Bonjour à tous,
Baron-Léopold-Davilliers ― Patrouilleur auxiliaire, ex-remorqueur (1914~1919).
Remorqueur en acier de 163 tx jb et de 141 tx jn lancé à la fin de l’année 1912 par l’établissement de Nantes de la Société anonyme des Ateliers et chantiers de la Loire [Siège social : Paris, 11 bis, boulevard Haussmann (IXe Arr.)] pour le compte de la Société centrale de sauvetage des naufragés, établissement reconnu d’utilité publique par un décret du 17 novembre 1865 [Siège social : Paris, 1, rue de Bourgogne (VIIe Arr.)]. Construit selon les plans du remorqueur de l’État Bœuf. Francisé à Nantes le 21 janvier 1913, n° 3.919 ; immatriculé audit quartier, f° 248, n° 739. Signal distinctif : H.L.G.S. Destiné à porter secours aux navires en détresse à l’embouchure de la Gironde, étant attaché au port de Royan. Initialement armé au cabotage le 21 jan-vier 1913 à Nantes, n° 67 ; désarmé le 20 janvier 1914 à Royan, n° 8 ; capitaine BERNIER. Réarmé au cabotage le 21 janvier 1914 à Royan, n° 18 ; capitaine Ph. GUERRE. Désarmé le 1er janvier 1915 à Royan, avec effet rétroactif au 1er août 1914.
A la déclaration des hostilités, mis gratuitement à la disposition du Ministère de la Marine ; restitué par celui-ci dès les premiers mois de 1919. Vendu la même année, le Conseil d’administration de la Société centrale de sauvetage des naufragés jugeant trop dispendieux le maintien à Royan d’un navire en per-manence armé. Réimmatriculé le 8 juin 1919 au quartier de Bordeaux, f° 156, n° 4.821.
• Société centrale de sauvetage des naufragés ― Annales du sauvetage maritime,
1913, 1er Fasc., Janv., Févr., Mars, p. 17 et s.
« MISE EN SERVICE A L’ENTRÉE DE LA GIRONDE
du remorqueur " BARON-LÉOPOLD-DAVILLIER "
Au printemps 1911, le baron Léopold DAVILLIER, cet admirable philanthrope qui a depuis laissé toute sa fortune aux œuvres, venait apporter à la Société de Sauvetage une magnifique donation de 200.000 francs. Cette somme importante arrivait, on peut dire, à son heure ; depuis quelques temps, en effet, le bateau à vapeur de sauvetage que la Société entretenait à Royan, l’Amiral Lafont, donnait des signe de fatigue et il devenait nécessaire de prévoir son remplacement dans un délai qu’avait fixé à dix-huit mois l’inspecteur chargé de la station. La providentielle générosité vint donc à point et nous permit de commander aux Chantiers de Bretagne, à Nantes, un remorqueur puissant qui pût assumer toutes les tâches et accomplir dignement toutes les missions.
Avant que la Société installât ses services de sauvetage à Royan, l’entrée de la Gironde, éloignée de plus de 100 kilomètres du grand port qu’elle commande, ne possédait aucun moyen de sauvetage et de remorquage ; cependant, entre la Coubre et le bec d’Ambez, dans un passage semé de bancs et parti-culièrement dangereux pendant les gros temps d’hiver, passent tous les jours de nombreux navires souvent chargés de passagers. En cas de sinistre, Bordeaux serait, dans la plupart des cas, par son éloi-gnement, incapable de fournir des secours efficaces ; les bâtiments échoués auraient le temps de se perdre et les équipages de se noyer avant qu’ils arrivassent sur les lieux.
L’entrée en service du remorqueur de sauvetage, Baron Léopold Davillier, rend impossible pareille éventualité.
Comme son prédécesseur, l’Amiral Lafont, il assurera, à l’aide de ses canots, le sauvetage des hommes ; mieux que lui, grâce à sa puissance supérieure, il pourra effectuer le sauvetage des navires désem-parés ou entreprendre immédiatement le renflouement des navires échoués : son rôle élargi gagne en bienfaisance.
Lorsqu’il s’est agi d’en faire la commande, nos commissions et notre Conseil se sont, comme toujours, inspirés des nécessités et ont résolu le problème avec l’ampleur qui convient à une Société en faveur de laquelle la générosité française s’exerce avec une aussi inlassable et constante persévérance.
Après étude des différents types de renseignements existants, leur choix s’est arrêté sur un type qui a donné toutes satisfactions à la marine militaire. La nécessité pour un sauveteur d’être prêt dans un temps minimum leur a fait adopter, pour l’appareil évaporatoire, une chaudière tubulaire, la chau-dière Fouché (Oriolle perfectionné) qui permet d’avoir de la pression 45 minutes après l’allumage.
La puissance de la machine a été fixée par eux à 600 chevaux, afin d’être en mesure de rendre tous les services possibles à la navigation. Ils ont voulu une construction extrèmement robuste afin de pouvoir affronter les mers les plus dures. Enfin, ils ont exigé la première cote du Veritas.
