Bonjour à tous,
Naufrage du 28 Janvier 1918
Navire armé de 2 canons de 95 mm sur affût de côte, un à l’avant et un à l’arrière, de 2 appareils Verdier et de 10 flotteurs Berger
46 hommes d’équipage dont 7 officiers
Rapport de l’officier enquêteur (CV LEBAIL)
DJIBOUTI est parti de Bougie le 27 Janvier à 17h00 à destination d’Alger escorté par BISSON II chef de convoi et ANEMONE. Ce dernier ne pouvant marcher plus de 8 nœuds, la vitesse a été fixée à ce chiffre quoique DJIBOUTI donna 10 nœuds en route libre.
Le convoi navigua conformément aux instructions générales pour la Méditerranée et celles particulières du délégué des routes indiquant angles de routes, DJIBOUTI en avant, zigzags. Voici les positions dans le convoi.
A 03h12 le 28 Janvier, par mer houleuse, sans clapotis, peu de vent, très bonne visibilité, très peu de nuages, lune haute sur la gauche, à la position approchée 37°04 N 03°53 E une violente explosion se produisit à l’arrière, près de la cale 3, sans que la passerelle ait rien vu ou ait été informée.
L’officier de quart et le capitaine croient à une explosion d’essence. L’équipage s’affole et se rend aux embarcations avant que l’ordre ait été donné. Personne ne vérifie l’état de la machine. Dix minutes plus tard, le bord est abandonné, le capitaine en dernier.
Le chef de quart du BISSON II avait entendu une détonation sourde et vu une gerbe d’eau à tribord arrière du DJIBOUTI. Les deux chalutiers ont alors mis à toute vitesse, en patrouillant autour de DJIBOUTI qui continuait à marcher. En passant sur ses arrières les commandants ont senti une violente odeur de pétrole. Ce sont les patrouilleurs qui ont transmis l’Allo.
BISSON II, ayant vu que l’équipage de DJIBOUTI évacuait dans les embarcations, s’est rapproché, de même qu’ANEMONE. ANEMONE a recueilli l’équipage qui était dans les deux baleinières qui ont été prises en remorque. Comme elles étaient pleines d’eau, elles ont été abandonnées et BISSON II les a coulées.
Le capitaine de DJIBOUTI est retourné à son bord avec 4 hommes dans le Berthon d’ANEMONE et a demandé une remorque.
A 05h10, les deux chalutiers ont commencé à remorquer en mettant le cap sur Dellys. DJIBOUTI se tenait encore droit, mais s’enfonçait par l’arrière.
A 05h45, la remorque du BISSON casse. Il manœuvre pour se rapprocher de DJIBOUTI. Il prend alors le canot de DJIBOUTI, le capitaine et ses 4 hommes. Ce dernier, voyant que l’eau gagnait toujours a quitté son bâtiment. BISSON se met alors en flèche d’ANEMONE pour continuer le remorquage. Les chalutiers ont une grande difficulté à manœuvrer et à 3 reprises BISSON doit larguer la remorque d’ANEMONE, ne pouvant tenir la route.
A 07h05, ANEMONE, voyant l’arrière de DJIBOUTI à fleur d’eau, largue la remorque. A 07h10, DJIBOUTI coule en 2 ou 3 minutes au Nord du phare de Bangut, ayant été remorqué de 2 milles vers la terre.
Les commandants du BISSON II et d’ANEMONE ont interrogé le capitaine et les hommes de DJIBOUTI qui déclarent n’avoir rien vu. Aucun sillage, aucun périscope n’a été aperçu par les patrouilleurs. Il faut attribuer la perte de DJIBOUTI à une mine ou une torpille dérivante, ou à une torpille lancée par un sous-marin qui n’a pas été aperçu.
Interrogatoire du Capitaine GUGUEN
Cet interrogatoire comporte 4 pages et les principales questions concernent les circonstances qui ont conduit à l’abandon. Voici les plus significatives :
- Qu’avez-vous constaté après l’explosion ?
J’ai constaté que les panneaux 3 et 4 avaient sauté, que la cale 3 était pleine d’eau et que la cale 4 se remplissait.
- Le charpentier Le Bigot a reçu de vous l’ordre de sonder et a relevé 5 m dans la cale 3 (profondeur 8 m). Qu’avez- vous remarqué dans la cale 4 ?
Je n’ai pas vu la cale 4. J’ai seulement entendu l’eau y entrer.
