Bonjour Olivier,
Si Tim Gale a visiblement bien consulté des archives françaises de Vincennes sur le sujet (JMO et carton n° 16N2165), il n'a pas tout exploité ou, peut-être, mal compris tout ce qu'il a pu y lire.
Il faut, pour commencer, noter que le Lt Boudon n'écrivait pas à un ami, mais à un Lieutenant du Service Historique de l'Armée qui lui avait demandé, depuis un moment déjà, un récit de cet engagement.
Il est probable que la lecture des documents, conservés par les Archives Militaires, lui avait fait se poser pas mal de questions, visiblement restées sans réponses.
Et effectivement, sans le récit du Lt Boudon, les rapports de l'AS ne peuvent rendre totalement copte des faits.
Bien entendu, ni le JMO du 501° RAS ni son historique n'était en mesure de répondre aux questions que se posaient le Lt Suire et il est intéressant de noter que, visiblement, il ne semble pas y avoir eu, au retour des prisonniers de guerre, un travail systématique de débriefing de ces hommes capturés au combat.
Concernant l'AS, les équipages capturés ne représentaient pas un volume trop important d'hommes, et si un travail de débriefing des équipages de chars capturés a bien été réalisé après guerre, il ne semble malheureusement pas qu'il ait été conservé par les archives militaires françaises.
Voici pour commencer l'intégralité du récit du Lt Charles Boudon, écrit non pas en 1930, mais vingt ans après les faits, soit en 1938.
Le Lieutenant de Réserve Boudon Charles, à Monsieur le Lieutenant Suire, attaché au Service Historique de l'Armée.
Mon Cher Camarade,
Voici quelques jours déjà, que j'ai reçu votre lettre par laquelle vous me demandez la relation de mon dernier combat comme Officier au 501° Régiment de Chars.
Hélas ! Voici bientôt vingt ans de cela. J'ai oublié, beaucoup de détails se sont effacés, bien des noms se sont enfuis de ma mémoire, et n'ayant pu trouver ici une carte d'Etat-Major des lieux, je n'ai pu vous faire de croquis.
Enfin, j'ai l'honneur de vous transmettre la narration demandée, trop heureux de pouvoir vous être agréable et si ce récit d'un combat, qui s'est bien mal terminé pour moi, peut contenir une leçon pour les Officiers, mes frères, dans le combats à venir.
Fin Mai 1918, sous la menace allemande, fut formé le 501° Régiment de chars de combat Renaud, sous le cdt. du Colonel de Velprix. Je fus affecté à la 3° Cie, Lt Clermont, du 3° Bataillon, du Commandant Perraldi.
Dans la nuit du 30 Mai, mon Bataillon quittait le Camp de Champlieu en direction de Villers-Cotteret, que nous traversâmes dans la matinée du 31 Mai, nous rendant en forêt, au "Rendez-vous de Chasse".
Dans l'après-midi du 1° Juin, sur ordre du Lieutenant Clermont, je me dirigeais avec ma section, sur le Carrefour du Cornouillard, où je devais établir mon poste de départ. J'avais reçu la mission suivante :
1° Me mettre en relation avec le Colonel Commandant le Régiment d'Infanterie en ligne,
et avec les Officiers commandant les unités de la 1° Ligne.
2° En cas d'attaque Allemande et de replis des notres, contre-attaquer et rétablir notre infanterie dans ses lignes.
Ne pas céder un pouce de terrain.
Après avoir exécuter la première partie de ma mission et après étude du terrain, aussi complète que la nuit me le permit, je rentrai à mon Poste de Départ. Il était environ 23 heures.
Vers 4 heures du matin, le 2 Juin (jour de mon anniversaire), je fus brusquement mis en éveil par une fusillade intense et le fracas de nombreuses arrivées de 210, en même temps que le bruit causé par une troupe en marche qui passait à proximité de mes chars.
Je me rendis compte, alors, que les Allemands venaient de déclencher une forte attaque sur nos lignes et que nos fantassins reculaient par échelon, en combattant. Je demandais à ces soldats, où se trouvait leur Officier, un Lieutenant se présente aussitôt. Je lui dit de regrouper ses Hommes et de suivre les chars qui allaient contre-attaquer, pour rétablir nos lignes.
