NB:pour le marin disparu en mer le 13 août 1917, il s'agit d'Eugène RAULT et non de Jean Rault; Eugène Rault, né à Erquy le 21 novembre 1875, avait épousé à Pléneuf Marie Joséphine PottierBonjour à tous,
EMILIE GALLINE
Voici quelques renseignements complémentaires concernant l’EMILIE GALLINE.
Composition de l’équipage
FROSTIN Jules Capitaine Saint Brieuc
MORELLEC René 2e capitaine Paimpol
GUERIN François Lieutenant Binic
KERHOAS Olivier Mécanicien Brest
MANOIR Ange Cuisinier Binic
LE BRAS Gustave Matelot Morlaix
BERTHOU François Matelot Brest
PERCELAY Jean Matelot Audierne
RIVOALLAND Jean Matelot Binic
MONTROSE Emile Matelot Saint Denis de la Réunion
DUPERIER Ernest Matelot Bordeaux
PERROT Gabriel Matelot Binic
GUIRIEC Henri Matelot Quimper
COSQUER Daniel Matelot Audierne
NICOL Louis Mousse Lannion
Disparu lors du naufrage
RAULT Jean Matelot Saint Brieuc
Il manque trois marins à cette liste car l’équipage de l’EMILIE GALLINE comportait 19 hommes.
Rapport du capitaine
Le capitaine Frostin rapporte les faits tels qu’ils sont exposés dans le post de Franck. Il explique toutefois pourquoi le voyage fut si long depuis Taltal :
Quitté Taltal le 1er Mai au matin avec 3500 tonnes de salpêtre et 19 hommes d’équipage pour Le Havre.
18 Mai Tempête de N au NNW. La mer, très grosse couvre le pont. Roulis très violent. Cette mer démontée dure jusqu’au 21 Mai et occasionne une grande fatigue au navire.
28 Mai Doublé le cap Horn par 51°20’ sud avec une très violente tempête de nord. La mer couvre constamment le navire.
4 Juin Véritable ouragan de SW au SSW qui dure jusqu’au 6. Mer énorme couvrant le pont qui ne désemplit plus. Fatigue du navire par suite de la surcharge continuelle d’eau. Très violent roulis qui m’entraine à faire toute réserve sur des avaries dues à ce mauvais temps continuel, et qui pourrait être découvertes, soit au navire, soit à la cargaison.
21 Juin Pris les alizés de SW par 19°30 S et 26°00 W.
26 Juin Par 05°30 S arrêt subit des alizés et calme plat. La ligne est franchie le 30 Juin, mais le navire ne retrouve des alizés de NE que le 11 Juillet. (Il sera resté plus de deux semaines dans la zone des calmes équatoriaux.)
Le 13 Août à 11h00 l’homme de bossoir aperçoit le sous-marin qui ouvre le feu à 7000 m et poursuit un tir continu, les obus tombant tout autour du navire. Celui-ci n’étant pas armé, le capitaine fait déborder les embarcations. C’est alors que le matelot Rault tranche la bosse de l’embarcation Td et, emporté par son élan en voulant la retenir, tombe à la mer. Le capitaine crie à l’armement du canot d’aller le récupérer lorsqu’un obus tombe à quelques mètres de cette baleinière. Les cinq hommes qui ont pris place à bord s’éloignent. Le voilier, qui après avoir stoppé a repris de la vitesse entraine avec lui le matelot Rault accroché à un filin. Aucun des canots ne peut le rattraper, bien qu’on lui ait crié de larguer le bout et de se laisser dériver. Plus tard, malgré les recherches effectuées, il ne put être retrouvé.
Le voilier fut coulé par trois bombes que les marins allemands avaient apportées avec le canot du capitaine. Pendant ce temps, celui-ci et ses hommes étaient restés prisonniers sur le sous-marin (environ deux heures) Les trois détonations furent entendues depuis le sous-marin. Le navire se coucha lentement sur bâbord et disparut.
La baleinière du capitaine fut retrouvée par le destroyer anglais SPITFIRE et celle du second par le chalutier CASTORIA.
