Bonjour à tous,
« ... la femme me répond que le sentier d'accès est sur une parcelle privée et que le passage est au bon vouloir du propriétaire. »
Il importe de rappeler à cette dame qu’aux termes de l’article 682 du Code civil, «
le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n’a sur la voie publique aucune issue ou qu’une issue insuffisante, soit pour l’exploitation agricole, industrielle ou commerciale de sa propriété, soit pour la réalisation d’opérations de construction ou de lotissement, est fondé à réclamer sur les fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de ses fonds, à charge d’une indemnité proportionnelle au dommage qu’il peut occasionner ».
Et il est jugé de façon ancienne et constante que «
le droit, pour le propriétaire d’une parcelle enclavée, de réclamer un passage sur les fonds de ses voisins, conformément aux dispositions de l'article 682 du Code civil, est fonction non de l'existence d'une exploitation agricole ou industrielle, au sens étroit de ces termes, mais de l'utilisation normale du fonds, quelle qu'en soit la destination »
(Cass. civ. 1re, 2 mai 1961 : Bull. civ. 1961, I., n° 220). La jurisprudence reconnaît donc de façon large au propriétaire d'un fonds enclavé, quel que soit l'usage qui en est fait,
« le droit d'obtenir sur le fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de son propre fonds » (Cass. civ. 3e, 19 mai 1993 : Bull. civ. 1993, III., n° 71, p. 45 ; D. 1993, Somm., p. 307, obs. A. Robert).
Il doit en outre être précisé que l’article 682 du Code civil, qui reconnaît cette servitude légale de passage au propriétaire du fonds enclavé, n'interdit nullement que ladite servitude «
soit mise en œuvre par un autre que [ledit]
propriétaire » (Cass. civ. 3e, 6 juin 1969 : Bull. civ. 1969, III., n° 462 ; D. 1969, p. 602).
Au cas présent, il ne saurait être sérieusement discuté que la parcelle à usage agricole en question est susceptible d’être grevée, au bénéfice du propriétaire du fonds enclavé et, plus généralement, du public, d’une «
servitude de passage à talons », plus communément appelée aujourd’hui «
servitude de passage à pied ». Cette servitude de caractère discontinu peut avoir été constituée
de jure par un titre contemporain de la création de la nécropole, ce qu’il conviendrait de vérifier. Et à défaut d’un tel titre, expressément exigé par l'article 691, alinéa 1, du Code civil, force est néanmoins de constater qu'elle existait
de facto, puisqu'exercée au vu et au su de tous les habitants de la commune depuis au moins 30 ans ; il suit de là que son
assiette et son
mode d’exercice résultent d’ores et déjà de la prescription acquisitive, puisque, même en l’absence de titre constitutif,
« l'assiette et le mode de passage pour cause d'enclave sont déterminés par trente ans d'usage continu » (Cass. civ. 3e, 27 oct. 2004 : Bull. civ. 2004, III., n° 185, p. 167).
S’il en était besoin, il convient d'ajouter que les propriétaires successifs de la parcelle agricole litigieuse doivent être réputés avoir tacitement accepté cette servitude discontinue, puisque, jusqu’alors, son exercice paisible ne fut, semble-t-il, jamais contesté par eux.