Re: 1er régiment d'artillerie à pied Maubeuge
Publié : sam. janv. 19, 2008 8:05 pm
Bonsoir,
Avant de répondre aux questions de JFL59 et Hervé Toulotte,quelques précisions supplémentaires concernant les B.A.P. et R.A.P.:
-l'organisation de ces unités a souvent évolué en fonction des missions jugées prioritaires par l'Etat-Major,ainsi pendant les années 1896-1902
la défense des côtes est prioritaire compte-tenu des menaces de guerre avec l'Angleterre (les amateurs de fortifications savent que plusieurs des tourelles à éclipse de 75mm nouvellement construites ont armé des ouvrages à Ouessant et Dunkerque),de même les déclassements de forts ou de forteresses (Lille, Reims,etc...) expliquent les multiples réorganisations.
-en 1910,la dernière réorganisation amène la suppression des Bataillons d'Artillerie à Pied et la création de 11 Régiments (1° à 11°R.A.P.) auxquels
s'ajoutent 2 Groupes d'Artillerie à Pied d'Afrique (6° et 7°G.A.P.A.).,ces derniers assurant la défense des côtes de l'Algérie et de la Tunisie.
-pour compliquer le tout,après la crise d'Agadir de 1911,les risques accrus de guerre à court terme avec l'Allemagne deviennent évidents,tandis que
le rapprochement avec l'Angleterre,maîtresse des mers,permet de "baisser la garde" pour la défense des côtes.
En 1913,devant les formidables progrés de l'artillerie lourde allemande,l'Etat-Major se "réveille" enfin sur la nécessité de posséder une Artillerie Lourde
de Campagne.Pour la créer,il faut trouver de nouvelles disponibilités en Cadres et Personnels d'Artillerie.Une nouvelle réorganisation s'impose pour l'Artillerie à Pied qui fera les frais de l'affaire.
-En 1913 et 1914,des Décrets pris sous le signe de l'urgence prévoient:
-la suppression de 2 R.A.P et de 13 Batteries d'Artillerie à Pied,les 2° et 4° R.A.P. sont dissous le 1° avril 1914,à la même date sont créés les
5 Régiments d'Artillerie Lourde de Campagne ( N° 1° à 5° R.A.L.).
Pour l'histoire,notons que toutes ces décisions de suppression d'unités d'Artillerie à Pied ont paru au Journal Officiel.Parmi les 13 Batteries d'Artillerie à Pied dissoutes figurent la 4° Batterie du 6° G.A.P.A. de Philippeville en Algérie,dans ces conditions vous comprendrez mieux pourquoi le 4 Août 1914
à 04h30,le trés puissant croiseur de bataille GOEBEN s'est présenté devant le port de Philippeville,a mouillé à 4000m du port pour ajuster son tir,et a été très surpris quand la batterie d'El-Kantara a tiré dans sa direction.Un navire à l'arrêt étant impuissant et en danger devant une batterie de côte,le Goeben a alors pris la fuite à grande vitesse.On doit ce tir de riposte à un Lieutenant de réserve qui improvisa ce tir avec une poignée de réservistes.Tout ceci ne rendra pas la vie au 13 soldats du 3° Zouaves brûlés dans leur sommeil dans un hangar du port et aux 3 civils tués en ville.
Si le télemètre de la batterie d'El-Kantara avait été opérationnel,le Goeben ne serait pas sorti intact de cet affrontement.
-pour en revenir aux R.A.P,la réorganisation d'avril 1914 a réparti certaines batteries des régiments dissous dans ceux subsistants ce qui complique
la tâche de l'historien....
-à la mobilisation,les R.A.P. multiplient leurs batteries actives en les dédoublant ou même en les détriplant,le personnel d'active se répartissant dans toutes les unités.En principe,les unités dédoublées ont le numéro de la batterie active augmenté de dix.
Exemple:la 1° batterie se dédouble en 11° batterie,si elle se détriple la troisième prend le numéro 11°bis.
En plus de ces dédoublements,les R.A.P. créent aussi à la mobilisation des batteries Territoriales qui se numérotent à partir de 1.
-lorsque les R.A.P. ont été touchés par la réorganisation de 1914,l'affaire se complique,car les livrets de mobilisation n'ont pas pu être modifiés dans tous les régiments entre avril et août 1914.
