Re: Hartmannswillerkopf, acte 1
Publié : ven. déc. 21, 2007 7:35 am
Bonjour à tous,
Le début d’une tragédie en trois actes : voilà 92 ans, le 21 décembre 1915 marquait le début d’une attaque française de grande envergure sur l’Hartmannswillerkopf. Voici ce qu’en a écrit le docteur Georges, médecin divisionnaire de la 66e D.I., dans son JMO.
La suite demain, 22 décembre, après la contre-attaque allemande, puis après-demain, 23 décembre, pour le troisième « acte », celui du bilan, tout provisoire, hélas.
Mardi 21 décembre [1915].
Blessés de guerre transités sur Bussang : 15
Blessés de guerre entrés dans For. Sanitaires : 13
Congélation des pieds : 0
9 h. Tournée Willer, Bitschwiller, Moosch.
Visité à Bitschwiller poste-relai de transbordement. Placé les brancardiers et fait faire écriteaux éclairés la nuit par lanterne.
Donné instruction de détail à Chef de Poste.
A Willer, trouvé chef des automobiles du G.B.C. 51 et prescrit mise en place des automobiles poids lourds pour blessés assis, à midi.
L’action projetée sur l’Hartmannswiller se déclanche à 9 h. par préparation artillerie. L’attaque d’infanterie doit avoir lieu vers 14 heures.
La température change. Le sol était légèrement gelé ces jours derniers. Ce matin, le temps se couvre. La neige commence à tomber.
Les brancardiers sont en route pour rejoindre leurs postes – d’après l’ordre de déclanchement que j’ai donné hier soir vers 18 h. 45 au Médecin Chef du Groupe de Brancardiers Divisionnaires 66, après avoir reçu les instructions du Chef d’Etat-Major et du Général.
La répartition des brancardiers, moyens de transport, a été préparée d’avance suivant un programme étudié d’avance et maintenant porté à la connaissance de tous les intéressés.
A 11 h. ½, arrivée du Méd. Général Capus envoyé par Méd. Inspecteur pour se rendre compte des disponibilités en lits dans les ambulances et pour traiter la question de l’éventualité de l’envoi d’une ambulance chirurgicale automobile actuellement à Belfort.
Le Médecin Inspecteur me fait savoir que cette ambulance est au Thillot, je suggère qu’en cas de besoin, cette ambulance pourrait s’installer à côté de l’Amb. 16/7. Elle fonctionnerait là, si nécessaire. Ou bien encore, j’en prendrais les chirurgiens pour les envoyer renforcer ceux de l’Amb. 3/58 de Moosch ou ceux de l’Hôp. Mob. Alsacien.
Départ à 14 h. du Méd. Gal Capus qui emporte les plans, croquis des postes de brancardiers du secteur H.W.K. visités par le Médecin Inspecteur hier, ainsi qu’une copie du travail de préparation des évacuations visé plus haut.
14 h. – 24 h. Tournée montagne – Secteur H.W.K. avec M. Lovering Hill, Cdt la S.S.A. Américaine n°3.
1° A Bitschwiller, je vois poste-relai prêt à fonctionner.
2° A Moosch, je prescris à Médecin Chef d’évacuer rapidement sur Bussang tous ses petits blessés. Je confère avec S.S. auto anglaise n°2. 10 voitures resteront à Moosch pour le trajet sur Bussang.
Toutes les 6 heures, l’Ambulance 3/58 enverra une note à l’HoE de Bussang pour le renseigner sur chiffre approximatif des évacuations.
3° A Turenne, tout le monde en place. Quelques blessés sont déjà passés à 16 heures.
4° A Herrenfluh (Jean Perrin) : idem (17 h.).
5° A Bains Douches : idem. Les évacuations s’engagent bien.
6° A Camp Renié : poste médical du 23e Inf. (Méd. M. Manaud), le mouvement de blessés est régulier, relativement minime.
7° Je rentre à Turenne pour en repartir à 20 heures. Tourmente de neige. La route de Pastetenplatz est devenue un miroir. Nos voitures sont bloquées. Nous en débloquons successivement 4 et transbordons les blessés.
Je fais venir équipe de sableurs et remonte par Turenne, la route de Pasteten étant impraticable.
Nous finissons par arriver vers 23 h. 30 à Moosch. J’expédie toutes les voitures automobiles disponibles dans la montagne.
A ce moment, il est passé à Moosch environ 250 blessés. Tout le monde travaille. M. Violet en est à sa huitième grande intervention.
8° A St-Amarin (Hôp. Mob. Alsacien) : 15 grands blessés sont arrivés. M. Massabuau opère.
Le Général Villaret est venu visiter cet hôpital ainsi que l’Ambulance 3/58 dans l’après-midi, accompagné du Capitaine d’Etat-Major de Varay de la 66e Division.
9° A Wesserling, à 1 h. du matin, je trouve ce Capitaine qui est de service et j’insiste pour que des compagnies de sableurs aménagent tout le circuit des évacuations. Il me répond que les ordres sont donnés et en voie d’exécution.
Au cours de ma tournée, j’ai croisé ou doublé environ 800 prisonniers allemands. J’en ai même ramené jusqu’à Bains Douches une quinzaine qui avaient semé leurs sentinelles.
Je vais m’étendre à 2 h. du matin. Je me lève à 4 h. 30 pour écrire ce journal, signer un volumineux courrier et préparer les ordres pour amener à pied d’œuvre tous les traîneaux disponibles (Mittlach, G.B.D., etc.)
A 4 h. 30 (la neige ne tombe plus depuis 2 h. matin), le dégel a l’air de vouloir s’installer. Il pleut légèrement.
