Re: Pourquoi Verdun? Pourquoi Pétain
Publié : lun. oct. 31, 2016 1:04 pm
Bonjour,
J'ai eu l'occasion de me pencher sur la bataille de Verdun dans Nivelle l'inconnu du Chemin des Dames. Je vous résume ici mes réflexions sur ce sujet.
On peut discuter à l'infini du mérite des uns ou des autres dans la bataille de Verdun. Préalablement, on pourrait aussi se poser la question, comme Jacques Becker l'a fait en 1985, « Fallait-il mourir pour Verdun.
En fait, on le voit dans ce débat on a du mal à parler de Nivelle. Pourtant la presse internationale de la fin de l'année 1916 est édifiante et il a sa rue à Verdun. On a aussi, pour d'autres raisons, des réticences à évoquer Castelnau, « le capussin botté ». Quant à Mangin, autre acteur important de la bataille, il est totalement ignoré.
Une chose est certaine, Pétain est mis à l'écart à la fin avril. C'est même lui qui le dit dans un entretien rapporté par Poincaré dans ses mémoires : « Voyez en moi un général qui vient d’être relevé de son commandement [dit Pétain]. » sur quoi, le général Nivelle intervenant : « Oh ! relevé mon général, pas précisément puisque vous prenez un commandement supérieur.
Oui, oui ; en attendant, on me signifie qu’on n’a plus besoin de moi »
Pour autant, Pétain continuera à intervenir en essayant d'infléchir les ordres du G.Q.G, adressé directement à Nivelle, sous couvert de Pétain pour respecter la forme. C'est ce que dit Barescut (chef d'EM 2e armée) dans ses mémoires non publiées :
« 30 octobre 1916 : Pétain est ulcéré d'avoir dû céder au général Nivelle le commandement direct sur le front de Verdun et ne manque aucune occasion d'intervenir pour faire valoir ou imposer ses vues stratégiques. Ces derniers jours, Joffre lui a dit de son gros rire bourru : « vous aurez beau faire, il en sera ainsi , vous serez le battu, Nivelle le vainqueur de Verdun ! » »
Aujourd'hui si Pétain est perçu comme le vainqueur de Verdun, cela tient aux événements de 1917 puis au pacifisme des années vingt et surtout aux années quarante.
Le mythe s'est forgé autour de son livre la Bataille de Verdun, régulièrement édité depuis 1929 jusqu’en 1986 et même une nouvelle fois en 2015. Cet ouvrage est en quelque sorte le texte fondateur de la légende de Pétain « vainqueur de Verdun ». L’ouvrage est un véritable plaidoyer pro domo donnant au maréchal un rôle déterminant pendant toute l’année 1916. Les deux tiers du récit des événements sont consacrés à la bataille avant le 1er mai, date de nomination de Nivelle au commandement de la IIe armée. Les rôles de Joffre, du G.Q.G. et de Nivelle y sont totalement occultés au profit d’un Pétain donnant directement ses ordres à Mangin. Le livre se termine par un chapitre intitulé « le soldat de Verdun » qui est, en fait, la transcription du discours de Pétain prononcé lors de l’inauguration de l’ossuaire de Douaumont, le 19 septembre 1927."
Personnellement, je crois que la victoire de Verdun est due tout autant à l’action de Castelnau qui a évité le désastre en prenant les mesures d'urgence, qu’à la complémentarité de caractère et de compétence des trois généraux. L’impétueux Mangin s’appuyait sur le sens de l’organisation de Nivelle, qui se trouvait tempéré par le pessimisme de Pétain.
Cordialement
Denis Rolland
J'ai eu l'occasion de me pencher sur la bataille de Verdun dans Nivelle l'inconnu du Chemin des Dames. Je vous résume ici mes réflexions sur ce sujet.
On peut discuter à l'infini du mérite des uns ou des autres dans la bataille de Verdun. Préalablement, on pourrait aussi se poser la question, comme Jacques Becker l'a fait en 1985, « Fallait-il mourir pour Verdun.
En fait, on le voit dans ce débat on a du mal à parler de Nivelle. Pourtant la presse internationale de la fin de l'année 1916 est édifiante et il a sa rue à Verdun. On a aussi, pour d'autres raisons, des réticences à évoquer Castelnau, « le capussin botté ». Quant à Mangin, autre acteur important de la bataille, il est totalement ignoré.
Une chose est certaine, Pétain est mis à l'écart à la fin avril. C'est même lui qui le dit dans un entretien rapporté par Poincaré dans ses mémoires : « Voyez en moi un général qui vient d’être relevé de son commandement [dit Pétain]. » sur quoi, le général Nivelle intervenant : « Oh ! relevé mon général, pas précisément puisque vous prenez un commandement supérieur.
Oui, oui ; en attendant, on me signifie qu’on n’a plus besoin de moi »
Pour autant, Pétain continuera à intervenir en essayant d'infléchir les ordres du G.Q.G, adressé directement à Nivelle, sous couvert de Pétain pour respecter la forme. C'est ce que dit Barescut (chef d'EM 2e armée) dans ses mémoires non publiées :
« 30 octobre 1916 : Pétain est ulcéré d'avoir dû céder au général Nivelle le commandement direct sur le front de Verdun et ne manque aucune occasion d'intervenir pour faire valoir ou imposer ses vues stratégiques. Ces derniers jours, Joffre lui a dit de son gros rire bourru : « vous aurez beau faire, il en sera ainsi , vous serez le battu, Nivelle le vainqueur de Verdun ! » »
Aujourd'hui si Pétain est perçu comme le vainqueur de Verdun, cela tient aux événements de 1917 puis au pacifisme des années vingt et surtout aux années quarante.
Le mythe s'est forgé autour de son livre la Bataille de Verdun, régulièrement édité depuis 1929 jusqu’en 1986 et même une nouvelle fois en 2015. Cet ouvrage est en quelque sorte le texte fondateur de la légende de Pétain « vainqueur de Verdun ». L’ouvrage est un véritable plaidoyer pro domo donnant au maréchal un rôle déterminant pendant toute l’année 1916. Les deux tiers du récit des événements sont consacrés à la bataille avant le 1er mai, date de nomination de Nivelle au commandement de la IIe armée. Les rôles de Joffre, du G.Q.G. et de Nivelle y sont totalement occultés au profit d’un Pétain donnant directement ses ordres à Mangin. Le livre se termine par un chapitre intitulé « le soldat de Verdun » qui est, en fait, la transcription du discours de Pétain prononcé lors de l’inauguration de l’ossuaire de Douaumont, le 19 septembre 1927."
Personnellement, je crois que la victoire de Verdun est due tout autant à l’action de Castelnau qui a évité le désastre en prenant les mesures d'urgence, qu’à la complémentarité de caractère et de compétence des trois généraux. L’impétueux Mangin s’appuyait sur le sens de l’organisation de Nivelle, qui se trouvait tempéré par le pessimisme de Pétain.
Cordialement
Denis Rolland