Bonjour Régis,
Il n’existe pas d’études pertinentes post-conflit des victimes et des séquelles des armes chimiques. Pour simplifier un peu : des travaux ont été constitués par les autorités, principalement pour connaître les « candidats » aux pensions d’invalidité après-guerre, dont les victimes des armes chimiques et de maladies pulmonaires.
Après le conflit, le nombre de prétendants potentiels fut énorme, mais très vite ramené à un chiffre « raisonnable » au regard du montant de la somme à verser au titre de ces invalidités. Je m’explique : pour l’administration, les conditions de reconnaissance d’invalide de guerre pour séquelles aux armes chimiques furent durcies de façon à bien maîtriser le nombre total de victimes à comptabiliser. Même situation pour les victimes outre-manche, au Royaume-Uni. Leur nombre est très faible et ne reflète aucune réalité des pertes exactes.
En un mot, aucune administration ne reconnue alors les séquelles au long court de l’exposition aux armes chimiques.
Il n’existe pas, à ma connaissance, d’études permettant d’appréhender cette question ; qui reste encore délicate aujourd’hui. On ne connaît pas les effets à long terme d’une exposition à l’Ypérite, même si on dispose de plus d’informations de nos jours. Idem pour les effets de suffocants comme le chlore, le phosgène et toute la série des faux lacrymogènes/irritants qui sont de terribles suffocants (bromacétone, chloracétone, etc…). Mais ils sont indéniables et je ne compte pas les témoignages d’anciens combattants, victimes d’exposition à l’arme chimique, décédés après le conflit de possible séquelles pulmonaires ou cardiaques.
Ces questions ont toujours une incidence aujourd’hui. L’arme chimique fut utilisée dans la guerre du RIF entre 1922 et 1925 par l’armée espagnole et l’armée française (désolée pour cette digression… voici encore une réalité historique falsifiée et détournée des archives militaires françaises. Mais la France est nettement impliquée dans cette utilisation de l’arme chimique en 1925, quand elle expédiait des munitions chimiques de l’ERG de la Ferté-Hauterive vers Casablanca. Ces documents ont en partie disparu des archives, mais pas tous…
http://www.guerredesgaz.fr/these/chap13/chap13.htm ). Le taux de cancers dans les régions victimes au RIF est nettement plus important qu’ailleurs :
http://news.bbc.co.uk/2/hi/africa/1770571.stm), sans lien de causalité établi clairement).
Les pertes relatives à l’arme chimique dans le conflit de 1914-1918 est un sujet à controverses. Tantôt surestimé, tantôt sous-estimées, manipulées… bref, il faut surtout se garder d’en tirer des conclusions.
J’ai essayé de faire comprendre cela sur la page du site :
http://www.guerredesgaz.fr/Pertes/Pertes.htm
De la même façon, en utilisant et en manipulant les chiffres disponibles, on a tenté d’effrayer les populations civiles face à un péril aérochimique dans les années 1930, pour sous-estimer l’impact militaire de l’arme chimique dans le conflit de nos jours. Je ne peux qu’appeler à la méfiance devant ces deux attitudes. L’arme chimique, dans son utilisation « moderne », ne se développa réellement que dans les derniers mois de la Grande-Guerre. Et la compréhension de cette arme ne peut se borner au simple recueil de pertes.
Si on analyse les données du Corps expéditionnaire américain, certes moins bien préparé, 23,7% de ses pertes sont dues aux gaz en 1918 et les statistiques font ressortires une plus grande efficacités des munitions chimiques devant les conventionnelles, en nombre de victimes par type de munitions. (1 gazé pour 12 obus chimiques contre 1 blessé pour 16 conventionnels, jusque 1 gazé pour 3 obus chimiques contre 1 victime pour 30 obus conventionnels dans les combats en Meuse en octobre 1918, secteur de la 29e D.I. US, par exemple…).
Conclusion : ces chiffres et leur impact sont également manipulés, mais ici faute d’un recueil standardisé et performant à l’époque et faute d’étude moderne pertinente. Cela est différent de la démarche évoquée initialement dans ce post.