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Bien cordialement,
Eric Mansuy
Le début d’une tragédie en trois actes : voilà 92 ans, le 21 décembre 1915 marquait le début d’une attaque française de grande envergure sur l’Hartmannswillerkopf. Voici ce qu’en a écrit le docteur Georges, médecin divisionnaire de la 66e D.I., dans son JMO.
La suite demain, 22 décembre, après la contre-attaque allemande, puis après-demain, 23 décembre, pour le troisième « acte », celui du bilan, tout provisoire, hélas.
Mardi 21 décembre [1915].
Blessés de guerre transités sur Bussang : 15
Blessés de guerre entrés dans For. Sanitaires : 13
Congélation des pieds : 0
9 h. Tournée Willer, Bitschwiller, Moosch.
Visité à Bitschwiller poste-relai de transbordement. Placé les brancardiers et fait faire écriteaux éclairés la nuit par lanterne.
Donné instruction de détail à Chef de Poste.
A Willer, trouvé chef des automobiles du G.B.C. 51 et prescrit mise en place des automobiles poids lourds pour blessés assis, à midi.
L’action projetée sur l’Hartmannswiller se déclanche à 9 h. par préparation artillerie. L’attaque d’infanterie doit avoir lieu vers 14 heures.
La température change. Le sol était légèrement gelé ces jours derniers. Ce matin, le temps se couvre. La neige commence à tomber.
Les brancardiers sont en route pour rejoindre leurs postes – d’après l’ordre de déclanchement que j’ai donné hier soir vers 18 h. 45 au Médecin Chef du Groupe de Brancardiers Divisionnaires 66, après avoir reçu les instructions du Chef d’Etat-Major et du Général.
La répartition des brancardiers, moyens de transport, a été préparée d’avance suivant un programme étudié d’avance et maintenant porté à la connaissance de tous les intéressés.
A 11 h. ½, arrivée du Méd. Général Capus envoyé par Méd. Inspecteur pour se rendre compte des disponibilités en lits dans les ambulances et pour traiter la question de l’éventualité de l’envoi d’une ambulance chirurgicale automobile actuellement à Belfort.
Le Médecin Inspecteur me fait savoir que cette ambulance est au Thillot, je suggère qu’en cas de besoin, cette ambulance pourrait s’installer à côté de l’Amb. 16/7. Elle fonctionnerait là, si nécessaire. Ou bien encore, j’en prendrais les chirurgiens pour les envoyer renforcer ceux de l’Amb. 3/58 de Moosch ou ceux de l’Hôp. Mob. Alsacien.
Départ à 14 h. du Méd. Gal Capus qui emporte les plans, croquis des postes de brancardiers du secteur H.W.K. visités par le Médecin Inspecteur hier, ainsi qu’une copie du travail de préparation des évacuations visé plus haut.
14 h. – 24 h. Tournée montagne – Secteur H.W.K. avec M. Lovering Hill, Cdt la S.S.A. Américaine n°3.
1° A Bitschwiller, je vois poste-relai prêt à fonctionner.
2° A Moosch, je prescris à Médecin Chef d’évacuer rapidement sur Bussang tous ses petits blessés. Je confère avec S.S. auto anglaise n°2. 10 voitures resteront à Moosch pour le trajet sur Bussang.
Toutes les 6 heures, l’Ambulance 3/58 enverra une note à l’HoE de Bussang pour le renseigner sur chiffre approximatif des évacuations.
3° A Turenne, tout le monde en place. Quelques blessés sont déjà passés à 16 heures.
4° A Herrenfluh (Jean Perrin) : idem (17 h.).
5° A Bains Douches : idem. Les évacuations s’engagent bien.
6° A Camp Renié : poste médical du 23e Inf. (Méd. M. Manaud), le mouvement de blessés est régulier, relativement minime.
7° Je rentre à Turenne pour en repartir à 20 heures. Tourmente de neige. La route de Pastetenplatz est devenue un miroir. Nos voitures sont bloquées. Nous en débloquons successivement 4 et transbordons les blessés.
Je fais venir équipe de sableurs et remonte par Turenne, la route de Pasteten étant impraticable.
Nous finissons par arriver vers 23 h. 30 à Moosch. J’expédie toutes les voitures automobiles disponibles dans la montagne.
A ce moment, il est passé à Moosch environ 250 blessés. Tout le monde travaille. M. Violet en est à sa huitième grande intervention.
8° A St-Amarin (Hôp. Mob. Alsacien) : 15 grands blessés sont arrivés. M. Massabuau opère.
Le Général Villaret est venu visiter cet hôpital ainsi que l’Ambulance 3/58 dans l’après-midi, accompagné du Capitaine d’Etat-Major de Varay de la 66e Division.
9° A Wesserling, à 1 h. du matin, je trouve ce Capitaine qui est de service et j’insiste pour que des compagnies de sableurs aménagent tout le circuit des évacuations. Il me répond que les ordres sont donnés et en voie d’exécution.
Au cours de ma tournée, j’ai croisé ou doublé environ 800 prisonniers allemands. J’en ai même ramené jusqu’à Bains Douches une quinzaine qui avaient semé leurs sentinelles.
Je vais m’étendre à 2 h. du matin. Je me lève à 4 h. 30 pour écrire ce journal, signer un volumineux courrier et préparer les ordres pour amener à pied d’œuvre tous les traîneaux disponibles (Mittlach, G.B.D., etc.)
A 4 h. 30 (la neige ne tombe plus depuis 2 h. matin), le dégel a l’air de vouloir s’installer. Il pleut légèrement.
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Bien cordialement,
Eric Mansuy