Bonjour à tous,
Torpillage du 14 Juillet 1918.
Rapport de l’officier enquêteur
Le 14 Juillet 1918, le convoi venant de Bayonne et allant en Gironde était composé de 4 navires en ligne de file, protégés par 2 convoyeurs, INES et FLAMANT, qui se tenaient du côté du large. Le convoi venait de dépasser E/O Hourtin, à 5 ou 6 milles quand, à 22h55, plusieurs hommes du VENDEE aperçurent par le milieu tribord du navire de tête, le CAP BRETON, une torpille. Celui-ci, chargé de poteaux de mine coula de suite.
Deux minutes après, à 22h57 le 2e capitaine de VENDEE qui était de quart aperçoit le sillage d’une seconde torpille arrivant à 45° sur son tribord. Il crie « Nous voilà torpillés nous aussi ! Tribord toute. » Mais la torpille atteint le navire à 6 m de l’arrière qui est broyé. Le navire apique et commence à couler et l’évacuation est ordonnée.
Le second s’occupe de l’embarcation bâbord et le capitaine de celle de tribord, dans laquelle il embarque quand tous les hommes y ont pris place. Personne n’a vu les manœuvres effectuées par les escorteurs. Les manœuvres ordonnées par le capitaine et par l’officier de quart étaient judicieuses et, si elles n’ont pas sauvé le navire, elles ont diminué le nombre de victimes en reportant le point d’impact sur l’arrière du navire. Le capitaine s’est conformé aux ordres prescrits.
Rapport de la commission d’enquête
Le convoi Nord du 14 Juillet 1918 comportait les navires CAPO BRETON, VENDEE, MARIE THERESE et ALGIERS.
(Nota : on remarque que dans presque tous les rapports officiels, tant du CAP BRETON que du VENDEE, les intervenants –pilote, capitaines, enquêteurs …etc- font une erreur sur le nom du navire anglais, l’appelant tantôt ALGIERS, tantôt HALLGIERS, ce qui a rendu son identification ardue. Il s’agissait en réalité du HALLGJERD, vapeur de 1621 t construit aux chantiers Laxevaags Maskin de Bergen. Ce vapeur norvégien avait été réquisitionné par le gouvernement britannique. Il terminera d’ailleurs sa carrière sous le nom de JOSHU GO sous pavillon japonais, torpillé le 10 Octobre 1944 par le sous-marin américain TANG -USS 306- dans le détroit de Formose. ALGIERS lui, était effectivement un vapeur anglais, mais il avait été coulé en 1917.)
Les deux escorteurs INES et FLAMANT se tenaient du côté du large. A 22h55, les hommes du VENDEE aperçurent une torpille qui frappa CAP BRETON en plein flanc tribord. Il coula aussitôt.
Le capitaine de VENDEE appela aux postes de combat et aperçut en même temps une autre torpille se dirigent vers lui. Il ordonna « Tribord toute », ce qui aurait peut-être permis d’éviter la torpille s’il y avait eu à bord un servo-moteur au lieu d’une barre à bras. N’obéissant que lentement, le navire fut atteint par la torpille à 6 m de l’arrière.
L’évacuation se fit en 5 minutes et tous les hommes ayant survécu à l’explosion purent se réfugier dans les embarcations. Sur les 7 disparus, 6 ont été tués dans leur poste de couchage par l’explosion. Le 7e, le second maître canonnier Lepage, avait, malgré le danger, couru à la pièce arrière alors que la torpille approchait juste au dessous de lui.
Après l’abandon, les hommes de VENDEE ont vu très nettement à quelques mètres de leurs embarcations, le périscope d’un sous-marin, ce qui concorde avec les sillages de torpilles aperçus. On ne peut douter de l’action d’un sous-marin et il faut rejeter l’hypothèse d’un champ de mines. D’ailleurs, les avions et le dirigeable qui le lendemain ont survolé les lieux de l’accident à marée basse, eussent constaté la présence de mines mouillées à si faible profondeur. Vingt minutes après le naufrage, les marins ont entendu une forte explosion et pensé qu’un 3e navire avait été torpillé.
(Nota : on peut penser, en lisant les documents qui suivent dans le dossier VENDEE, qu’il s’agit de l’explosion d’une torpille tirée sur le HALLGJERD et qui l’aurait manqué.)
Le capitaine de MARIE THERESE, 3e navire du convoi, a dit qu’après avoir vu torpiller les deux navires qui le précédaient, il a mis barre toute à gauche pour faire route à l’Ouest et a vu passer un escorteur qui lui a crié « Faites route à toute vitesse vers votre destination ». Mais il n’a pu fournir aucune indication sur la manœuvre des escorteurs.
La mise à l’’eau des embarcations s’est effectuée avec ordre et sang froid. Les deux embarcations firent cap sur la terre et atterrirent sur la plage de Soulac à 08h00. Elles furent halées à terre et tous les occupants, exception faite d’un maître mécanicien, ont été remis au syndic des gens de mer de Soulac.
Ce maître mécanicien
(sans doute un premier chauffeur) a été recueilli 10 heures après l’abandon, réfugié sur un radeau.
La conduite du second maître canonnier Lepage qui, après avoir dirigé ses hommes vers leurs postes de combat, rejoignait lui-même le sien, mérite une citation avec Croix de Guerre.
Note du Ministre de l’Intérieur au Ministre de la Marine. 18 Août 1918
Le commissaire spécial de Bordeaux me signale les torpillages des vapeur français CAP BRETON et VENDEE et d’un vapeur anglais le 14 Juillet dernier au NO de Cordouan. Il ajoute :
« je me fais l’écho des rescapés pour signaler l’attitude du patrouilleur français INES qui est passé à plusieurs reprises à faible distance des deux baleinières dans lesquelles ils s’étaient réfugiés, et qui, malgré leurs appels réitérés, ne voulût pas s’arrêter. »
Note du sous-secrétaire d’Etat à la Marine de Guerre au Ministre de l’Intérieur. Confidentiel. Septembre 1918
Nous avons transmis au Contrôle Général des Services de Recherche Judiciaire l’information du Contrôleur Général de Bordeaux sur l’attitude du patrouilleur INES le 14 Juillet dernier. Etant passé auprès des naufragés de CAP BRETON et VENDEE, il ne leur a pas porté secours.
La conduite de ce commandant m’avait déjà été signalée par la commission d’enquête de Bordeaux qui s’est réunie le 20 Juillet.
Dans l’esprit de cet officier marinier, sa conduite a été motivée par les ordres donnés au départ par le chef de convoi, qui lui enjoignait, en cas d’attaque de continuer sa route avec le reste du convoi, se réservant, lui, le sauvetage éventuel de naufragés.
Toutefois, cet officier marinier a fait preuve d’une telle inertie et d’une telle absence d’initiative que, dès le 18 Juillet, le Capitaine de Vaisseau commandant la Division des Patrouilles de Gascogne l’a relevé de son commandement.
Le sous-marin attaquant
C'était bien sûr l'UB 103 du Kptlt Paul HUNDIUS
Lancer deux torpilles à deux minutes d'intervalle, faire mouche à chaque coup et couler deux navires en un si petit intervalle de temps doit constituer un record au cours de ce conflit.
Cdlt