Re: BOÏELDIEU – Trois-mâts barque – Société nouvelle d’armement.
Publié : mer. janv. 07, 2009 12:34 am
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Bonsoir à tous,
Boïeldieu – Trois-mâts barque – Société nouvelle d’armement, Nantes.
Trois-mâts barque de 3100 tonneaux, construit en 1901 par les Chantiers nantais de Chantenay pour le compte de la Société nouvelle d’armement, venue aux droits de la Compagnie française de navigation.
Il fut ainsi dénommé en hommage à François Adrien BOÏELDIEU (Rouen, 16 déc. 1775 – Varennes-Jarcy, 8 oct. 1834) : « Auteur de mélodies et de pièces pour le piano, il connut la célébrité avec une quarantaine d’opéras-comiques et d’opéras, ensemble de pièces inégales d’où se détachent Le Calife de Bagdad (1800) et La Dame Blanche (1825). Directeur de la musique à l’Opéra impérial de Saint-Pétersbourg (1803-1810), il fut aussi professeur de composition au Conservatoire de Paris. » (Le Petit Robert 2, Dictionnaire universel des noms propres alphabétique et analogique, 1987, p. 242).
Son lancement eu lieu en Juin 1902 : la marraine en fut Mlle Jeanne NEUMAYER – ultérieurement devenue Mme Norbert GUILLON –, fille de M. NEUMAYER, administrateur de la Compagnie française de navigation, et le parrain le Comte CASATI, allié à la famille du musicien dont le nom était attribué au navire. Pendant quatre années consécutives, il fut initialement commandé par le capitaine HARANG, « un vétéran des mers du Sud ».
Parti de Sydney le 3 juin 1904, le navire fut victime, du 4 au 28, d’une série de coups de vents qui fatiguèrent sa structure. Le 28 au matin, la mèche du gouvernail cassa près de la jaunière. Jusqu’au 18 juillet, pas moins de quatre gouvernails de fortune furent improvisés et installés sans grand succès par l’équipage ; ce ne fut qu’à cette date qu’il put réussir à passer des sauvegardes au gouvernail avarié, et le 21, en plein hiver austral, le navire put enfin virer de bord, alors que venait d’être atteint le 57° de latitude Sud, puis faire route au Nord. Malgré le bris des sauvegardes du gouvernail, qui survint les 2 et 7 août, la Nouvelle-Zélande fut aperçue le 8, dans les parages de la Baie de Pegassus. Le 10, le voilier fut pris en remorque par le remorqueur Ki-Hama, à 25 milles de Littletown, pour le prix de 1250 livres anglaises. Aux deux tiers déchargé afin de passer en cale sèche, le navire fut drossé par une rafale qui lui causa de nouvelles avaries ; après avoir été caréné et rechargé, il commença à faire eau, de sorte qu’il fallut à nouveau le décharger et le remettre en forme sèche. Enfin, le 23 décembre, soit six mois après son départ de Sydney, il fut prêt à reprendre la mer ; il doubla le cap Horn le 4 février, et atteignit Queenstown le 1er mai. Au total, ces avaries successives revinrent à près de 100.000 francs à l’armateur. A son arrivée dans ce port, le voilier fut remis au commandement du capitaine ANNETTE.
En 1905, à Oakland, en baie de San-Francisco, alors que le navire se trouvait amarré le long d’un wharf en bois, le feu prit à bord et tout faillit brûler. Bien qu’importants mais purement matériels, les dégâts consécutifs à ce sinistre furent rapidement réparés. Puis, sous les ordres de différents capitaines, le Boïeldieu navigua jusqu’à la guerre sans connaître d'autres évènements majeurs.
En 1917, le Boïeldieu eut avec le Crillon un abordage qui fut sans doute son salut. Après avoir abandonné le convoi dont il faisait partie pour réparer les avaries éprouvées, son commandant, le capitaine CANIVET, fut informé qu’un sous-marin allemand avait envoyé par le fond les trois premiers bâtiments dudit convoi. Il fit aussitôt gouverner au Sud ; ayant réussit, la nuit venue, à repérer le sous-marin, il poursuivit son voyage, en dépit d’un beaupré cassé.
