Forum PAGES 14-18

Bonsoir à tous,

Encore une énigme relevée en épluchant la presse locale durant la période 14/18, dans la Tribune Républicaine, journal de Saint-Etienne.
Je pensais connaître tous les morts pour la France de ma commune mais voilà que j'en trouve un de plus mais inidentifiable.
Voici le détail de ce qui est paru dans le journal :

"Villars, le 7 mai 1916 : La mairie a reçu l'avis de décès du chasseur Serre Pierre, du 11è bataillon, tué à l'ennemi en mars 1916. Sa mère, veuve remariée à M.Laurent, habite à Villars rue du Platton."

Mais voilà, pas de trace de Pierre Serre dans un 11è Bataillon, rien non plus à l'état civil dans les transcriptions de décès.
Je cherche en vain un remariage entre un Laurent et une veuve Serre, mais a priori pas sur la commune.

Peut-être quelqu'un a t-il un état des MPLF du 11è BCA (car je présume que chasseur au 11è Bataillon c'est bien le 11è BCA).
De plus il me semble qu'il n'y a pas de JMO disponible pour cette période, sauf erreur possible de ma part.

Les infos de l'époque étaient fournies par le secrétaire de mairie et jusqu'à présent très fiables. Donc quelque chose a du m'échapper ou bien ce chasseur n'est pas dans la base SGA.

Merci d'avance de votre aide

Pierre du 42

Bonjour Pierre,
Bonne nouvelle, j' ai retrouvé ton gars !!! bien sur dans les NMPLF car il a été fusillé. Pour cette raison je ne mettrais pas la fiche en ligne afin de ne pas déclencher une nouvelle fois une tempête dans un verre d' eau, mais je te la transmets en MP et si d' autres la veulent, un petit message en MP ou sur mon mail privé et c' est dans la boite.
Amicalement,
Jef

Bonjour à tous,
Bonjour Pierre et Jean-François,

Je suppose qu'il s'agit du chasseur fusillé le 16 mars 1916 dans le cimetière d'Anould (88). Il semble avoir blessé plusieurs de ses camarades à coups de couteau le 15 mars, ce qui lui a valu le peloton d'exécution. Ces faits sont relatés par Honoré Coudray dans Mémoires d'un troupier.

Bien sincèrement,
Eric Mansuy

Bonjour à tous,

http://www.memorial-genweb.org/~memoria ... &id=146025

L'auteur a peut être encore plus d'éléments?

Bon dimanche

sesouvenir

Bonjour à tous

Un sincère et grand merci à tous.
Voilà près de 3 ans que je piste minutieusement les Poilus de ma commune. 91 noms inscrits sur le monument aux morts + 3 noms rajoutés grace à ces recherches le 11 novembre dernier + 1 crypte et 11 corps de Poilus (pas encore identifiés mais ça suit son cours) retrouvés.
Parfois les progrès sont tout petits, parfois on avance d'un grand pas d'un coup après avoir laissé de coté un nom qui ne menait à rien.

Je voudrais en profiter pour remercier tous les adhérents de ce forum qui ont su débloquer une situation, prendre des photos dans les nécropoles, partager des informations ou me mettre sur une bonne piste (comme les richesses insoupçonnées de la cote 3R des archives départementales).

J'avais déjà un cas un peu étrange, un soldat MPLF "tué à l'ennemi", mais en fait mort d'une insolation lors d'une marche "forcée" sans avoir vu un Uhlan le 10 aout 14. Ou encore ces deux frères revenus indemnes d'une contre offensive à Retegnebois à Verdun, mais tués par un obus isolé alors qu'ils dormaient dans la paille d'une grange juste en arrière des lignes sur les berges de la Meuse.
Les JMO m'ont permis de découvrir la petite histoire dans la grande histoire. Fastidieux, mais passionnant.

Je m'arrête là pour vous dire encore une fois merci.

Bien sûr je vais "pister" un peu plus loin le soldat Pierre SERRE et son présumé coup de folie. Hélas le JMO en ligne pour le 11è BCA s'arrête au 3 mars 1915. Si quelqu'un a plus d'infos je suis bien sûr preneur.

Cordialement
Pierre du 42

Bonjour à tous,
Bonjour Pierre et Jean-François.

Voici l'extrait de l'ouvrage d'Honoré Coudray sur le sujet.

