Re: " 88 autrichien ", mythe ou réalité?
Publié : sam. mars 22, 2008 6:38 pm
Bonjour,
Une remarque de Stéphan dans le précédent sujet me conduit à aborder un point particulier:
Dans de nombreux récits de combattants et même dans des historiques d'unités, il est fait référence à un obus toujours redoutable, baptisé
"88 autrichien".Pour ne prendre qu'un exemple illustre, Maurice Genevoix, dans "Les Eparges", prête à son capitaine les paroles suivantes:"...des 88 autrichiens...Une belle saleté..."
Après avoir étudié le problème au plan technique, je ne trouve pas de réponse satisfaisante, en effet, on trouve ces témoignages dès 1915 au moins.
La réalité est qu'aucun matériel autrichien moderne n'avait ce calibre et,qu'au début de la guerre, les autrichiens n'ont fourni à leur allié allemand que bien peu de matériel, toujours moderne, d'un type n'existant pas dans l'armée allemande:mortiers Skoda de 30,5cm pour aider à la destruction des forts, canon de 75mm de montagne, matériel négligé par les allemands jusqu'en 1914 notamment.
De surcroît, les seuls matériels autrichiens du calibre 9 cm (calibre réel 88mm) sont de vieux canons,employés en artillerie de campagne et de forteresse, mais de types anciens,équivalent des matériels de Bange, appelés M 75, M 75/96, M 4 dans le manuel "Artillerie Unterricht für die k.u.k Festungsartillerie".Ces matériels ont servi sur les fronts italien,russe et dans les Balkans, mais n'ont jamais été employés à l'Ouest, ni prêtés à l'armée allemande.
Il reste l'hypothèse d'un canon allemand, les matériels allemands du calibre 9cm sont au nombre de trois:
-vieux canons de campagne et de siège 9cm C/73,C/73-88 sur affûts divers,assez semblables eux aussi à nos matériels de Bange et employés sur le front dès la fin de l'année 1914.
-canons de marine de 8,8cm SKL/45 et KL/30, employés en artillerie anti-aérienne et de côte, mais certainement pas en emploi en tir direct de campagne.
-canons Flak de 8,8cm, matériels anti-aériens très modernes et tardifs de 1917 et surtout 1918, même remarque que précédemment.
On ne peut mettre en doute les témoignages répétés des combattants sur des obus de "88" très meurtriers.Je ne vois qu'une réponse satisfaisante,évoquée indirectement dans le livre "A coups de canons" de Charles Nordmann (astronome éminent par ailleurs):l'auteur remarque, en règle générale, qu'un obus qui éclate brusquement à côté de soi sans qu'on ait entendu le bruit du départ du coup est un obus dépassant la vitesse du son et qu'en moyenne UN OBUS DE 90 NE S'ENTEND PAS S'IL EST TIRE A MOINS DE 3400m en moyenne.
En règle générale, les artilleries de campagne étaient situées assez loin du front et les obusiers tirant leurs projectiles à une vitesse inférieure à celle du son,surtout en fin de trajectoire, étaient toujours détectés à leur départ du coup.Par contre, les pièces anciennes étaient souvent proches des lignes et l'on peut penser que les vieux 9cm allemands étaient mis en batterie à moins de 3000m du front dans certains cas.Ceci pourrait expliquer les tirs de surprise que rien n'annonce avant l'explosion et qui sont donc redoutés des fantassins exposés à ces obus meurtriers.
Cette hypothèse "technique" n'explique pas pourquoi les poilus parlaient de "88 autrichiens", mauvaise interprétation d'un marquage ou d'un poinçon à couronne figurant sur des fragments d'obus ou de douilles?
Si un lecteur a une autre hypothèse, je serai très intéressé.De même, si vous avez des exemples de témoignages de combattants parlant de "88 autrichien", merci de les signaler.
Cordialement, Guy.
Une remarque de Stéphan dans le précédent sujet me conduit à aborder un point particulier:
Dans de nombreux récits de combattants et même dans des historiques d'unités, il est fait référence à un obus toujours redoutable, baptisé
"88 autrichien".Pour ne prendre qu'un exemple illustre, Maurice Genevoix, dans "Les Eparges", prête à son capitaine les paroles suivantes:"...des 88 autrichiens...Une belle saleté..."
Après avoir étudié le problème au plan technique, je ne trouve pas de réponse satisfaisante, en effet, on trouve ces témoignages dès 1915 au moins.
La réalité est qu'aucun matériel autrichien moderne n'avait ce calibre et,qu'au début de la guerre, les autrichiens n'ont fourni à leur allié allemand que bien peu de matériel, toujours moderne, d'un type n'existant pas dans l'armée allemande:mortiers Skoda de 30,5cm pour aider à la destruction des forts, canon de 75mm de montagne, matériel négligé par les allemands jusqu'en 1914 notamment.
De surcroît, les seuls matériels autrichiens du calibre 9 cm (calibre réel 88mm) sont de vieux canons,employés en artillerie de campagne et de forteresse, mais de types anciens,équivalent des matériels de Bange, appelés M 75, M 75/96, M 4 dans le manuel "Artillerie Unterricht für die k.u.k Festungsartillerie".Ces matériels ont servi sur les fronts italien,russe et dans les Balkans, mais n'ont jamais été employés à l'Ouest, ni prêtés à l'armée allemande.
Il reste l'hypothèse d'un canon allemand, les matériels allemands du calibre 9cm sont au nombre de trois:
-vieux canons de campagne et de siège 9cm C/73,C/73-88 sur affûts divers,assez semblables eux aussi à nos matériels de Bange et employés sur le front dès la fin de l'année 1914.
-canons de marine de 8,8cm SKL/45 et KL/30, employés en artillerie anti-aérienne et de côte, mais certainement pas en emploi en tir direct de campagne.
-canons Flak de 8,8cm, matériels anti-aériens très modernes et tardifs de 1917 et surtout 1918, même remarque que précédemment.
On ne peut mettre en doute les témoignages répétés des combattants sur des obus de "88" très meurtriers.Je ne vois qu'une réponse satisfaisante,évoquée indirectement dans le livre "A coups de canons" de Charles Nordmann (astronome éminent par ailleurs):l'auteur remarque, en règle générale, qu'un obus qui éclate brusquement à côté de soi sans qu'on ait entendu le bruit du départ du coup est un obus dépassant la vitesse du son et qu'en moyenne UN OBUS DE 90 NE S'ENTEND PAS S'IL EST TIRE A MOINS DE 3400m en moyenne.
En règle générale, les artilleries de campagne étaient situées assez loin du front et les obusiers tirant leurs projectiles à une vitesse inférieure à celle du son,surtout en fin de trajectoire, étaient toujours détectés à leur départ du coup.Par contre, les pièces anciennes étaient souvent proches des lignes et l'on peut penser que les vieux 9cm allemands étaient mis en batterie à moins de 3000m du front dans certains cas.Ceci pourrait expliquer les tirs de surprise que rien n'annonce avant l'explosion et qui sont donc redoutés des fantassins exposés à ces obus meurtriers.
Cette hypothèse "technique" n'explique pas pourquoi les poilus parlaient de "88 autrichiens", mauvaise interprétation d'un marquage ou d'un poinçon à couronne figurant sur des fragments d'obus ou de douilles?
Si un lecteur a une autre hypothèse, je serai très intéressé.De même, si vous avez des exemples de témoignages de combattants parlant de "88 autrichien", merci de les signaler.
Cordialement, Guy.