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Re: Dieuze : 19 et 20 août 1914

Publié : mer. août 31, 2005 11:13 pm
par Guilhem LAURENT
Bonsoir à toutes et à tous,

Avant de combattre à Mont-sur-Meurthe, le 26 août 1914, le 61e régiment d'infanterie a combattu dans la région de Dieuze les 19 et 20 août. Le lieutenant-colonel Guigues, qui était alors lieutenant à la 9e compagnie retrace dans une suite d'articles, paru dans la revue d'infanterie ces deux tristes journées pour le 15e C.A. Voici donc l'intégralité de ce témoignage.


Source : Revue d'infanterie

Auteur : Lieutenant-colonel Guigues

Titre : Le 61e Régiment d'infanterie à la bataille de Lorraine (août 1914)

* 1re partie : 41e année – 1er mai 1932 – 80e volume – n° 476 : pages 889 à 909

* 2e partie : 41e année – 1er juin 1932 – 80e volume – n° 477 : pages 1093 à 1119


Bonne lecture




Le 61e Régiment d'infanterie à la bataille de Lorraine (août 1914)



Préliminaires


Baptême du feu et moral

Le 61e régiment d'infanterie (XVe corps, 30e division, 60e brigade) participa à la bataille que la IIe armée française livra entre le 15 et le 20 août, en Lorraine annexée, à la VIe armée allemande.


Nous nous proposons de suivre, dans leur ensemble, les mouvements et les opérations exécutés par ce régiment et plus particulièrement par son IIIe bataillon, depuis le 17 août, date à laquelle il entre dans les opérations actives, jusqu'au 20 août, à la fin de la bataille qui détermina le repli de la IIe armée française.


Nous n'entrerons pas dans l'étude détaillée des opérations tactiques ni dans les critiques que cette étude pourrait exiger. Nous rechercherons plutôt les enseignements pratiques susceptibles de donner aux cadres qui n'ont pas fait la guerre des exemples et des leçons pour la conduite des troupes d'infanterie. Comme, en outre, nous estimons que les facteurs moraux jouent un rôle capital au combat, nous profiterons de toutes les occasions pour souligner tout ce qui peut influencer leur équilibre, soit sur les individus soit sur les collectivités.


Le 17 août dans l'après-midi, le mouvement en avant que la IIe armée poursuivait, depuis le 14 août, en direction générale de Sarrebrück, avait poussé le 61e régiment d'infanterie entre Juvelize et Blanche-Eglise (Etat-major, Ier et IIe bataillons), et à Mulcey (IIIe bataillon)


Ayant franchi la Seille sur des passerelles de fortune, entre Blanche-Eglise et Mulcey, le III/61e, en arrivant à Mulcey, fut pris à parti par des feux lointains de mousqueterie que des cavaliers ennemis, ayant mis pied à terre vers la lisière sud de la forêt de Bride et de Koeking, dirigeaient sur lui. La 9e compagnie, formant avant-garde, se déploya rapidement, riposta par quelques salves et les cavaliers ennemis disparurent dans la forêt. Ce premier et lointain contact n'occasionna aucune perte.


A la nuit, le gros du III/61e était installé à Mulcey, en cantonnement d'alerte, couvert, face à la forêt de Koeking et à Dieuze, par un peloton de la 9e compagnie à cheval sur la route Mulcey – Dieuze et par une section de la 10e compagnie, qui tenait, à la droite du peloton de la 9e compagnie, les abords de la vallée de la Seille. Les éléments aux avants-postes n'avaient reçu ni le mot ni les signaux de ralliement, mais ils avaient soigneusement barré la rouge allant vers Dieuze, organisé sommairement leurs emplacements de combat et étaient prêts à toute éventualité.


Vers 21 heures, l'ordre parvint au chef de bataillon d'évacuer Mulcey et de rejoindre, sans délais le gros du régiment vers Juvelize.


Le mouvement s'exécuta sous une pluie battante, avec des difficultés considérables, par suite de l'obscurité, de l'état des chemins et aussi des erreurs d'itinéraires, qui eussent pu être évitées, si des officiers orienteurs avaient été détachés en avant avec le personnel nécessaire. De plus, aucune distribution n'avait été faite.


C'est dans un état de fatigue extrême que le régiment fut rallié, vers minuit, sur le plateau de Juvelize, à 1 kilomètre environ au nord-ouest de cette localité. Les unités furent installées au bivouac sur le terrain détrempé, et il fut impossible de cuire la maigre distribution qui put être faite aux hommes, tant à cause de la pluie qui empêchait d'allumer les feux qu'à cause de la fatigue qui faisait préférer le repos à la faim.


Dans de telles circonstances, le commandement devient bien délicat pour les officiers des compagnies, car il est difficile de réagir, lorsque le manque de sommeil, les fatigues et les privations dont souffraient les troupes depuis le 12 août, distendent les énergies et paralysent les volontés.


C'est cependant au cours de ces moments difficiles que les chefs, surtout ceux de l'infanterie, doivent montrer les qualités maîtresses qui les placent au-dessus de leurs hommes, c'est- à-dire ; l'exemple de la fermeté, de la bonne humeur et de la résistance à la fatigue et aux privations. Agissant beaucoup plus, en effet, par l'exemple que par la parole, ils doivent, pendant tout le temps que dure la crise due aux difficultés du moment, savoir vivre au milieu de leurs hommes, partager leurs peines et soutenir leur courage.


C'est du calme et de l'action personnelle des chefs, de leur énergie, que dépend, dans ces moments critiques, le maintien de la discipline. On ne doit pas se dissimuler que, chez les troupes non encore entraînées aux fatigues, aux dangers et aux privations que la guerre impose souvent, la discipline est une chose fragile que le moindre incident peut briser.




La journée du 18 août


Le 18 au matin, un petit jour brumeux éclaira, sur le plateau de Juvelize, un grouillement indescriptible d'hommes, d'animaux et d'équipages. Au cours de la nuit, toute la 60e brigade (55e et 61e régiments d'infanterie) et un certain nombre d'autres éléments de la 30e division étaient venus bivouaquer également sur le plateau, ce qui présentait un rassemblement considérable. Heureusement que la brume, qui avait succédé à la pluie, ne permit pas aux aviateurs ennemis de venir survoler cette région !


Vers 5 h 30, la dislocation de ce rassemblement commença : presque toutes les unités furent dirigées vers le nord-est, par les chemins et à travers champs.


Le III/61 fut maintenu sur place pour organiser et tenir, face à Dieuze, le rebord-nord-est du plateau de Juvelize, d'une part, et de Juvelize à Donnelay, d'autre part. Le reste du régiment était dirigé sur Guéblange.


Malgré les travaux, qui furent activement poussés, et les fatigues accumulées, la journée du 18 août fut réconfortante pour le III/61e. Le soleil, qui parut vers 9 heures, permit aux hommes de sécher leurs effets, et d'abondantes distributions vinrent à point pour réparer partiellement les privations supportées au cours des jours précédents.


La canonnade se fit entendre avec violence à maintes reprises, dans la direction du nord et du nord-est, et quelques avions vinrent survoler la région. Mais aucun incident sérieux ne marqua cette journée.


L'absence de nouvelles sur les évènements qui paraissaient se dérouler au nord de Dieuze causait, dans les unités, une impatience bien compréhensible, car le soldat français aime bien connaître ce qui se passe non loin de lui, surtout lorsqu'il peut être appelé à intervenir.


A la nuit, la 9e compagnie vers la cote 261 (nord-ouest de Juvelize) et la 11e compagnie, vers le coude de la route Juvelize – Donnelay, se couvrant par des postes face à Dieuze, s'installaient au bivouac, tandis que les 10e et 12e compagnies étaient rassemblées, au bivouac également, à la sortie nord-est de Juvelize.


A minuit trente, le 19, le III/61e fut précipitamment rallié par le chef de bataillon, vers la cote 261 (nord-ouest de Juvelize) et dirigé sur Blanche-Eglise. Ce mouvement, exécuté sous la pluie, qui s'était remise à tomber serrée, dans la soirée, fut très lente, parce que insuffisamment orienté et aussi à cause de la boue qui rendait la marche pénible. Ce défaut d'orientation de la marche, que nous avons déjà eu l'occasion de signaler et que nous aurons l'occasion de souligner encore, constitue une faute de la part du chef qui n'a pas organisé ce service.


Il est, en effet, indispensable que tous les déplacements de nuit, même sur des itinéraires connus, soient exactement dirigés et orientés par des détachements couverts au besoin. Le principal souci de ces détachements doit être de diriger exactement les unités dans le sens voulu, de déblayer, le cas échéant, les itinéraires et, en tout cas, de signaler les incidents qui seraient susceptibles de retarder la marche. Cette nécessité s'imposera davantage encore au cours des opérations dans une guerre future, en raison des nombreux déplacements qu'il faudra effectuer de nuit, non seulement sur des chemins, mais encore à travers champs. L'instruction des unités d'infanterie ne saurait donc négliger un tel dressage à l'avenir.






La journée du 19 août


Le 19 août, au jour, le III/61e avait rejoint, entre Blanche-Eglise et Dieuze, le reste du régiment, et les troupes apprenaient avec joie que les Allemands avaient évacué Dieuze, la veille.