Bien sincèrement,
Eric Mansuy

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« 15 Mars
Cette nuit à deux heures, nous partions du Calvaire et après avoir fait grand’halte au Rudlin, l’on arrivait au village d’Anould pendant que la cloche de l’église tintait ses neuf coups réguliers et, réoccupant nos cantonnements de jadis, l’on attendait la soupe longue à se préparer. Bientôt l’on se disséminait dans les cafés du pays et buvions force vin blanc afin de nous réchauffer.
Mais l’après midi devait être marqué d’une sale histoire qui aurait gagné à coup sûr d’être liquidée par un autre homme que P… Voilà qu’un chasseur d’une compagnie nommé S… ayant bu plus que de raison cherchait querelle à ses camarades et en a blessé plusieurs, oh légèrement, à coups de couteau. Le commandant vient à passer et veut mettre de l’ordre, mais S…, aveuglé par la boisson, le bouscule. Alors le vase sacré du chef est effleuré. Il donne l’ordre aux chasseurs de le maîtriser et de l’enfermer au cantonnement, surveillé par eux baïonnette au canon. Croyez-vous que P… ait cherché un mode de conciliation et se soit arrêté là ? Non ! Immédiatement, réunissant quelques officiers, il appelle cela une cour martiale, pérore un instant, sort l’article X du code militaire et, juge unique et inique, s’appuyant sur sa seule autorité branlante, il condamne gracieusement S… à mort…
Voilà un bel exemple de justice militaire qui nous a singulièrement refroidis. Qu’a fait cet homme ? Ivre, donc en partie irresponsable, il a frappé ses camarades et heurté le commandant. Il méritait une sévère punition, mais n’ayant tué personne, il est difficile de trouver la raison de ce châtiment. C’est un monstre, ce P… A-t-il des entrailles ? Un cœur ? Est-ce une femme qui l’a mis au monde ? Il est permis d’en douter. Quant à S…, il n’y avait qu’à le laisser fermenter dans son vin et, une fois calmé, le morigéner d’importance et au besoin le punir de 15 jours de sentinelle au prochain poste d’écoute, et tout était dit. Mais quant à aller supprimer d’autorité la vie d’un homme, par surcroît père de famille, il faut, pour adopter une telle conclusion sans être rongé par le remords, être fou ou être issu de l’accouplement de deux perfides animaux.
Et S… a un frère dans le bataillon qui reste désemparé sans chercher par tous les moyens à sauver sa tête, mais il est donc en bois ?
Il est bon de faire observer qu’aucune enquête n’a été faite, et l’on ignore si S… n a pas été excité par les brimades de ses camarades. Rien. Cour martiale. Et c’est tout. Et de plus, ce n’est pas à proprement parler une faute qui dérive d’un acte de guerre. Qu’est-ce que Mars vient foutre là-dedans ?
Comme me disait il y a un instant, un sapeur du bataillon, qui dans le civil est substitut d’un procureur de la république, « celui qui mérite le poteau c’est l’affreux juge qui à prononcé la sentence, » nous disons P… ; pouah ! qu’il est dégoûtant ce type là. C’est à vomir…

16 Mars
Ce matin à la pointe du jour, le peloton d’exécution a fait passer le malheureux S… de vie à trépas, et l’on n’a pas oublié l’odieux coup de grâce dans la tête de cet infortuné. Ceci se passait dans le cimetière d’Anould et certains m’ont dit que le criminel P… se frottait les mains de joie. Triple bête qui a la conscience plombée.
Je n’ai pas eu le courage d’assister à cette tragique mise en scène. Ce qui m’étonne, c’est qu’il n’ait pas fait défiler le bataillon devant le corps encore chaud.
[…]
Ce matin à sept heures, le bataillon partait d’Anould et les quelques civils qui peuplent le village se demandaient quel crime avait bien pu perpétrer le chasseur qui repose dans leur terre.
Il est quatre heures, nous venons d’embarquer en gare de Laveline et nous attendons le départ et des jours meilleurs en priant le Dieu des armées de communiquer une parcelle de son immense miséricorde à ceux qui sont chargés de rendre la justice. Surtout pour des faits que des hommes sensés appellent des pécadilles.
P… ! Tu vas te faire repérer ! »

