Bonsoir Yves,
Bonsoir à tous,
□ Le destroyer anglais Zulu sauta sur une mine le 8 novembre 1916 ― et non le 8 octobre 1916 ―, vers 14 h. 50 (Heure française), dans le Nord de la bouée de Gravelines. Son équipage fut recueilli par un torpilleur de Dunkerque que je n’ai pu identifier, faute d’indications suffisantes. Se trouvaient égale-ment sur les lieux deux chalutiers anglais et un « baleinier » français, de même non identifiés.
Le Zulu fut d’abord remorqué pendant une heure par le patrouilleur Nelly, alors commandé par l’enseigne de vaisseau Louis Marie Charles GUICHARD, puis, ensuite, par le torpilleur d’escadre Capi-taine-Mehl qui le conduisit en rade de Calais. Le Capitaine-Mehl était escorté par le torpilleur d’es-cadre Carquois et une vedette ― qui furent renvoyés à Dunkerque ―, deux destroyers anglais (D-55 et D-82) et plusieurs chalutiers français et anglais, bâtiments de même non identifiés. De la rade, il fut conduit au bassin par des remorqueurs du Front de mer de Calais.
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Le remorquage par le torpilleur d’escadre Capitaine-Mehl du destroyer anglais Zulu,
« désemparé par l’explosion d’une mine » (8 novembre 1916)
I. ― Rapport de mer du capitaine de frégate Vincent Victor GUY, commandant le torpilleur d’es-cadre Capitaine-Mehl.
[Registre historique de la correspondance intéressant le personnel et le matériel du bâtiment ― 13 déc. 1913 ~ 28 août 1919 ―, Note n° 4, p. 65 à 67, Service historique de la Défense, Cote SS Y 72, p. num. 1125 et 1128]
« № 4.
à Monsieur le Capitaine de vaisseau,
Chef de Division des Flottilles de la mer du Nord.
Remorquage du Zulu désemparé par l’explosion d’une mine.
Commandant,
J’ai l’honneur de vous rendre compte que le Mercredi 8 novembre, à 15 heures 15, je reçus le signal de T.S.F. : « S.O.S. Nord bouée de Gravelines ».
Le Capitaine-Mehl était appareillé de la rade de Malo depuis 15 heures 10 pour aller faire un exercice à Zuydcoote. Au reçu de ce signal, je fis route immédiatement en vitesse pour me porter au secours du bâtiment en détresse, en passant dans l’Est et le Nord des filets du Dyck, puis en mettant le cap sur le groupe de bâtiments qu’on apercevait dans la Nord de la bouée de Gravelines.
En arrivant à un mille dans le N. 10 W. de la bouée du Haut-fond de Gravelines, je stoppais près du groupe. Je trouvais le destroyer anglais Zulu, dont tout le personnel avait été complètement évacué, pris en remorque par le chalutier français Nelly et escorté par deux chalutiers anglais et un baleinier français. Le destroyer était coupé en deux sur l’arrière du kiosque du projecteur, l’arrière enfoncé, le tronçon arrière maintenu faiblement au tronçon avant ; ces deux parties jouant l’une par rapport à l’autre à chaque lame. Petite brise d’O.-S.-W., petite houle clapoteuse du vent.
Le commandant du Zulu, qui se trouvait sur le baleinier français, me fit la demande de faire conduire son bateau à Calais et de prévenir les autorités anglaises.
Voyant que le Nelly gouvernait mal avec sa remorque courte, je pris le Zulu à la remorque à 16 heures 20 et remis en marche à 5 nœuds à 16 h. 40 (vitesse réelle, 4 nœuds, avec le courant).
La direction du courant (S.-O. jusqu’à 19 h. 00), la crainte de voir couler le Zulu, le désir de le rame-ner entier, me décidèrent à le conduire à Calais pour abréger la durée de la traversée. Je fis demander par T.S.F. à Calais des remorqueurs pour mon arrivée en rade à 19 heures et la préparation du bassin.
Pour ces mêmes raisons, je continuais ma route sur Calais, quand, à 17 h 15, je reçus le signal de con-duire le Zulu à Dunkerque.
Escorté par le Carquois et une vedette (qui furent renvoyés à Dunkerque), deux destroyers anglais (D-55 et 82) et plusieurs chalutiers français et anglais, le remorquage se faisait bien quand, à 17 h. 50, à un mille 5 dans le N. 5 E. du feu de Walde, par 25 mètres de fond, l’arrière du Zulu s’enfonça puis disparut.