Formé en colonne de route, à l'abri du bois de Mersack, le 61e régiment d'infanterie, dans l'ordre IIe, Ier, IIIe bataillons, était maintenu en position d'attente prêt à se porter sur Dieuze. Ni un coup de canon, ni un coup de fusil ne s'entendaient, lorsque, vers 6 heures, la fusillade et la canonnade éclatèrent avec violence, vers le nord-est, et à une distance qui paraissait très rapprochée de la position d'attente du 61e. Les officiers cherchèrent à obtenir des renseignements auprès de quelques batteries de 75 qui, forçant l'allure, doublaient le régiment pour se diriger sur Dieuze ; mais il fut impossible de savoir ce qui pouvait se passer. Dans de tels moments, le besoin de savoir, chez chacun, est tellement impérieux qu'ion accepte sans contrôle ni critique les pires invraisemblances, les plus énormes "bobards". Cet état d'esprit doit donc retenir l'attention des chefs, car les nouvelles ainsi colportées peuvent être un élément de démoralisation. Combien de gens qui, pour se donner de l'importance ou pour intéresser les autres à leur sort, inventent, déforment ou colportent des faits dans lesquels, ils prétendent avoir pris une part active ? C'est ainsi qu'on a l'occasion de rencontrer de nombreux "derniers survivants" de leur unité, ou de nombreux auteurs de faits d'armes inconnus. N'avait-on pas vu, l'avant-veille, un canonnier du 19e d'artillerie, errant seul sur un cheval d'attelage, qui prétendait être le dernier survivant de sa batterie engagée le 11 août à La Garde (1) !


Si nous signalons de tels faits, en apparence sans importance, mais en réalité susceptibles d'entraîner de fâcheuses conséquences, c'est pour mettre en évidence la nécessité d'empêcher des agissements de cette nature : c'est le rôle et le devoir des officiers.


Les mouvements de troupe et le feu rapproché faisaient penser à la possibilité, pour le régiment, d'un engagement, sinon immédiat, du moins prochain. Comme c'était le premier auquel il allait prendre part et que cet engagement s'annonçait comme devant être sérieux, les visages devenaient graves. Chacun paraissait rentrer en soi-même, et les rares plaisanteries de quelques "loustics" ne trouvaient plus d'écho.


Nous indiquons cet état d'âme, dont l'analyse relève de la psychologie des collectivités combattantes, pour attirer l'attention sur la nécessité qui s'impose aux officiers d'en abréger la durée. Par leur calme, leur intervention enjouée, au besoin en racontant une histoire gaie, ils doivent changer le cours des idées de leurs hommes.


Après un très long stationnement, le régiment se mit en marche en colonne de route, dans l'ordre d'échelonnement de ses bataillons au moment de l'arrêt, c'est-à-dire IIe, Ier, IIIe.


La petite ville de Dieuze, qu'on aurait crue vide de ses habitants, fut rapidement traversée, tandis que la bataille semblait se dérouler à ses abords. Nouvel arrêt à la sortie nord-ouest de la ville, sur la route qui conduit à Kerprich-lès-Dieuze, les trois bataillons articulés : le Ier à la droite du IIe sur le chemin qui longeant la voie ferrée, conduit à Guénestroff ; le IIIe, en arrière du IIe, sa queue à hauteur du passage à niveau à l'ouest de Dieuze. En avant, à distance très rapprochée maintenant, le feu des fusils et des mitrailleuses faisait rage, tandis que le canon se faisait entendre surtout vers Vergaville et Bidestroff, ainsi que du côté ouest de la forêt de Bride et de Koeking.


Le rassemblement articulé ordonné par le colonel paraissait répondre parfaitement à la situation du moment et à l'engagement possible des bataillons de tête dans les directions sur lesquelles ils étaient orientés. Mais examinons les erreurs d'exécution, notamment au IIIe bataillon, pour souligner ce que ces erreurs pouvaient avoir de dangereux.


L'articulation du régiment appelait, au moins dans la situation présente, celle des unités dans les bataillons, cela dans le but de dissimuler ces unités aux vues et de réduire leur vulnérabilité. Or, le chef du IIIe bataillon ne trouva rien de mieux que de rassembler ses unités dans un pré, à proximité de la route, et de les former en colonne double de bataillon avec intervalles et distances de six pas ; le train de combat derrière le bataillon. On conviendra sans peine que cette formation, la plus vulnérable et la moins maniable rapidement, était susceptible d'attirer les tirs lointains d'artillerie, si elle était aperçue. L'ordre du chef de bataillon était d'autant plus blâmable qu'il lui était possible de dissimuler toutes ses compagnies dans des boqueteaux qui se trouvaient à proximité du lieu de rassemblement.


Mais il n'en voulut rien faire, même après plusieurs survols exécutés par un avion ennemi. L'artillerie ennemie devait être occupée ailleurs, car par bonheur pour ce bataillon, elle ne tira pas.


De pareilles erreurs, déjà condamnables en 1914, constitueraient de très graves fautes aujourd'hui, en raison du développement de l'observation terrestre et aérienne et de la puissance des bombardements aussi bien par l'aviation que par le canon. Le souci de soustraire sans cesse les troupes à cette observation et aux dangers de l'air doit être une règle absolue pour les chefs.


La bataille croissait en intensité et, du lieu de rassemblement du III/61e, si l'on n'en voyait rein, on en percevait le fracas ; éclatement d'obus et crépitement, sans arrêt, du tir des fusils et des mitrailleuses. Un poste de secours installé dans une maison à proximité du III/61e commençait à recevoir de nombreux blessés venant de Kerprich. Ce spectacle, pour nature qu'il soit, hélas ! à la guerre, impressionna fortement les hommes du III/61e. Il émeut toujours même les plus aguerris. C'est pourquoi nous croyons nécessaire d'éloigner, dans toute la mesure du possible, les formations sanitaires des emplacements occupés par les unités non encore engagées, ou inversement.


Vers 8 heures, le II/61e reçut l'ordre de s'engager rapidement sur Kerprich et la cote 234 à l'est de cette localité, pour rejeter l'ennemi dans la forêt. Déployé dans le plus grand ordre, en arrière de la crête 237, entre Dieuze et Kerprich, il dut ouvrir un feu violent dès son arrivée à la crête, pour pouvoir déboucher de celle-ci. Il semble que le colonel aurait été heureusement inspiré en appuyant ce débouché par ses mitrailleuses, qui étaient à ce moment-là, inemployées derrière le I/61e. Mais ces engins nouveaux, dont beaucoup d'officiers ne soupçonnaient ni la puissance, ni les règles d'emploi, commandés trop souvent par des chefs insuffisamment instruits de leurs possibilités, furent trop souvent laissés avec les impedimenta, au début de la guerre. On savait cependant ce que pouvait être une base de feu, et les écrits du capitaine Soloview, du 1er régiment de tirailleurs sibériens, avaient amplement mis en évidence la puissance du feu de ces engins, pendant la guerre russo-japonaise !


Pris sous un feu meurtrier venant des lisières de la forêt de Bride et Koeking, le II/61e fut rapidement cloué au sol, après avoir subi des pertes élevées. D'abord engagé contre des cavaliers ennemis faisant du combat à pied, ce bataillon avait été attiré dans la zone des feux organisés des mitrailleuses ennemies.


Pendant ce temps, le I/61e était poussé sur Guébestroff. Quant au III/61e, il commençait à s'impatienter dans sa position d'attente où il pouvait, à tout instant, être pris à partie par les feux lointains de l'artillerie ennemie.


Cette attente à proximité du champ de batille est une épreuve pénible pour les jeunes troupes, car elle tend à l'excès les nerfs de chacun. On voudrait voir et surtout savoir ce qui se passe à proximité de soi : et on ne sait rien, on ne voit rien.


Vers 9 heures, le III/61e reçut, enfin, l'ordre de se porter entre Guébestroff et Vergaville ; de s'y installer en position d'attente, de manière à être ne mesure , le cas échéant, soit de se porter vers le nord-est en direction de Bourgaltroff, soit d'intervenir face aux débouchés de la forêt de Bride et de Koeking.


Nous allons suivre ce bataillon pendant le reste de la journée.


C'est en colonne de route, les compagnies dans leur ordre normal, que le III/61e entama sa marche d'approche. Utilisant la voie ferré comme axe, il parcourut, tout d'abord, zet jusqu'à Guébestroff, un terrain qui le dissimulait aux vues terrestres ainsi qu'aux coups venant des lisières de la forêt de Bride et de Koeking. Parti sans aucun renseignement sur la situation et sachant seulement qu'il avait en avant de lui le I/61e, le chef de bataillon ne put donner aucun ordre précis et se contenta d'indiquer la direction de la crête au nord-est de Guébestroff. Il semble que la plus élémentaire prudence eût exigé l'envoi d'une sûreté rapprochée en avant et sur les flancs, surtout sur celui qui pouvait être exposé à une intervention possible partant de la forêt de Bride et de Koeking.


En avant, la sûreté était une nécessité, car elle aurait permis aux commandants de compagnie et au chef de bataillon de "décoller" à temps pour reconnaître les cheminements et les points de rassemblement successifs. Or, ces officiers restèrent collés à leur troupe.


Quelle que soit la situation, la sécurité immédiate d'une troupe est une mesure qui s'impose et qui est indépendante de la sécurité qu'assurent les organes de sûreté en marche ou en station. Elle doit être assurée, à très courte distance, par les éléments jugés nécessaires, fournis par l'unité à protéger.


Faute d'avoir été précédées par leurs chefs, les unités du III/61e, qui étaient passées de la colonne de route à la colonne double ouverte, abordèrent, dans cette dernière formation, le mouvement de terrain 251 – 247, au nord de Guébestroff. Ce n'est qu'après plusieurs déplacement dans cette formation apparente et vulnérable que le chef de bataillon fixa un emplacement d'attente. Les compagnies, articulées de manière à faire face au nord-ouest et au
Nord-est, furent rapidement soumises à des bombardements intermittents de 77, dès leur arrivée sur le terrain, vers 11 heures. Malgré le voisinage du déblai de la voie ferrée, qui était susceptible d'offrir un couvert convenable, les unités furent maintenus couchées, en plein champ, et exposées ainsi aux tirs de l'ennemi. Bien que ces tirs, mal ajustés et peu efficaces, n'eussent provoqué que des pertes peu importantes (une dizaine de tués ou blessés), vers la fin de l'après-midi, ils n'aient pas moins déprimé moralement la majeure partie des hommes.


