Précisions techniques canon de 75 et canon d'Argonne

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patrick corbon
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Re: Précisions techniques canon de 75 et canon d'Argonne

Message par patrick corbon »

Bonjour à tous,

Oups, Florian, j'ai préparé le post et je l'ai posté bien après toi (repas oblige). Excuse mais autant le laisser tel quel. Enfin comme je le pensais tu as été bien plus précis que moi.

Après recherche, je confirme que dans une casemate de Bourges on peut battre un secteur max de 54° pour une chambre de tir de 3m40 de large (cas extrême car le pivot (sellette affût) doit alors être partiellement encastré dans le mur). Une chambre de tir en général a 3m de largeur sur une profondeur de 3 m 50. Le champ vertical permis est de -10 à +15° ce qui donne une portée théorique max de 5500 m avec l'obus à balles et 5600 m avec l'obus explo. C'était largement suffisant pour un tir de flanquement (Nota : pour la portée max de 10700 m, il faut enterrer la crosse. A charge réduite elle est de 6400m. ).

Pour une pièce sur affût ou une pièce quelconque d'une longueur hors tout égale, l'emploi d'un pivot avant fixé près du piédroit face à l'ennemi tel celui de l'affût du 75 de la casemate précitée permet de réduire la largeur du créneau de tir (légèrement supérieure à l'épaisseur du mur avec partie gauche élargie pour la visée). Par contre pour la rotation vu la distance entre le pivot avant et l'arrière du châssis on est obligé d'élargir la chambre de tir (3m40 de large pour l'angle de 54° dans une casemate de Bourges.
Inversement pour un pivot central (correspond en gros au centre de l'axe des roues pour un canon de campagne) on est obligé pour conserver un angle de tir identique d'élargir le créneau de tir. La largeur de la chambre de tir est moindre que dans le cas précédent. Elle n'est que sensiblement supérieure à la largeur du créneau de tir nécessaire.

C'est le cas sur votre photo ce qui montre que cette casemate était dotée d'un canon de campagne sur ou sans pivot central (Nota : une pièce d'artillerie de campagne lourde pouvant se monter sur pivot central nécessite un pivot surélevé avec un encuvement autour du pivot pour éviter que les roues ne touchent le sol pour faciliter la mise en rotation de la pièce). De fait dans les deux cas c'est le pivot qui absorbe le recul résiduel et non pas la bêche de crosse. L'absence de pivot et d'encuvement milite pour l'utilisation d'une vulgaire pièce de campagne. La longueur de la chambre de tir devrait confirmer si c'est une pièce avec ou sans frein de recul. Du fait de la taille de l'ouvrage cela devait être une petite pièce (Nota: la hauteur du tube d'un 90 devait bien être à 1m 30 du sol voire plus).

Pour répondre à Jidu, Epinal compte six casemates rive droite et deux rive gauche (Uxegney) ce qui fait 8 casemates sur les 46 en service en 1914. Au total 92 pièces de 75 sur affût existent ce qui donnent bien 46 casemates. Deux à Verdun (Haudainville) sont équipées de 95 de cote ce qui donne 4 pièces en excédent. Logiquement en 1914 Deyvillers devait être doté de ses affûts d'autant que Uxegney fut le dernier fort équipé et lui les a. Par contre lors du réarmement en 16 pas évident de savoir si les affûts y ont été remis ou non. Ont-ils d'ailleurs été retirés en 15 ? 4 affûts sont venus équiper le Rembêtant et Troyon (provenance inconnue). Florian doit en savoir plus que moi sur le sujet.

Cordialement
patrick
ALVF
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Re: Précisions techniques canon de 75 et canon d'Argonne

Message par ALVF »

Bonjour,

Au sujet des casemates de l'Argonne, il faut rechercher les positions exactes des batteries de montagne employées dans ce secteur, en effet, ces batteries ont souvent été mises en batterie en toute première ligne à 60-80m des positions de l'ennemi (il y a même un exemple célèbre d'une pièce de 65mm de Montagne mise en batterie à 13m de la tranchée ennemie à Vauquois)!
Ainsi, la 43° batterie du 2° R.A.M. a occupé des positions avancées en 1915 aux cotes 263 et 285, outre ses 4 canons de 65mm de Montagne Mle 1906, elle armait en même temps pas moins de 9 canons de 80mm de Montagne du système de Bange et 2 canons de Marine de 47mm Mle 1885.
La 45° batterie du 2° R.A.M. armait dans le bois de La Gruerie ses 4 canons de 65mm mais aussi une section de 80mm de Montagne.
Autre exemple, la 48° batterie du 1° R.A.M. en batterie à Fontaine aux Charmes, au Four de Paris, Est de La Placardelle, La Harazée, entre novembre 1914 et novembre 1916, occupait des positions très proches de l'ennemi.
Je pense que la mise sous casemate de ces pièces date de 1915 et surtout de 1916.Ces canons légers ne nécessitaient pas de gros travaux, leur encombrement et leur recul étant faibles.
Cordialement, Guy.
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Jidu
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Re: Précisions techniques canon de 75 et canon d'Argonne

