Bonjour à tous,
DUPLEIX
Vapeur de 7500 tx armé de 2 canons de 90 mm
54 hommes d’équipage dont 1 Brésilien
Rencontre avec un sous-marin. Rapport du capitaine
Quitté Le Havre le 22 Janvier 1918. Sorti du barrage à 14 h00 et fait route avec LA PEROUSE, escorté par contre-torpilleur FLEURET.
Contourné la baie de Sine et Barfleur conformément aux ordres reçus. A 17h00, FLEURET nous signale d’aller relâcher à St Helens pour attendre un convoi. A 20h10, étant au point désigné pour quitté la côte française, donné des routes pour aller chercher Sainte Catherine en naviguant en zigzags. Beau temps clair. Mer plate.
A 21h50, par 50°07 N et 01°23 W Greenwich, le matelot Hamon, de veille à bâbord de la passerelle signale au 1er lieutenant Daniel qui était à côté de lui, une traînée blanche sur l’eau, un peu sur l’arrière du travers bâbord. Nous venions juste de commencer une embardée sur tribord et le 1er lieutenant, ayant reconnu le sillage d’une torpille et se conformant avec sang froid à mes prescriptions sur la manœuvre à effectuer spontanément en pareil cas, commande aussitôt « La barre à droite toute ».
J’étais à tribord de la passerelle et, entendant cet ordre, je me précipite à bâbord et vois nettement le sillage à trois quarts sur l’arrière du travers. Je confirme l’ordre donné par le 1er lieutenant et donne l’ordre à la machine de monter à toute puissance. Le navire, qui était déjà lancé sur tribord par la manœuvre que nous voulions faire, évolue très rapidement et la torpille passe à quelques mètres sur l’arrière. Nous pouvons suivre son sillage un certain temps après qu’elle fut passée sur tribord de nous, mais nous n’avons pas vu le sous-marin.
Seul le maître d’équipage, de quart sur le pont, a vu un reflet qui attira son attention. Aussitôt après, il a vu le sillage et a prévenu en criant. Le QM canonnier de veille à la pièce arrière a donné l’alarme en même temps avec son sifflet. Il a eu l’impression que la torpille allait atteindre l’arrière et estime qu’elle est passée à moins de 10 mètres.
Fait le signal lumineux prévu pour avertir LA PEROUSE et FLEURET et averti par TSF la station de Cherbourg qui répond « Bien compris ».
Continué l’embardée sur tribord de manière à présenter l’arrière au gisement présumé du sous-marin. Pendant une heure, me suis éloigné de la route primitive en marchant toujours à pleine puissance et en faisant des zigzags réguliers de grande amplitude et de très courte durée. A 23h00, réglé la machine à 72 tours jusqu’à St Helens où j’ai mouillé le 23 Janvier à 02h30.
Je suis heureux de signaler le calme et la discipline dont tout l’équipage a fait preuve en cette circonstance. A peine l’alarme donnée, tous les officiers pont et machine étaient à leur poste de combat, prêts à faire exécuter les ordres. La vigilance des hommes de veille, le sang froid et la présence d’esprit de l’officier de quart et le promptitude des ordres donnés à la machine nous ont permis d’éviter la torpille.
Rapport de l’officier AMBC
Le 22 Janvier vers 21h30, le veilleur du commerce qui était à bâbord de la passerelle et le QM Pinsard qui était à la pièce arrière aperçurent une torpille par le travers bâbord et l’alerte fut donnée immédiatement. Le QM Pinsard déclare avoir aperçu la torpille à 1200 m. Elle sauta hors de l’eau et il la prit tout d’abord pour un marsouin. Puis il aperçut que son sillage se dirigeait vers le milieu du bâtiment qui naviguait en zigzags et commençait justement une embardée. Le capitaine mit la barre toute à droite et la torpille élongea tout le navire, passant à 5 m de l’arrière. Elle naviguait en surface. Il n’a aperçu ni périscope, ni sous-marin.
Veille bien effectuée. Rôles affichés dans les postes. L’armement militaire a donné toute satisfaction.
Rapport d’enquête
Il reprend tous les faits et précise :
L’objectif ennemi a été insuffisamment et trop peu de temps distingué pour que l’artillerie du bord puisse être utilisée. La manœuvre du capitaine a été correcte. Très secondé par la bonne discipline de son état major et de son équipage, par l’initiative heureuse et rapide de l’officier de quart, il a réussi à sauvegarder son bâtiment.
Il y a lieu de proposer un Témoignage Officiel de Satisfaction, avec mention spéciale pour le 1er lieutenant.
Récompenses
Témoignage Officiel de Satisfaction du Ministre
DANIEL Raoul 1er lieutenant
Pour l’esprit de décision et les qualités de manœuvrier dont il a fait preuve en réussissant à éviter une attaque de son bâtiment à la torpille.
HAMON Yves Matelot
Pour à sa vigilance, grâce à laquelle l’officier de quart a pu éviter une torpille dirigée contre son bâtiment. (+ Prime de 200 francs)
Vapeur DUPLEIX des Chargeurs Réunis
Pour l’ordre et la discipline qui régnaient à bord et qui ont permis, par la rapide et bonne exécution du commandement, de conserver un bâtiment attaqué à la torpille le 22 Janvier 1918.
Le sous-marin attaquant
N’est pas identifié.
Mais on pourrait penser à l’U 90 du Kptlt Walter REMY
Cdlt