Bonjour à tous, à Eric et Thio.
Merci de ce témoignage qui rejoint ceux que j'avais évoqués, il ya qqs mois, (24-12-2007),ceux là n'avaient blessé personne, l'un ivre n'avait que le dèfaut de ne pouvoir assurer son role d'agent de liaison et l'autre avait fait du tapage:
Bonjour le forum,
J'espère que cet article sera lu par le Gal Bach, et par Denis Rolland.
Je viens de découvrir 2 témoigages concernant des èxécutions pour ivresse ou ivrognerie répétée. Je ne pouvais imaginer qu'un soldat puisse être fusillé pour une cuite quand par ailleurs on le dopait à la gnole pour sortir des tranchées.
1er cas rapporté par le M.d. l. Sartel du 17 ième Dragons, en Artois en octobre 1914 : Un caporal du 4 ième chasseurs qui sert d'agent de liaison avec le 146 ième RI se saoule aprés avoir visité une cave , en attendant des ordres du commandant Pompey du 146 °. Celui ci le fait fusiller dans la matinée du lendemain.
2ième cas rapporté par Emile Vallat de Cavillargues ( Gard ) du 52 ième RI de Montélimar. Cela se passe à Méhéricourt prés de Rosiéres la veille du 2 juillet 1915 :un soldat de la 12 ième compagnie qui s'ennivrait ré gulièrement à l'arrière et qui par suite faisait du tapage était mis en prison jusqu'au départ aux tranchées. Ce phénomène étant répétitif, "ce mauvais soldat" aprés jugement fut fusillé sur le front des troupes et mourut courageusement. Ne faut il pas voir dans cette ivresse répétée et cette mort courageuse une sorte de suicide indirect dans le genre de celui qui se présentait de nuit devant sa sentinelle sans lui donner le mot de passe.
Cordialement. Francis.

Bonjour à tous, à Eric et Thio.
.../...
Bonjour le forum,
J'espère que cet article sera lu par le Gal Bach, et par Denis Rolland.
Je viens de découvrir 2 témoigages concernant des èxécutions pour ivresse ou ivrognerie répétée. Je ne pouvais imaginer qu'un soldat puisse être fusillé pour une cuite quand par ailleurs on le dopait à la gnole pour sortir des tranchées.
.../... Ne faut il pas voir dans cette ivresse répétée et cette mort courageuse une sorte de suicide indirect dans le genre de celui qui se présentait de nuit devant sa sentinelle sans lui donner le mot de passe.
Cordialement. Francis.

Bonjour à tous,
Bonjour Francis,

Voilà un lien wikipedia qui va vous donner encore plus de grain à moudre pour votre imagination :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Soldat_fus ... %27exemple
Le Général Bach y est cité comme source...

Quant à l'usage de l'alcool je cherche une étude sérieuse sur son utilisation pendant la Première Guerre Mondiale. En effet, si de très nombreux témoignages font état de distribution de gnôle avant un assaut, j'ai du mal à croire que les centaines de milliers de poilus qui ont tenu à Verdun, les centaines de milliers qui ont attaqués plusieurs jours de suite dans des conditions effroyables dans la Somme, au Chemin des Dames et combien d'autres ..... étaient "dopés à la gnôle" par le commandement.

Cordialement
sesouvenir

Bonsoir à tous

Retour d'une journée de travail (et de reprise) et...la messagerie bien pleine. Que d'infos intéressantes ! Merci à tous, merci Eric pour cette retranscription fidèle et édifiante.
Il me reste à recoler les morceaux : passage à la mairie de naissance, recherche à la mairie d'accueil puis à la mairie de transcription du décès et enfin un tour aux AD pour suivre le parcours de ce chasseur malheureux.
Certes je n'aurai pas le temps de tout faire dans les jours prochains, mais ça sera fait.
Il me manque quand même une pièce du puzzle : le JMO du 11èBCA ou un historique un peu plus détaillé que ce que j'ai trouvé notamment pour la période de janvier à mars 1916.
Alors là si quelqu'un veut bien m'aider, j'apprécierai grandement.

Encore merci à tous

J'ajoute la coupure de presse qui m'a mis sur la voie. Elle émane du secrétaire de mairie de la commune de Villars (42). A noter les mentions "morts au champ d'honneur" et "tué à l'ennemi". Pourtant en mai 1916 (date de la parution dans le journal), je pense que la mairie était bien consciente de la situation et donc plus large d'esprit.
Ce pauvre chasseur méritait un autre sort. Je n'ai bien sur pas retrouvé trace à ce jour de son nom sur un monument aux morts. Je vais quand même vérifier le livre d'or de Saint-Etienne.

Très cordialement
Pierre

Bonjour Sesouvenir,

Je vous engage à lire les 459 lettres du sergent Marquand que j'ai retranscrites et qui sortiront, bientôt j'espère, sous la forme d'un livre. Dans plusieurs de ses lettres il demande de l'eau de vie de prune ou de marc, à ses parents, car dit-il, celle qu'on leur donne est du pétrole. Par ailleurs, quand les poilus sont privés de vin. c'est une vraie souffrance, qu'ils expriment à leur parents dans leur lettres. Il n'y avait pas à l'époque de tabou contre l'alcool, comme aujourd'hui. Le sergent Marquand à une culture élevée. il n'a que 21 ans à cette époque .... il aime boire... et il en a l'occasion, au front et à l'arriére, sa correspondance est truffée de considérations sur le vin, sonprix sa qualité, etc.
Crdt. Francis.