Bonsoir Chanteloube,
La remarque sur l'affaire des fiches est sévère car cette sinistre affaire a bel et bien créé un profond malaise dans l'armée.Il est d'usage depuis quelque temps de minimiser les conséquences de cette affaire, un livre récent cite des chiffres faibles de fiches et en déduit que les carrières des officiers en ont donc peu souffert, c'est totalement méconnaître les règles de l'avancement dans les Armées de cette époque.Certes la "fiche" d'un lieutenant ou d'un capitaine n'a eu que peu d'incidence sur le déroulement ultérieur des carrières, il en est tout autrement des officiers supérieurs et je vous invite à comparer la situation des officiers à "avancement rapide" et en état d'accéder à une carrière "brillante" avant, pendant et après l'affaire des fiches (travail long mais qui peut être fait avec un peu de méthode).Cet examen montre qu'il y a bien eu épuration d'une génération d'officiers pour des raisons politiques avec des conséquences importantes (pas démesurées mais importantes).
Cordialement,
Guy François.
Bonjour à tous,
je découvre cet aspect du sujet et je souhaite apporter mon "grain de sel"
Il est certain que le nombre des victimes du système des fiches, voulu ou subi par le général André, a vraisemblablement été faible pour les officiers subalternes mais a considérablement freiné la carrière des "mal-fichés" qui allaient accéder à un commandement.
De plus, ce système, en raison du contexte dans lequel il s'est produit a créé dans l'Armée un mauvais climat. N'oblions pas que cette affaire, si elle est directement impactée par l'affaire Dreyfus, est aussi concomitante des inventaires de la loi de 1905 et que l'une et l'autre de ces affaires ont entraîné un nombre non négligeable de démissions.
D'autres mesures on pu accroitre le malaise.
Ainsi certains accusent le général André d'avoir affaibli le niveau intellectuel des officiers ainsi, en réduisant en 1901 d'un quart l'effectif des promotions de Saint-Cyr (de 400 à 300) en augmentant à due proportion l'effectif des promotions des écoles d'armes (Saint-Maixent, Saumur ... de 200 à 290) qui permettent aux sous-officiers de devenir officier, et surtout en permettant aux adjudants d'accéder directement à 1/10e des emplois de sous-lieutenant, sans passage par une école et sans stage.
S'agissait-il d'une mesure politique dont le but aurait été de "démocratiser" le corps des officiers ? la mesure prise par ce ministre en 1905 de suppimer l'obligation d'une dot pour les futures épouses d'officiers paraît aller dans le même sens; s'agit il d'une mesure purement technique justifiée par le moindre attrait de la carrière militaire pour l'élite intellectuelle au tournant du siècle ? Peut-être un peu des deux.
En ce qui concerne les officiers généraux, les mesures d'éviction prises par J.Joffre au début de la guerre montrent un fait qui était vrai avant, pendant, après et encore de nos jours, à savoir que les qualités que l'on demande à un officier pour progresser en temps de paix ne sont pas forcément celles dont il aura besoin en temps de guerre; à savoir dans le premier temps conformisme aux idées à la mode, en rester à des discours convenus, appartenance à une chapelle d'admiration réciproque et ... j'en passe, alors que dans le second temps il a besoin de faire preuve de courage physique et intellectuel, d'autonomie et parfois d'indiscipline.
Bien sûr des individus d'exception peuvent faire les deux ou mieux encore être eux-mêmes du début à la fin, ils n'en prennent pas moins de gros risques. En un mot sans vouloir vexer personne disons que nous avons là l'opposition classique entre le militaire et le soldat qui est de tous temps !
Bien cordialement
Pierre