Bonjour à tous,
BOUDEUSE
Rencontre avec un sous-marin le 16 Octobre 1918
(Voir aussi la fiche AMIRAL DUPERRE)
Rapport du capitaine, LV PETIT de MEURVILLE
Par suite d’avarie du SATURNE j’avais dû réduire la vitesse à 8 nœuds pour qu’il puisse tenir son poste. Mais il s’était fortement laissé culer dans la nuit. Je venais de mettre à 7 nœuds pour lui permettre de rejoindre. Il y aura d’ailleurs lieu de lui demander des explications que je n’ai pu avoir, à cause de la distance trop grande.
J’étais par tribord arrière du DUPERRE prêt à me porter d’un bord ou de l’autre. Le sillage de la torpille a été vu très nettement. Les conditions de visibilité étaient très favorables. L’origine était à environ 800 m du DUPERRE sur son bâbord. SATURNE, s’il avait été à son poste, eut été dans les meilleures conditions d’attaque, les miennes étant moins favorables.
Je venais de descendre de la passerelle depuis 5 minutes quand on me cria « Torpille par bâbord ». J’arrivai à temps sur le pont pour la voir passer à quelques mètres sur l’arrière du DUPERRE et de BOUDEUSE. Le maître de timonerie LE BRIS, qui était de quart, avait déjà fait la manœuvre nécessaire, barre à gauche toute et en avant toute sur l’origine du sillage. La torpille naviguait en surface. Elle paraissait avoir un cône en bronze. Les antennes étaient visibles et ce n’est que grâce à la présence d’esprit du maître Le Bris que nous devons de ne pas avoir été torpillés à l’arrière, c’est-à-dire à l’endroit le plus dangereux. Je demande une récompense pour cet officier marinier : LE BRIS Louis Marie, Le Conquet 12030.
Il s’est nécessairement écoulé un certain temps entre le moment où nous sommes partis et celui où nous sommes arrivés au point de départ de la torpille. N’ayant aucune indication sur le sens de la marche du sous-marin, j’ai lancé une première grenade dans l’hypothèse d’une marche dans le sens du convoi.
Des débris ont été vus dans l’explosion et après, mais qui n’ont pas flotté. Il est possible, mais douteux, qu’ils appartiennent au sous-marin.
La 2e grenade, mouillée dans l’hypothèse d’un lancement par l’arrière, n’a amené aucun débris.
Dans le doute complet, me trouvant seule escorte du DUPERRE, je n’ai pu mettre mes écouteurs Perrin à l’eau, devant stopper pour cela. J’ai rejoint le DUPERRE parti en avant à vitesse maximum.
Allo réglementaire lancé et prévenu des chalutiers et un sloop anglais qui ont fait route sur Doro.
Voici le schéma de l’action.
Conclusions de la commission d’enquête
Elle reprend le déroulement des faits et conclut :
AMIRAL DUPERRE marchait à 8 nœuds et sa longueur est de 119 m. En supposant à la torpille une vitesse de 50 nœuds, elle aurait pu parfaitement passer derrière, même si le bateau n’avait pas manœuvré. On ne peut donc affirmer que la manœuvre a sauvé le bateau. Cependant, elle a été faite avec promptitude et il convient d’en féliciter le commandant.
Tout le monde s’est rendu aux postes d’évacuation dans le plus grand ordre.
Le sous-marin était posté dans les environs de Doro, parages tout indiqués pour un affut de ce genre. Le soleil étant encore très bas, il se l’était forcément mis dans le dos. A ce propos, la commission fait remarquer que BOUDEUSE, seul escorteur, aurait été mieux placé à bâbord d’AMIRAL DUPERRE, bord du soleil. Le sous-marin était à petite distance et semble avoir lancé un peu trop tard.
Le sous-marin attaquant
Très certainement l’UC 23 du Kptlt Hans Georg LÜBBE, seul sous-marin allemand dans les parages à cette époque. Le 5 Octobre, il avait coulé l’Anglais REVENTAZON dans le golfe de Salonique, vapeur de 4050 t qui allait de Salonique à Port Saïd.
Entre le 13 et le 15 Octobre, il avait coulé 12 petits voiliers grecs qui furent ses dernières victimes.
UC 23 fera sa reddition le 25 Novembre suivant à Sébastopol et sera remis à la France. Démoli en 1921 à Bizerte.
Cdlt