Bonjour,
Voici un article qui me paraît intéressant. Il provient de
La Grande Encyclopédie, et date de 1902, mais on peut supposer que les choses n'avaient pas trop changé en 1914 (à part pour le "biscuit" devenu "pain de guerre" et dont on a déjà parlé).
Voici donc enfin des précisions sur la fabrication du pain de munition !
Le pain ordinaire (civil) est décrit au début de l'entrée
Boulangerie.
<< II. Art militaire. Ministère de la Guerre.
Les farines employées à la fabrication du pain de troupe
ou de munition proviennent des blés achetés par les fonc-
tionnaires de l'intendance militaire. Les officiers comp-
tables de la Guerre sont chargés de faire transformer ces
blés en farines, soit dans les moulins de l'Etat, ou dans
ceux des usines particulières. Les farines de munition
contiennent l'intégralité des fleurs et celle des gruaux
repassés sous la meule; elles sont blutées, savoir celles
du blé tendre exotique ou indigène à 18 ou 20 % ; celles
du blé dur d'Algérie et d'autres provenances, à 12 %.
En France, les deux essences sont mélangées dans la
fabrication du pain, soit par moitié, soit à raison de 2/3
de farine tendre et de 1/3 de farine dure. En Algérie,
la farine de blé dur est employée seule. La fabrication du
pain est effectuée dans les manutentions militaires au
nombre de 116, dont 86 en France et 30 en Algérie; elles
sont dirigées par les officiers d'administration des subsis-
tances militaires. Le pétrissage s'opère à bras d'homme
par les ouvriers d'administration ; la fermentation panine
est obtenue à l'aide du levain de pâte. Les fours sont du
système Lespinasse et d'une contenance de 225 kilogr.
de pain, soit 150 pains à 1k500 l'un ; ils sont chauffés
au bois, sauf dans les bassins houillers, où le charbon de
terre est préféré comme plus économique. Le pain de
munition pesant 1k500 représente deux rations journalières
de 750 gr. l'une ; sa forme est ronde, son diamètre est
environ de 270 millim. et sa hauteur de 97 millim.; l'en-
fournement a lieu à quatre baisures. La blancheur du
pain, sa nuance et sa saveur sont intermédiaires entre
celles du pain de première et de deuxième qualité des
boulangeries civiles. Le pain de munition en France est
donc bon ; à l'étranger il est fabriqué avec de la farine de
seigle seule, ou mélangée avec de la farine brute de fro-
ment. Le rendement par quintal métrique de farine est
au minimum de 139k500 pour l'essence tendre et de
150 kilogr. pour l'essence dure. - Indépendamment du
pain de munition, les manutentions militaires fabri-
quent du
biscuit de troupe pour les réserves de guerre;
ce biscuit est semblable à celui de la marine militaire.
Dans les grandes manutentions de l'Etat, à Paris notam-
ment, il est fabriqué à la mécanique ; dans les petits
établissements, il est confectionné à bras d'homme et au
moyen de la table du vermicelier. Les matières employées
sont les mêmes que pour le pain. Les galettes sont planes,
percées de 36 trous, elles ont 13 centim. de côté et de
23 à 25 millim. d'épaisseur. La mastication en est facile;
ce biscuit se conserve pendant une année environ. Le
rendement par quintal métrique de farine est de 93 à
96 kilogr. de biscuit. On a cherché depuis une vingtaine
d'années à incorporer, dans le pain de munition, certaines
matières alimentaires, telles que haricots, lard, viande,
bouillon gras concentré, etc., ces essais se poursuivent
encore; ces pains sont très avantageux pour les armées en
campagne (V. BISCUIT).- Parmi les établissements les
plus remarquables de l'administration de la Guerre il faut
citer la manutention militaire du quai de Billy, à Paris,
laquelle reçoit annuellement, et en temps de paix,
150,000 quintaux métriques de blé et produit, pendant la
même période 110,000 quintaux métriques de farine,
6,900,000 rations de pain et 28,000 quintaux métriques
de biscuit. Ses greniers métalliques du système Huart,
assurent à peu de frais, par l'aération et le pelletage auto-
matique, la bonne conservation du grain. La part de l'ad-
ministration de la Guerre sous le rapport de la production
et de la consommation est assurément très large. On peut
évaluer approximativement la consommation pour une
année aux chiffres ci-après : blés achetés au commerce
7 à 800,000 quintaux métriques ; bois acheté au commerce
150,000 quintaux métriques; charbon de terre acheté au
commerce 15 à 20,000 quintaux métriques; sel acheté au
commerce 3 à 4,000 quintaux métriques; fleurage, 3 à
4,000 quintaux métriques. La production est de 5 à
600,000 quintaux métriques de farine; 130,000 à
140,000 quintaux métrique, de son; 82,500,000 kilogr.
de pain; 40,000 quintaux métriques de biscuit; 25,000
quintaux métriques de braise. Pour les années de
cherté, le prix du kilogr. de pain s'est élevé à 30 cent.;
pendant les années moyennes il s'élève à peu près à
26 cent. La valeur du pain distribué annuellement par les
manutentions de l'Etat est donc de 21 à 26 millions de
francs.
Boulangerie de campagne. Lorsque les armées sont
en campagne on se sert, pour la cuisson des pains, de
fours particuliers que l'un nomme pour cette raison
fours
de campagne. L'invention des tours portatifs pour l'armée
paraît due à Faguet, trésorier de France à Châlons, en 1761.
Son four était composé de deux grandes caisses de tôle, pla-
cées l'une dans l'autre, et laissant entre elles un ou deux
pouces d'intervalle; ces caisses étaient soutenues par des
barreaux de fer assujettis par des vis, de manière que le
tout pût se démonter. La caisse extérieure était de tôle plus
forte que la caisse intérieure, qui faisait l'office de four et
qui était partagée en trois étages pouvant chacun recevoir
192 rations de pain, ce qui faisait 876 rations dans les
trois étages. Ce tour recevait la chaleur du feu que l'on
allumait entre les deux caisses, et dont la flamme, péné-
trant dans l'intervalle qu'elles laissaient entre elles, com-
muniquait à toutes ses parties une chaleur assez égale,
surtout si on avait le soin de défendre le four de l'action
directe du feu par une caisse en tôle remplie d'une couche
de sable de quelques pouces d'épaisseur. Le four, comme
on le voit, était une espèce de four aérotherme, et c'était
encore de fours analogues, mais construits sur des don-
nées scientifiques plus précises, que l'on se servait jusque
dans ces derniers temps. >>
La suite sur Gallica :
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k2 ... pagination
Cordialement.
Yves