Re: Entre les lignes...
Publié : sam. févr. 10, 2007 12:47 am
Gendarmerie nationale
Prévôté de la D.E.S.
Poste de Port à Binson du 28 juin 1916
Détachement de Dormans.
Procès-verbal constatant la mort par immersion du soldat Forestier Yves, classe 1904 en subsistance à l’ambulance 4/60.
Ce jourd’hui vingt-huit juin mil neuf cent seize à treize, nous soussigné Vidal Eusèbe Jean, brigadier à pied à la résidence de Port à Binson département de la Marne revêtu de notre uniforme et conformément aux ordres de nos chefs, prévenu qu’un cadavre venait d’être découvert, flottant dans un remous de la rivière la Marne, nous nous sommes rendus à l’écluse de Vaudières, où, l’éclusier-barragiste nous a conduit à environ 1 kilomètre 500 en aval de l’écluse, rive gauche de la Marne, territoire de la commune de Troissy où se trouvait le cadavre qui nous avait été signalé.
Ce cadavre qui paraissait avoir séjourné plusieurs jours dans l’eau était dans un état de
décomposition très avancé, il était complètement nu. Au moyen de la barque, nous nous en sommes approchés et avons constaté qu’il portait au poignet gauche la plaque d’identité maintenue par une petite chaîne et portant les inscriptions suivantes : Forestier Yves 1904 Guigamp 266. la plaque d’identité ne laissant aucun doute que nous étions en présence du corps d’un militaire, nous nous sommes mis à la recherche des effets.
Sur la berge, rive gauche et à environ dix mètres en amont, nous avons trouvé les vêtements militaires du noyé à l’exception du pantalon que nous avons découvert 200 mètres plus haut. Les poches étaient vides et malgré les recherches faites aux alentours, nous n’avons pu découvrir aucune pièce ou objet pouvant nous servir et nous faire connaître le régiment auquel appartenait le défunt.
La découverte des effets à deux endroits différents et la disparition complète de toute pièce que d’habitude les militaires mettent dans leurs poches ( portefeuille, photographies etc...) peuvent donner lieu à cette supposition :
Ce militaire a voulu se suicider et pour faire croire à une mort accidentelle s’est déshabillé, et, afin que son identité ne puisse être établi, a jeté à l’eau toutes les pièces pouvant le faire identifier, oubliant d’enlever la plaque d’identité.
Ou bien, il s’est noyé accidentellement en voulant se baigner, et un ou des inconnus se seraient approprié tout ce qui se trouvait dans les poches des vêtements, trouvés par eux sur la berge, et, ont abandonné le pantalon de velours 200 mètres plus haut, craignant que cet effet qu’ils auraient peut-être voulu prendre pour leur service, les fasse découvrir.
Toutefois, la première supposition parait plus vraisemblable, car l’endroit où a été retrouvé le cadavre, qui, vu la découverte des effets à proximité n’a pas été entraîné loin du point où il est tombé à l’eau, est peu propice aux baignades, se trouvant éloigné de 3 kilomètres environ du village de Troissy donc un endroit désert, en dehors de tout chemin et où la rivière est très vaseuse, recouverte d’herbes et d’un accès très difficile.
Continuant notre enquête, nous avons entendu monsieur Monteil Henri, 34 ans, éclusier-barragiste à Vandières ( Marne) qui nous a fait la déclaration suivante :
“Ce matin, vers dix heures, des bateliers qui remontaient la Marne, m’ont rendu compte en passant à l’écluse qu’ils venaient d’apercevoir à environ 1 kilomètre 500 en aval un cadavre flottant près de la berge, rive gauche. Je me suis immédiatement rendu au dit lieu et ai en effet constaté que le corps d’un homme paraissant avoir séjourné longtemps dans l’eau, se trouvait dans les joncs à l’endroit où il est encore.
“M’étant aperçu que ce cadavre avait au poignet gauche une plaque d’identité au nom de Forestier Yves, j’en ai conclu que c’était un militaire et ai aussitôt télégraphié au commandant d’armes de la place de Dormans.