Le navire était alors armé. En témoigne la fiche M.P.L.F. de ce marin, mort à bord lors d’une escale :
― HAMON Félix Joseph Marie, né le 23 juin 1897 à Plévenon (Côtes-du-Nord) et y domicilié, décédé le 11 octobre 1918 en rade d’A… par suite d’une épidémie – sans doute de grippe –, Matelot canonnier, Centre A.M.B.C. de Nantes, Voilier Boieldieu, Matricule n° 44.213- ?
La guerre terminée, le Boïeldieu fut envoyé à La Nouvelle-Orléans pour le compte du gouvernement français. Le 18 mars 1919, alors qu’il était assisté de deux remorqueurs pour sortir des bouches du Mississipi, la remorque se rompit ; il fut drossé sur un banc où il demeura échoué jusqu’au 23, en dépit des efforts consentis pour le tirer de cette fâcheuse posture. Une semaine plus tard, se trouvant à louvoyer à l’entrée du canal de Floride, il manqua un virement de bord et vint heurter la roche dite « Alligator Reef ». Le vapeur de sauvetage américain Biesbash accourut aussitôt et commença à alléger le chargement ; le 4 avril, le Boïeldieu était de nouveau à flot ; il put faire route jusqu’à Keywest, où des scaphandriers examinèrent son petit fond qu’ils trouvèrent intact. Le chargement fut remis en cale et réarrimé, et, le 20 mai au matin, le navire entrait en Loire, après une traversée de 52 jours depuis la Nouvelle-Orléans.
En 1921, à son dernier voyage, il débarqua à Granville ; il fut ensuite remorqué jusqu’au Canal de La Martinière, où il y entra le 16 mai 1921 pour être désarmé ; il en ressortira le 18 juillet 1927 pour être démoli. Et il semble qu’il ait été le premier des occupants de ce triste cimetière fluvial, aux écluses impressionnantes, où, tristement, finirent pas moins de 27 grands voiliers nantais...
(D’après Louis LACROIX : « Les derniers grands voiliers », J. PEYRONNET & Cie, éd., Paris, 1937, p. 300 à 303, et Annexe, p. 489).
Bonsoir à tous,
Boïeldieu – Trois-mâts barque – Société nouvelle d’armement, Nantes.
Trois-mâts barque de 3100 tonneaux, construit en 1901 par les Chantiers nantais de Chantenay pour le compte de la Société nouvelle d’armement, venue aux droits de la Compagnie française de navigation.
Il fut ainsi dénommé en hommage à François Adrien BOÏELDIEU (Rouen, 16 déc. 1775 – Varennes-Jarcy, 8 oct. 1834) : « Auteur de mélodies et de pièces pour le piano, il connut la célébrité avec une quarantaine d’opéras-comiques et d’opéras, ensemble de pièces inégales d’où se détachent Le Calife de Bagdad (1800) et La Dame Blanche (1825). Directeur de la musique à l’Opéra impérial de Saint-Pétersbourg (1803-1810), il fut aussi professeur de composition au Conservatoire de Paris. » (Le Petit Robert 2, Dictionnaire universel des noms propres alphabétique et analogique, 1987, p. 242).
Son lancement eu lieu en Juin 1902 : la marraine en fut Mlle Jeanne NEUMAYER – ultérieurement devenue Mme Norbert GUILLON –, fille de M. NEUMAYER, administrateur de la Compagnie française de navigation, et le parrain le Comte CASATI, allié à la famille du musicien dont le nom était attribué au navire. Pendant quatre années consécutives, il fut initialement commandé par le capitaine HARANG, « un vétéran des mers du Sud ».
