Re: RIVER CLYDE SGTM
Publié : ven. déc. 26, 2008 2:23 pm
Bonjour à tous,
Cargo RIVER CLYDE SGTM (sous pavillon britannique)
Lancé en Mars 1905 au chantier Russel de Glasgow pour la River Clyde Co Ltd.
3913 tx JB
Arrive à Marseille le 11 Février 1915 avec un chargement de maïs, en provenance de Haïphong. Il est alors racheté par la Sefton S.S Company, une filiale anglaise de la SGTM.
La SGTM en était donc le propriétaire depuis quelques jours lorsque le navire est réquisitionné. Il a gardé son nom et son pavillon britannique.
Suite à l’échec de la tentative de forcement des détroits le 18 Mars 1915, le débarquement de troupes avait été décidé aux Dardanelles. Les Anglais vont choisir le RIVER CLYDE pour en faire un prototype de navire de débarquement. Il viendra s’échouer sur le rivage et un ponton flottant constitué de chalands le reliera à ce rivage. Des ouvertures rabattables aménagées dans la coque s’ouvriront alors pour débarquer les troupes qui atteindront ainsi la terre ferme.
Mais la plage de débarquement choisie, appelée plage V, se situe au nord de la baie Morto, entre le fort de Seddul Bahr et la batterie Ertoghoul, dans une ondulation du rivage que l’on peut voir sur cette carte.

Cette plage est au pied de terrasses gazonnées qui s’élèvent en pente douce jusqu’à 30 m au dessus du niveau de la mer. La défense turque s’échelonne autour de trois réseau parallèles de barbelés et de plusieurs tranchées qui couvrent de leur feu tout le terrain, jusqu’à la mer. De nombreuses mitrailleuses sont aussi abritées dans les deux forts et balaient en enfilade tout le secteur. Les défenseurs dominent donc tout le rivage comme des spectateurs de fauteuils de balcons dominent la scène d’un théâtre, déclare même le général Hamilton. On ne peut pas dire que le choix du point de débarquement soit particulièrement judicieux. Voici une vue de l’ensemble du secteur, vu depuis la batterie Ertoghoul.

Le 25 Avril, le RIVER CLYDE quitte Tenedos avec 2000 fusiliers du Lancashire qui doivent être mis à terre en une seule fois. A 06h00 du matin les premiers canots, portant trois compagnies se dirigent vers la plage, tandis que le RIVER CLYDE les suit avec ses barges amarrées à couple.
La discipline de feu des Turcs est parfaite. Pas un coup n’est tiré avant que les canots n’atteignent la plage. Puis le feu se déchaîne et en quelques instants, toute la vague d’assaut est anéantie, sauf quelques hommes qui resteront toute la journée regroupés au pied d’un escarpement.
Une grêle de projectiles atteint le RIVER CLYDE. La berge s’avère moins inclinée que prévue et lorsque le cargo s’échoue, les passerelles volantes ne touchent pas le sol. De plus, un des chalands, ses amarres coupées par les projectiles, tombe en travers.
Une première compagnie s’élance, accueillie par un feu terrible venu des tranchées, situées à moins de 100m. Seul un peloton rejoint les premiers hommes sous l’escarpement. Une 2e compagnie s’élance, mais les barges se détachent du rivage. Les hommes doivent se jeter à l’eau pour tenter d’atteindre la plage à la nage. La plupart sont tués ou se noient sous le poids de leur équipement. Il faut plus d’une heure au commander Urwin et à ses marins pour rétablir un ponton flottant. Une 3e compagnie s’élance alors avec à sa tête le général Napier, qui dirige l’assaut, et son chef d’état-major. Elle est anéantie.
Sur mille hommes sortis du RIVER CLYDE, 600 ont été tués… Devant ce terrible carnage, l’assaut est alors suspendu.
Voici deux vues du ponton de débarquement prises depuis le RIVER CLYDE


Le débarquement va reprendre à la nuit tombée, dans une complète obscurité. Il s’effectuera enfin, avec des pertes…minimes. Et à l’aube du 26, appuyés par le tir de vaisseaux de guerre, les soldats s’emparent des forts et établissent une solide tête de pont. On demeure tout de même surpris que les stratèges n’aient pas songé plus tôt à une attaque de nuit ! Surtout, choix du point d’attaque et estimation des forces de l’adversaire n’avaient pas fait l’objet d’études sérieuses. Pareille opération semble une infraction flagrante aux lois les plus élémentaires de l'art de la guerre.
Voici, photographié au cours des jours suivants, le RIVER CLYDE échoué à Seddul Bahr.