Au cours de mes tournées, je n’ai jamais vu de militaires venant se baigner en dessous de l’écluse, où d’ailleurs la rivière est vaseuse, recouverte de joncs et peu propice aux baignades.”
Lettre faite de sa déclaration, y persiste et signe.
Nous nous sommes ensuite rendus à l’ambulance 4/60, sise sur le territoire de la commune de Binson-Orquigny, dont une annexe est installée à Troissy, afin de prévenir monsieur le médecin-chef, lui rendre compte de nos constatations et le prier de vouloir bien se rendre sur les lieux, afin d’autopsier et autres constatations légales.
Dès qu’il a eu connaissance du nom inscrit sur la plaque d’identité trouvée sur le cadavre cet officier nous a déclaré que cet homme appartenait à sa formation, et que n’étant pas rentré d’une permission expirant le 19 juin courant, il avait été signalé comme déserteur le 24 du même mois. Il a ajouté que Forestier était un alcoolique et d’un caractère faisant supposer qu’il s’est noyé volontairement.
Le cadavre ne portait aucune trace de violence.
Aidé du personnel que monsieur le médecin-chef avait amené avec lui, le corps de ce soldat a été transporté à l’ambulance 4/60 à Binson-Orquigny, afin d’autopsie et d’inhumation.
Nous joignons au présent :
1°) un rapport du médecin-chef
2°) une copie de l’acte de décès
3°) un inventaire des effets retrouvés sur la berge
4°) une plaque d’identité.
Le soldat Forestier Yves, classe 1904, était affecté à l’ambulance 4/60 et appartenait au 19ème escadron du train des équipages militaires, 70ème compagnie, il était domicilié avant la mobilisation à Ploëzal canton de Pontieux ( Côtes du Nord).
Copie du présent à été remis à monsieur le médecin-chef de l’ambulance 4/60, son chef de service.
En foi de quoi, nous avons rédigé les présents destinés à monsieur le Général commandant la D.E.S. Vème Armée.
Fait et clos aux armées, les jours, mois et an que d’autre part.
Signé : Vidal
CCM 08/02/2007
Prévôté de la D.E.S.
Poste de Port à Binson du 28 juin 1916
Détachement de Dormans.
Procès-verbal constatant la mort par immersion du soldat Forestier Yves, classe 1904 en subsistance à l’ambulance 4/60.
Ce jourd’hui vingt-huit juin mil neuf cent seize à treize, nous soussigné Vidal Eusèbe Jean, brigadier à pied à la résidence de Port à Binson département de la Marne revêtu de notre uniforme et conformément aux ordres de nos chefs, prévenu qu’un cadavre venait d’être découvert, flottant dans un remous de la rivière la Marne, nous nous sommes rendus à l’écluse de Vaudières, où, l’éclusier-barragiste nous a conduit à environ 1 kilomètre 500 en aval de l’écluse, rive gauche de la Marne, territoire de la commune de Troissy où se trouvait le cadavre qui nous avait été signalé.
Ce cadavre qui paraissait avoir séjourné plusieurs jours dans l’eau était dans un état de
décomposition très avancé, il était complètement nu. Au moyen de la barque, nous nous en sommes approchés et avons constaté qu’il portait au poignet gauche la plaque d’identité maintenue par une petite chaîne et portant les inscriptions suivantes : Forestier Yves 1904 Guigamp 266. la plaque d’identité ne laissant aucun doute que nous étions en présence du corps d’un militaire, nous nous sommes mis à la recherche des effets.
Sur la berge, rive gauche et à environ dix mètres en amont, nous avons trouvé les vêtements militaires du noyé à l’exception du pantalon que nous avons découvert 200 mètres plus haut. Les poches étaient vides et malgré les recherches faites aux alentours, nous n’avons pu découvrir aucune pièce ou objet pouvant nous servir et nous faire connaître le régiment auquel appartenait le défunt.