Le manque de renseignements sur la situation continuait à énerver chacun : on ignorait s'il y avait, à proximité, des unités avec lesquelles on aurait pus e mettre en liaison ; on ne savait pas o`se trouvaient les autres bataillons, ni le colonel, et on resta ainsi sans ordres jusque vers 18 heures. On supposait bien que le I/61e pouvait être vers l'est, entre le bois de Monacker et Vergaville ; mais aucune liaison n'avait permis de confirmer cette hypothèse.


L'artillerie ennemie bombardait fréquemment Vergaville et ses abords, où devaient se trouver des éléments de la 29e division, ainsi que les parages de Guébestroff, où devaient avoir été signalés d'importants mouvements de troupe.


Ces mouvements, apparurent, vers 16 h 30, aux officiers du III/61e, qui virent déboucher de Guébestroff le 55e régiment d'infanterie (2) progressant par bataillons successifs, en colonne double serrée. Malgré le feu de l'artillerie ennemie, le 55e continua son mouvement en direction de Guebling, après avoir "traversé" le III/61e.


Nous ne connaissons pas de situations plus pénible que celle qui fut imposée aux unités du III/61e, au cours de cet après-midi du 19 août. Ceux qui n'ont connu que les bombardements de la guerre de stabilisation, pourtant plus violents et plus meurtriers, ne peuvent se faire une idée exacte des effets déprimants que les bombardements des premiers jours de la campagne ont eux sur les troupes non encore aguerries. Qu'on s'imagine un millier d'hommes couchés en plein champ, en formation assez dense, recevant, entre 11 h 30 et 18 heures, des salves d'obus et n'ayant pour s'abriter que leurs outils portatifs et quelques gerbes de blé.


Cependant, lorsque, vers le soir, les résultats de tant de bruit furent connus, le moral se releva, car chacun voulut admettre comme définitif le jugement porté sur le pu de valeur de l'artillerie allemande qui tirait mal ou dont les projectiles n'éclataient pas .


Ce jugement sommaire et prématuré devait, dès le lendemain, causer de bien cruelles déceptions ; mais n'anticipons pas.


Vers 18 heures arrivait au III/61e l'ordre de se porter en direction de Guébling ; il avait, en avant de lui, le I/61e et le 55e régiment d'infanterie. Le mouvement, exécuté en colonne double ouverte, fut accompagné par quelques salves d'artillerie ennemie, mais sans dommage. Les bonds successifs, exécutés de crête en crête, amenèrent, vers 19 heures, le bataillon dans le ravin qui n partant de al corne sud-est du bois de Monacker, se dirige vers le moulin, à la sortie nord-est de Vergaville. En avant, le I/61e et le 55e régiment d'infanterie n'avaient pu franchir la voie ferrée, qui était prise sous les feux d'infanterie et d'artillerie paraissant provenir de la région Bourgaltroff – Bidestroff.


Le colonel commandant le 61e régiment d'infanterie, qui se trouvait avec le I/61e aurait voulu tenter avec ses deux bataillons et l'appui du 55e un poussée en avant ; mais aucune liaison n'existant avec l'artillerie, il dut renoncer à son intention. On ignorait d'ailleurs où pouvait être l'artillerie de la division, qui demeura silencieuse au cours de cette journée, et il était vraiment trop tard pour monter une attaque. Les éléments du 61e et du 55e, qui avaient atteint la voie ferrée, n'avaient pu apercevoir aucun fantassin et n'avaient pu repérer aucun engin ennemi. Il est vrai que le service de l'observation était pour ainsi dire inexistant dans beaucoup d'unités, à cette époque de la guerre.


A la nuit, les 55e et 61e régiments d'infanterie reçurent l'ordre de rétrograder dans la région de Vergaville : le 61e régiment d'infanterie, à Vergaville et aux abords immédiats de cette localité ; le 55e régiment d'infanterie en arrière. Le 61 régiment d'infanterie s'installa : le gros du régiment à Vergaville, où le II/61e rejoignit, dans la soirée, le III/61e au bivouac, sur le mouvement de terrain 230 au nord-ouest de Vergaville, sa tête au chemin qui partant de cette localité, va au bois de Monacker. Le I/61e à la droite du III/61e, partie dans Vergaville, partie au bivouac.


Le III/61e ignorait ce qui pouvait se trouver à sa gauche, vers la forêt de Bride de Koeking, et ne tenta pas de rechercher une liaison de ce côté. Il se contenta de faire surveiller cette direction par un poste de la 12e compagnie. Le bivouac était couvert en avant, face au nord-est, par des postes que la 9e compagnie détacha à très courte distance au delà du chemin Vergaville – Bois de Monacker.


A notre avis, une partie de la nuit aurait dû être employée à organiser défensivement la crête 230 – bois de Monacker, en prenant, comme tracé général, le chemin qui la jalonne ; mais rien de cela ne fut ordonné, sans doute parce que certains chefs estimaient que l'idée d'offensive excluait celle d'organiser le terrain. Or, sans préjuger des intentions que le commandement pouvait avoir pour le lendemain, il eût été nécessaire de s'assurer, d'abord, la possession du terrain conquis en améliorant ses possibilités de défense. Ces mesures, réglementaires alors comme aujourd'hui, auraient permis de recevoir, le cas échéant, une attaque ennemie sur un terrain organisé au moins sommairement. Elles ne nuisaient pas à la reprise du mouvement offensif, et, en cas d'échec de ce dernier mouvement, elles auraient permis de s'accrocher plus solidement au terrain.


Voilà ce qu'on aurait dût faire du côté commandement, si l'on n'avait considéré que les nécessités tactiques. Malheureusement, l'état physique de la troupe, privée de sommeil depuis plusieurs nuits, ayant eu à subir les intempéries des dernières journées et ayant, d'autre par, subi l'ébranlement nerveux que les bombardements prolongés provoquent toujours, ne permettait pas d'accomplir l'effort qu'aurait exigé l'organisation, même sommaire, du terrain occupé.


C'est dans de telles circonstances qu'on se rend compte de la nécessité d'éviter à tout prix les fatigues inutiles qui ruinent peu à peu les effectifs ou qui les rendent incapables d'accomplir l'effort imposé par la situation.


On attendit en vain les distributions cette nuit-là. Les postes établis pour couvrir le bataillon firent très correctement leur service, que l'ennemi ne troublé pas d'ailleurs. Il ne manifesta son activité que par le lancement de fusées éclairantes et l'éclairage du terrain au moyen de projecteurs puissant, qui paraissaient installés dans la région Guébling – Bourgaltroff.


Cette activité d'une nature particulière était l'indice certain d'un ennemi en éveil sur une position au moins partiellement organisée. Elle fut signalée au commandant du bataillon et au colonel, qui ne parurent pas lui accorder une importance considérable.


Pourtant, la bataille était dans l'air et les évènements de la journée du 19 semblaient en être les préliminaires immédiats. C'était du moins ce qu'on pensait dans les unités, où chacun avait la conviction que la journée du lendemain, 20 août, ne se passerait pas sans avoir "à y aller".


Dans les unités aux avant-postes, les officiers eurent l'impression qu'on manquait d'ordres et ils ne purent que déplorer l'absence complète de renseignements sur la situation. Il leur paraissait nécessaire, en effet, de faire procéder aux reconnaissances destinées à faciliter le débouché des troupes, si on comptait reprendre l'offensive le lendemain. Mais la nuit se passa sans qu'aucun ordre fût donné à ce sujet.





La journée du 20 août


Le 20 août, à 4 h 30, les bataillons du 61e régiment d'infanterie, rassemblés en arrière de la crête 230, étaient prêts à déboucher de la ligne jalonnée par le chemin Vergaville – bois de Monacker. Formés en colonne double de bataillon, les compagnies en ligne de sections par quatre, abrités des vues du nord-est par la crête que jalonne le chemin, ils avaient l'ordre de commencer leur marche d'approche en direction générale de Bénestroff.


C'est là tout ce qui fut donné comme renseignements aux commandants de compagnie et aux chefs de section.


Si on songe qu'on ignorait à peu près tout de l'ennemi et aussi des voisins, dans les unités qui allaient s'engager en première ligne, on verra que c'était vraiment trop sommaire. Et dire que les règlements insistaient beaucoup sur la nécessité de renseigner les troupes !


On finit cependant par savoir que la 60e brigade allait déboucher, entre Vergaville et le bois de Monacker, avec ses deux régiments accolés ayant chacun deux bataillons en premier échelon : à droite, le 61e régiment d'infanterie, avec son bataillon de droite (I/61e) à la voie ferrée et son bataillon de gauche (III/61e) en liaison avec le 55e régiment d'infanterie, vers le chemin allant à la cote 232 (au coude de la voie ferrée) ; son troisième bataillon (II/61e) en arrière, en deuxième échelon.


Le calme était impressionnant. Aucune activité ni aucun coup de feu ne se manifestaient du côté de l'ennemi.