- Toujours d’après le charpentier, il y avait seulement 2 m d’eau à la sonde. Une heure plus tard, quand le charpentier est retourné à bord avec vous, il y avait 3,5 m. Qu’avez-vous fait après?
Pensant pouvoir rallier la terre, j’ai donné l’ordre au 2e capitaine de remettre la machine en marche.
- Pourquoi l’ordre n’a-t-il pas été exécuté ?
Parce qu’il n’y avait plus personne dans la machine. Je suis descendu de la passerelle pour aller vers la machine et j’ai rencontré le chef mécanicien qui m’a dit que l’eau entrait dans la machine, tombait sur la dynamo, que celle-ci avait stoppé et que la cloison étanche ne résisterait pas.
- Il est regrettable, dans un cas aussi grave, qu’en tant que capitaine vous ne vous soyez pas assuré par vous-même des assertions de votre chef mécanicien.
Oui, je le reconnais. J’ai ordonné l’évacuation. C’était 10 à 15 minutes après le choc.
- Que faisait votre équipage ?
L’équipage, composé d’indigènes, s’était rendu en désordre aux embarcations et se disposait à partir.
- Pourquoi les chefs d’embarcation n’usaient-ils pas de leur autorité pour maintenir l’ordre ?
Le 2e capitaine, commandant l’embarcation tribord était à la passerelle et personne ne pouvait contrôler ce canot. Le lieutenant, qui commandait celle de bâbord s’y trouvait. Les saisines n’avaient pas été larguées. Quand j’ai donné l’ordre d’abandon, je pensais le navire perdu.
- Les faits ont prouvé que le bâtiment flottait encore 4 heures après. Votre estimation n’a pas été fondée sur un examen suffisant de la situation.
Je suis d’accord avec tout mon équipage pour affirmer que nous estimions le bateau perdu.
- Les appréciations de votre équipage qui, en la circonstance, a montré plus d’envie de se sauver que de sauvegarder le bâtiment sont plutôt douteuses, tout comme celles du chef mécanicien.
Il m’a dit être descendu sur le plateau des cylindres de la machine et avoir vu que l’eau y entrait.
- Lui avez-vous demandé quelle quantité y entrait ?
Non
- Et lui, vous l’a-t-il dit ?
Non.
- Vous dites que c’est le 2e capitaine, de quart, qui a fait stopper la machine. Or l’enquête faite à Alger montre que la machine a été stoppée à l’avance par le 4e mécanicien ?
En effet. Il n’a pas attendu l’ordre pour stopper la machine.
- Une fois à bord d’ANEMONE, quand vous avez constaté que tout l’équipage était en sécurité, vous êtes revenu à bord pour constater la situation ?
Oui. J’ai constaté que la machine continuait à se remplir et que la seule chance de sauver le bâtiment était de le remorquer.
- Il a alors été constaté qu’il n’y avait que 4 à 5 cm sur le parquet machine. Un essai de pompage aurait pu être tenté avant l’abandon. Pourquoi aucunes mesures d’assèchement n’ont-elles été ordonnées par vous ?
La quantité de 7 tonnes d’eau donnée par le chef mécanicien lors de son interrogatoire est ridicule. Je n’ai pas donné d’ordre d’assèchement par crainte d’ébranlement de la cloison arrière et aussi parce que je n’avais plus personne de disponible dans la machine.
- Le télégraphiste n’avait pas le point régulièrement ?
Si. Mais malheureusement, il n’avait pas été donné cette fois.
- Pourquoi, alors que le télégraphiste essayait de mettre en marche son poste de secours, suivants les prescriptions réglementaires, l’avez-vous fait embarquer dans un canot avant qu’il ait terminé ?
Il m’a dit que son appareil ne fonctionnait plus.
- Vous avez du confondre avec le fonctionnement de la dynamo, et non du poste de secours auxiliaire qui fonctionnait parfaitement comme l’a déclaré le télégraphiste à l’officier AMBC d’Alger ?
Je maintiens mon affirmation.
- Il résulte de vos déclarations qu’un meilleur examen de la situation, plus de discipline dans votre équipage et moins de confiance dans les dires de votre chef mécanicien vous auraient permis d’essayer utilement le sauvetage de votre bâtiment ?
Je reste persuadé que j’aurais pu échouer le bâtiment.
- C’est possible, mais on ne peut que constater que vous n’avez pas tout fait pour le faire.
Interrogatoire du chef mécanicien LESCOP
- Au moment de l’explosion, vous êtes-vous rendu à l’entrée de la machine ?
Oui.