La découverte des effets à deux endroits différents et la disparition complète de toute pièce que d’habitude les militaires mettent dans leurs poches ( portefeuille, photographies etc...) peuvent donner lieu à cette supposition :
Ce militaire a voulu se suicider et pour faire croire à une mort accidentelle s’est déshabillé, et, afin que son identité ne puisse être établi, a jeté à l’eau toutes les pièces pouvant le faire identifier, oubliant d’enlever la plaque d’identité.
Ou bien, il s’est noyé accidentellement en voulant se baigner, et un ou des inconnus se seraient approprié tout ce qui se trouvait dans les poches des vêtements, trouvés par eux sur la berge, et, ont abandonné le pantalon de velours 200 mètres plus haut, craignant que cet effet qu’ils auraient peut-être voulu prendre pour leur service, les fasse découvrir.
Toutefois, la première supposition parait plus vraisemblable, car l’endroit où a été retrouvé le cadavre, qui, vu la découverte des effets à proximité n’a pas été entraîné loin du point où il est tombé à l’eau, est peu propice aux baignades, se trouvant éloigné de 3 kilomètres environ du village de Troissy donc un endroit désert, en dehors de tout chemin et où la rivière est très vaseuse, recouverte d’herbes et d’un accès très difficile.
Continuant notre enquête, nous avons entendu monsieur Monteil Henri, 34 ans, éclusier-barragiste à Vandières ( Marne) qui nous a fait la déclaration suivante :
“Ce matin, vers dix heures, des bateliers qui remontaient la Marne, m’ont rendu compte en passant à l’écluse qu’ils venaient d’apercevoir à environ 1 kilomètre 500 en aval un cadavre flottant près de la berge, rive gauche. Je me suis immédiatement rendu au dit lieu et ai en effet constaté que le corps d’un homme paraissant avoir séjourné longtemps dans l’eau, se trouvait dans les joncs à l’endroit où il est encore.
“M’étant aperçu que ce cadavre avait au poignet gauche une plaque d’identité au nom de Forestier Yves, j’en ai conclu que c’était un militaire et ai aussitôt télégraphié au commandant d’armes de la place de Dormans.
Au cours de mes tournées, je n’ai jamais vu de militaires venant se baigner en dessous de l’écluse, où d’ailleurs la rivière est vaseuse, recouverte de joncs et peu propice aux baignades.”
Lettre faite de sa déclaration, y persiste et signe.
Nous nous sommes ensuite rendus à l’ambulance 4/60, sise sur le territoire de la commune de Binson-Orquigny, dont une annexe est installée à Troissy, afin de prévenir monsieur le médecin-chef, lui rendre compte de nos constatations et le prier de vouloir bien se rendre sur les lieux, afin d’autopsier et autres constatations légales.
Dès qu’il a eu connaissance du nom inscrit sur la plaque d’identité trouvée sur le cadavre cet officier nous a déclaré que cet homme appartenait à sa formation, et que n’étant pas rentré d’une permission expirant le 19 juin courant, il avait été signalé comme déserteur le 24 du même mois. Il a ajouté que Forestier était un alcoolique et d’un caractère faisant supposer qu’il s’est noyé volontairement.
Le cadavre ne portait aucune trace de violence.
Aidé du personnel que monsieur le médecin-chef avait amené avec lui, le corps de ce soldat a été transporté à l’ambulance 4/60 à Binson-Orquigny, afin d’autopsie et d’inhumation.
Nous joignons au présent :
1°) un rapport du médecin-chef
2°) une copie de l’acte de décès
3°) un inventaire des effets retrouvés sur la berge
4°) une plaque d’identité.
Le soldat Forestier Yves, classe 1904, était affecté à l’ambulance 4/60 et appartenait au 19ème escadron du train des équipages militaires, 70ème compagnie, il était domicilié avant la mobilisation à Ploëzal canton de Pontieux ( Côtes du Nord).
Copie du présent à été remis à monsieur le médecin-chef de l’ambulance 4/60, son chef de service.
En foi de quoi, nous avons rédigé les présents destinés à monsieur le Général commandant la D.E.S. Vème Armée.
Fait et clos aux armées, les jours, mois et an que d’autre part.
Signé : Vidal
CCM 08/02/2007