Cet officier tint à guider mon char jusqu'au déboucher de la forêt.
J'envoyais un agent de liaison à mon Commandant de Compagnie, le mettant au courant de la situation, l'avisant de mon attaque et lui demandant du renfort. Puis, rassemblant mes chefs de chars, je leur donnais rapidement mes dernières instructions. Je leur recommandais, notamment, de ne pas économiser les munitions.
Enfin, tout mon personnel ayant pris place, je donnais le signal : En avant, en Bataille !
Débouchant de la forêt sur un plateau, dont le terrain uni était semé de blé, qui était alors presque en épi, les chars prirent leurs position à 60 m d'intervalle et marchèrent au combat en ouvrant un feu très vif sur les mitrailleuses allemandes, dissimulées dans les blés. Pour ma part, je tirais 80 obus de 37 mm presque à bout portant.
Notre combat fut merveilleux. Mes chars marchaient comme à l'exercice, malgré le feu vraiment terrifiant des Allemands qui dirigeaient tous leurs efforts sur les chars qui sous les rafales de balles et les explosions de grenades, vibraient comme des caisses de résonance.
Notre infanterie qui avait très bien suivi, était depuis assez longtemps déjà rétablie dans ses lignes, notre mission était donc remplie et je m'apprêtais à faire aux char le signal convenu pour regagner notre Poste de Départ.
Je donnais un dernier regard sur le champ de bataille, par la fente de regard de ma tourelle. A ce moment, je fus atteint à l'oeil gauche par des éclats de balles en fusion, et au même instant, je fus blessé au sommet du front, juste au-dessus de l'oeil droit, par une balle tirée d'un avion qui pendant toute la durée du combat, survolait mon char à faible hauteur.
Sous la douleur, je n'eut que le temps de donner l'ordre à mon conducteur de retourner au poste de départ et je m'affaissais dans le char, ayant presque perdu connaissance. Quelques instants plus tard, revenu à moi, je me cru aveugle.
J'avais l'oeil définitivement perdu et le droit fermé par l'enflure et le sang qui, coulant de ma blessure du front, se coagulait.
Je demandais à mon mécanicien si nous étions bientôt arrivés. Il me répondit : " Mon Lieutenant, je ne sais pas où nous sommes et le char n'avance plus."
Le char n'avançait plus ! Cependant, j'entendais le bruit régulier du moteur. Machinalement je passais alors ma main sur mes yeux et ainsi j'essuyais le sang qui s'était figé sur mon oeil droit, et la vue me fut rendue.
Regardant par la fente de regard, je me rendis compte que nous étions dans la forêt. Je voyais tourner les chenilles, mais le char restait immobile. Je commandais quelques manoeuvres : marche avant, marche arrière. Les chenilles obeissaient très bien mais le char ne bougeait pas.
Le combat était terminé. Quelques coups de feu isolés troublaient seulement le silence.
Je ne voyais plus aucun Allemands, mais je les devinais tout près. Cette situation ne pouvait s'éterniser.
D'une part, j'avais hâte d'arriver près de mes Chefs, pour les mettre au courant du combat et les entretenir sur le danger des fentes de regard, d'autre part, je craignais d'être à court d'essence.
Il me fallait agir rapidement. J'ouvris la porte de ma tourelle afin de sortir du char et trouver la cause de son arrêt.
Comme je sortais la tête, je reçu un violent coup de crosse qui m'eut, sans doute assommé, si je n'avais pas été protégé par mon casque qui, sous le choc, roula à terre.
J'allais être tué, lorsqu'un jeune Lieutenant Allemand écarta les soldats et me dit : "Monsieur, rendez-vous."
Très nombreux, les Allemands entouraient le char. J'étais seul, blessé, sans armes. Je dus me rendre.