- Vous y avez alors trouvé le 4e mécanicien qui quittait la machine ?
Oui.
- Que vous a-t-il dit ?
Il m’a dit : « Nous sommes torpillés. J’ai stoppé la machine. La cloison arrière est crevée et l’eau tombe sur la dynamo. »
- Il avait donc stoppé la machine sans ordre ainsi qu’il résulte de ses déclarations ?
Oui.
- Lui avez-vous demandé où étaient les hommes de quart ?
Non.
- Vous avez ensuite rencontré le capitaine descendu de la passerelle qui vous a demandé les raisons pour lesquelles l’ordre de remettre en marche la machine n’était pas exécuté ?
Oui. Je lui ai répondu ce que venait de me dire le 4e mécanicien.
- Etes-vous descendu vous-même dans la machine pour vérifier ses assertions ?
J’ai descendu trois ou quatre marches, mais comme la machine était dans l’obscurité je n’ai rien vu. J’ai entendu l’eau qui giclait.
- Le capitaine affirme que c’est sur votre déclaration qu’il était impossible de remettre la machine en marche qu’il a décidé l’évacuation ?
Oui.
- Il était vraiment prématuré de votre part de donner des affirmations aussi nettes sans être allé vous rendre compte vous-même, ne serait-ce qu’avec une lampe de poche électrique, de la situation exacte du bâtiment. D’autre part, n’étant pas de quart, mais ayant la responsabilité de la machine, il était encore plus fâcheux que vous ne vous rendiez pas compte par vous-même si, même l’évacuation décidée, toute mesure de sécurité avait été prise dans la machine pour éviter une explosion ?
J’avais donné des instructions aux mécaniciens de service.
- Vous voyez qu’elles n’ont pas été exécutées. Vous vous reposez sur votre mécanicien de quart comme le capitaine se repose sur vous. L’évacuation s’est faite d’une façon trop hâtive alors qu’il était peut-être possible de sauver le navire. Pourquoi n’avez-vous pas suggéré au capitaine l’usage des pompes d’assèchement ?
Je croyais que la cloison étanche arrière n’était pas suffisamment solide pour supporter les trépidations de la machine.
- N’aviez-vous pas un moyen d’épuisement indépendant ?
Si. Nous avions une pompe auxiliaire d’un débit de 60 t/h environ.
- Pourquoi n’a-t-elle pas été mise en action ?
Parce que l’équipage était déjà aux postes d’abandon et que le personnel mécanicien de quart avait quitté son poste.
- A ce moment, l’ordre d’évacuation avait-il été donné ?
Non.
- Il aurait donc été possible de donner aux mécaniciens de quart qui s’étaient sauvés l’ordre de revenir à leur poste ?
Oui.
- Il est regrettable au point de vue de l’ordre et de la discipline, sinon de la sécurité, que cet ordre n’ait pas été donné. Quand vous êtes revenu à bord, avez-vous pu vous rendre compte de la quantité d’eau embarquée ?
Oui.
- A combien estimez-vous cette quantité ?
A un débit de 7t/h.
- Etant donné ce débit, votre petit cheval aurait pu, avec son débit de 60 t/h compenser largement la voie d’eau ?
Oui.
- Le capitaine conteste votre déclaration de 7 t/h ?
Je maintiens ce que j’ai vu à ce moment là. Mon estimation est un peu approximative.
- Quelle est la valeur de votre personnel mécanicien et chauffeurs ?
J’avais un personnel très dévoué.
- Il est regrettable que vous n’ayez pas vérifié la déclaration de votre mécanicien de quart comme c’était votre devoir avant l’évacuation du bâtiment. A quelle occasion et à quelle époque avez-vous reçu la Croix de Guerre avec palmes ?
A bord du COLBERT attaqué par un sous-marin le 6 Avril 1916.
Interrogatoire du 4e mécanicien BANNIER
- Qui aviez-vous de quart dans la machine de DJIBOUTI le 28 Janvier 1918 à 03h00 ?
Un graisseur sénégalais et trois sénégalais dans la chaufferie.
- Quand vous avez ressenti le choc de la torpille, vous avez immédiatement stoppé la machine ?
Oui.
- Pourtant, vous n’en aviez pas reçu l’ordre ?
Non. L’ordre est arrivé après.
- Qu’avez-vous fait ensuite ?
J’ai constaté qu’il n’y avait plus personne dans la machine et je suis monté sur le pont pour voir ce qui se passait.
- Vous avez alors rencontré le chef mécanicien ?