Parti de Sydney le 3 juin 1904, le navire fut victime, du 4 au 28, d’une série de coups de vents qui fatiguèrent sa structure. Le 28 au matin, la mèche du gouvernail cassa près de la jaunière. Jusqu’au 18 juillet, pas moins de quatre gouvernails de fortune furent improvisés et installés sans grand succès par l’équipage ; ce ne fut qu’à cette date qu’il put réussir à passer des sauvegardes au gouvernail avarié, et le 21, en plein hiver austral, le navire put enfin virer de bord, alors que venait d’être atteint le 57° de latitude Sud, puis faire route au Nord. Malgré le bris des sauvegardes du gouvernail, qui survint les 2 et 7 août, la Nouvelle-Zélande fut aperçue le 8, dans les parages de la Baie de Pegassus. Le 10, le voilier fut pris en remorque par le remorqueur Ki-Hama, à 25 milles de Littletown, pour le prix de 1250 livres anglaises. Aux deux tiers déchargé afin de passer en cale sèche, le navire fut drossé par une rafale qui lui causa de nouvelles avaries ; après avoir été caréné et rechargé, il commença à faire eau, de sorte qu’il fallut à nouveau le décharger et le remettre en forme sèche. Enfin, le 23 décembre, soit six mois après son départ de Sydney, il fut prêt à reprendre la mer ; il doubla le cap Horn le 4 février, et atteignit Queenstown le 1er mai. Au total, ces avaries successives revinrent à près de 100.000 francs à l’armateur. A son arrivée dans ce port, le voilier fut remis au commandement du capitaine ANNETTE.
En 1905, à Oakland, en baie de San-Francisco, alors que le navire se trouvait amarré le long d’un wharf en bois, le feu prit à bord et tout faillit brûler. Bien qu’importants mais purement matériels, les dégâts consécutifs à ce sinistre furent rapidement réparés. Puis, sous les ordres de différents capitaines, le Boïeldieu navigua jusqu’à la guerre sans connaître d'autres évènements majeurs.
En 1917, le Boïeldieu eut avec le Crillon un abordage qui fut sans doute son salut. Après avoir abandonné le convoi dont il faisait partie pour réparer les avaries éprouvées, son commandant, le capitaine CANIVET, fut informé qu’un sous-marin allemand avait envoyé par le fond les trois premiers bâtiments dudit convoi. Il fit aussitôt gouverner au Sud ; ayant réussit, la nuit venue, à repérer le sous-marin, il poursuivit son voyage, en dépit d’un beaupré cassé.
Le navire était alors armé. En témoigne la fiche M.P.L.F. de ce marin, mort à bord lors d’une escale :
― HAMON Félix Joseph Marie, né le 23 juin 1897 à Plévenon (Côtes-du-Nord) et y domicilié, décédé le 11 octobre 1918 en rade d’A… par suite d’une épidémie – sans doute de grippe –, Matelot canonnier, Centre A.M.B.C. de Nantes, Voilier Boieldieu, Matricule n° 44.213- ?
La guerre terminée, le Boïeldieu fut envoyé à La Nouvelle-Orléans pour le compte du gouvernement français. Le 18 mars 1919, alors qu’il était assisté de deux remorqueurs pour sortir des bouches du Mississipi, la remorque se rompit ; il fut drossé sur un banc où il demeura échoué jusqu’au 23, en dépit des efforts consentis pour le tirer de cette fâcheuse posture. Une semaine plus tard, se trouvant à louvoyer à l’entrée du canal de Floride, il manqua un virement de bord et vint heurter la roche dite « Alligator Reef ». Le vapeur de sauvetage américain Biesbash accourut aussitôt et commença à alléger le chargement ; le 4 avril, le Boïeldieu était de nouveau à flot ; il put faire route jusqu’à Keywest, où des scaphandriers examinèrent son petit fond qu’ils trouvèrent intact. Le chargement fut remis en cale et réarrimé, et, le 20 mai au matin, le navire entrait en Loire, après une traversée de 52 jours depuis la Nouvelle-Orléans.
En 1921, à son dernier voyage, il débarqua à Granville ; il fut ensuite remorqué jusqu’au Canal de La Martinière, où il y entra le 16 mai 1921 pour être désarmé ; il en ressortira le 18 juillet 1927 pour être démoli. Et il semble qu’il ait été le premier des occupants de ce triste cimetière fluvial, aux écluses impressionnantes, où, tristement, finirent pas moins de 27 grands voiliers nantais...
(D’après Louis LACROIX : « Les derniers grands voiliers », J. PEYRONNET & Cie, éd., Paris, 1937, p. 300 à 303, et Annexe, p. 489).