PRINCIPALES DIMENSIONS
Longueur entre perpendiculaires .................................... : 26 m. 750
Longueur hors tout...................................................... : 29 m.
Largeur à la flottaison.................................................. : 6 m. 960
Largeur hors tout........................................................ : 7 m. 300
Creux sur fond de carène au livet du pont, au milieu ............ : 3 m. 70
Profondeur de carène................................................... : 2 m. 650
Tirant d’eau moyen en charge......................................... : 2 m. 78
Tirant d’eau maximum.................................................. : 3 m. 18
Le 17 janvier [1913] et les jours suivants, en présence de M. LE VERGER, lieutenant de vaisseau de réserve, inspecteur de la Société, les essais prévus au marché ont été effectués à l’entrée de la Loire.
Ils ont été en tous points réussis et les résultats ont dépassé les prévisions. C’est ainsi :
1°― Que la vitesse prévue de 11 nœuds à 140 tours a été dépassée de 1 nœud 74, bien que les essais de vitesse aient été faits par petits fonds sur la base d’Indret ;
2°― Que la puissance prévue de 600 hp a atteint 619 chevaux 67 ;
3°― Que la consommation prévue de 0 kg. 750 par cheval et par heure n’a pas dépassé 0 kg 605.
L’essai de bon fonctionnement a été fait par mauvais temps et le bâtiment s’est admirablement comporté.
L’armement a été des plus soignés.
Après avoir été béni à Nantes, avant son départ, le Baron Léopold Davillier a fait route pour Bordeaux où il est arrivé le 24. Après avoir complété son charbon et pris son équipage, il s’est rendu, le 30, à Royan, son poste de stationnement.
A l’occasion de la mise en service de notre nouveau remorqueur, notre société réunissait dans un ban-quet donné au Nouvel Hôtel du Café de Bordeaux, le 29 janvier dernier, un certain nombre de notabi-lités bordelaises.
M. DUREAULT, préfet de la Gironde, qui avait accepté d’être des nôtres, mais qui fut obligé, au dernier moment, de se rendre à Paris, s’était fait représenter par le secrétaire général de la Préfec-ture. Assistaient en outre au banquet, qui était présidé par M. GRANJON DE LEPINEY, Administrateur-délégué, représentant M. le vice-amiral DUPERRÉ ;
MM. GRUET, maire de Bordeaux ; GUESTIER, président de la Chambre de Commerce ; docteur JEAN, directeur de l’École de santé navale ; ESTORGES, chef des services de la Marine ; CLAVEL, ingénieur des ponts et chaussée ; DE MADAILLAN, administrateur de l’Inscription maritime ; LAGARDE, trésorier de la Chambre de Commerce ; PASCAL BUHAN, ancien président de la Chambre de commerce ; MILLET, trésorier de la Fédération maritime ; Ch. ALLARD et BALGUERIE, président et vice-président de la Chambre des courtiers maritimes ; GUILLOT DE SUDUIRAUT, président de la Chambre des assureurs maritimes ; LESPES, directeur des chantiers Dyle et Bacalan ; PRESSEQ, directeur des chantiers de la Gironde ; G. BARRES, président de la Société de défense du commerce ; E. FAURE, président de la Chambre syndicale des exportateurs ; RENAUD et BRENIER, directeurs de la maison Worms et Cie, à Bordeaux ; LOGRE, agent général de la Compagnie des Chargeurs réunis ; MINVIELLE, directeur de la Compagnie Bordeaux-Océan ; H. FERRIÈRE et OLLION DELMESTRE, courtiers maritimes ; LARRONDE, président du Comité de sauvetage d’Arcachon ; D. GOT et PRIVAT, président et secrétaire de la Ligue maritime à Bordeaux.
MM. BALLANDE, député ; ABBADIE, commandant de port, et CANGARDEL, administrateur de l’ins-cription maritime à Royan, avaient également accepté de se rendre à notre invitation, mais ont été retenus par des empêchements imprévus.
Au champagne, les discours que nous reproduisons ci-dessous furent prononcés par M. GRANJON DE LEPINEY, Administrateur-délégué, et M. GUESTIER, président de la Chambre de Commerce. Puis, M. GRUET, maire de Bordeaux, porta un toast à la santé de notre éminent et toujours si dévoué prési-dent, M. le vice-amiral DUPERRÉ, et exprima en termes chaleureux les sentiments de sympathie et d’admiration qu’inspire à ses concitoyens la Société Centrale de Sauvetage des Naufragés. Enfin M. le Secrétaire général de la Préfecture, parlant au nom de son chef empêché, déclara s’associer pleine-ment au langage des précédents orateurs, et renouvela à notre administrateur-délégué l’assurance du grand intérêt que porte le gouvernement à l’Œuvre si considérable et si efficace de notre Société. »
(Discours non retranscrits).
(op. cit., p. 19).
(op. cit., p. 20).
• Société centrale de sauvetage des naufragés – Annales du sauvetage maritime,
3e et 4e Trim. 1919, p. 96.