Je connus alors la cause de mon arrêt. Au début du combat, mon mécanicien avait rabattu les obturateurs sur les fentes de regard, afin de ne pas être blessé par les éclats de projectiles. Il conduisait en aveugle, guidé seulement par mes signaux qui lui manquèrent lorsque je fus blessé. Lorsqu'il reçu l'ordre de se rendre au Poste de Départ, il n'opéra qu'un à droite, au lieu de faire un demi-tour complet. Il marchait en quatrième vitesse.
En arrivant à la lisière de la forêt, le char rencontrant deux arbres dont les étaient très rapprochés et dont les troncs en sécartant, formaient fourche, s'enfonça entre eux; les chenilles en tournant avaient fait leur place dans les troncs et le char était suspendu.
A mon retour d'Allemagne, le Général Estienne, notre chef vénéré, me dit que mon char avait été retrouvé en Juillet, lors de notre avance, et que l'emploi de deux tracteurs avait été nécessaire pour le retirer de sa position.
L'Officier Allemand qui m'avait fait prisonnier fut vraiment parfait. Après avoir pansé mes blessures, il me donna un cordial et me fit conduire par un Adjudant, au poste de secours, situé à l'entrée du village de Longpont.
Là je me rendis compte des pertes subies par les Allemands. Je dois être en dessous de la vérité, en les estimant à 300 hommes tués ou blessés.
Le soir, je fus évacué sur Missy, ou j'eu la visite des deux officiers aviateurs qui m'avaient blessé au front.
Quelques jours plus tard, je fus dirigé sur Laon où je reçu pendant près d'un mois, les soins d'un médecin oculiste, puis en Juillet, sur l'Allemagne dans la forteresse de Torgau-sur-Elbe, camp de représailles.
A mon retour d'Allemagne, en Janvier 1919, j'eu ma récompense magnifique. Le Commandant Pérraldi me donna l'accolade et m'affirma que ce matin du 2 Juin, j'avais sauvé la forêt de Villers-Cotterets.
Quelques jours plus tard, le Général Estienne, après m'avoir fait raconter mon combat, me faisait obtenir la Croix de Chevalier de la Légion d'Honneur.
Vingt ans bientôt se sont écoulés. L'oubli n'est pas encore venu, et déjà la guerre gronde à nouveau.
Si elle vient, elle me trouvera prêt encore, à faire mon devoir et à donner mes dernières forces pour la défense de notre cher Pays.
Veuillez mon Cher Camarade, excuser mon retard à vous répondre, et agréer l'expression de mes sentiments les meilleurs.
Charles Boudon (Valbréas - Vaucluse)
Quelques remarques préliminaires sur le commentaire initial d'Olivier :
Le conducteur du Lt Boudon n'a pas été blessé, il conduisait à l'aveugle avec les fentes d'observations obturées.
Guidé uniquement par son chef de char sur un terrain plat, il a perdu le char parce qu'ignorant que son Lieutenant était blessé.
Le char n'était pas du tout à cours de munitions il n'avait tiré que 70 obus (sur 237 en dotation)
Le Lt Boudon ne cherchait pas à s'enfuir, il se pensait revenu dans ses lignes, et n'eut pas même le temps de sortir de son char.
Et un complément sur les parties surlignées du texte :
Mon Cher Camarade,
Il s'agit d'une simple formule de politesse entre officiers du même grade qui n'implique absolument,
comme semble le penser Tim Gale dans son ouvrage, une relation amicale ancienne ou même récente.
S'ils s'étaient connus, le tutoiement aurait été de rigueur dans cette lettre.
L'original de Vincennes n'est pas manuscrit, il s'agit d'un texte tapé à la machine, signé par Charles Boudon.
"Vers 4 heures du matin, le 2 Juin" :
Il s'agissait du 3 et l'artillerie allemande a commencé à canonner à 3 H 20
"J'envoyais un agent de liaison à mon Commandant de Compagnie" :
Comme le montre le rapport de Compagnie, les ordres sont venus du Lt Clermont et non le contraire.
La Section Boudon n'a pas été la première activée.