Dans les rangs, les officiers avaient l'impression que, si on se portait en avant, la bataille s'engagerait sérieusement, car l'activité des projecteurs ennemis, au cours de la nuit, semblait confirmer ce que des renseignements d'habitants avaient déjà indiqué : l'ennemi était fortement retranché en avant de Bénestroff. Devant cette éventualité, la plupart des officiers faisaient leurs ultimes recommandations à leurs hommes, à savoir :

suivre aveuglement les chefs ;

ne pas tirer sans ordre ;

ne pas s'entasser ;

regarder toujours en avant de soi, jamais en arrière ;

rester, coûte que coûte, à la place indiquée ;

ne jamais se replier sans ordre ;

avoir confiance.

Nous allons suivre plus spécialement les opérations du III/61e, et en particulier de sa 9e compagnie, au cours de cette journée.


Vers 4 h 45, le chef de bataillon réunit ses officiers et leur communiqua l'ordre verbal suivant

"Le régiment, encadré à gauche par le 55e régiment d'infanterie et, à droite, à l'est de Vergaville, par des éléments de la 29e division, se porte en avant, en direction générale de Bénestroff. Le III/61e, à gauche, en liaison avec le 55e régiment d'infanterie par sa gauche et avec le I/61e par sa droite. Formation de départ : colonne double, les compagnies en ligne des sections pas quatre, 9e compagnie et 11e compagnie en tête ; la 9e à droite, la 11e à gauche. Quelques éclaireurs en avant de chaque compagnie de tête. On peut s'attendre à rencontrer l'ennemi. Se tenir prêt à déboucher au premier signal."


Pas un mot sur l'appui de l'artillerie ni sur la situation connue de l'ennemi. Aucune précision n'était donnée aux compagnies de tête sur leur direction particulière rapprochée, et rien n'était dit au sujet de la conduite à tenir en cas de rencontre de l'ennemi. L'ordre donné semblait indiquer qu'il s'agissait, tout d'abord, d'une marche d'approche, et pourtant les évènements de la veille tendaient à prouver que l'ennemi n'était pas éloigné.


Pour guider leurs unités, les officiers ne disposaient que de cartes au 1/200 000e ce qui ne leur permettait pas d'étudier le terrain à parcourir. C'était là une lacune très sérieuse, surtout pour leur faciliter la préparation des bonds successifs de leur troupe.


Au moment où le mouvement allait commencer, un coup d'œil sur les unités s'imposait pour scruter l'état d'âme de ces collectivités. Les visages des officiers comme ceux des hommes étaient devenus graves, le silence le plus complet régnait dans les rangs et un peu d'émotion contenue se lisait sur la plupart des physionomies. Un grand nombre parmi les hommes, étaient pâles, et quelques mouvements nerveux agitaient leurs membres ; presque tous regardaient les officiers. Certains de ces derniers cherchaient à cacher leurs sentiments, en paraissant s'intéresser à des détails secondaires de tenue.


Les moments ainsi vécus par les chefs d'infanterie et par leurs hommes sont difficiles à décrire et seuls, ceux qui ont été appelé à les vivre, peuvent s'y essayer avec quelques chance d'y réussir. On s'aguerrit à la longue, la guerre l'a prouvé. Mais lorsque, pour la première fois, on va marcher à l'ennemi, que l'on sait tout proche, l'état d'âme, même des plus résolus, est trouble et se dérobe à l'analyse du psychologue qui n'a pas été dans l'action.


Les chefs, qui doivent trouver dans leur éducation et dans l'élévation de leurs sentiments la force nécessaire pour donner l'exemple du calme et de la résolution, ont le devoir d'encourager leurs hommes et de détourner leur esprit de l'idée du danger. Ils doivent savoir que tous les yeux sont fixés sur eux et que leurs gestes comme leurs paroles n'échappent à personne, car chacun, autour d'eux, semble chercher celui qui donnera le branle à ces volontés en suspens et déclenchera le réflexe qui va l'entraîner en avant, vers le danger.

Dans ces minutes solennelles, le vrai chef, celui dont la force d'âme sera supérieure à la crainte du danger, celui qui saura conserver le calme et le sang-froid qui lui permettront de juger en toute liberté d'esprit les évènements du combat et d'ordonner avec calme et autorité les mesures convenables, s'imposera définitivement à ses hommes : il sera toujours suivi. Par contre, les trembleurs, – il en existe, – les agités ou les timorés seront certains d'être abandonnés bientôt, lorsque le danger se sera révélé.





Fin de la première partie.





Les évènements de la journée qui forment ce qu'on peut appeler une tranche de la bataille de Lorraine, se classent assez bien en trois phases pour les troupes engagées au nord-est de Dieuze :

- une phase d'attaque ;

- une phase de repli et de réaction contre l'ennemi

- une phase de retraite



I Phase d'attaque

A 5 heures, le colonel donne le signal du mouvement en avant. On se croirait, non pas à une marche à l'ennemi, mais à une parade sur un terrain de manœuvres. Le colonel en tête du régiment, en avant du IIIe bataillon qui assure la direction avec sa 9e compagnie ; le chef de bataillon et les capitaines en tête de leurs unités. La masse compacte de la ligne de colonnes doubles, peu ouvertes, s'avançant dans l'ordre le plus parfait, franchit, sans incident, la crête jalonnée par le chemin Vergaville – vois de Monacker et descend la pente nord du mouvement de terrain 230. Un arrêt de très courte durée est marqué au pied de cette pente, dans le ravin qui se dirige vers le moulin de Vergaville ;puis la masse repart dans le même ordre. Le silence de l'ennemi laisse déjà croire à quelques-uns qu'il a pu se replier. Cette hypothèse ne va pas tarder à être tragiquement démentie. En effet, dès que les unités de tête des colonnes (9e et 11e compagnie pour le IIIe bataillon) abordent le rebord ouest du mouvement de terrain 232 (vers le coude de la voie ferrée entre Vergaville et Guebling), des rafales nourries et ajustées d'artillerie ennemie s'abattent sur elles. Les obus de 77 sont mélangés à des obus de plus gros calibres, dont les éclatements percutants sont terrifiants. Les unités surprises par le feu, hésitent. Quelques remous se produisent, puis les officiers font coucher leurs hommes. Comme le tir continue et que le meilleur moyen de se soustraire à son action est de se porter en avant, les 9e et 11e compagnie poussées par leurs chefs, bondissent en cherchant à se déployer ; mais le feu inexorable les cloue de nouveau au sol. En arrière, les autres unités, également soumises au bombardement, se sont arrêtées, puis ont tenté un bons qui a provoqué leur mélange. Les pertes paraissent déjà élevées et l'ennemi continue son tir sur zone, englobant ainsi les premiers échelons et les réserves. Un temps d'arrêt très court se produit, pendant lequel les officiers et les sous-officiers cherchent à mettre un peu d'ordre dans les unités et à préparer un nouveau bond. Une légère accalmie dans le feu de l'ennemi se manifeste d'ailleurs. Mais le colonel, le chef de bataillon et plusieurs officiers s'élancent alors au cri de : "En avant ! En avant !" et entraînent, dans un nouveau bond, les unités encore en désordre. Ce mouvement, qui est pris immédiatement sous le feu violent de l'artillerie et des mitrailleuses ennemies, est de nouveau arrêté, net. Il a aggravé la situation en causant de nouvelles et très sérieuses pertes et en augmentant l'entassement ainsi que le mélange des unités. Les liens tactiques sont rompus ; beaucoup d'unités n'ont plus de chefs et les hommes refluent ou se pressent autour des officiers qu'ils voient à leur proximité. Au IIIe bataillon, le chef de bataillon et le capitaine commandant la 9e compagnie, ainsi que plusieurs autres officiers sont blessé ; le capitaine commandant la 11e compagnie est tué ; un nombre élevé de sous-officiers et d'hommes sont également tombés. Le lieutenant en premier de la 9e compagnie prend, en même temps, le commandement de sa compagnie et celui des éléments divers appartenant en majorité aux 9e et 11e compagnies, qui sont en première ligne. Il cherche, d'abord, à pousser tout ce monde à l'abri d'un repli de terrain qu'il aperçoit en avant de lui, afin de pourvoir mettre de l'ordre dans ces groupes qui commencent à regarder en arrière. Il y parvient, grâce à l'aide d'hommes résolus qui, spontanément, se portent en avant ou poussent les hésitants. Ce sont des chefs qui se révèlent : ils en ont le courage, sinon la science.


A l'abri du repli de terrain qu'il a pu atteindre, le nouveau commandant de la 9e compagnie prend les mesures nécessaires pour déployer les fractions qui sont avec lui et donner un chef improvisé à chacune d'elles. Cela fait, il cherche à apercevoir l'ennemi et pense à l'ouverture du feu, car, déjà, sans ordre et tirant au hasard, certains hommes ont commencé d'eux-mêmes à tirer. Les laisser continuer serait vouer d'avance le tir à un résultat stérile et à le rendre plus dangereux pour les amis que pour l'ennemi.


Pendant ce temps, l'ennemi continue ses rafales sur les unités de deuxième échelon, dont la majeure partie est couchée et dont quelques groupes refluent en arrière, puis sont ramenés par des officiers. La situation est confuse et il faut, ou bien avancer, ou bien s'enterrer dans le sol conquis. C'est ce moment que, de l'arrière, la charge, sonnée par les clairons, retentit. Il se produit alors une nouvelle ruée en avant de toute la ligne : c'est fou, car non ne sait où l'on va. Ce nouveau bond est rapidement arrêté par le feu de l'ennemi et, cette fois le 61e sera cloué au sol, puis devra reculer.


A la 9e compagnie, le nouveau bond en avant a aggravé les pertes, car toute la 4e section, avec le deuxième lieutenant, prise sous une rafale, a été mise hors de combat. D'autres groupes ont également souffert et il a fallu maintenir à leur place, revolver au poing, quelques hommes qui, en tentant de fuir vers l'arrière, pouvaient engendrer une panique. Des hommes courageux sont intervenus pour maintenir dans le devoir leurs camarades affolés.


