Bonjour à tous,
Rencontre avec un sous-marin le 8 Août 1917. Rapport du capitaine
Je soussigné Wadoux, capitaine du S/S ALGERIE, 2150 tx, armé à Dunkerque, 30 hommes d’équipage, déclare avoir quitté Calais le 7 Août 1917 à 16h00, par temps brumeux, mer belle, faible brise de Sud, à destination de Swansea pour y prendre un chargement de briquettes. Ce chargeement était pour la Compagnie des Chemins de Fer du Nord. A 19h00, brume épaisse.
Relevé le son de la sirène de Gris Nez à l’Est. Route au N45W. A 20h10, Varne au 90. Route au S78W. A 21h25, Dungeness à 2,5 milles par le travers. Route au S70W. Temps brumeux.
Le 8 Août à minuit 45 route au N67W.
Passé Sainte Catherine à 3 milles, Pointe Anvil à 1,5 mille. A 15h55, Portland à 1,5 mille par le travers.
A16h15, une torpille lancée par le travers bâbord vient frapper le navire, démolissant la machine et faisant un large trou dans la coque, à 1 m au dessous de la flottaison. Le tuyau de vapeur a été arraché et la chaudière bâbord avariée. Cette torpille fut aperçue à 40 m du bord et je n’ai pas eu le temps de faire obéir le navire. Lancé appel de secours par TSF et hissé le signal du code NC.
A 16h20, suis entouré de patrouilleurs. Deux d’entre eux prennent la remorque, remplacés à 18h20 par le remorqueur PILOT. Mouillé 4 maillons sur rade de Portland à 22h50.
Lors de l’explosion de la torpille, les deux chauffeurs de quart ont été tués et j’ai fait des recherches sans résultat. Ils ont été retirés de la chaufferie et inhumés à Portland quelques jours plus tard.
J’ai pu sortir de la machine le chef mécanicien à moitié noyé et gravement brûlé. Il a été admis d’urgence à l’hôpital royal de Portland.
Le soutier Victor Lefevre, blessé au dos et au poignet gauche a pu s’en sortir tout seul. Il est aussi à l’hôpital de Portland.
Débarqué les blessés sur le patrouilleur 476, ainsi que 11 hommes de l’équipage qui étaient dans les embarcations. Lee canot bâbord est resté suspendu sur le palan du bossoir arrière, celui de l’avant ayant été rendu inutilisable. Soulagé hors de son emplanture, il était tombé sur le château. Les compas de route et de relèvements ont été enlevés de leurs suspentes et sont tombés au fond de l’habitacle.
Je me disposais à gouverner au Nord, pour me rapprocher de la côte lorsque le torpillage a eu lieu.
Je suis resté tout d’abord seul à bord. Puis j’ai pu faire rallier l’équipage et ramener le navire au port avec l’aide du remorqueur.
ALGERIE a quitté Portland en remorque du GLADSTONE le 21 Septembre, à destination de Barry Docks.
Rapport de la commission d’enquête
Elle reprend les déclarations du capitaine Wadoux, signalant que les deux chauffeurs avaient été engloutis par la trombe d’eau et brûlés par la vapeur. Ils étaient tombés dans l’eau à la partie inférieure de la chaufferie. Le chef mécanicien a pu être hissé très difficilement sur le pont à l’aide d’une échelle de corde. Par la suite, 14 hommes sont revenus à bord pour le remorquage.
Elle estime qu’en ces circonstances tragiques, le capitaine et le second ont fait tout leur devoir.
Récompenses
Citation à l’Ordre l’Armée
WADOUX Paul Capitaine Gravelines 150
A procédé avec ordre à l’évacuation de son navire après torpillage. Est resté seul à bord et a sauvé le chef mécanicien qui se trouvait dans une situation extrêmement périlleuse. A fait tout ce qui était en son possible pour découvrir les deux chauffeurs manquants. Voyant que son navire continuait à flotter, a fait remonter à bord une partie de l’équipage, a dirigé la manœuvre et a ramené le navire au port.
Citation à l’Ordre du Corps d’Armée
DEMESTER Benoit Chef mécanicien Dunkerque 2563
Etait de quart dans la machine au moment où la torpille a frappé le compartiment. Entraîné par le remous de l’eau s’engouffrant dans le navire, a été grièvement brûlé à la tête et aux poumons par la vapeur s’échappant des collecteurs brisés. A tenu à reprendre son poste à bord après quelques jours de traitement à l’hôpital, bien qu’incomplètement guéri.
Citation à l’Ordre de la Division
GIROU Lucien 2e capitaine Dunkerque 327
CROUZAT Raymond Matelot Agde 290
LEMAIRE Pierre Matelot Gravelines 2530
Pour l’exemple qu’ils ont donné en remontant les premiers à bord pour aider le capitaine à sauver les blessés Puis ont fait des rondes dans le navire pour s’assurer qu’il pouvait continuer à flotter.
Le sous-marin attaquant
C’était l’UB 31 de l’Oblt z/s Thomas BIEBER
Cdlt