Oui. Je lui ai dit : « Nous sommes torpillés. L’eau passe par la cale 3 et arrive sur la dynamo. »
- Donc vous avez dit qu’il n’y avait plus rien à faire dans la machine ?
Oui.
- Comment pouviez-vous le savoir puisque vous étiez monté brusquement sans rien vérifier de ce que produisait la déchirure de la cloison ?
Je l’avais constaté en montant sur le pont.
- Votre constatation était superficielle puisque d’après l’’enquête vous avez été vu sur le pont immédiatement après l’explosion.
Oui.
- A ce moment là, l’ordre d’évacuation n’avait pas été donné ?
Non.
- Pourquoi n’êtes-vous pas redescendu dans votre machine et n’avez-vous pas forcé vos chauffeurs de quart à y retourner avec vous ?
Je ne suis pas redescendu et n’ai pas donné d’ordres.
- Vous avez grandement manqué à votre devoir et n’avez pris aucune des mesures de sécurité préalables dans votre machine. Quand on est revenu à bord, on a constaté que la chaufferie était toujours en fonctionnement et la chaudière complètement vide.
Je ne suis pas retourné à bord.
- C’est sur votre affirmation au chef mécanicien, qui l’a répétée au capitaine, que la machine ne pouvait être remise en marche sans danger que le bâtiment a été évacué prématurément. La responsabilité de cette évacuation hâtive vous revient en grande partie et s’ajoute aux fautes précédentes. Est-il exact que vous ayez conseillé au chef mécanicien de ne pas descendre dans la machine ?
Non, je ne l’ai pas dit.
- Il a été dit devant la commission d’enquête d’Alger que vous avez conseillé à Monsieur Lescop de ne pas descendre dans la machine. Monsieur Lescop, le confirmez-vous ?
Réponse de Mr Lescop : « Monsieur Bannier m’a dit –Nous sommes torpillés. La cloison arrière est démolie-. Ce sont ces déclarations qui m’ont incité à ne pas descendre.
- N’avez-vous pas pensé, en voyant que le bâtiment ne coulait pas, à l’usage des pompes d’assèchement ?
Non parce que je suis monté aussitôt.
- En somme, vous avez quitté votre machine en étant dans l’impossibilité complète de dire dans quel état elle se trouvait suite au choc de la torpille.
Oui.
- Avez-vous votre brevet d’officier mécanicien ?
Non. Je suis seulement 1er chauffeur et fait office de 4e mécanicien.
- Depuis combien de temps faites-vous fonction d’officier ?
Je faisais fonction d’officier depuis 44 mois et mangeais à la table des officiers mécaniciens. Mais mon autorité vis-à-vis des hommes de quart se ressentait naturellement de cette situation.
- Vous êtes extrêmement coupable d’être parti aussi hâtivement et sans ordre alors que vous étiez de quart, et de n’avoir pas, avec l’aide de votre chef mécanicien, pris toutes les mesures que commandait la situation.
Le sous-marin attaquant
C’était donc l’U 34 du Kptlt Wilhelm KANARIS
Sanctions. Récompenses
Blâme
GUGUEN François Capitaine Saint Malo 640 (Voté par 2 voix contre 1, le Président proposant une suspension temporaire de commandement de 3 mois)
Avoir fait abandonner précipitamment son navire sans s’être rendu compte que celui-ci n’était pas en danger immédiat avec les circonstances atténuantes suivantes :
- a été débordé par son équipage en grande partie composé d’indigènes
- a été mal renseigné, ou plutôt pas renseigné du tout, par les officiers mécaniciens
- Dès qu’il a été à bord du chalutier, s’est rendu compte de la situation non encore désespérée de son navire et y est retourné pour essayer de le faire remorquer.
Suspension de 3 mois du brevet de chef mécanicien
LESCOP Jean Le Havre 5251
A fait preuve d’incurie et de négligence grave en service en ne vérifiant pas l’état de la machine et des pompes lors du torpillage de son bâtiment et en transmettant à son capitaine des renseignements non contrôlés.
Témoignage Officiel de Satisfaction
LE CALVEZ Guillaume Maître d’équipage Paimpol 3085
MUDES Pierre Restaurateur Paimpol 40144
LEBON Gabriel Matelot Saint Malo 6062
Etaient parmi les volontaires revenus à bord après l’évacuation.
Note du 31 Mars 1918 du LV de CUVERVILLE, Président de la Commission d’enquête, au CA Commandant la Marine au Havre
Par dépêche du 4 Mars 1918 le CA Directeur Général de la Guerre sous-marine demande une enquête contradictoire près des membres du Personnel du vapeur DJIBOUTI, de la Havraise Péninsulaire, coulé le 28 Janvier 1918.