Le colonel, calme, s'est porté en première ligne, pour juger la situation. Bien que sa présence là ne soit pas la place qui lui permettrait d'assurer le commandement dans les conditions les plus favorables, elle réconforte les hommes. Mis au courant des évènements et de la situation par le commandant de la 9e compagnie, il ordonne à ce dernier de prendre le commandement de toutes les fractions les plus avancées de la ligne, de les remettre en ordre, puis d'organiser un mouvement de repli, par échelons, tandis qu'il va organiser lui-même le repli des unités qui sont en arrière. Il apprend au commandant de la 9e compagnie que la plupart des capitaines, ainsi qu'un nombre élevé d'officiers et de gradés du régiment, sont hors de combat.


Il est difficile d'imaginer le déchirement que produisent de telles nouvelles, ainsi que l'obligation d'abandonner un terrain dont la conquête a coûté tant de sang et sur lequel on doit laisser ses blessés et ses morts ! Pourtant, il faut obéir. C'est dans de telles circonstances que le chef élèvera son âme au-dessus des sentiments ordinaires de la vie, pour ne penser qu'au devoir, quels que soient les sacrifices que l'accomplissement de ce devoir exige.


Il semble qu'on pourrait s'accrocher au terrain conquis, sur lequel on serait en mesure de recevoir l'ennemi, s'il contre-attaquait ; mais le colonel n'accepte pas cette proposition que lui fait le commandant de la 9e compagnie ; il sait, en effet, que, sur la droite du régiment, les éléments de la 29e division ne progressent pas et que le flanc est découvert de son côté.


On n'a d'ailleurs pas le temps de discuter davantage, car le feu de l'ennemi continue par rafales et il faut remettre de l'ordre dans les groupes. D'autre part, il faut intervenir avec énergie pour empêcher les hommes valides d'accompagner les blessés vers l'arrière : un très grand nombre s'offrent déjà à faire l'office qui incombe régulièrement aux brancardiers. Il y a là une tendance qu'il est nécessaire d'enrayer brutalement : quelle que soit la raison invoquée, on ne saurait tolérer que les combattants valides se rendent à l'arrière sans ordres précis de leurs officiers. Le souci de conserver les effectifs et de maintenir le moral doit rendre les chef intraitables sur cette question.



II Phase de repli et de réaction contre l'ennemi

L'exécution du mouvement de repli ordonné par le colonel est une opération délicate à réaliser, à cause de l'état moral de la troupe. Il ne faut d'ailleurs pas se dissimuler qu'un tel mouvement est toujours d'une exécution difficile sous le feu de l'ennemi. La première condition à rechercher, pour le rendre possible, c'est l'ordre, sans lequel les hommes tendent à s'entasser et à dépasser les limites fixées pour les bonds. C'est pour cette raison que le commandant de la 9e compagnie choisit quelques-uns des hommes qui se sont fait remarquer par leur résolution lors du mouvement en avant, et leur prescrit d'aller jalonner, en arrière, à 200 mètres environ, une ligne qui marquera le premier temps du mouvement rétrograde. Tandis que lui-même règlera les départs successifs des groupes, les hommes postés arrêteront, au besoin par la force, les groupes sur la ligne fixée. Ces hommes accomplissent admirablement leur tâche et ramènent à leur place tous ceux qui dépassent cette ligne. Des hommes d'une telle trempe – nous l'avons dit déjà – ont une âme de chefs. Par leur courage et par leur exemple, ils s'imposent à leurs camarades dans les circonstances difficiles du combat. Chez nous, leur nombre est toujours assez élevé pour combler les vides occasionnés par les pertes et pour prendre spontanément la place des chefs qui sont tombés. Cette "réserve" donne à notre armée une force incomparable.


Le premier temps du repli s'est correctement exécuté, grâce à ces serre-file improvisés ; mais le moral des hommes a été soumis à une rude épreuve. Il a fallu, en effet, parcourir, sous le feu, un terrain couvert de morts et de blessés qui demandaient du secours, sans pouvoir rendre les derniers devoirs aux uns ni secourir les autres.


A l'arrière, les unités restées en deuxième échelon ne semblent pas avoir exécuté leur repli avec le même ordre que celles du premier échelon ; des groupes entassés ont paru plutôt s'enfuir que se replier, et le feu de l'ennemi a creusé des sillons sanglants dans ces éléments que des chefs improvisés ont arrêtés, puis remis en ordre.


Au milieu de ces mouvements, le colonel, toujours calme, réconforte chacun. Constamment debout, il semble défier l'ennemi. Mais un éclat d'obus lui fracasse le bras : il pâlit sous la douleur sans prononcer un mot ni faire un geste qui laisse deviner sa blessure ; il comprend que la moindre parole de découragement pourrait être le signal du désordre dans les unités. Sommairement pansé, il demeure à son poste, dominant par son courage toutes les velléités de faiblesse. Il prescrit une répartition provisoire du commandement entre trois officiers qui se sont retrouvés sur la ligne de repli, puis ordonne un nouveau bond en arrière, destiné à ramener toutes les fraction du régiment à la crête Vergaville – bois de Monacker, base de départ du matin, sur laquelle on tentera de s'accrocher solidement et d'organiser les feux. Il peut être alors 8 heures.


Ce deuxième mouvement de repli, exécuté en partie à l'abri des vues, s'effectue sans incident ; il permet même de reprendre un peu en main les fractions et de leur donner des chefs, sans grade encore, mais à qui le courage a, sans délai, donné le prestige nécessaire pour être obéis et suivis de leurs camarades.


Le feu de l'ennemi s'est ralenti, sur le front du régiment du moins, et l'installation sur la route Vergaville – bois de Monacker peut s'effectuer dans un calme relatif. C'est une position qui domine le terrain en avant et qui possède un observatoire naturel : une maison isolée située à 100 mètres environ au nord-ouest du passage en dessus de la voie ferrée du chemin qui va de Vergaville au bois de Monacker.


En arrivant à cette maison, le commandant de la 9e compagnie y trouve, abrités derrière ses murs, une foule d'hommes et de gradés, peut-être plus d'une centaine qui semblent très émus. Il y en a de toutes les compagnies du régiment et du 55e régiment d'infanterie. Tous prétendent avoir été envoyés là par un de leurs chefs pour y être "en réserve". Revolver au poing, ce commandant de compagnie, aidé par quelques gradés, prend cette foule sous ses ordres, la fractionne, l'encadre et lui donne une place long de la route tandis qu'avec un élément il va organiser défensivement la maison.


Lorsqu'on rencontre des groupes de trembleurs, qui ne manquent pas de faire rapidement des adeptes, seule l'énergie peut les ramener dans le devoir ; quelquefois même il faut en venir à "forcer l'obéissance". Cette mesure, toujours pénible à appliquer, s'impose pour le salut de l'unité qu'on commande et qu'on a l'obligation de maintenir, coûte que coûte, dans le bon chemin. Pendant les moments de crise, tout acte de faiblesse de la part du chef peut entraîner le désordre et même la panique.


L'ordre étant mis dans les unités et le commandement réparti, le commandant de la 9e compagnie s'empressait, d'une part, de rechercher la possibilité d'établir les liaisons avec les voisins ; d'autre part, d'organiser le terrain avec les outils portatifs. Que ne l'avait-on fait la veille !


Quant aux feux, il aurait fallu au moins les préparer, mais les mitrailleuses n'étaient pas là. Il paraît que ces unités avaient été très éprouvées, avant même d'avoir pu se déployer. N'eût-on pas dû les établir, d'abord sur la base de départ, puis, le cas échéant, les déplacer par bonds ordonnés ? Mais, encore une fois, on pouvait constater que l'emploi de ces engins était loin d'être bien connu, à cette époque de la guerre.


Il faut donc se passer du précieux et puissant concours de ces armes automatiques et se contenter, faute de mieux, des armes individuelles. Les officiers qui sont encore là, au nombre de trois, pour commander des fraction appartenant au Ier et IIIe bataillons du 61e et à des unités du 55e, commencent à faire le repérage du terrain, et décident qu'on n'exécutera que des feux commandés, ouverts à leur signal. Ils estiment, en effet, que, sans cette précaution, le tir ne tarderait pas à dégénérer en tirailleries bruyantes, qui auraient surtout le résultat de vider les cartouchières tout en étant sans danger pour l'ennemi. Ce dernier n'a point été aperçu encore. Va-t-il se montrer enfin, ou bien va-t-il se résigner à se défendre par le feu ? Ce feu, auquel il paraît avoir donné une puissance considérable, en conjuguant le tir de l'artillerie avec celui des mitrailleuses, qu'il n'a pas encore été possible de repérer, a parfaitement réussi à enrayer l'attaque française, mais il ne saurait, à lui seul, réussir à rejeter celle-ci au delà de la frontière. Du côté français, les pertes subies ont brisé l'élan du matin, mais il paraît possible de tenir tête à l'ennemi s'il se montre agressif : c'est de moins l'impression éprouvée par les officiers du 61e qui tiennent maintenant la crête : Vergaville – bois de Monacker. Pour cela, il faudrait qu'un appui sérieux des feux d'artillerie fût organisé. Or l'artillerie française paraît avoir été nettement dominée, depuis le matin, par celle de l'ennemi, car elle n'a pu ouvrir le feu sans être violemment contre-battue par des canons d'un calibre supérieur à celui du 75. Où se trouve-t-elle ? Aucune liaison effective n'existe avec elle ou, du moins, si elle a été ordonnée, aucun officier n'en a eu connaissance.