Le capitaine fait une description assez précise du sous-marin : kiosque à deux étages, toile de passerelle au sommet, canon probablement de 88 mm sur l’avant du kiosque et obus de couleur rouge, filière pare-mines, installation TSF.
Il en fait un dessin.
http://img7.imageshack.us/img7/5272/emi ... ne1ml0.jpg
La commission d’enquête reprend les faits dans les mêmes termes, précisant même que le sous-marin continua son tir jusqu’à ce que les hommes soient dans les baleinières, avant de s’en approcher pour les reconnaître. Les marins de celle du capitaine durent monter sur le sous-marin sous la menace de revolvers. Il est même précisé que les marins allemands riaient en voyant les hommes inondés par les paquets de mer qui balayaient le pont du sous-marin… !
Pourtant, les conclusions de la commission d’enquête sont particulièrement sévères à l’encontre du capitaine Frostin et méritent d’être reprises dans leur intégralité .
« Après étude des faits, la commission émet les remarques suivantes :
Tout d’abord, il y a lieu de s’étonner que le 1er Mai 1917, l’agent consulaire de Taltal n’ait donné aucune instruction, si générale soit-elle, au voilier en partance pour Le Havre.
En ce qui concerne le capitaine, la commission relève les fautes suivantes :
A son arrivée en Manche, ayant reconnu Bishop Rock, n’a pas eu l’initiative de serrer la côte au plus près. Ayant croisé un destroyer anglais, s’est contenté de hisser son pavillon national. Il ne lui est pas venu à l’idée de lui demander des instructions.
Manque de perspicacité
Lorsqu’il a aperçu le sous-marin sur Bd, à une distance de 4 milles ce qui ne le rendait pas encore très dangereux (sic), n’a pas cherché à virer lof pour lof et à fuir grand largue vers l’WNW sur Falmouth.
Selon ses propres dires, son voilier est un fin marcheur, pouvant atteindre 9 nœuds. Il aurait toujours été temps de mettre en panne si le sous-marin, le gagnant de vitesse l’avait alors obligé à évacuer.
Manque d’initiative
Ayant pris la décision d’abandonner le navire aux premiers coups de canon, n’a pas fait cette manœuvre correctement de façon à empanner le navire en masquant l’un des phares. Il en est résulté que le voilier ayant abattu après être venu vent debout, il a repris de l’erre en avant. La conséquence fut la perte du matelot Rault, les baleinières n’ayant pu gagner de vitesse le voilier. La distance à laquelle se trouvait le sous-marin n’est pas une excuse à cette manœuvre précipitée.
Manque de sang-froid
En conséquence, la commission estime qu’il n’y a pas lieu de maintenir au capitaine Frostin sa faculté de commander. »
Ces marins, qui doublaient le cap Horn dans des conditions terribles, manquaient donc tout à la fois de perspicacité, d’initiative et de sang-froid. Cela laisse songeur !
Il est vrai que l’on manœuvre beaucoup mieux dans un bureau que lorsque les obus pleuvent autour de vous…
Mais cela dépend aussi beaucoup des commissions d’enquête. Dans d’autres cas, elles ont estimé que le capitaine avait bien agi en cherchant à sauver la vie de son équipage. Le capitaine Frostin n’a pas eu de chance !
Voici la position du naufrage donnée par le capitaine Frostin
http://img7.imageshack.us/img7/3225/emi ... ne2xr8.jpg
et un autre cliché le l'EMILIE GALLINE (lien de Joe)
http://img132.imageshack.us/img132/2304 ... neazw8.jpg
PS : Les trois marins manquants sur la liste d'équipage sont les matelots
- PEROCLE
- ALBRIN
- KARL JONSON
Ils ont signé la déposition du capitaine. Pas de renseignement sur leur quartier d'inscription. La liste précédente était celle donnée par le consul pour le rapatriement en France.
On peut donc supposer que ces trois marins étaient britanniques et sont restés en Angleterre.
Cdlt
bien cordialement