Il porte 18 à 19 ans et de paraître aussi jeune a grandement contribué à sa sécurité dans les lignes allemandes.
Ce jeune soldat actuellement ne se ressent presque plus des privations qu'il a endurées. Il nous a fait le récit de son extraordinaire odyssée. A maintes reprises, il a vu la mort de près, car il a failli être pris par les Allemands et il savait ce qui l'attendait.
"Comme je ne m'étais pas rendu, nous disait-il, je savais que je serais fusillé. Pris pour pris, j'aimais mieux courir la chance de m'échapper un jour à l'autre. J'y ai mis huit mois, mais je suis revenu après avoir vu bien des pays et je compte bien maintenant aller à Berlin !"
Telle est la mentalité du brave petit soldat. A son retour à son dépôt à Evreux, il a été félicité par tous les officiers qui ont eu connaissance de son aventure. Félicitations bien dues à son courage et à sa tenacité.
Dans le récit que nous a fait Raymond Pître, nous supprimons tous les noms, car il ne faut pas que les boches fassent payer aux braves gens qui se sont dévoués à le cacher et à le nourrir, lui et des centaines d'autres soldats dans le même cas, le dévouement dont ils ont fait preuve à tous les instants.
Il y eut hélas ! des lâches cependant. Pître nous a cité une femme qui en mauvais termes avec sa voisine à dénoncé celle-ci aux boches comme donnant asile à 11 anglais.
Les allemands sont arrivés en nombre alors que les anglais mangeaient la soupe. Les 11 anglais ont été fusillés. Le maître de la maison et son fils ont également été fusillés, la femme condamnée à 5 ans de prison et la maison a été brûlée. La dénonciatrice immédiate a reçu - tel Judas - une somme d'argent des Allemands. Se pendra-t-elle comme Judas ? C'est ce qu'elle a de mieux à faire.
La suite dans quelques jours....
Vincent
Jacky Tessier que je remercie infiniment m'a transmis un texte très intéressant sur le périple de Raymond Pître, jeune soldat au 28e RI.
Je livre ici ce récit en épisode. N'hésitez-pas à me faire part de vos remarques.
[g]Huit mois dans les lignes allemandes
Le récit d'un jeune soldat du 28e RI, Raymond Pître,
originaire d'Aveny, canton d'Ecos (Eure) [/g]
Disparu le 27 août 1914, il donne de ses nouvelles le 15 mai 1915
Lorsque l'héroïque armée française vers la fin d'août 1914 dut céder à la pression de l'énorme torrent des Barbares qui avaient envahi la Belgique et le nord de la France, elle battit en retraite à marches forcées de 30 à 40 kilomètres par jour, jusqu'au moment où sur la Marne, elle s'immobilisa comme un mur à la voix du général Joffre.
L'ennemi voulut percer le mur d'airain. Il s'y brisa et dut reculer jusqu'aux endroits où il avait préparé des tranchées dans lesquelles il s'est terré comme le sanglier dans sa bauge.
Les boches se cramponnent, s'accrochent jusqu'au jour où nos poilus les délogeront et dès lors l'Allemagne verra poindre la débâcle fatale.
Alors que nos régiments reculaient à marches forcées, beaucoup de soldats harassés de fatigue, les pieds en sang, durent s'arrêter au revers des routes et furent faits prisonniers.
Il en fut parmi ces braves traînards qui parvinrent à se cacher, puis à se procurer des vêtements civils et ils attendirent le moment propice pour revenir en France. Les journaux nous ont donné les récits de rescapés qui pendant tout le temps où ils demeurèrent dans les lignes allemandes ne purent donner de leurs nouvelles à leurs familles.
Ces derniers jours, nous avons eu la bonne fortune de rencontrer à Evreux un de ces rescapés qui est originaire d'une commune de l'arrondissement des Andelys. Depuis le 15 août, il n'avait pas donné de ses nouvelles à sa famille et c'est seulement le 15 mai dernier, c'est-à-dire après 9 mois que ses parents ont reçu de lui une lettre datée de la Hollande.
Ce rescapé est M. Raymond Pître, âgé de 22 ans, soldat de la classe 1913, dont le père est chef-cantonnier à Aveny, petite commune du canton d'Ecos.
M. Raymond Pître qui appartient au 28e d'infanterie et était caserné lors de la déclaration de la guerre au fort de Daumont (Seine-et-Oise) est un blond normand, aux moustaches à peine naissantes et à la physionomie sympathique. Il porte 18 à 19 ans et de paraître aussi jeune a grandement contribué à sa sécurité dans les lignes allemandes.
Ce jeune soldat actuellement ne se ressent presque plus des privations qu'il a endurées. Il nous a fait le récit de son extraordinaire odyssée. A maintes reprises, il a vu la mort de près, car il a failli être pris par les Allemands et il savait ce qui l'attendait.
"Comme je ne m'étais pas rendu, nous disait-il, je savais que je serais fusillé. Pris pour pris, j'aimais mieux courir la chance de m'échapper un jour à l'autre. J'y ai mis huit mois, mais je suis revenu après avoir vu bien des pays et je compte bien maintenant aller à Berlin !"
Telle est la mentalité du brave petit soldat. A son retour à son dépôt à Evreux, il a été félicité par tous les officiers qui ont eu connaissance de son aventure. Félicitations bien dues à son courage et à sa tenacité.
Dans le récit que nous a fait Raymond Pître, nous supprimons tous les noms, car il ne faut pas que les boches fassent payer aux braves gens qui se sont dévoués à le cacher et à le nourrir, lui et des centaines d'autres soldats dans le même cas, le dévouement dont ils ont fait preuve à tous les instants.
Il y eut hélas ! des lâches cependant. Pître nous a cité une femme qui en mauvais termes avec sa voisine à dénoncé celle-ci aux boches comme donnant asile à 11 anglais.
Les allemands sont arrivés en nombre alors que les anglais mangeaient la soupe. Les 11 anglais ont été fusillés. Le maître de la maison et son fils ont également été fusillés, la femme condamnée à 5 ans de prison et la maison a été brûlée. La dénonciatrice immédiate a reçu - tel Judas - une somme d'argent des Allemands. Se pendra-t-elle comme Judas ? C'est ce qu'elle a de mieux à faire.
La suite dans quelques jours....
Vincent