Ces membres sont GUGUEN François, capitaine, LESCOP Jean, Chef Mécanicien, BANNIER Joseph 4e mécanicien, pour lesquels des sanctions ont été demandées par la Commission d’Alger.
Il se trouve que MM Lescop et Bannier sont actuellement à Glasgow, embarqués sur VILLE DE REIMS. Ce bâtiment, récemment construit dans les chantiers anglais pour le compte de la Havraise Péninsulaire est en voie de transfert de pavillon.
Cette compagnie, en vue d’éviter de fournir aux constructeurs un prétexte pour retarder ou suspendre la remise de ce vapeur, m’a demandé s’il serait possible d’attendre son arrivée dans un port quelconque de France pour convoquer ces deux mécaniciens. Leur présence est de toute nécessité à l’armement du bâtiment. La date de son arrivée en France est encore indéterminée. Cette demande me paraît justifiée et, sauf avis contraire du Département, je suspendrai l’envoi des convocations jusqu’à l’arrivée en France de VILLE DE REIMS.
Le commandement de ce nouveau bâtiment doit être pris par Monsieur MASSON, ex capitaine du vapeur VILLE DE BORDEAUX récemment torpillé, et pour lequel nous avons récemment transmis un supplément d’enquête contradictoire réclamé par le Département.
Note du 18 Avril 1918 du Ministre au CA commandant la Marine au Havre
Vous m’avez transmis le 9 Avril une requête tendant à autoriser le Capitaine au long cours Guguen à prendre un nouveau commandement.
Tenant compte du fait que le retard apporté à l’enquête contradictoire ne saurait être attribuée à ce capitaine et, d’autre part, des difficultés de faire comparaître les officiers mécaniciens embarqués actuellement sur un bâtiment retenu en Angleterre, j’ai décidé, à titre de mesure exceptionnelle et bienveillante, d’autoriser provisoirement le capitaine GUGUEN à prendre le commandement du vapeur HAVRAISE pour le voyage indiqué dans la lettre du 4 Avril de la Compagnie Havraise Péninsulaire.
Vous voudrez bien lui donner, ainsi qu’aux officiers mécaniciens LESCOP et BANNIER, les instructions nécessaires pour qu’ils comparaissent ensemble, à leur retour, devant la commission d’enquête de votre port qui devra conserver à cet effet le dossier DJIBOUTI.
Note du 2 Mai 1934 du CV Paul CHACK à propos du dossier du canonnier TRISTANI (Vapeur DJIBOUTI)
Le vapeur DJIBOUTI a été torpillé et coulé par un sous-marin le 28 Janvier 1918 à 03h00 du matin.
Sur la liste d’équipage dressée le 31 Janvier à Alger figure le canonnier CRISTANI 64981.5. Ce nom est également orthographié CRISTANI dans sa déposition individuelle.
A la suite de ce fait de guerre, des sanctions ont été prises contre le capitaine et 2 membres de l’équipage, tandis que 3 hommes ont reçu des témoignages officiels de satisfaction.
TRISTANI, d’après sa propre déclaration, étant de veille à la pièce avant, après avoir donné l’alerte a quitté sans ordre sa pièce pour voir ses camarades de l’arrière. Dans son rapport, la commission a écrit : « Personne ne donne d’ordre aux pièces abandonnées par leur armement ». L’officier de marine AMBC s’exprime ainsi : « Le torpillage a eu lieu à 03h15 à 9 milles de terre, beau clair de lune, par un sous-marin en plongée. L’ordre d’évacuation ayant été donné aussitôt, l’artillerie n’est pas intervenue. Le canonnier de veille à la pièce avant prétend avoir vu le sillage de la torpille à 100 m du bord et n’a pas eu le temps d’achever sa phrase pour l’annoncer que l’explosion a eu lieu. Ce canonnier s’est transporté alors sur l’arrière, soi-disant pour voir ce qu’était devenu son camarade de la pièce arrière qu’il croyait avoir été projeté à la mer par l’explosion. Il y a là mauvaise compréhension de son devoir qui était de rester à son poste, de charger au plus tôt sa pièce et d’être prêt à tirer le cas échéant, ce qu’a fait le canonnier de l’arrière ».
Le canonnier de veille à l’avant était TRISTANI et aucune sanction n’a été prise contre lui.
Cdlt