Bonjour à tous,
Un petit complément sur le CARAIBE
CARAIBE
Caractéristiques
Construit au chantier Gourlay Bros. en 1906 sous le nom de REGISTAN
Acheté par la Cie Gle Transatlantique le 20 Juin 1908 à la Strick Line de Londres et rebaptisé CARAIBE.
1 hélice. 2 mâts. 1 cheminée
Longueur 104,80 m Largeur 13 ,17 m Creux 7,54 m
4233 tpl 2976 tx JB
5409 m3 capacité
Machine à triple expansion de 1500 cv donnant 10,25 nds
Deux chaudières cylindriques timbrées à 12 kg.
Histoire
Affecté à la ligne des Antilles pour le transport du sucre et du rhum des îles.
Premier départ le 15 Septembre 1908.
A subi plusieurs attaques de sous-marins en Méditerranée
- 23 Janvier 1918 réussit à éviter les torpilles de deux sous-marins aux environs de Milo (nota : l’un de ces sous-marins pourrait être l’UC 23 du KL Hans Georg LÜBBE.)
- 28 Septembre 1918 Frappé par une torpille, réussit à gagner Messine. (Récit ci-dessous)
Deux incendies en 1926
- 4 mai dans la machine
- 4 Octobre dans une soute à charbon
S’échoue sur la côte de Cuba en 1927.
S’échoue à nouveau aux Gonaïves (Haïti) en 1929
Désarmé au Havre le 8 Décembre 1934.
Vendu aux Chinois le 30 Janvier 1935 et rebaptisé HA YIH.
Vendu aux Japonais en 1937 et rebaptisé KAIYOKU MARU
Naufragé le 20 Février 1939 par 34°03 N et 127°24 E lors d’une traversée Karatsu - Tsing Tao sur ballasts.
Attaque du 28 Septembre 1918.
Liste d’équipage
Rapport du capitaine
Réquisitionné par le Transit Militaire Maritime, quitté Messine le 28 Septembre 1918 à 15h00 à destination de Palerme, Bizerte puis Toulon, avec 350 tonnes de raisins secs et 32 tonnes de vieux matériel de guerre embarqué à Corfou pour Toulon (vieux filets de barrages, obus, aéroplanes) et escorté par chalutiers ALOUETTE II et MARGUERITE MARIE.
Suivi chenal de sécurité dans les eaux de MARGUERITE MARIE. A 16h02, passé E/W cap Peloro. Commencé à zigzaguer.
A 16h20, par 38°18 N et 15°39,5 W, choc formidable, suivi d’une forte explosion qui ébranle tout le navire. L’explosion se produit par le travers tribord, juste sous la passerelle qui est submergée. Tout est brisé sur la passerelle et dans la chambre de veille où je me trouvais, portant le point sur la carte. Embarcation tribord et compas sont projetés en l’air et je ressens moi-même une forte commotion. Le poste TSF est complètement détruit.
Appelé aux postes de combat. Remous sur tribord, qui pourraient provenir du sous-marin dont on ne voit pas le périscope. Tiré trois coups avec la pièces de 90 mm tandis que MARGUERITE MARIE lance des grenades et qu’ALOUETTE fait route sur la terre.
Mis en avant toute, cap sur la terre, pour échouer le navire qui s’enfonce, sur une plage. Fermé les portes étanches. L’eau monte dans la machine, la cale 2, la soute et la chaufferie. La machine s’arrête toute seule et la barre est bloquée.
La torpille a frappé à hauteur de la cloison entre cale 2 et chaufferie et la brèche est énorme, au moins 12 m de longueur. Embrayé la barre à main de secours.
Demandé à MARGUERITE MARIE de me remorquer et fait tous les signaux pour appeler un remorqueur supplémentaire. MARGUERITE MARIE me prend en remorque avec un petit remorqueur italien, l’AUDACIA. Fait tout d’abord route vers la plage. Chaufferie, soute et machine sont remplies d’eau, jusqu’à mi-hauteur des cylindres.
Monsieur Bouche, officier de tir, fait à nouveau ouvrir le feu avec le 90 mm sur des remous anormaux. Mis l’équipage aux postes d’abandon et amené à la mer l’embarcation bâbord, non détruite, ainsi que les radeaux qui sont pris en remorque. L’équipage non nécessaire à bord y a pris place.
Constaté que les cloisons étanches tiennent bien et que la flottabilité est suffisante pour gagner Messine. Le torpilleur anglais n° 11, ainsi qu’un torpilleur français, un italien et plusieurs vedettes évoluent autour de Caraibe pour le protéger. A l’entrée du port, le remorqueur MEHARI et deux italiens l’aident à rentrer. A quai à 21h30.
MEHARI va pomper toute la nuit, mais le niveau de l’eau ne diminue pas. La torpille a explosé dans la grande soute avant. Une grande partie des marchandises est perdue ou avariée.
Bonne volonté et énergie de tous les officiers et hommes d’équipage, jusqu’au mousse lui-même qui, pris dans la gerbe d’eau, n’a pas quitté un instant son poste sur la passerelle.
Rapport complémentaire
Le capitaine Dagorne va donner les noms des hommes les plus méritants et consacre un long paragraphe à chacun d’entre eux.
