Bonjour,
voici quelques infos sur Richard Hall de la SSU 3 enterré à Moosch.
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L’Alsace
Jeudi 13 novembre 2003
Moosch : un ambulancier américain mort pour la France
Bien du temps a passé depuis ce 11 novembre 1918 quand, après quatre années d'une effroyable et inutile tuerie, les combats ont enfin cessé et les armes se sont tues. La France a commémoré mardi l'armistice de 1918, elle a honoré le sacrifice des millions de victimes de la « Grande Guerre », sans distinction de nom ou de nationalité… Pourtant le devoir de mémoire nous interpelle tous, car le risque de l'oubli est grand et le souvenir s'estompe. D'autant plus que les derniers valeureux Poilus auront bientôt disparu. Alors, la « Grande Guerre », déjà une réminiscence lointaine ?
L'engagement américain
Le corps expéditionnaire américain — personne ne l'ignore — est venu à la rescousse des Alliés après le discours historique du président Wilson du 2 avril 1917. L'Amérique, pays de la liberté, se souvenait peut-être du soutien de la part de la France lors de son propre combat pour l'indépendance entre 1777 et 1781. C'est du moins ce que semblent traduire ces paroles du général Joffre. « Les États-Unis d'Amérique n'ont pas oublié que la première page de l'histoire de leur indépendance a été écrite avec un peu de sang français ». En effet, les États-Unis n'ont pas oublié, et dès les premiers mois du conflit en 1914, longtemps avant que le corps expéditionnaire n'embarque pour l'Europe, des hommes de bonne volonté mirent sur pied un service d'ambulances de campagne, le "Field Service of the American Ambulance", pour venir au secours des blessés sur les champs de bataille de France.
La section n° 3 installée à Saint-Amarin
Grâce aux dollars des souscriptions, grâce aux premiers véhicules offerts par Ford, les premières sections sanitaires — chacune avec vingt ambulances et un véhicule de service — étaient opérationnelles dès avril 1915. La section no 1 était stationnée à Dunkerque ; la section no 2 en Lorraine ; la section no 3 restera pendant un an dans les Vosges et la vallée de Saint-Amarin à la disposition de la 66e Division commandée par le général Serret. Deux autres sections furent affectées ailleurs, toutes équipées d'ambulances légères Ford, ces remarquables engins qui se jouaient des routes boueuses des Flandres, qui dépassaient les convois ravitailleurs de la Marne, qui remplaçaient avantageusement les mulets dans les Vosges ! Ce corps relativement restreint avec 386 conducteurs d'ambulances en avril 1916, était formé exclusivement d'étudiants volontaires de toutes les universités des États-Unis et dirigé par Piatt Andrew, inspecteur général aux armées de l'hôpital américain de Neuilly. L'engagement était de six mois, aux strictes conditions suivantes : citoyenneté américaine, bonne santé, casier judiciaire vierge, aptitude à conduire et à réparer une voiture automobile, solvabilité pour les frais de voyage (pas de salaire, mais subsistance assurée). L'histoire de ces étudiants-ambulanciers est finalement un chapitre peu connu — sinon oublié — de la Grande Guerre. Dans un formidable élan humanitaire, ces braves et intrépides jeunes Américains prendront tous les risques pour secourir les malheureux blessés sur la ligne de front. Dans un ouvrage américain intitulé "Friends of France" (Amis de la France), l'un deux, Waldo Pierce, de la section no 3, étudiant à Harvard, témoigne sans fioriture du quotidien en décembre 1915 au fond de la vallée de Saint-Amarin (traduction condensée).