Message par Jidu »

Bonjour Florian et Patrick :hello:
Tout d'abord, merci pour vos réponses. Ensuite:
-Pour ce qui est des casemates du fort de Troyon et du Rembêtant, est-on certain que les affûts qui y étaient en place avec leurs canons proviennent d'un stock non-utilisé, car il se pourrait bien que ceux-ci provienent de casemates de Bourges désarmées suite au décret du 5 aout 1915? D'ailleurs, il me semble que de tels affûts avec leurs canons ont étés utilisés au fort de Domgermain (et peut-être ailleurs?) en tant qu'armes antiaériennes, non?
-Pourquoi les casemates d'artillerie construites dans les intervalles de la ligne Maginot et ayants eu de tels montage n'ont-elles pas reçu d'affûts de campagne?
-Des pièces ont étés prélevées à Epinal, donc au fort d'Uxegney. Mais ce qui m'interpelle, c'est que lors de ma visite dans ce fort, je n'ai rencontré aucune trace pour affût de campagne dans le radier de la casemate de Bourges Ouest. Pourquoi donc?
-Et enfin, le rapport Benoit parle des casemates de la citadelle de Verdun. Il dit qu'elle était dotée de 2 canons de 120 et de 9 canons de 75(sans préciser le type d'affût) sous caves à canons reliées par galeries de mines à l'infrastructure souterraine, et ce en novembre 1917.
Cordialement,
Julien
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patrick corbon
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Re: Précisions techniques canon de 75 et canon d'Argonne

Message par patrick corbon »

Bonjour à tous,

Cela me rassure, ma mémoire reste bonne. Comme le l'ai pensé, on trouve une piste dans les carnets de guerre de Louis Barthas (Edition la découverte/poche 1997, chapitre 1917: Destination inconnue. Compertrix. Daucourt. Secteur de la Harazée. Sainte-Menehould. La révolte du régiment, page 475).
Je cite :
Nous traversâmes Moiremont, dernier lieu habité, civilisé puis Vienne la Ville, Vienne le Château, ..............et à 300 mètres de ce qui fut le village de la Harazée dans la riante vallée de la Biesme nous relevâmes les canonniers du 358 ème régiment;
Nous nous installâmes dans un véritable petit fort situé sur le côté du vallon qui faisait face à l'ennemi. Dans les galeries et pièces souterraines, nous pouvions défier tout bombardement, ayant 100 m de rochers au-dessus de nos têtes.
Au fond deux embrasures, deux canons de marines fixes mais tournants braquaient leurs gueules menaçantes sur les pentes d'en face et sur les ravins qui venaient déboucher dans la vallée. Les allemands n'étaient qu'à un km ........

Dommage, il ne parle pas du type de canon. Pourrait-être des canons G de 95 mle 88 sur affût G de côte (1894), du canon révolver de 47 (marine), canon de 57.....
Néanmoins un peu plus loin dans la description d'un coup de main il parle de canons de 37, de canons anglais Stockes et enfin page 482 il cite la variété des engins à desservir; 3 canons 37, un canon révolver, quatre canons Brand à air comprimé, trois pièces de 47 de marine. Il précise qu'il y avait plus de canons que de canonniers.
Enfin en bref il nous décrit la panoplie de l'artillerie de tranchée desservie par l'infanterie.
Cordialement
patrick
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Mike55
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Re: Précisions techniques canon de 75 et canon d'Argonne

Message par Mike55 »

Bonjour Patrick,

Merci pour ce passage des carnets de Louis Barthas, je suis en train de les lire mais, j'ai fait acquisition de la Barrière de Fer et donc il passe en priorité. Je n'en suis pas encore la dans les carnets de guerre.

Pour ce qui est des blockhaus on en rencontre de "systèmes", l'un flanquant la ligne de crète du Bois de la Gruerie au Carrefour de la Croix de Pierre (ou été situé un point d'accés au front à la zones pour les troupes, le materiel, etc.) et celui flanquant toute la vallée de la Biesme.

En lisant l'extrait que je relirais trés bientot, des carnets de Louis Barthas, on peut donc validé l'idée de Florian, en disant que les blockhaus étaient armés de pièces légères.

Merci pour vos informations encore une fois.
Cordialement,
Mikaël.
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TURPINITE
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Re: Précisions techniques canon de 75 et canon d'Argonne

Message par TURPINITE »

Bonjour à tous, bonjour Julien,

en réponse à ton message :

-Pour ce qui est des casemates du fort de Troyon et du Rembêtant, est-on certain que les affûts qui y étaient en place avec leurs canons proviennent d'un stock non-utilisé, car il se pourrait bien que ceux-ci provienent de casemates de Bourges désarmées suite au décret du 5 aout 1915?
Non, le désarmement ne prévoyait pas le démontage des circulaires et longrines, mais l'enlèvement des affûts et bouches à feu.

