Re: La goutte.
Publié : mar. avr. 18, 2006 2:27 pm
Bonjour
Extrait d'un site (je mets les reférences aprés)
"— En avant, les marsouins! clame le commandant, nu-tête, superbe, échevelé, à dix mètres devant nous.
Sous l'ouragan de fer, les dents serrées, la poitrine bondissante, nous nous jetons à sa suite. Les rangs s'éclaircissent; les hommes s'affalent comme s'ils trébuchaient sur quelque racine, mais nulle plainte ne s'élève. Les blessés se terrent sans bouger. Je ne reconnais plus que deux ou trois visages autour de moi; mon tirailleur est toujours là. Il a mis son fusil en bandoulière, et la main droite serre fortement la cisaille. Le dernier saut nous a portés presque à la clairière; cinquante mètres à peine nous séparent des tranchées ennemies, d'où part un ouragan de feu.
Comment nous contenir? Les secondes nous semblent des heures; nous sommes exaspérés, affolés du désir de tirer, de foncer en avant, de frapper, d'en finir; sans nous en rendre compte, nous tirons avec fureur.
Soudain nous tressaillons des pieds à la tête: sur un couac magnifique, qui amène quand même un sourire à nos lèvres, un clairon sonne la charge; un cri formidable: « En avant! A la baïonnette! » répété par mille poitrines et, comme des fous, tandis que les notes métalliques nous fouaillent le cœur, nous nous ruons irrésistiblement.
..... Il y a la goutte à boire là-haut! …..Il y a la goutte à boire…..
Hurlants comme des démons, aucun obstacle ne nous arrête Qui tombe? On n'en sait rien!
..... Il y a la goutte à boire là-haut!
Arbres couchés, enchevêtrés; trous invisibles où nous perdons l'équilibre, fils de fer où nous nous empêtrons, plus rien ne brise notre élan.
..... Il y a la goutte à boire!......
D'un coup d'œil, de ce coup d'ceil que seuls quinze ans de football peuvent donner à un homme, j'embrasse le champ de bataille: cent mètres à peu près de tranchées, continuées plus loin par d'autres, deux mitrailleuses à chaque bout, qui balayent le terrain d'une dernière rafale, et trente Boches à peu près — tout ce que deux officiers ont pu maintenir revolver au poing — debout devant les tranchées, et qui tirent en jurant. Le reste fuit devant noa baïonnettes, entraînant les réserves dans leur panique.
— Aux mitrailleuses! aux mitrailleuses!
Vingt hommes se précipitent; un caporal arrive le premier et foudroie sur sa pièce le sous-officier mitrailleur; les autres « moulins à café » se taisent aussi, pris sans doute. Mais le clairon ne se tait pas, lui:
….. Il y a la goutte à boire là-haut!…..
Récit de Charles Tardieu - dans le Figaro - 17 décembre 1914
(non localisé avec des marsouins ....)
A bientot
Extrait d'un site (je mets les reférences aprés)
"— En avant, les marsouins! clame le commandant, nu-tête, superbe, échevelé, à dix mètres devant nous.
Sous l'ouragan de fer, les dents serrées, la poitrine bondissante, nous nous jetons à sa suite. Les rangs s'éclaircissent; les hommes s'affalent comme s'ils trébuchaient sur quelque racine, mais nulle plainte ne s'élève. Les blessés se terrent sans bouger. Je ne reconnais plus que deux ou trois visages autour de moi; mon tirailleur est toujours là. Il a mis son fusil en bandoulière, et la main droite serre fortement la cisaille. Le dernier saut nous a portés presque à la clairière; cinquante mètres à peine nous séparent des tranchées ennemies, d'où part un ouragan de feu.
Comment nous contenir? Les secondes nous semblent des heures; nous sommes exaspérés, affolés du désir de tirer, de foncer en avant, de frapper, d'en finir; sans nous en rendre compte, nous tirons avec fureur.
Soudain nous tressaillons des pieds à la tête: sur un couac magnifique, qui amène quand même un sourire à nos lèvres, un clairon sonne la charge; un cri formidable: « En avant! A la baïonnette! » répété par mille poitrines et, comme des fous, tandis que les notes métalliques nous fouaillent le cœur, nous nous ruons irrésistiblement.
..... Il y a la goutte à boire là-haut! …..Il y a la goutte à boire…..
Hurlants comme des démons, aucun obstacle ne nous arrête Qui tombe? On n'en sait rien!
..... Il y a la goutte à boire là-haut!
Arbres couchés, enchevêtrés; trous invisibles où nous perdons l'équilibre, fils de fer où nous nous empêtrons, plus rien ne brise notre élan.
..... Il y a la goutte à boire!......
D'un coup d'œil, de ce coup d'ceil que seuls quinze ans de football peuvent donner à un homme, j'embrasse le champ de bataille: cent mètres à peu près de tranchées, continuées plus loin par d'autres, deux mitrailleuses à chaque bout, qui balayent le terrain d'une dernière rafale, et trente Boches à peu près — tout ce que deux officiers ont pu maintenir revolver au poing — debout devant les tranchées, et qui tirent en jurant. Le reste fuit devant noa baïonnettes, entraînant les réserves dans leur panique.
— Aux mitrailleuses! aux mitrailleuses!
Vingt hommes se précipitent; un caporal arrive le premier et foudroie sur sa pièce le sous-officier mitrailleur; les autres « moulins à café » se taisent aussi, pris sans doute. Mais le clairon ne se tait pas, lui:
….. Il y a la goutte à boire là-haut!…..
Récit de Charles Tardieu - dans le Figaro - 17 décembre 1914
(non localisé avec des marsouins ....)
A bientot