"dont le terrain uni était semé de blé" :
Il s'agissait de seigle . . . détail qui 20 ans après n'a pas une importance stratégique, mais qui, comme le dit le Lieutenant Boudon s'est passé il y a longtemps.
Autre oubli significatif, il ne donne pas le nom de son binôme le Canonnier Belabre
Il est bon de rappeler que les céréales, à l'époque, avaient des tiges vraiment très longue. C'est ce qui explique la fouille "en zig-zag" faite par les chars en rentrant dans leurs lignes. Il était facile pour les Allemands de se cacher.
"que le temps de donner l'ordre à mon conducteur de retourner au poste de départ"
Ordre mal compris par le conducteur qui, de plus n'a pas eu, de suite, d'indications complémentaires
et qui pilotait en aveugle.
[#0000ff]"J'allais être tué":
Lt Lieutenant Boudon n'a à peine eu le temps de passer la tête hors de sa tourelle.
Le coup de crosse était un acte logique de soldat allemand pour prendre le dessus sur cet ennemi . . .
dont il ne devait pas connaître l'armement personnel.
Il n'est pas même évident qu'il soit descendu du char au moment ou l'officier allemand est intervenu.
Ceci dit, il est assez logique qu'il ait alors pensé qu'il pouvait être tué après ce coup de crosse.
Dans son ouvrage Tim Gale écrit :
" They were seized by some furious german infantry who were determined to lynch the two frenchmen"
Ce n'est pas ce que dit Charles Boudon !
La rudesse de l'intervention allemande ne signifie pas pour autant que les Allemands entourant le char étaient collectivement près à tuer des soldats qui étaient à leur merci.
Il serait intéressant, à ce sujet, d'avoir des éléments historiques allemands de la 28° DI allemande
ou du 111° Reserve Jaeger Regiment.
"J'étais seul, blessé, sans arme" :
Seul, non, deux et peut-être quatre hommes si le deuxième char était juste à côté . . . .
Certes, pistolet et poignard n'étaient pas la panacée, mais s'étaient tout de même des armes et elles ont
préventivement pour les Allemands amené au coup de crosse
"obtenir la Croix de Chevalier de la Légion d'Honneur" :
Décoration qui prouvent que les soupçons de trahison d'équipages de chars, prisonniers et trop bavards,
soupçons évoqués au GQG dès Juillet 1917, ne l'ont pas du tout concerné.
Extrait du rapport de combat de la première section de l'AS 309, rédigé par le Maréchal des Logis Bellavoine le 4 Juin 1918.
Le 4 Juin, le rapport de combat est rédigé par le MdL Bellavoine, chef de la 2° Demi-section, et sous-officier le plus ancien. Le Lieutenant Boudon était le seul officier de la 1° Section de l'AS 309.
Au premier Juillet 1918, le MdL Bellavoine est nommé Ajdudant.
"En dépassant la lisière pour déboucher sur le plateau, les Allemands apparaissent couchés à 50 m. environ.
Ils sont dans les seigles. La plupart s'enfuient à la vue des chars et ont à peine le temps de tirer quelques
coups de fusils et de mitrailleuses.
Ceux qui essaient de résister sont pris par l'infanterie qui suit, l'arme à la bretelle, derrière les chars.
L'infanterie progressant derrière les chars va un peu au delà de la route Voutry-Corcy ou elle reprend ses anciennes positions.
Passé cette route, j'aperçois à ma gauche deux chars et n'en voit pas à ma droite. Arrivé au Sud de la ferme Saint Paul avec ces deux chars qui ne cessent de marcher avec moi l'artillerie ennemie ouvre un tir sur nous. Ses obus tombent par trois autour des chars.
Nous rentrons lentement en contournant des meules de pailles situées au Sud/ouest de la ferme Saint Paul.
Aussi bien en avant de la route Voutry-Corcy qu'au delà, nous avons réduit de nombreuses mitrailleuses.
Elles gisent sur le terrain, abandonnés par leurs servants.
C'est surtout au delà de la ligne récupérée par nos fantassins qu'elles sont nombreuses.
Ces dernières ne seront pas ramassées par notre infanterie.