D'ailleurs, il me semble que de tels affûts avec leurs canons ont étés utilisés au fort de Domgermain (et peut-être ailleurs?) en tant qu'armes antiaériennes, non?
Oui, le fort de Domgermain a désarmé sa casemate de Bourges en utilisant les affûts et bouches à feu de celles-ci, comme pièces de DCA. Il existe d'autres réutilisations sur Toul, à Villey-Le-Sec, Brûley.

-Pourquoi les casemates d'artillerie construites dans les intervalles de la ligne Maginot et ayants eu de tels montage n'ont-elles pas reçu d'affûts de campagne?
La facilité aurait été de construire des casemates aptes à recevoir un affût de campagne (ce qui sera fait plus tard avec les casemates RFM et STG), mais on le sait, en France, on aime faire compliquer, car ce procédé a entraîné des coûts énormes, c'est un peu du n'importe quoi, désarmer une casemate pour ensuite faire des travaux pour la réarmer, alors que la solution de construire une casemate pour canon de campagne aurait éviter tous ceci !

-Des pièces ont étés prélevées à Epinal, donc au fort d'Uxegney. Mais ce qui m'interpelle, c'est que lors de ma visite dans ce fort, je n'ai rencontré aucune trace pour affût de campagne dans le radier de la casemate de Bourges Ouest. Pourquoi donc?
Pour Uxegney, tous ce qui restait des éléments de l'affût de campagne dans les casemates ont été rebouchés par ces messieurs les puristes, ce qui ne les a pas empêcher de monter les circulaires à l'envers !

-Et enfin, le rapport Benoit parle des casemates de la citadelle de Verdun. Il dit qu'elle était dotée de 2 canons de 120 et de 9 canons de 75(sans préciser le type d'affût) sous caves à canons reliées par galeries de mines à l'infrastructure souterraine, et ce en novembre 1917.
Oui, c'est tout à fait cela, nous nous étions rendu sur place, il y a quelques années avec Philippe Truttmann, pour l'élaboration de la barrière de fer, sujet qui est resté dans les cartons, n'ayant pas trouver et pu accèder aux chambres de tir des 120.

Amicalement
Florian



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Jidu
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Re: Précisions techniques canon de 75 et canon d'Argonne

Message par Jidu »

Bonjour tout le monde, bonjour Florian,
Dans ton message, tu dis:[quote][#0000ff]Non, le désarmement ne prévoyait pas le démontage des circulaires et longrines, mais l'enlèvement des affûts et bouches à feu.
Mais si, comme tu le dis, les affûts furent enlevés, à quoi pouvaient-ils servir sachant qu'ils étaient unutilisables en rase campagne, alors que les canons (qui devaient, suite au désarmement y être déployés) pouvaient l'être ?

Amicalement,
Julien.
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TURPINITE
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Re: Précisions techniques canon de 75 et canon d'Argonne

Message par TURPINITE »

Bonjour,
à quoi pouvaient ils servir ?
le but d'enlever ces matériels, n'étaient pas de les réutiliser ailleurs, mais bien de neutraliser la casemate. En plus, la bouche à feu de 75 est la même que celle de campagne, don réutilisable sur un affût de campagne. Dans une casemate de Bourges, il y a trois bouches à feu de 75.
Ce sont malgré tout des matériels d'artillerie en état de fonctionnement, cela n'empêche pas par la suite de réinstaller ces matériels, une fois les ouvrages reconquits.
En sachant également, qu'ils auraient pu être utilisés dans d'autres forts.
Les tourelles, elles, étaient minées, puisque, hormis les mitrailleuses, qui pouvaient être réutilisées, le reste ne l'était pas ! C'est d'ailleurs ce qui joua un mauvais tour à la tourelle de Vaux qui sauta par la négligence de nos services, n'ayant défait les fourneaux de mine de celles-ci, un coup malencontreux de 420, eu raison de la tourelle.
Amicalement
Florian
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patrick corbon
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Re: Précisions techniques canon de 75 et canon d'Argonne

Message par patrick corbon »

Bonjour à tous, bonjour Florian, bonjour Julien,

A noter que j'ai que lu sans autre précisions que le 75 de campagne semblait poser un problème pour son utilisation en casemate à cause de son système de pointage en direction obtenu par glissement sur l'essieu. Je pense que ce devait être une histoire de créneau de tir. En plus selon le sol de l'ouvrage il fallait trouver un système pour asseoir le canon si la bêche ne pouvait s'enfoncer dans le sol. Ceci milite pour dire que en aucun cas les 75 sur affût de casemate ont pu être remplacé par des versions de campagne.

Cordialement
Patrick
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TURPINITE
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Re: Précisions techniques canon de 75 et canon d'Argonne

Message par TURPINITE »

Bonsoir à tous, bonsoir Patrick,

Ceci milite pour dire que en aucun cas les 75 sur affût de casemate ont pu être remplacé par des versions de campagne.

Si justement, c'est ce qui a été fait à Epinal dans 7 casemates sur 8, on a modifié les radiers pour recevoir l'affût de campagne.

Amicalement
Florian

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