Re: LA VERDUNISATION
Publié : mar. sept. 19, 2006 4:43 pm
Bonjour.
Si 2006 est l'année de Verdun, c'est donc aussi l'année de la Verdunisation.
En voici un petit topo :
En août 1914, Philippe Bunau-Varilla, Polytechnicien et Ingénieur (Canal de Panama, chemins de fer en Espagne et en Afrique) reprend du service - il est libéré de toute obligation militaire depuis 1902 - avec son grade de Capitaine dans le Génie de la Place de Paris. Il reconstruit les ponts de Magny, Creil, Pont Sainte Maxence, Verberie détruits prématurément à proximité de Paris avant la bataille de la Marne. Suite à une divergence fondamentale avec le Général Petibon, il passe au Génie de la 2e Armée en avril 1915. En Champagne il approvisionne la Cavalerie en eau de la Suippe grâce à des pompes centrifuges actionnées par des locomotives. Puis il prend le commandement du service des eaux de l'Armée Pétain pour l'offensive de Champagne en septembre. Il a 15 jours (et l'autorisation par le Général de violer tous les réglements) pour alimenter en eau la 2e Armée. Il achète à Paris des pompes, des tuyaux et demi-muids, il obtient des bons de transports (interdits) à l'intendance de l'Armée. Des appareils distributeurs d'eau, pouvant alimenter huit camions porteurs chacun de 3 demi-muids de 600 litres, furent installés le long du front auprès de puits creusés en toute hâte et... 15 jours après sa nomination, le 25 septembre 2 000 000 litres d'eau sonts prêts à couler journellement et à suivre l'Armée.
En Champagne et au début de la bataille de Verdun, l'assainissement de l'eau n'était pas un gros problème car toute l'Armée avait été vaccinée contre la typhoïde au début de 1915.
Mais, vers juillet 1916, arrivèrent des contingents de travailleurs militaires indochinois qui apportaient deux autres maladies d'origine intestinale comme la typhoïde (dysenterie amibienne et dysenterie bacillaire). Contre elles les vaccinations antityphiques n'avaient aucune action. Il fallait trouver une solution nouvelle.
La stérilisation de l'eau "en Campagne" consistait à cette époque en la méthode dite Javellisation (on met 1 à 4 milligrammes de chlore par litre d'eau puis on traite à l'hyposulfite de soude pour éliminer le chlore en excès et rendre l'eau buvable. Mais ce 2me traitement est irréalisable en guerre et le G.Q.G n'a pas hésité à le supprimer (les poilus qui risquent chaque jour leur vie auront bientôt accepté ce petit désagrément - goût du désinfectant usuel des feuillées). C'est tout le contraire : ils puisent dans les trous d'obus l'eau contaminée.
Le raisonnement de Bunau-Varilla:
Les microbes nocifs (bacilles typhiques, amibes dysentériques) sont décelés par la présence de colibacilles inoffensifs et très résistants. Comme tous les microbes nocifs sont plus vulnérables que les colibacilles, ils ont tous disparus quand tous les colibacilles sont morts. Mais il faut employer tant de chlore que l'eau a un goût répugnant. Si cet excès de chlore est nécessaire pour acquérir la certitude que TOUS les colibacilles sont morts, est-il bien indispensable que TOUS les colibacilles soient morts pour avoir détruits TOUS les bacilles dangereux mais plus délicats de constitution ?
Il fait expérimenter au laboratoire de la 2e Armée à Bar-le-Duc un traitement avec une dose égale au dixième du minimum - alors prescrit - sur les eaux de l'Hôpital de Fleury-sur-Aire (1000 colibacilles/litre) préparées pour la grande attaque sur Douaumont et celles de Bar-le-Duc (33000 colibacilles/litre : chiffre énorme et très rare). Tous les colibacilles sont détruits dans ses 2 expériences - Découverte de "La Verdunisation".
L'application à l'Armée de verdun (ainsi qu'à quelques autres Armées) du nouveau phénomène de purification des eaux par le chlore protégea contre toute épidémie et toute épizootie, les quelques 300 000 hommes et les 140 000 cheveaux qui s'accumulaient pendant les attaques à Verdun.
Bunau-Varilla donnera le nom "d'Auto-Javellisation Imperceptible" à son procédé lorsque le traitement sera effectué par javellisateur automatique.
Le système Bunau-Varilla s'appliquera avec beaucoup de réticences au réseau civil et prendra plusieurs années (1932 pour Paris).
Tous les systèmes de stérilisation de l'eau étaient connus en 1914 : Chaleur, filtration, traitement chimiques et électriques (ozone - ultra-violets).
Sources : De Panama à Verdun de Philippe Bunau-Varilla - L'Alimentation en eau potable Ecole du Génie 1922.
Cdlt patrick ROCHET.