Incidents - Mon char mitrailleur (Brigadier Argence) m'a dépassé dès notre arrivée à la route Voutry-Corcy.
Il filait à une allure rapide vers la ferme Saint Paul. Je ne l'ai plus revu. C'est également vers cette route que j'ai constaté la disparition d'un char canon.
C'était celui du chef de section, le Lieutenant Boudon."
Organisation de la 1° Section de l'AS 309 :
Renault FT canon n° 66384 - Lt Boudon et Canonnier Belabre
- Première demi section :
Renault FT canon n° 66180 - MdL . . . . . . . et Canonnier . . . .
Renault FT mitrailleuse n° 66189 - Brig. . . . . . . et Canonnier . . . . . .
- Deuxième demi section :
Renault FT canon n° 66303 - MdL Bellavoine et Canonnier . . . .
Renault FT mitrailleuse n° 66187 - Brig. Argence et Canonnier Didier
Extrait du rapport de combat de la Compagnie AS 309, rédigé par le Lieutenant Clermont le 4 Juin 1918.
Engagement :
Le lendemain matin, mardi 3 Juin, à 4h 30, après une action d'artillerie qui a commencé vers 3 h 20,
le Colonel Regard, Cdt le 167° RI communique le renseignement suivant au Lt Cdt la Compagnie :
"Des éléments ennemis qui ont refoulé notre ligne de surveillance se rapproche de la lisière de la forêt,
ayant dépassé la route Voutry/Corcy".
Ordre de s'engager est donné à la 2° Section.
Presque au même moment, un second renseignement signale que l'infiltration ennemie a commencé
à se produire dans la forêt au Nord et au Sud de la Laie des vignes.
A son tour la section de réserve est actionnée tandis qu'à la 1° Section est envoyé l'ordre d'intervenir
en direction de la Ferme Saint Paul.
A ce moment, et de ce côté, en effet, des tirailleurs ennemis qui ont dépassé la route Vouty/Corcy,
sont à 80 m de la forêt.
Les sections font donc irruption sur le glacis à l'Est de la lisière de la forêt dans l'ordre ;
2° Section à 4 h 50,
1° Section à 5 h 30,
3° Section avec trois chars vers 5 h 30,
s'étalant successivement :
- 1° Section, à gauche du secteur de contre-attaque.
- 2° Section, à droite du secteur de contre-attaque.
- 3° Section, au centre du secteur de contre-attaque.
Les éléments ennemis qui s'étaient infiltrés dans le bois, sont tués ou fait prisonniers par l'infanterie amie.
Les sections de chars déployées en bataille et en liaison intime avec l'infanterie qui les suit agissant
vigoureusement et leur action se fait sentir aussitôt.
L'ennemi presque exclusivement armé de mitrailleuses et de mitraillettes était parvenu, en se glissant
par les ravins qui montent vers la forêt, à garnir le plateau.
De nombreuses mitrailleuses sont réduites malgré la ruse de l'ennemi qui essaie d'utiliser les hautes herbes
pour se dissimuler à la vue des chars.
Le feu des canons et des mitrailleuses des chars d'assaut fait éprouver à l'ennemi des pertes lourdes;
la plupart des Allemands qui échappent à ces feux, s'enfuient ou se rendent.
Certains tentent vainenet d'éviter le feu des canons et des mitrailleuses en tournant autour des chars,
ils sont soit culbutés ou écrasés par les chars qu'ils entourent, soit tués par le feu des chars voisins.
L'infanterie amie étant réinstallée dans ses positions reconquises, les chars continuent à avancer
et refoulent l'ennemi dans les ravins; ils ne rentrent qu'à une allure lente en cisaillant le front afin de
ne laisser aucune partie de terrain inexploré et de donner l'impression ux troupes amies qu'elles ne sont pas abandonnées par eux, ils rentrent et se replacent ( 2° et 3° Section), à gauche et à droite de la Laie des Vignes, respectivement à 60 et 40 m environ, en arrière de la lisière de la forêt (2° section en colonne et 3° Section en bataille).