Quant au débarquement, il se poursuivra sans trop de mal, mais avec des moyens bien rudimentaires. (Je n'ai pu identifier le cuirassé figurant sur ce cliché).

Il faudra, par cette plage si chèrement conquise, ravitailler toutes les troupes qui tentent de progresser vers l’intérieur. Or il s’avère bien vite que cette plage, ouverte à tous les vents, exposée aux assauts de la mer, est impropre à cette fonction. C’est pourquoi on va créer de toutes pièces un port artificiel, comme on le fera en Juin 1944 à Arromanches.
Le RIVER CLYDE, échoué, constituera le brise-lames sud-est. Le 9 Novembre, le brise-lames nord-ouest sera formé par les navires MASSENA et SAGHALIEN. (voir fiches de ces bâtiments).
Mais le 9 Janvier 1916, lors de l’évacuation des Dardanelles, les trois navires seront dynamités afin d’éviter tout renflouement par les Turcs. Après la guerre, SAGHALIEN et MASSENA, définitivement hors d’état de naviguer, seront dépecés sur place par des démolisseurs. En revanche, le RIVER CLYDE sera renfloué et remis en état.
Vendu en 1920 à un armement espagnol, il prendra le nom d’ANGELA. Il changera de propriétaire en 1929 et sera alors rebaptisé MARUJA Y AURORA. Il naviguera encore de nombreuses années, survivra à la seconde guerre mondiale et ne sera démoli à Avilès qu’en 1966, après 61 ans d’existence.
Sources : "La Société Générale de Transports Maritimes" d'Alain Croce.
L'Illustration
Cdlt
Olivier
Cargo RIVER CLYDE SGTM (sous pavillon britannique)
Lancé en Mars 1905 au chantier Russel de Glasgow pour la River Clyde Co Ltd.
3913 tx JB
Arrive à Marseille le 11 Février 1915 avec un chargement de maïs, en provenance de Haïphong. Il est alors racheté par la Sefton S.S Company, une filiale anglaise de la SGTM.
La SGTM en était donc le propriétaire depuis quelques jours lorsque le navire est réquisitionné. Il a gardé son nom et son pavillon britannique.
Suite à l’échec de la tentative de forcement des détroits le 18 Mars 1915, le débarquement de troupes avait été décidé aux Dardanelles. Les Anglais vont choisir le RIVER CLYDE pour en faire un prototype de navire de débarquement. Il viendra s’échouer sur le rivage et un ponton flottant constitué de chalands le reliera à ce rivage. Des ouvertures rabattables aménagées dans la coque s’ouvriront alors pour débarquer les troupes qui atteindront ainsi la terre ferme.
Mais la plage de débarquement choisie, appelée plage V, se situe au nord de la baie Morto, entre le fort de Seddul Bahr et la batterie Ertoghoul, dans une ondulation du rivage que l’on peut voir sur cette carte.

Cette plage est au pied de terrasses gazonnées qui s’élèvent en pente douce jusqu’à 30 m au dessus du niveau de la mer. La défense turque s’échelonne autour de trois réseau parallèles de barbelés et de plusieurs tranchées qui couvrent de leur feu tout le terrain, jusqu’à la mer. De nombreuses mitrailleuses sont aussi abritées dans les deux forts et balaient en enfilade tout le secteur. Les défenseurs dominent donc tout le rivage comme des spectateurs de fauteuils de balcons dominent la scène d’un théâtre, déclare même le général Hamilton. On ne peut pas dire que le choix du point de débarquement soit particulièrement judicieux. Voici une vue de l’ensemble du secteur, vu depuis la batterie Ertoghoul.