Il écrit notamment :
« Après avoir ravitaillé l’Armée d’Orient pendant trois ans, effectué de nombreux voyages entre Corfou et Salonique, paré des torpilles à plusieurs reprises, j’étais heureux et fier d’approvisionner la 1ère escadre de l’Armée Navale, gardienne de l’Adriatique.
J’avais sur CARAIBE un équipage bien entraîné aux différents postes de combat, veille, manœuvre et abandon. C’est grâce à lui et à MARGUERITE MARIE que CARAIBE a été sauvé et pourra continué ses missions.
Nous pensions pouvoir continuer longtemps encore, et que ce vieux transport, presque le dernier de ses anciens collègues des Dardanelles, ne pouvait être touché…
Lettre du 30 Septembre 1918 du Chef du Transit Maritime au CA Mornet, commandant la Marine à Marseille
Le CARAIBE, parti de Corfou le 21 Septembre, n’est pas venu à Marseille. Il a été coulé dans la journée du 28/09.
Je n’ai reçu aucun manifeste de chargement et j’ignore si ce vapeur a chargé des raisins secs à Corfou pour Toulon ou Marseille.
Dans ces conditions, je ne peux vous donner les renseignements demandés dans votre télégramme du 28.
Le sous-marin attaquant
C’était l’ UC 53 du KL Erich GERTH.
Récompenses
Citation à l’Ordre de l’Armée
DAGORNE François Capitaine Lieutenant de Vaisseau auxiliaire Saint Malo
A réussi à sauver son bâtiment torpillé en l’amenant à l’abri dans le port de Messine grâce au calme et au sang froid qui a régné à bord suite à l’esprit d’ordre et de discipline qu’il avait su inculquer à son équipage.
Citation à l’Ordre de la Division
BOUCHE Louis 2e capitaine Marseille
VERRINOT Jacques 1er lieutenant Ajaccio
BELVAIRE Maurice 2e lieutenant Le Havre
Ont fait preuve d’énergie et de sang froid au moment du torpillage de leur bâtiment aussi bien dans la conduite du tir que dans la mise à l’eau des embarcations de sauvetage ou l’aveuglement des voies d’eau.
Nota : signalons que sur l'annuaire des officiers transat de 1935, on retrouve le lieutenant Maurice Belvaire, Croix de Guerre, en tant que 2e capitaine de 1ère classe (prêt à passer commandant). Cet officier, né le 16 Avril 1900, n'avait que 18 ans lors du torpillage.
Dans son rapport, le capitaine Dagorne le qualifie ainsi :
Très jeune officier d'un grand courage, d'un grand sang froid, très dévoué qui, bien que le navire fut en danger de couler, s'est rendu dans les cales avec quelques hommes pour étancher fissures et voies d'eau. Il a ensuite dirigé le tir de la pièce avant, évitant au navire d'être à nouveau torpillé. Fut au dessus de tout éloge dans cette circonstance difficile.
Citation à l’Ordre de la Brigade
BIGOTTIERES Lucien Mousse Marseille
Malgré son jeune âge, a montré le plus grand calme et le plus grand sang froid au moment du torpillage. Après s’être trouvé pris dans la gerbe d’eau due à l’explosion de la torpille, s’est rendu immédiatement à son poste de manœuvre. A coopéré à toutes les opérations de sauvetage dans la mesure de ses forces.
LOUINSE Théodore Maître d’équipage Dinan
BRUNET Louis Charpentier La Rochelle
FLOHIC François Matelot Vannes
SALLABERY Pierre QM timonier
LE PARQUE Adrien QM canonnier
LEBEAUPIN François QM canonnier Nantes
BADIC Paul Boulanger
METON Barthélémy Graisseur Marseille
DHO Vincent Graisseur La Ciotat
Ont fait preuve de dévouement, calme, sang froid et abnégation dans les différentes manœuvres pour le sauvetage et le remorquage de leur bâtiment. Les canonniers ont dirigé un tir opportun pour empêcher le sous-marin de lancer une 2e torpille qui aurait entraîné la perte du bâtiment.
Témoignage officiel de satisfaction du Ministre
Equipage et armement AMBC CARAIBE pour leur calme et leur esprit de discipline
Equipage MARGUERITE MARIE pour avoir sauvé le CARAIBE en le remorquant à Messine.
Note de la Cie Gle Transatlantique de Mai 1919
CARAIBE a été torpillé au large de Messine le 28 Septembre 1918. Remorqué dans ce port pour une réparation provisoire, il y est resté jusqu’à fin Février 1919.
Il est rentré à Marseille le 4 Mars 1919.
La Marine Marchande a établi avec nous les feuilles de réparations et a adressé ces travaux aux chantiers de Provence. Depuis ce jour, c'est-à-dire depuis trois mois, nous avons demandé à la Marine Marchande de bien vouloir s’intéresser au CARAIBE et de le faire entrer au bassin.
L’Amiral est seul maître de la disponibilité des formes et il s’est vu dans l’obligation de refuser l’entrée au bassin en raison de la longueur des travaux nécessaires et alors que ces formes sont utilisées pour d’autres navires torpillés ou endommagés.
Cdlt