Les sections ont assuré le rétablissement de la ligne d'infanterie sur un front d'environ 1800 m.
Il est alors procédé au ralliement de ces deux sections et à leur regroupement, des incidents du combat
les ayant légérement dissociées.
A ce moment, 8 h 30 environ, 3 chars venant de la direction de la ferme Saint Paul, ayant contourné des meules de paille aux abords immédiats de la ferme rentrent en suivant la lisière de la forêt située au Nord de la ligne, poste des Cornillards, ferme Saint Paul.
Ce sont les seuls chars restants de la 1° section qui reviennent ayant perdu le char du chef de section et le char mitrailleur de la 2° Demi-Section avec leurs équipages.
Au départ, ces deux chars précipitant exagèremment leur allure, ont foncé vers la ferme Saint Paul,
ce qui a désagréger la section. Il est à présumer qu'ils sont allés s'immobiliser dans le terrain marécageux qui se trouve au delà de la ferme et qui leur ont masqué par les herbes ou qu'ils se sont, en franchissant la pente assez abrupte qui descend vers Corcy, mis dans l'impossibilité, en raison des obstacles qu'ils ont rencontrés, de revenir en arrière.
Des renseignements fournis par les chefs de chars restants, il résulte que le char du chef de Section semble
avoir franchi la lisière de la forêt le dernier, ce qui a amené une certaine confusion et faire prendre pour le chef de section, un autre char-canon que le sien.
De plus l'irruption dans la zone de la section d'un char mitrailleur d'une section de droite n'a fait qu'accentuer encore cette erreur.
La consommation de munitions de la 1° Section (y compris les deux chars disparus ; connue pour le char Boudon, et estimée pour l'autre char) est de 300 obus et plus de 15 bandes de mitrailleuses de 96 cartouches.
C'est nettement plus que les 20 obus et 4 bandes de mitrailleuse tirés par chacune des deux autres sections de l'AS 309
La dotation du FT canon était de 237 obus et celle deu FT Mitrailleuse de 4800 cartouches de 8 mm.
Les 5 Renault de la 1° Section du Lt Clermont ont été engagés dans la partie la plus profonde du plateau, c'est probablement ce qui explique le niveau de leur consommation de munition en deux heures de combat.
Le retour vers 8 h 30 est du aux pannes de deux des trois derniers chars, une fois repassé la route Voutry/Corcy.
Tous les rapports rédigés à partir du niveau du Cdt de l'AS 309 insiste sur le probable non respect des procédures avec "la charge" des deux chars disparus et ce n'est qu'au retour d'Allemagne du Lt Boudon que la bonne raison a été comprises.
Les deux chars ont été retrouvé le 24 Juillet par l'équipe de récupération de l'AS 309.
Il semble évident que le Lt Boudon a été obligé d'accélérer au départ car, mis en bataille le dernier à la sortie du bois, il a du rattrapper ses chars et il est probable qu'en final, le char du Brigadier qui avait du coller au train de son Lieutenant l'a aveuglément suivi dans son virage vers la droite et le ravin boisé à l'Est de la ferme.
Les Allemands ont tenter de récupérer les chars, mais ils se sont finalement contenter de démonter les magnétos et les armes.
Il reste à trouver des récits des trois autres survivants de ces deux chars et aussi, peut-être des éléments complémentaires du côté de la 28° DI allemande.
Comme le montre les rapports de la 128° DI, les pertes des 111° 110° Reserve Jaeger Infantry ont été très importantes lors de cet attaque (probablement plus de 1000 tués sur deux Kilomètres du front de ces 2 à 3 heures d'attaque.
La fiche matricule du Lt Boudon n'est pas en ligne (les A.D. du Jura . . . ! !) mais son dossier militaire le n° 8ye 7125, est consultable à Vincennes au Service Historique de la Défense.
Concernant le souhait exprimé en 1938 de pouvoir encore servir, Charles Boudon, né en 1882? a été rayé du cadre de réserve le 3 Juin 1939. Il n'a donc pas été mobilisé dans les chars, mais a peut-être eu une action dans la Résistance.
Très bonne journée - Michel