Le 25 Avril, le RIVER CLYDE quitte Tenedos avec 2000 fusiliers du Lancashire qui doivent être mis à terre en une seule fois. A 06h00 du matin les premiers canots, portant trois compagnies se dirigent vers la plage, tandis que le RIVER CLYDE les suit avec ses barges amarrées à couple.
La discipline de feu des Turcs est parfaite. Pas un coup n’est tiré avant que les canots n’atteignent la plage. Puis le feu se déchaîne et en quelques instants, toute la vague d’assaut est anéantie, sauf quelques hommes qui resteront toute la journée regroupés au pied d’un escarpement.
Une grêle de projectiles atteint le RIVER CLYDE. La berge s’avère moins inclinée que prévue et lorsque le cargo s’échoue, les passerelles volantes ne touchent pas le sol. De plus, un des chalands, ses amarres coupées par les projectiles, tombe en travers.
Une première compagnie s’élance, accueillie par un feu terrible venu des tranchées, situées à moins de 100m. Seul un peloton rejoint les premiers hommes sous l’escarpement. Une 2e compagnie s’élance, mais les barges se détachent du rivage. Les hommes doivent se jeter à l’eau pour tenter d’atteindre la plage à la nage. La plupart sont tués ou se noient sous le poids de leur équipement. Il faut plus d’une heure au commander Urwin et à ses marins pour rétablir un ponton flottant. Une 3e compagnie s’élance alors avec à sa tête le général Napier, qui dirige l’assaut, et son chef d’état-major. Elle est anéantie.
Sur mille hommes sortis du RIVER CLYDE, 600 ont été tués… Devant ce terrible carnage, l’assaut est alors suspendu.
Voici deux vues du ponton de débarquement prises depuis le RIVER CLYDE


Le débarquement va reprendre à la nuit tombée, dans une complète obscurité. Il s’effectuera enfin, avec des pertes…minimes. Et à l’aube du 26, appuyés par le tir de vaisseaux de guerre, les soldats s’emparent des forts et établissent une solide tête de pont. On demeure tout de même surpris que les stratèges n’aient pas songé plus tôt à une attaque de nuit ! Surtout, choix du point d’attaque et estimation des forces de l’adversaire n’avaient pas fait l’objet d’études sérieuses. Pareille opération semble une infraction flagrante aux lois les plus élémentaires de l'art de la guerre.
Voici, photographié au cours des jours suivants, le RIVER CLYDE échoué à Seddul Bahr.


Quant au débarquement, il se poursuivra sans trop de mal, mais avec des moyens bien rudimentaires. (Je n'ai pu identifier le cuirassé figurant sur ce cliché).

Il faudra, par cette plage si chèrement conquise, ravitailler toutes les troupes qui tentent de progresser vers l’intérieur. Or il s’avère bien vite que cette plage, ouverte à tous les vents, exposée aux assauts de la mer, est impropre à cette fonction. C’est pourquoi on va créer de toutes pièces un port artificiel, comme on le fera en Juin 1944 à Arromanches.
Le RIVER CLYDE, échoué, constituera le brise-lames sud-est. Le 9 Novembre, le brise-lames nord-ouest sera formé par les navires MASSENA et SAGHALIEN. (voir fiches de ces bâtiments).
Mais le 9 Janvier 1916, lors de l’évacuation des Dardanelles, les trois navires seront dynamités afin d’éviter tout renflouement par les Turcs. Après la guerre, SAGHALIEN et MASSENA, définitivement hors d’état de naviguer, seront dépecés sur place par des démolisseurs. En revanche, le RIVER CLYDE sera renfloué et remis en état.
Vendu en 1920 à un armement espagnol, il prendra le nom d’ANGELA. Il changera de propriétaire en 1929 et sera alors rebaptisé MARUJA Y AURORA. Il naviguera encore de nombreuses années, survivra à la seconde guerre mondiale et ne sera démoli à Avilès qu’en 1966, après 61 ans d’existence.
Sources : "La Société Générale de Transports Maritimes" d'Alain Croce.
L'Illustration
Cdlt
Olivier