Aucun contact n'a pu être établi à gauche, vers la forêt, d'où les éléments du 55e régiment d'infanterie paraissent avoir effectué un mouvement de repli, car aucune patrouille n'a pu les joindre et plusieurs fractions envoyées à cet effet ont, par contre, reçu des coups de fusil partant du bois.


La maison du passage en dessus, précédée au nord-est par un en cols, a pu être rapidement organisée et crénelée. Au grenier et aux deux étages sont placés des tireurs qui voient admirablement le terrain. Il en est de même des tireurs qui sont placés derrière le mur de l'enclos, face à la direction de l'ennemi. Le commandant de la 9e compagnie désigne un commandant de cette forteresse observatoire et lui ordonne de faire ouvrir des feux lointains, si l'ennemi commence un mouvement offensif. Il prescrit une observation attentive, après avoir, lui-même, fait une étude du champ de bataille. Quel admirable observatoire pour les artilleurs, s'ils étaient là !


Au loin, vers les pentes à l'ouest de Bidestroff, commencent, peu après, à se mouvoir des groupes ennemis qui paraissent entamer leur bond en avant. Beaucoup d'hommes portent sous leur bras gauche une gerbe de blé ramassée dans les champs qui leur sert de bouclier au moment de l'arrêt. Mais ces groupes ont été aperçus, car de toute la ligne française partent des feux à grande distance et l'artillerie tire sur les pentes occupées par l'ennemi. Aussi les observateurs de la maison de passage en dessus ont-ils la joie de constater que les groupes ennemis refluent en arrière. Plusieurs tentatives seront ainsi repoussées.


A l'extérieur de la maison les feux sont maintenant organisés, malheureusement, sans mitrailleuses : une fraction a été placée en crochet défensif face au bois de Monacker, tandis que, vers Vergaville, le commandant du Ier bataillon du 61e, a mis ses unités en ordre et défend le terrain face au nord-est.


Les liaisons entre les éléments de la première ligne qui ont pu être reconstitués, sont établies, mais aucun ordre précis sur la conduite n'a été donné. On a l'impression que le combat n'est pas conduit suivant une volonté ferme.


Le colonel fait rallier par le IIe bataillon, regroupé vers la cote 231, à l'ouest de Vergaville, les fractions qui se sont repliées et qui errent sans chef. En arrière, du côté de Guébestroff, des renforts paraissent avancer pour soutenir la première ligne, qui constitue déjà une ossature suffisante pour permettre une résistance sérieuse, surtout si des mitrailleuses peuvent lui être affectées.


Le manque de chefs énergiques se fait rapidement sentir dans les unités engagées, et c'est là une situation grave, car, outre qu'elle laisse les troupes sans direction, elle expose les voisins aux pires dangers. C'est ainsi que des éléments ralliés en arrière et renvoyés en avant ont ouvert, à maintes reprises, le feu sur les troupes amies de la première ligne, qu'ils prenaient pour des unités ennemies. De telles erreurs ne sont, malheureusement, pas rares à la guerre : elles risquent de démoraliser les troupes. Elles se produisent généralement lorsque les chefs perdent leur sang-froid ou que les troupes n'ont plus de chefs.


En résumé, vers 8 h 30, la situation paraît être la suivante. Du côté de l'ennemi, tentative de mouvement en avant, repoussée sur le front du 61e. Du côté du 61e, les éléments mélangés, mais à peu près réorganisés, du IIIe bataillon, sont à même d'ouvrir le feu de la crête Vergaville – Bois de Monacker, qu'ils occupent avec l'observatoire de la maison de passage en dessus ; à sa droite, le Ier bataillon paraît pouvoir tenir, tandis qu'à sa gauche, vers la forêt, les éléments du 55e ont dû se replier sur Guébestroff. Enfin, en arrière, vers la cote 251, le IIe bataillon du 61e , avec le colonel, a rallié ses unités et est à même de participer de nouveau au combat.


De l'observatoire de la maison du passage en dessus, le commandant de la 9e compagnie peut constater que l'ennemi a réussi à déclencher son mouvement en avant. Il aperçoit des vagues successives qui bondissent et progressent, entraînées par les officiers et appuyées par le feu de l'artillerie qui tire sur la ligne Vergaville – bois de Monacker et en arrière. La maison du passage en dessus devient bientôt intenable ; il faut l'évacuer, car les obus l'entament progressivement. De toute la ligne française, on tire sans arrêt ; mais, hélas ! on n'entend pas, sur cette ligne, le crépitement caractéristique du tir des mitrailleuses. Sur le front du IIIe bataillon du 61e, l'ennemi paraît cloué au sol, après avoir fait quelques bonds en avant. Il n'en est malheureusement pas de même vers Vergaville et à l'est, où la progression s'accentue, tandis que, vers la forêt, on a l'impression que l'ennemi va déboucher sur le flanc gauche du 61e. Ces dangers sont sans doute réels, ou tout au moins possibles ,car le colonel ordonne un repli par échelons sur Guébestroff. Le Ier bataillon utilisera la voie ferrée et ses abords, tandis que le IIIe bataillon utilisera le terrain au nord de la voie ferrée, en se couvrant face à la forêt.


De tels mouvements, exécutés sous le feu de l'ennemi, font courir aux troupes qui les effectuent le risque de voir le repli dégénérer en fuite, puis en panique, si le feu est efficace. Il faut donc les exécuter avec sang-froid, ordre et méthode. Les bonds doivent être préparés soigneusement, énergiquement à ce qu'on pouvait penser, le IIe bataillon du 61e, qui aurait pu, de la position qu'il occupait vers la cote 251, constituer l'élément de recueil de toutes les unités, avait été replié sur Guébestroff. C'est donc dans ce village, dont les abords nord-est étaient tenus par un bataillon du 55e régiment d'infanterie, que purent se rallier les unités du 61e.


Le colonel prescrivit, tout d'abord, une remise en ordre des unités. Le commandant de la 9e compagnie ayant reçu l'ordre de reconstituer le IIIe bataillon, ne put réunir que les éléments décimés appartenant aux 9e, 10e et 11e compagnies, sans aucun officier, et presque sans gradés. La 12e compagnie, encore ne bon état, avait reçu une mission spéciale et n'avait pas rallié Guébestroff.


Cet entassement dans un village à proximité de l'ennemi n'était évidemment pas une mesure heureuse, car celui-ci pouvait le bombarder et y occasionner des pertes et du désordre : heureusement, il n'en fit rien.


Le repli sur Guébestroff laissait aux mains de l'ennemi les morts et les blessés du champ de bataille, tombés le matin. Quelque pénible que fût ce sacrifice, il n'était pas possible de faire autrement faute de temps et de moyens.


Lorsque la plupart des unités furent à peu près reformées avec des cadres de fortune, le bruit courut que le drapeau du régiment était tombé aux mains de l'ennemi. Ce fut d'abord un sentiment de stupeur ; puis, spontanément, les hommes demandèrent à se reporter en avant, pour chercher à le délivrer. L'intervention du colonel, qui assura que le drapeau était en sûreté, rasséréna les esprits. Nous signalons ce fait pour montrer l'influence morale que peut exercer sur les troupes l'emblème de la patrie.


Dans Guébestroff se trouvaient également de nombreux blessés, ainsi que des éléments divers de toutes les unités de la 60e brigade, dont un grand nombre erraient à l'aventure et paraissaient chercher leurs chefs, mais, pour certains, avec le désir évident de ne point les retrouver. Cette constatation, que nous aurons l'occasion de faire en maintes circonstances du combat, nous montre la nécessité de placer, en arrière des unités engagées, des troupes solides, très fortement encadrées, chargées d'arrêter les fuyards, de recueillir les éléments dispersés et de les remettre en ordre.


C'est au nombre d'une centaine seulement que le commandant de la 9e compagnie put rassembler les hommes appartenant à son unité (3). Ayant pu, tant bien que mal, reconstituer les autres compagnies, il reçut l'ordre de rallier la 12e compagnie à l'ouest de Guébestroff, et de se placer sous les ordres du capitaine commandant cette compagnie à qui incombait, maintenant, le commandement provisoire du IIIe bataillon. Le reste du régiment, couvert par les 9e et 12e compagnies, déployées vers la cote 229 (ouest de Guébestroff) devait continuer son mouvement de repli sur Dieuze.


Cependant il pouvait être 10 h 30, lorsque le colonel fit prévenir le commandant du IIIe bataillon qu'un retour offensif général allait être déclenché, et il lui ordonna de réoccuper immédiatement Guébestroff avec les 9e et 12e compagnies. Homme d'une bravoure extrême, mais n'ayant pas, à cause de sa bravoure même la pondération et la réflexion sans lesquelles un chef risque souvent de lancer ses troupes à l'aventure, le capitaine commandant provisoirement le IIIe bataillon du 61e poussa immédiatement ses unités sur le village, avec ordre d'atteindre les lisières nord-ouest. Il était convaincu que des fraction amies s'y trouvaient encore et qu'elles étaient en mesure, en attendant son intervention de tenir l'ennemi en échec.


Son erreur était grande. Elle aurait pu provoquer une catastrophe si le commandant de la 9e compagnie, d'accord en cela avec les sages prescriptions du Règlement, n'avait pas envoyé une patrouille dans le village. Cette patrouille signalait, peu après, que les Allemands atteignaient en force la lisière nord-ouest et que des unités d'aile avaient déjà entrepris le débordement des lisières est et ouest. Déployées alors de part et d'autre de la route venant du sud-ouest, la 9e compagnie à droite, la 12e à gauche, ouvrent le feu dans la rue principale du village et aux abords immédiats des lisières est et ouest. Surprises, les unités ennemies s'arrêtent et cherchent un abri dans les maisons. Un combat par le feu s'engage ainsi, sans grand danger d'ailleurs pou l'un et l'autre adversaire, à cause du tir mal ajusté des armes individuelles.