«
CONSTRUCTIONS NEUVES ET GROS TRAVAUX ENTREPRIS EN 1919
« [...] Royan. ― Au lendemain de la guerre, et alors que notre remorqueur de sauvetage le Baron Léopold Davillier devait nous être prochainement rendu par la Marine, notre Conseil d’Administration, examinant s’il convenait de rétablir l’organisation du sauvetage à l’embouchure de la Gironde, telle qu’elle était en 1914, se prononça pour la négative, jugeant que le problème serait résolu, d’une manière à la fois moins coûteuse et plus satisfaisante, par l’installation à terre, à Royan, d’un bon canot à moteur, avec voie de lancement. En conséquence, la convention du 29 janvier 1913 avec la Chambre de commerce de Bordeaux a été résiliée, et le Baron Léopold Davillier a été vendu. Les plans de la nouvelle organisation ont été établis ; les formalités administratives, nécessaires avant d’en commencer l’exécution sont en cours. [...] »
• Société centrale de sauvetage des naufragés ― Annales du sauvetage maritime, 1er et 2e Trim. 1920, p. 8, 11 et 12 : Assemblée générale ordinaire du 16 mai 1920 ― Rapport de M. Granjon de Lépiney, administrateur délégué, sur l’action de la société et sur la situation financière.
« [...] L’organisation du sauvetage dans l’estuaire de la Gironde est un problème des plus difficiles. Les nombreux bancs qui s’étendent entre la Coubre au Nord et la Pointe de Grave au Sud constituent de sérieux dangers pour la navigation ; or, le littoral voisin est désert, et ce n’est qu’à 12 milles en de-dans que l’on rencontre, sur la rive droite, le premier port, qui est Royan ; puis, sur la rive gauche, le Verdon.
L’histoire des initiatives de notre Société dans ces parages, dont la première remonte à 1876, présente une longue série d’efforts en général fort coûteux, et qui, néanmoins, ne nous ont jamais satisfait. En dernier lieu, nous avions placé à Royan un remorqueur de 600 HP maintenu armé en permanence, le Baron Léopold Davillier, que nous avions fait construire spécialement d’après les plans du remorqueur de l’État le Bœuf. Une convention passée avec la Chambre de Commerce de Bordeaux stipulait qu’en dehors de sa destination spéciale pour le sauvetage des vies humaines, le Baron Léopold Davillier opérerait des sauvetages matériels, et ferait des remorquages de la mer à la rade du Verdon pour le compte de la Chambre de Commerce ; ce régime devait présenter le double avantage d’être utile à la ville de Bordeaux qui ne disposait d’aucun remorqueur dans l’estuaire, et d’assurer à notre équipage une certaine activité.
Dès que la guerre éclata, le Baron Davillier fut mis par nous gratuitement à la disposition de la Marine, et, pendant toute la durée de la guerre, il ne cessa d’apporter à la Défense Nationale son entier concours. La Marine nous le rendit dans les premiers mois de 1919. La question se posa alors de savoir si l’organisation d’avant-guerre devait être rétablie. La carrière du Baron Davillier n’avait pas réalisé nos espérances ; les interventions pour le compte de la Chambre de Commerce avaient été si rares que nos hommes vivaient dans une inaction presque complète ; l’opinion publique elle-même était peu favorable à ce navire armé qui ne rendait pas de services. La Chambre de Commerce de Bordeaux, consultée, déclara nettement qu’elle ne désirait pas remettre en vigueur notre convention de 1913. La décision que nous avons prise était alors inéluctable : les interventions pour le sauvetage de personnes en péril sur un navire à la mer sont, Dieu merci, très espacées ; et un navire armé cons-tamment n’ayant d’autre destination que des interventions de cette nature, est fatalement un navire inoccupé, dont l’équipage ne fait que perdre dans le désœuvrement les qualités qui lui seraient néces-saires le jour où on aurait besoin de son concours.
Au surplus, il ne faut pas perdre de vue que la Société Centrale de Sauvetage des Naufragés, de même que les Sociétés similaires des divers pays maritimes et notamment de l’Angleterre, a pour objet l’as-sistance côtière au moyen de canots, tandis que les opérations de sauvetage en pleine mer, qui exigent l’emploi de véritables navires, ne sont ni dans ses attributions, ni en son pouvoir. Seuls l’État, les Com-pagnies de Navigation, les Chambres de Commerce, sont susceptibles d’assumer un tel rôle, parce qu’ils ont la possibilité de fournir aux navires armés à cet effet d’autres occupations de caractère com-mercial ou militaire. A la suite de la déplorable catastrophe de l’Afrique sur le plateau de Roche-bonne, c’est une solution de ce genre qui s’imposait et qui demain sera réalisée. A cet effet, l’État a confié au service du pilotage de la Gironde un remorqueur qui sera mouillé en rade du Verdon ; ce remorqueur ne sera pas inoccupé ; il fera notamment le pilotage au large par gros temps. Quant à l’entretien évidemment fort dispendieux, on y pourvoira au moyen des participations financières des grands organismes les plus intéressés et en premiers lieu de l’État. [...] »