Les «chasseurs de trésor» dans le viseur
Le pillage de la dépouille d’un soldat de 14-18 dans le Pas-de-Calais par un prospecteur illustre le côté obscur de l’activité des « chasseurs de trésor » du dimanche.
D es gens qui font n’importe quoi, dans le milieu, ça existe. Mais franchement c’est une minorité. » William est ce qu’on appelle un prospecteur. Avec un petit groupe d’amis, le dimanche, il prend sa «poêle à frire», un détecteur de métaux en vente libre, et arpente les champs et les sous-bois en quête de «trésors», monnaies anciennes, objets divers du passé…
« C’est une passion qui me vient de mon père. Il a trouvé des jolies choses, ça m’a donné envie », raconte William qui assure: « C’est un loisir, comme la pêche. Et on fait ça proprement, on demande toujours l’autorisation au propriétaire du terrain. » Ce n’est pas forcément dans les clous de la loi (lire ci-dessous), William ne déclare pas ses « trouvailles », collectionne. Mais lui jure qu’il reste « propre ». Le pillage d’une dépouille de Poilu à Neuville-Saint-Vaast (Pas-de-Calais) a pourtant jeté l’opprobre sur ces «chasseurs de trésor» du dimanche. « C’est négatif, parce que c’est du bon sens. Si on trouve une dépouille, on arrête de creuser, on avertit la gendarmerie. C’est la loi. » Le pilleur de Neuville-Saint-Vaast qui a mis au jour la dépouille dans un champ et avait prélevé des objets n’avait pas eu ce scrupule. Contre l’auteur du pillage, la direction régionale des Affaires culturelles des Hauts-de-France va se constituer partie civile au pénal. Car les archéologues professionnels sont de plus en plus excédés par la multiplication des fouilles clandestines, alimentées par le centenaire de la Grande Guerre qui gonfle le marché. « Grosso modo, il y a deux grandes familles de prospecteurs », explique Gilles Prilaux, archéologue à l’Institut national de la recherche en archéologie préventive et spécialiste des fouilles de 14-18. « Il y a l’amateur de patrimoine local, qui essaie de comprendre, de manière parfois maladroite, parfois éclairée. Et puis il y a ceux qui font ça avec une visée financière, qui ne vont pas se contenter de faire du ramassage de surface après labour, mais vont creuser. » Le professionnel observe qu’une forte demande pour ces objets existe, outre-Manche notamment. Pire, « on a de plus en plus de gens qui prospectent sur des sanctuaires archéologiques, à la recherche d’objets de valeur, avec des équipes qui passent derrière nous, font des trous partout et pillent. Ça rend hargneux… », appuie Jean-Luc Collart, conservateur régional de l’archéologie. Les archéologues mettent en avant la préservation du patrimoine y compris celui, «récent», de 14-18, « une composante de la recherche archéologique, pour mieux comprendre le quotidien des soldats notamment », selon Jean-Luc Collart. « La multiplication des fouilles clandestines pose problème. Quand vous extrayez des objets en cassant tout autour, le site perd son sens. C’est une perte irrémédiable pour l’histoire. » Et comme le rappelle Jean-Luc Collart, « le pillage d’un Poilu de 14-18 dépasse le cadre scientifique. C’est une simple question de respect des morts… »
Que dit la loi?
L’association « Halte au pillage » estimait en 2009 à au moins 10 000 en France le nombre de prospecteurs « de loisir ». Ils entrent dans le champ de l’article L 542-1 du code du patrimoine : « Nul ne peut utiliser du matériel permettant la détection d’objets métalliques à l’effet de recherches de monuments et d’objets pouvant intéresser la préhistoire, l’histoire, l’art ou l’archéologie sans avoir au préalable obtenu une autorisation administrative. » Prospecter avec un détecteur est donc autorisé, à condition… de ne pas creuser pour trouver des objets archéologiques. Ambigu et peu contrôlable. L’utilisation non déclarée peut faire encourir 3 000 € d’amende. Le vol ou la dégradation de site, c’est jusqu’à sept ans de prison. Dans tous les cas, la découverte d’ossements est soumise à déclaration. Dans les faits, la pénalisation reste rare. Mais Jean-Luc Collart, conservateur régional, observe un serrage de vis judiciaire : « Les autorités se sont aperçues que le trafic d’objets archéologiques en dissimulait parfois d’autres, d’armes ou de drogue. »
http://www.courrier-picard.fr/16357/art ... -le-viseur
Y'a t-il une présence officielle pendant le débardage afin que ces ossements ne retombent pas dans l'oubli ? Les engins doivent tout écraser j'imagine.
Je ne sais pas mais j'aimerai bien le savoir...
bien a vous