Dans l'espoir de voir se produire le retour offensif annoncé par le colonel, le commandant du IIIe bataillon s'accroche au sol, mais déjà les munitions manquent et on ignore où se trouve le colonel pour luis demander un ravitaillement.


Si le retour offensif tarde à se produire, il sera impossible de rester là. On aperçoit, de Guébestroff, des groupes nombreux de troupes françaises qui, abandonnant les abords de Vergaville, sont talonnés vivement par les Allemands et se replient sur Dieuze et à l'est, par le mouvement de terrain de la cote 237. D'autre part, devant Guébestroff, l'ennemi a élargie son mouvement débordant vers l'ouest et menace de prendre entre deux feux les éléments du IIIe bataillon du 61. Demeurer là, alors qu'aucune mission de sacrifice ne leur a été donnée, serait, pour ces éléments, la certitude d'être capturés. Il faut donc se résoudre à un repli que l'entêtement du commandant du bataillon a beaucoup trop retardé déjà. Tandis que la 12e compagnie se repliera par la voie ferrée, la 9e suivra le ruisseau Spin : direction Dieuze. Le mouvement de repli de la 9e compagnie va rapidement devenir tragique, car, si son premier échelon a pu, grâce au couvert offert par les murs de clôture du village, se retirer sans difficultés, son deuxième échelon, fortement accroché par l'ennemi qui a atteint les lisières sud de Guébestroff, éprouvera des pertes pour atteindre l'angle mort formé par le ruisseau même. Au sud–est de Guébestroff, la 9e compagnie est prise violemment de flanc par une mitrailleuse ennemie qui s'est installée vers l'embranchement des routes au sud de la cote 237 (sud-ouest de Vergaville). De nouvelles pertes s'ensuivent et la destruction totale était inévitable, si le commandant de la compagnie n'avait ordonné d'utiliser le lit même du ruisseau comme cheminement.


Couvert par des arbres et des haies, ce lit était dissimulé en partie aux vues de l'ennemi et se trouvait en angle mort par rapport à son tir. La liaison avec la 12e compagnie, ainsi qu'avec le reste du régiment, était perdue pour la 9e compagnie. Pourvu que l'ennemi n'eût pas encore atteint Dieuze par l'est !



III Phase de retraite

Il peut être midi lorsque la 9e compagnie, réduite à 75 hommes, atteint, sans encombre, les lisières nord-est de Dieuze. Les hommes sont exténués et la faim tiraille les estomacs.


Le calme semble avoir succédé au fracas de la bataille, car on n'entend plus que quelques coups de canon isolés et de rares tirs de mitrailleuses. On dirait que l'ennemi progresse maintenant avec prudence. Son artillerie, qui aurait pu causer de sérieuses pertes aux troupes françaises traversant Dieuze, ne tire pas sur la ville. Or, Dieuze, est encombrée de troupes et de convois qui refluent vers l'arrière en toute hâte.


Va-t-on faire tête en avant de Dieuze ? Il semble que l'opération pourrait être tentée avec avantage en s'appuyant, d'une part, sur la forêt de Bride et de Koeking, et, d'autre part, sur les étangs à l'est de Dieuze. Il est vrai que c'est la situation générale qui doit commander cette mesure et qu'un officier de troupe ne peut être bon juge pour cela, tant est réduit le champ de ses investigations au combat.


A Dieuze, le commandant de la 9e compagnie apprend que le gros de la division se replie vers le sud et que le régiment se rallie au sud-ouest de la ville.


Le spectacle dans Dieuze est navrant, car la ville regorge de blessés, et tous ceux qui sont en état de marcher s'en vont par la route, tandis que d'autres s'entassent dans des voitures, pour échapper à l'ennemi. Ceux qui sont sérieusement atteints vont tomber entre ses mains et cette constatation ne manque pas d'être pénible pour leurs camarades plus heureux.


Pendant la traversée de la ville quelques fractions appartenant aux autre bataillons du régiment se sont ralliées aux débris de la 9e compagnie, qui forme ainsi un groupe de 130 à 140 hommes environ.


A la sortie sud-ouest de Dieuze, sur la route de Blanche-Eglise, le général commandant la 60e brigade installe lui-même le IIe bataillon du 61e à la lisière du bois de Mersack, face aux débouchés de Dieuze. Il ordonne, verbalement, au commandant de la 9e compagnie de rallier sans délai le gros du régiment sur la route de Blanche-Eglise.


Quoique exténué, le petit détachement se remet en marche dans le plus grand ordre. Au moment où il atteignait la lisière ouest du bois de Mersack, un incident des plus regrettables, qui mérite d'être mentionné ici en raison des leçons qu'il comporte, se produisait entre le commandant du détachement et un colonel du génie. L'incident illustre, en effet, la nécessité des ordres écrits, car il arrive fréquemment, au début d'une guerre surtout, que des officiers, n'ayant aucune responsabilité directe dans le commandement, croient pouvoir intervenir, pour redresser les actes de certains chefs subalternes. De là ne manquent pas de naître de fréquents et fâcheux malentendus dont la discipline d'abord et le prestige des intéressés ensuite ne peuvent que souffrir.


Tandis que forçant l'allure pour rejoindre au plus tôt le gros du régiment, le détachement du commandant de la 9e compagnie arrivait à la lisière ouest du bois de Mersack, un colonel du génie, qu'accompagnait un capitaine de la même arme, à cheval, arrêtait d'autorité le détachement et ordonnait à son chef de retourner à Dieuze, et cela sans décliner ni son nom, ni sa qualité. Surpris en même temps que vexé de la manière brutale dont venait d'agir cet officie

Re: Dieuze : 19 et 20 août 1914

Publié : mer. août 31, 2005 11:47 pm
par Guilhem LAURENT
Re,

Il semblerait que tout le texte ne passe pas, m'en étant rendu compte, voici la suite du texte de l'officier Guigues.

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C'est, malheureusement, en grand nombre que des incidents de cette nature se sont produits au début de la guerre, et cela, pour le plus grand mal de la discipline. Provoqués souvent par un énervement consécutif au combat, ces incidents ont eu, quelquefois des conséquences fâcheuses, en poussant les intéressés à des extrémités regrettables.


Si nous convenons volontiers qu'aux heures critiques on ne saurait, sans danger, engager des discussions ni apporter dans les ordres la forme habituelle, nous croyons cependant qu'une juste mesure est nécessaire pour ménager à la fois l'intérêt de la discipline et la susceptibilité de ceux qui combattent avec tout leur cœur. Qu'on se montre sans faiblesse vis à vis de ceux qui s'éloignent du devoir, même momentanément, mais qu'on n'oublie pas, à ce sujet, que si l'énergie est un stimulant, l'insulte ou les vexations ne peuvent qu'engendrer le pire.


A remarquer, en outre, qu'au combat, certaines apparences peuvent être trompeuses pour celui qui arrive inopinément, et pour un instant très court, auprès d'une unité dont il ne connaît ni la situation, ni la mission, ni l'état physique et moral, ni le chef.


L'incident du bois de Mersack doit servir de leçon aux chefs comme aux exécutants : aux premiers, en les habituant à donner à ceux qui ne sont pas sous leurs ordres immédiats, des ordres écrits, lorsqu'ils estiment devoir intervenir ; aux autres, à demander par écrit tout ordre qui modifie leur mission première, lorsque cet ordre n'émane pas de leurs chefs habituels. La responsabilité de chacun se trouve ainsi nettement et régulièrement engagée, et la discipline ni le moral ne risquent d'en souffrir, ni le combat.


Sur la route, des unités du 173e régiment d'infanterie étaient en pleine retraite ; la plupart n'avaient plus d'officiers et l'on sentait qu'elles manquaient d'une direction ferme qui leur aurait été indispensable. Sans chefs, les plus belles unités risquent de devenir troupeau. Heureusement que l'ennemi manquait de mordant, car, s'il en avait été autrement, il aurait eu la possibilité de troubler profondément la retraite française. En fait, les quelques éléments de cavalerie qu'il avait poussés sur les colonnes françaises se repliaient prudemment aux premiers coups de fusil qu'ils essuyaient.


Avant d'atteindre Blanche-Eglise, le commandant de la 9e compagnie rencontra un cavalier envoyé par le colonel ; il apportait l'ordre d'avoir à rejoindre Juvelize par les champs, les routes devant être laissées à la disposition des convois. Il dirigea alors son petit détachement sur le bois du Sorbier (sud de Blanche-Eglise). C'est là que se regroupait le 55e régiment d'infanterie, dont les pertes étaient, paraît-il très élevées.


Au cours d'un arrêt, à l'abri de ce bois, le commandant de la 9e compagnie put donner un coup d'œil dans la direction de Dieuze. Il constata le repli général des troupes vers le sud-sud-est, dans un ordre parfait. Il est vrai que l'ennemi se montrait peu actif et que les quelques unités qui avaient cherché à déboucher des bois au nord de Mulcey avaient été sévèrement traitées par l'artillerie française, installée dans la région du bois du Sorbier.


Une inexplicable méprise, - puisque, à l'œil nu, on distinguait les uniformes français, - fit qu'une batterie française déclencha un tir violent sur une colonne amie qui se dirigeait sur Guéblange. Le commandant de batterie paraissait avoir perdu son sang-froid, car, malgré plusieurs avis lui signalant son erreur, il persistait à tirer. Heureusement, pour la colonne, que le tir était mal ajusté ! Ces méprises sont malheureusement fréquentes à la guerre, et cela malgré l'opposition des couleurs des uniformes qui, en 1914, différenciait nettement les belligérants. Que va-t-il advenir, lorsque la couleur kaki sera celle de presque toutes les armées ?