Offensive au Hartmannswillerkopf
« Veille de Noël 1915 — Au fond d'une petite vallée latérale de la vallée de la Thur, le petit village de Mollau abrite le cantonnement de la troisième section sanitaire. Depuis des mois, un va-et-vient incessant sur les chemins raides et boueux, dans les ornières, en évitant obstacles multiples et cratères d'obus. Jour et nuit, sous la pluie et la neige, les ambulanciers font la navette en solitaire — stoïquement ! Une semaine avant Noël, la section prenait un peu de repos bien mérité à Mollau — une accalmie ensoleillée après de longues journées harassantes dans le froid et la grisaille. Mais, dès le 21 décembre, l'armée avait lancé une énième attaque contre les positions allemandes du mythique Hartmannswillerkopf, massif dénudé, meurtri, hérissé de barbelés, sillonné de tranchées, labouré par les impacts d'obus. Dès lors, les colonnes d'ambulances s'engagèrent à leur tour vers les postes de secours avancés, alors que partout, d'un versant à l'autre, sifflaient les balles et tonnait le fracas des canons. Comme d'habitude, l'ambulancier Richard Hall conduisit sereinement son véhicule sur les chemins balayés par les tirs ennemis, pour arriver au poste où les brancardiers avaient rassemblé et enveloppé dans des couvertures les blessés. On chargea rapidement ces derniers et Hall les descendit vers l'hôpital de Moosch, tandis qu'il allait faire le plein d'essence en attendant la prochaine mission. Il dormait où et quand il pouvait, dans sa voiture, au poste, sur un sol de cuisine à Moosch… sur une couverture — sèche ou mouillée — mais toujours prêt ! Ainsi, vers minuit de la nuit de Noël, il quittait une fois de plus la vallée pour une mission en solitaire vers la montagne, devant lui deux heures de route… Bien du temps, malgré le danger, pour penser à d'autres veillées de Noël, aux siens, à Ann Arbor dans le lointain Michigan, à ses amis étudiants de Dartmouth, à tous ceux qui devaient penser à lui ce soir… Plus tard dans la nuit, c'était au tour des ambulanciers Matter, puis Jennings, de suivre dans la même direction… Hélas ! À mi-chemin ce sera le choc et la consternation ! Ils trouveront sur le bas-côté ce qui restait d'une ambulance, un numéro de véhicule bien connu ! une carcasse déchiquetée, et parmi les tôles froissées le corps sans vie du brave Richard Hall, le visage livide, la main fermement agrippée au volant… Un obus avait frappé la voiture, tuant le malheureux sur le coup. Les deux camarades le ramenèrent dans la voiture de Mattler jusqu'à Moosch, où Louis Hall, le frère de Richard, apprit la nouvelle avec une immense tristesse. Le matin de Noël 1915, le Hartmannswillerkopf était couvert d'un voile de brouillard… Aucun de ses camarades ne dira "Merry Christmas", personne, ce jour, ne dira "Joyeux Noël " Richard Hall, dans la fleur de l'âge, « soldat humanitaire », sera enterré à Moosch après un service religieux avec les honneurs militaires et les honneurs dus à son sacrifice.
Croix de guerre
Le médecin militaire, le docteur Georges, de la 66e Division, cite à l'ordre de la Division : « Hall Richard, de la section sanitaire américaine no 3. Le Bon Samaritain qu'était Richard Hall avait pris la décision de voyager beaucoup de concert avec nous, sur notre route, pour tendre une main inlassablement secourable à ceux de nos compatriotes militaires, que les hostilités actuelles auraient plongé dans le malheur. Il l'a fait depuis de longs mois avec la constante ténacité que vous savez. Sur cette route, un projectile l'a tué. Je salue bien bas sa dépouille en lui disant, à lui et à ses émules en dévouement, les membres de la section sanitaire américaine no 3, mon sentiment de profonde et entière admiration au nom du service de santé de la 66e Division. Par ordre du général commandant la 66e Division, j'épingle à ce cercueil la croix de Guerre française avec citation à l'ordre de la Division. 26 décembre 1915 ».
Bernard Hilfiger
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photos de Richard HALL
HALL à gauche, son frère à droite et Tracy Putnam de la SSU3 à Mollau
SSU3 à Mollau (Hall à droite)
reste de l'ambulance de Hall parès bombardement
cercueil de Hall
Cercueils dans la cour d'un Hopital en Alsace, parmi eux celui de Richard Hall