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Bonjour à toutes et tous
Blanche Maupas
(épisode 3) d'octobre 1919 au 11 novembre 1920
Année 1919
* 24 octobre : vote d’une loi d’amnistie qui interdit toute poursuite contre le commandement militaire. Toute demande de réexamen d’une condamnation prononcée par le Conseil de Guerre
doit présenter un fait nouveau. (source: archives de la Manche)
Année 1920
* 31 Janvier : Blanche Maupas et la Ligue des Droits des Hommes déposent, auprès du Garde des Sceaux, une demande officielle de révision du jugement du Conseil de Guerre. Le dossier est conséquent, il rassemble de nombreuses lettres de témoins qui connaissent les circonstances de la condamnation. On croit en la révision possible du procès mais, les mois passent sans qu’aucune réponse ne soit apportée.
Il semblerait bien qu’en haut lieu on compte sur un lâcher-prise par épuisement.
* Mai : la LDH réagit et demande que le dossier des fusillés de Souain soit mis à sa disposition.
* Juin : la Chancellerie répond enfin : elle transmet la demande au Ministre de la Guerre, seul habilité à autoriser une telle communication.
*Juillet : par deux fois, la LDH récidive dans sa requête. C’est une véritable guerre d’usure qui a commencé
* 11 Août : après huit mois d’attente, Blanche et ceux qui la soutiennent obtiennent enfin une réponse. Le directeur des affaires criminelles et des grâces,
a rejeté la demande en révision.
* Décembre 1920 : Léon Quesnel, curé et brancardier dans la 60e D.I. (celle de Maupas) transmet pourtant à la LDH, un témoignage détaillé sur la tenue du Conseil de guerre de Suippes.
Il n’y a plus d’issue juridique.
Pour poursuivre il est, plus que jamais, nécessaire de s’en remettre la puissance de l’opinion publique. On organise de larges campagnes de presse afin de maintenir la population en éveil. Pour que la mort de Théophile Maupas ne soit pas oubliée, il faut que sa Veuve saisisse toutes les occasions où elle peut se faire voir et entendre par des foules.
Lors des prises de décisions de construction de Monuments aux Morts, partout où elle estime que le nom de son mari doit figurer, elle s’invite. Elle harcèle les décideurs à tel point qu’un jour, excédé, son Inspecteur d’Académie lui écrira : «Non, je n’ai pas qualité pour trancher la question. Prière d’en prendre bonne note une fois pour toutes ».
Pourquoi Blanche concentre- t- elle son énergie sur les MAM ?
Pour l’honneur de Théophile, sans aucun doute, mais aussi parce qu’elle sait parfaitement que, précisément là, elle peut atteindre un large public. Des milliers de familles n’ont pas pu procéder au rituel essentiel qu’est la cérémonie d’enterrement. D’ailleurs, les décisions de construction de monuments aux morts se multiplient, tant dans les petites communes que dans les grandes villes.
Certaine d’être entendue par le plus grand nombre, Blanche va se servir de ces occasions qui, de surcroit, sont chargées d'un intense impact émotionnel.
Officiellement Théophile ne fait pas partie des Morts pour la France. Que Blanche obtienne ou non gain de cause, le but est atteint : on aura parlé de Théophile. Parmi les croisades à destination des MAM, la plus ardue sera celle de Saint Lô.
Pourquoi Saint Lô ?
C’est là que se situe l’école normale d’instituteurs qui a formé Théophile.
(source photo: un site de vente bien connu)
- 1] Tout d’abord, il faut prendre en compte l’état d’esprit qui anime les instituteurs. Depuis bien longtemps ils ont tissé des liens entre eux et se sont constitués en Amicales reliées entre elles par des Fédérations. Ils ont de l'expérience quant aux débats, à l’organisation de congrès, aux diffusions de journaux et, ils sont nombreux à posséder un sérieux savoir-faire. Théophile est l’un des leurs, Blanche est institutrice, elle dispose ainsi d’une solide structure préexistante.
(
https://www.cairn.info/revue-le-telemaq ... age-67.htm.)
C’est d’ailleurs un instituteur qui, depuis le front, avait écrit à Blanche cette lettre dans laquelle figurait le nom de trois autres instituteurs.Tous avaient déjà à l’esprit l’idée que leurs témoignages pourraient être précieux. 5 jours après l’exécution de Théophile, le processus était déjà enclenché.
- 2] Quel est le lien avec un MAM à Saint Lô ?
Année 1919
* Janvier: le Ministre de l’Instruction Publique a adressé à chaque Ecole Normale une médaille de bronze avec le nom des élèves tombés au Champ d’Honneur. La remise des médailles donne lieu à des cérémonies.
* Juin: Celle de Saint Lô est présidée par le Préfet. Il n’est pas nécessaire de chercher un local, la salle des fêtes du Collège est parfaite, elle accueille plus de 700 personnes. Sur la médaille de l’Ecole Normale de Saint Lô, le nom de Maupas ne figure pas.
Les Amicales des Instituteurs ne vont pas s’en tenir à une médaille, l’idée d’un MAM est déjà dans leur esprit.
Année 1920
* Juin: sous l’autorité de personnalités comme le Préfet, le Recteur d’Académie, le principe de la construction d’un monument dédié aux élèves tués pendant la guerre est arrêté. Il sera érigé dans la Cour d’Honneur de l’Ecole Normale. L'inscription ou non inscription de Maupas sur la liste va durablement embarrasser l’administration.
La campagne de propagande a porté ses fruits, au-delà de la Manche et au-delà du cercle des instituteurs :
* 11 novembre : un ancien combattant de Reims, qui ne connait pas les Maupas, arbore devant sa maison un drapeau portant l’inscription : « 11 novembre 1918 Honneur au caporal Maupas et à ses compagnons martyrs Souain, Vingré, Flirey Souvenons-nous ».
Nous pouvons noter que, si les autres fusillés ne sont pas oubliés, seul le nom de Maupas apparaît. Cela signifie (ce n’est pas rien) que d'anciens combattants sont sensibles au combat de la Veuve Maupas.
Blanche pourra compter sur le soutien des Associations d’Anciens Combattants.
cordialement
Brigitte