Après cet arrêt rendu nécessaire pour faire souffler ses hommes, le commandant de la 9e compagnie reprit sa marche et rallia, vers 17 heures, le gros du régiment, au nord du Juvelize, presque ne même temps que les unités du IIe bataillon, qui avaient été déployées à la sortie sud-ouest de Dieuze et qui avaient empruntés un autre itinéraire.


Rein de plus émouvant que ce ralliement, qui montrait les vides creusés dans les unités. Que ce premier appel, fait après la bataille, fut douloureux pour tous ! Sans doute, quelques retardataires devaient rejoindre encore, mais combien dormaient là-bas de leur dernier sommeil, tandis que d'autres, blessés étaient maintenant aux mains de l'ennemi !


Les officiers du régiment avaient été décimés. Il n'en restait que trois au IIIe bataillon. La 9e compagnie n'avait plus qu'un officier : elle n'avait plus d'adjudant, ni de sergents et il ne restait qu'une centaine d'hommes valides, sur les 240 qu'elle en comptait encore, le matin, avant la bataille.


Une morne tristesse étreignait les cœurs et cependant il fallait s'apprêter à lutter encore, car l'ennemi n'était pas loin.


Le colonel stoïque avec son bras en écharpe, donnait l'exemple du calme et ordonnait la réorganisation des unités. On constitua des sections et des escouades réduites en proportion avec les effectifs restants et avec les hommes et les gradés à même de les commander, mais que ferait-on avec des débris exténués, sans vivres depuis l'avant-veille, s'il fallait les engager encore une fois avant la nuit ?


Vers 18 heures, l'artillerie légère ennemie commença à canonner les rassemblements autour de Juvelize, indice de l'avance de son infanterie. On dispersa les unités et, vers 18 h 30, le régiment reçu l'ordre de se replier sur Montcourt. C'était donc la retraite qu'on ordonnait après le repli, puisque ce village se trouvait à la frontière même. Cette nouvelle consterna chacun, car il semblait que ce mouvement était bien précipité. C'était sans doute, la situation générale qui imposait une telle mesure. Le combattant est mauvais juge pour cela, comme il ne voit et ne sait que ce qui se passe dans son voisinage immédiat, il ne peut apprécier justement les raisons qui guident les décisions du commandement, renseigné sur l'ensemble.


Comme il fallait abandonner aux équipages les routes et les chemins qu'ils encombraient d'une manière inextricable, l'infanterie dut marcher à travers champs. Quelle pénible étape ! Au moindre arrêt, les hommes tombaient, terrassés par la fatigue et il fallait toute l'énergie des chefs et des camarades les plus courageux pour leur faire reprendre la marche. Ce n'est que vers 21 heures que le régiment atteignit enfin Montcourt. L'épuisement des hommes était tel qu'il fallut aux chefs accomplir des prodiges d'énergie pour obliger les escouades à cuire une maigre soupe au riz, que la plupart des hommes, préférant dormir, ne mangèrent pas.


Le commandant de la 9e compagnie réunit tout son monde dans une grange et coucha au milieu de son unité. Il fallait cela pour surveiller moralement et matériellement l'état de la troupe. Dans d'aussi pénibles moments, les chefs ne sauraient rester trop près de leurs hommes. C'est là un devoir auquel un officier d'infanterie ne peut manquer sans danger pour le moral et pour son prestige personnel.


Le repos fut subitement interrompu, vers 23 heures, par l'ordre de se porter sur Serres. C'était à n'en pas douter, la continuation de la retraite. Où s'arrêterait-elle ? Quelques égarés de la journée rejoignirent les compagnies avant le départ.


Cette remise en mouvement fut des plus pénibles pour les hommes, qu'on avait eu du mal à réveiller et à tenir éveillés ensuite. Il avait fallu, pour cela, les tenir sur les rangs en attendant le départ. Ceux qui s'asseyaient s'endormaient aussitôt et il fallait les secouer fortement pour les remettre sur pied. Le rôle des chefs est difficile et délicat dans ces moments critiques, car ils doivent oublier et dissimuler leurs fatigues propres pour ne penser qu'à leur devoir, qui consiste surtout à donner l'exemple. La moindre faiblesse de leur part ne manquerait pas d'être exploitée par leurs hommes, et, d'autre part, leur énergie ou leur autorité manifestée d'une manière brutale ou intempestive risquerait de compromettre la discipline. C'est donc une œuvre de tact, en même temps que d'exemple, qui s'impose à eux.




Epilogue provisoire


Journée du 21 août



L'encombrement inextricable des routes par les convois et les unités attelées continua d'imposer à l'infanterie la marche à travers champs. Cette marche, à laquelle les troupes à pied de l'avenir devront, plus que jamais, être rompues tant de jour que de nuit, fut extrêmement dure et longue. De nombreux arrêts accidentels, provoqués par la traversée des routes et des villages ainsi que par des erreurs d'itinéraires, la rendirent énervante et fatigante. Les hommes dormaient en marchant. Leur remise en mouvement, après les arrêts, était lente et cruelle. Valhey, petite localité à l'est de Serres, fut atteinte vers 10 heures. Un arrêt de deux heures environ fut fait autour du village, pendant lequel chacun s'endormit profondément, sans penser à l'ennemi ni même à son estomac vide. Au loin, en arrière, on entendait le canon, et les habitants affolés commençaient à fuir l'invasion, maintenant certaine, après la retraite de l'armée de Lorraine.


Au lieu d'être dirigé sur Serre, le régiment reçut l'ordre de se porter sur Einville-au-Jard, et la marche reprit vers midi trente.


A Einville, une grand'halte fut ordonnée pour attendre des instructions qui ne vinrent pas. On chercha, alors, à organiser des achats dans le village mais il ne restait presque rien et les habitants s'enfuyaient, après avoir fermé leurs maisons.


Quel triste spectacle que celui de voir des Français quittant en hâte leurs foyers et leurs biens, pour se soustraire à l'occupation ennemie !


Le canon continuait à se faire entendre vers le nord, mais on ignorait tout de la situation, alors qu'on aurait voulu savoir ce qui se passait, ce qu'on devait craindre et ce qu'on pouvait espérer. Sans aucun doute la bataille d'hier était perdue par l'armée française de Lorraine. Mais pensait-on à réagir bientôt et où ?


Vers 15 h 30, l'ordre arriva d'atteindre au plus tôt Dombasle-sur-Meurthe, par la vallée du Sannon. L'encombrement des routes était tel qu'il fallut fréquemment piétiner sur place, ce qui, en raison de l'état de fatigue extrême de la troupe, constituait un vrai supplice pour les hommes. Pourquoi n'avait-on pas organisé une stricte surveillance de la circulation ? Faute de cette précaution, c'était le bon plaisir de chacun qui régnait dans les colonnes et qui provoquait des embouteillages fâcheux. Les chefs de colonne se disputaient entre eux ou avec les commandants des convois et, finalement, le plus élevé en grade imposait sa volonté sans s'inquiéter de l'ordre d'urgence d'écoulement prévu par le commandement. Lorsqu'on a vu cela, on ne peut qu'applaudir aux mesures prises, depuis pour réglementer la circulation en campagne.


Arrivées, à 19 heures, à Dombasle-sur-Meurthe, les unités du 61e régiment d'infanterie y cantonnèrent, y reçurent, enfin, une copieuse distribution et purent prendre une bonne nuit d'un repos qui leur était indispensable.




Journée du 22 août


La retraite continua sur la Moselle le lendemain. La marche fut attristée , encore une fois, par la vue des convois de paysans et de villageois qui fuyaient l'invasion en emportant chacun ce qu'ils avaient de plus précieux ou de plus utile. Rangés en longues files qu'encadraient des gendarmes, ils faisaient peine à voir, ces convois de misère qu'on arrêtait de temps à autre, au bord des routes, pour laisser passer les troupes. Des individus aux allures louches circulaient maintenant le long des colonnes ; certains même se mêlaient aux soldats. Ils répandaient des nouvelles tendancieuses contre la possibilité de la victoire finale. C'étaient sans doute, des agents de l'ennemi. Ordre fut donné de les éloigner et même de les arrêter. Le chefs doivent comprendre que c'est pour eux, un devoir de soustraire leurs hommes à cette propagande et ils doivent se montrer inflexibles au sujet de la police dans les colonnes qu'ils commandent.


Après avoir traversé les organisations réalisées sur le plateau de Saffais, face à la vallée de la Meurthe, par des troupes territoriales, le 61e régiment d'infanterie atteignit, dans la soirée, vers 23 heures, le village de Saint-Remimont, à l'ouest de la Moselle, où il cantonna.


La retraite était enfin terminée.


La riposte n'allait pas se faire attendre


FIN



Avec toutes mes excuses pour ce texte en deux parties un peu disproportionnées...

Bien cordialement à toutes et à tous

Guilhem LAURENT

Re: Dieuze : 19 et 20 août 1914

Publié : jeu. sept. 01, 2005 12:12 am
par Guilhem LAURENT
Bonsoir Claude,

Merci pour votre message.

Malheureusement les notes n'ont que peu d'intérêt, j'ai oublié de les insérer. Les voici :


(1) Village de la frontière où lieu le 11 août, une sérieuse affaire entre un détachement français et des troupes allemandes


(2) Le 55e régiment d'infanterie et le 61e régiment d'infanterie constituaient la 60e brigade de la 30e division d'infanterie


(3) A cette époque de la guerre, les compagnies d'infanterie avaient un effectif de 250 hommes.


Bien cordialement

Guilhem LAURENT