NEPTUNE
Brick-goélette construit en 1882 à Castellamare
195 tpl 140 tx JB 113 tx JN
Immatriculé à Marseille
Armateur Sylon Frères. Marseille
Liste d'équipage
GENOUD Etienne Capitaine Marseille
PORTANGUEN Ange Matelot Lorient
CASTEL Jean-Marie Matelot Paimpol
LE BOLCH Louis Matelot Brest
RAMAZOTTI Arthur Matelot (Italien)
GARGANI Raphaël Novice Marseille
TOSCA Antoine Mousse (A perdu son livret maritime)
Il y a en outre une passagère, Madame Genoud, épouse du capitaine.
La perte de NEPTUNE
Rapport du capitaine
Quitté Tunis pour Marseille le 27 Juillet avec un complet chargement de 160 tonnes de phosphate, 30 tonnes de cendre potassique et 350 barils vides en fer.
Passé dans l'ouest de la Sardaigne. Le 1er Août, doublé l'île San Pietro. Le 2 Août à O7h00, rencontré un torpilleur français.
Vers 10h00, aperçu sur l'arrière un navire qui se dirige sur nous à grande vitesse. Reconnu un sous-marin. Appelé tout l'équipage sur le pont, amené le perroquet et disposé l'embarcation de sauvetage. Cinq minutes plus tard, le submersible, qui bat pavillon autrichien est à 30 m de nous.
Le commandant demande « Nationalité? »
Je réponds « Français; donnez-nous dix minutes ».
Il répond : « Vous avez cinq minutes ».
Il fait mettre à la mer un petit canot dans lequel prennent place un officier, un sous-officier et deux matelots porteurs de bombes dont voici le dessin.

Ce sont des bombes cylindriques, peintes en rouge, de 20 cm de haut et 18 cm de diamètre. Le cordon, de couleur jaune, est enroulé autour de la bombe.
Nous prenons des vivres, de l'eau et abandonnons NEPTUNE que je quitte en dernier. Le commandant me fait monter sur sa passerelle et me demande tous les papiers du bord : rôle, journal de mer...etc. Il me rend tous nos papiers personnels.
J'avoue que ce commandant a été de la plus grande correction avec moi. Il m'a dit qu'il regrettait d'avoir à me couler, mais qu'il était obligé de faire son devoir.
Sur NEPTUNE, les matelots allemands ont pris la cloche et tout ce qui était en cuivre. La goélette a coulé vers 11h00 après s'être lentement inclinée sur le côté. Nous n'avons pas entendu les explosions, mais un peu de fumée est sortie de la cale.
Le sous-marin s'est alors éloigné vers le NNW, en surface, à 13 ou 14 nœuds.
Nous étions à 25 milles dans l'ouest du cap Sandalo et nous avons donc fait route à l'est, vers l'île San Pietro. Après bien des fatigues, nous sommes arrivés à 22h00 à Caloforte, avec l'aide d'un pêcheur. Le commandant du port et l'agent consulaire nous ont reçus de la façon la plus hospitalière.
Avons été rapatriés sur Civitta Vecchia, puis sur Marseille par voie de terre.
Description du sous-marin
80 m de long. 8 m de large au centre.
Lettre « R » peinte sur tribord avant de la coque.
Blockhaus de 2 m de haut, ovale, en pointe vers l'avant et entouré d'une rambarde.
Echelle large de 80 cm sur l'arrière
Deux canons d'environ 100 mm, symétriques par rapport au blockhaus, sur l'avant et l'arrière à 10m.
Périscope de 2 m
Mât de pavillon de 3 m portant un pavillon autrichien
2 mâts TSF de 10 m, rabattus l'un vers l'autre, portant une antenne à 4 fils.
Berthon dans un logement sur l'avant du blockhaus, fermé par une porte étanche à rabattement, tenue par des écrous à oreilles.
Voici le dessin du sous-marin fait par le capitaine Genoud.

Mais l'officier enquêteur qui, a mon avis, a parfaitement reconnu le sous-marin (peut-être grâce à la description de son commandant) a refait le dessin de la façon suivante :

Le commandant du sous-marin
Environ 32 ans. Brun. Rasé. Grand et bien bâti. L'air distingué. Portait une chaîne en or au poignet.
Il a été très correct.
Il a demandé au capitaine Genoud si son navire était assuré et s'il en était le propriétaire. Sur sa réponse négative, il lui a dit qu'il était obligé de le couler, mais qu'il était heureux de ne lui causer aucun préjudice personnel.
Il lui a demandé s'il avait suffisamment de vivres et s'il connaissait la route pour rallier la terre, lui donnant toutes indications utiles.
Puis il a autorisé le canot à faire route.
Ce commandant parlait très correctement le français, sans aucun accent.
Deux autres officiers, celui qui est allé sur NEPTUNE et celui qui a pris les documents pour les donner au commandant, parlaient aussi le français.
Vu une trentaine d'hommes en tout sur le sous-marin.
Le sous-marin attaquant
C'était l'U 35 du KL Lothar von Arnauld de la Perière.
La description de von Arnauld faite par le capitaine Genoud est fort intéressante car elle correspond parfaitement à ce qu'il était, tant au point de vue caractère que physiquement.
On notera qu'en Août 1916, il semblait avoir supprimé le damier qui se trouvait auparavant sur le kiosque.
Cdlt