A ce moment, le commandant du Zulu, qui avait dû se transporter sur le 82, me fit signaler qu’il se rendait à bord ; une baleinière se détachait du 82, je stoppai.
Le Zulu continuait à bien flotter, et, allégé de son arrière, semblait plus droit.
Sur ma demande, le Commandant du Zulu m’informa que tout allait bien à bord, que l’arrière s’était détaché, mais que la partie avant paraissait saine.
Je continuai ma route sur Calais et, à 19 heures 10, je mouillai sur rade où les remorqueurs envoyés par le Front de mer prirent le Zulu et le rentrèrent à Calais sans incidents.
Les rapports du commandant du torpilleur de défense qui a recueilli l’équipage du Zulu et celui du com-mandant du Nelly, qui me paraît avoir très bien manœuvré, vous fixeront sur ce qui s’est passé avant mon arrivée.
Bord, Dunkerque, le 10 novembre 1916.
Signé : Vincent GUY. »
II. ― Torpilleur d’escadre Capitaine-Mehl ― alors commandé par le capitaine de frégate Vincent Victor GUY.
[Journal de navigation n° ... / 1916 - 17 oct. ~ 14 nov. 1916 – : Service historique de la Défense, Cote SS Y 72, p. num. 809 (extraits)]
« Mercredi 8 novembre 1916
Remorqué destroyer anglais "Zulu"
Quart de 12 h. 00 à 16 h. 00
15 h. 00 ― Poste d’appareillage.
15 h. 07 ― Appareillé.
15 h. 13 ― Reçu un signal de détresse (S.O.S.) du Nord du haut-fond de Gravelines.
Quart de 16 h. 00 à 19 h. 00
16 h. 20 ― Stoppé.
16 h. 21 ― Manœuvré pour prendre destroyer A. Zulu à la remorque.
[En marge : « G. : 0° 16' 30’’ W. ; L.= 51° 04' N. »]
16 h. 21 ― Pris en remorque le Zulu.
17 h. 50 ― L’arrière du destroyer Zulu sombre.
18 h. 08 ― Stoppé.
18 h. 10 ― Baleinière anglaise se rend sur Zulu.
18 h. 20 ― Remis en marche.
Quart de 19 h. 00 à 20 h. 00
19 h. 10 ― Poste de mouillage.
19 h. 17 ― Stoppé.
19 h. 17 ― Mouillé rade de Calais.
19 h. 40 ― Zulu largue la remorque ; remorqueurs le rentrent à Calais. »
III. ― Patrouilleur auxiliaire Nelly ― alors commandé par l’enseigne de vaisseau de 2e classe Louis Marie Charles GUICHARD.
[Journal de bord ― 3 mars / 7 mai 1916 ― : Service historique de la Défense, Cote SS Y 366, p. num. 518.]
« Mercredi 8 juillet [lire : novembre] 1916.
Quart de 12 h. 00 à 16 h. 00
Très beau temps. Brise d’W.-S.-W. Mer assez belle.
12 h. 40 ― Appareillé [de Dunkerque].
13 h. 10 ― Sorti des jetées. Route pour la bouée de Gravelines.
14 h. 45 ― Relevé la Mouette. (*)
14 h. 50 ― Entendu une explosion sur un destroyer anglais. Fait route dessus. Rappelé aux postes de combat. Attiré l’attention du torpilleur et autres chalutiers à l’aide du sifflet.
14 h. 55 ― Le destroyer anglais hisse le signal de détresse, cône pointe en l’air, boule.
15 h. 15 ― Pris la remorque du destroyer anglais. Route sur Calais.
16 h. 15 ― Fait passer la remorque du destroyer anglais au Capitaine-Mehl.
17 h. 15 ― Mouillé devant Gravelines.
20 h. 40 ― Appareillé. Surveillance des filets.
P.M. ― En prenant la remorque du destroyer anglais Zulu, on avarie la potence de la "mine Marseil-laise". La remorque ayant forcé à l’écubier tribord, la tôle est enfoncée légèrement et l’écubier cassé.
Le commandant,
Signé : Illisible ».
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(*) Cordier Mouette-III, de la 1re Escadrille de chalutiers de la Manche, alors commandé par le premier maître de timonerie Alphonse Pierre Marie LENGLEMET, inscrit au quartier de Saint-Malo, n° 2.404.