Bonjour à tous,
VILLE DE ROUEN
Un petit complément sur VILLE DE ROUEN
Etat-major du navire
BUGAUT Frédéric Capitaine Saint Malo (Lieutenant de vaisseau auxiliaire)
LALANDE François 2e capitaine Paimpol (Enseigne de vaisseau auxiliaire)
HERIBEL Charles Chef mécan. Caen
DOUET Pierre 2e mécanicien Le Havre
DUVAL Henri 3e mécanicien (embarqué le 8 Juin 1915. Aucun renseignement sur lui)
Rapport du capitaine BUGAUT
Le 18 Juillet 1916 à 12h45, par …... (position illisible, SW du cap Matapan) avons aperçu sur bâbord arrière le sillage d'une torpille qui se dirigeait vers nous et allait atteindre le compartiment des machines. L'homme de veille arrière a donné l'alerte dès qu'il l'a aperçue et nous avons mis la barre toute à droite pour que la torpille élonge le navire. Celui-ci fut atteint par le travers bâbord à hauteur de la cale. Le choc fut effroyable et le pont s'est ouvert sur toute la partie comprise entre l'hiloire de panneau et la muraille. Les radeaux du roof arrière ont été détruits. Le tunnel fut envahi, puis la machine où l'eau monta avec rapidité. Il était impossible de combattre la voie d'eau avec les moyens du bord.
Mis aux postes de sauvetage et débordé les trois embarcations. Depuis le matin, nous naviguions de conserve avec un vapeur de Gibraltar et deux chalutiers qui l'escortaient, ceci de manière inattendue. Envoyé des signaux de détresse et les trois navires se sont rapprochés pour nous recueillir. Les embarcations ont effectué plusieurs voyage entre le navire et les chalutiers.
A un moment, il ne resta plus à bord que les trois officiers de pont et moi-même. Nous attendions le retour d'une embarcation. C'est alors qu'une seconde torpille a frappé le navire par le travers tribord de la passerelle. Heureusement, nous avions vu le sillage et j'ai crié aux hommes de se mettre à l'abri vers l'arrière. Le second, qui se trouvait sur bâbord, a été projeté à la mer. L'explosion fut terrible avec gerbe d'eau, de charbon et de débris de toutes sortes jusqu'à hauteur des mâts. Le navire s'est aussitôt incliné sur tribord et s'est enfoncé rapidement. Avec les deux officiers restant à bord, nous avons sauté à la mer pour essayer de rejoindre une embarcation. Le navire a disparu en trois minutes, laissant les hommes des embarcations pétrifiés. A bout de forces, nous avons pu finalement rejoindre l'embarcation la plus proche.
Le chalutier a manœuvré de façon admirable. Ils ont recueilli tout le monde, mais on déplore malheureusement trois disparus :
le soldat Phinord qui logeait sur le pont arrière et qui a été tué par l'explosion de la torpille
le matelot Pietri, que nous n'avons pas pu retrouver
le matelot Orsoni, très gravement blessé et qui fut évacué dans une embarcation, mais qui décéda deux heures plus tard de ses blessures.
Pietri et Orsoni étaient permissionnaires des bâtiments de servitude de Salonique.
Quatre hommes ont aussi été blessés et ont reçu des soins sur les chalutiers.
A 17h00, un trooper anglais a donné l'ordre aux chalutiers d'aller nous déposer à Milo où nous sommes arrivés le 19 Juillet à 14h00.
Le sous-marin attaquant
C'était donc l'UB 45 du KL Karl PALIS.
Voici la silhouette de ce sous-marin dessinée par le capitaine du vapeur anglais VIRGINIA qu'il avait coulé 48 heures plus tôt.
LES RECOMPENSES
Citations à l'Ordre de l'Armée
BUGAUT Frédéric Emmanuel CLC Capitaine Lieutenant de Vaisseau auxiliaire Saint Malo 655
A toujours fait preuve des plus belles qualités de commandement. A réussi par son énergie et son sang froid à assurer le sauvetage des passagers et de l'équipage de son bâtiment torpillé par un sous-marin.
ORSONI Antoine Toussaint Matelot sans spé. Bastia 2718
PHINORD Joseph Soldat du train des équipages
Morts à leurs postes en accomplissant leur devoir à bord du VILLE DE ROUEN lors du torpillage de ce vapeur par un sous-marin.
PIETRI Joseph Matelot sans spé. Bastia 5592
Grièvement blessé à son poste en accomplissant son devoir à bord de VILLE DE ROUEN lors du torpillage de ce vapeur par un sous-marin. Mort deux heures après des suites de ses blessures.
Citations à l'Ordre de la Brigade
LALANDE François CLC Second capitaine Enseigne de Vaisseau auxiliaire
GALOPET Eugène Capitaine au cabotage Maître de manœuvre Saint Malo
Ont secondé avec le plus grand calme le capitaine de VILLE DE ROUEN lors de l'évacuation de ce vapeur torpillé par un sous-marin.
Le capitaine BUGAUT
Né à Saint Briac le 25 Août 1873, Frédéric Emmanuel Bugaut était un ancien des grands voiliers cap-horniers. Il avait notamment été embarqué comme lieutenant sur le trois-mâts ANNE DE BRETAGNE en 1901, puis à nouveau sur ce même trois-mâts, comme capitaine, en 1910/1911 pour une campagne Le Havre – Thio – Houaïlou – Glasgow (transport de minerai de nickel).
On note d'ailleurs qu'au cours de ce voyage sur la Nouvelle Calédonie, il avait comme lieutenant à son bord un officier né à Sydney et nommé Marin La Meslée. On peut penser qu'il s'agit d'un proche parent (père ou oncle) du futur pilote de chasse Edmond Marin La Meslée, héros de la bataille d'Angleterre en 1939-1940 avec 20 victoires, et qui disparût en 1944 dans le ciel d'Alsace lors de sa 105e mission.
Frédéric Bugaut fut par la suite fait Chevalier de la Légion d'Honneur. Il est décédé en 1949. Voici son faire-part de décès.
Cdlt