Exemple:La 4° Batterie du 6° G.A.P.A a été dissoute le 1° avril 1914 à Philippeville.A la mobilisation,il était prévu de créer une 14° Batterie par dédoublement,cette batterie devenant opérationnelle au 4° jour de la mobilisation.Compte-tenu de la dissolution,les personnels prévus pour la 14° batterie furent désormais rattachés à la 12° Batterie bis provenant du détriplement de la 2° Batterie active d'Alger.Les personnels de réserve étaient encore mobilisés à Philippeville mais le noyau actif provenait de la batterie d'Alger,ceci explique que le Goeben fut tout de même canonné grâce à l'initiative du LT Cardot, venu de Sétif dès le 1° jour de la mobilisation et qui réussit à convaincre ses chefs de se préparer sans délai!Voilà un lieutenant qui n'a pas volé son galon de Capitaine un peu plus tard!
-On pourrait prendre des exemples identiques dans la pluspart des R.A.P.,il y en a de plus étonnants:à la dissolution du 2° R.A.P.,les deux batteries actives du Havre furent ramenées à une seule intégrée au 1° R.A.P.Par contre,les fascicules n'ayant pas été modifiés,les batteries territoriales conservèrent un temps leur ancienne appellation,il y eut ainsi une malheureuse 13° Batterie Territoriale du 2° R.A.P.créée au Havre et envoyée à Maubeuge.Son capitaine fut tué en essayant de fuir après la capitulation mais des militaires de cette unité purent rejoindre Dunkerque et seront intégrés à la 54° Batterie du 1° R.A.P.
J'ai essayé de rendre claire une organisation très compliquée,je ne sais pas si le but est atteint!
En tout cas,celui qui donnera la référence d'un document décrivant la mobilsation de l'artillerie française,notamment à pied,sera accueilli
"Musique en tête"!
Je donnerai des réponses aux questions posées dans des prochains messages.
Cordialement,G.F.
Avant de répondre aux questions de JFL59 et Hervé Toulotte,quelques précisions supplémentaires concernant les B.A.P. et R.A.P.:
-l'organisation de ces unités a souvent évolué en fonction des missions jugées prioritaires par l'Etat-Major,ainsi pendant les années 1896-1902
la défense des côtes est prioritaire compte-tenu des menaces de guerre avec l'Angleterre (les amateurs de fortifications savent que plusieurs des tourelles à éclipse de 75mm nouvellement construites ont armé des ouvrages à Ouessant et Dunkerque),de même les déclassements de forts ou de forteresses (Lille, Reims,etc...) expliquent les multiples réorganisations.
-en 1910,la dernière réorganisation amène la suppression des Bataillons d'Artillerie à Pied et la création de 11 Régiments (1° à 11°R.A.P.) auxquels
s'ajoutent 2 Groupes d'Artillerie à Pied d'Afrique (6° et 7°G.A.P.A.).,ces derniers assurant la défense des côtes de l'Algérie et de la Tunisie.
-pour compliquer le tout,après la crise d'Agadir de 1911,les risques accrus de guerre à court terme avec l'Allemagne deviennent évidents,tandis que
le rapprochement avec l'Angleterre,maîtresse des mers,permet de "baisser la garde" pour la défense des côtes.
En 1913,devant les formidables progrés de l'artillerie lourde allemande,l'Etat-Major se "réveille" enfin sur la nécessité de posséder une Artillerie Lourde
de Campagne.Pour la créer,il faut trouver de nouvelles disponibilités en Cadres et Personnels d'Artillerie.Une nouvelle réorganisation s'impose pour l'Artillerie à Pied qui fera les frais de l'affaire.
-En 1913 et 1914,des Décrets pris sous le signe de l'urgence prévoient:
-la suppression de 2 R.A.P et de 13 Batteries d'Artillerie à Pied,les 2° et 4° R.A.P. sont dissous le 1° avril 1914,à la même date sont créés les
5 Régiments d'Artillerie Lourde de Campagne ( N° 1° à 5° R.A.L.).
Pour l'histoire,notons que toutes ces décisions de suppression d'unités d'Artillerie à Pied ont paru au Journal Officiel.Parmi les 13 Batteries d'Artillerie à Pied dissoutes figurent la 4° Batterie du 6° G.A.P.A. de Philippeville en Algérie,dans ces conditions vous comprendrez mieux pourquoi le 4 Août 1914
à 04h30,le trés puissant croiseur de bataille GOEBEN s'est présenté devant le port de Philippeville,a mouillé à 4000m du port pour ajuster son tir,et a été très surpris quand la batterie d'El-Kantara a tiré dans sa direction.Un navire à l'arrêt étant impuissant et en danger devant une batterie de côte,le Goeben a alors pris la fuite à grande vitesse.On doit ce tir de riposte à un Lieutenant de réserve qui improvisa ce tir avec une poignée de réservistes.Tout ceci ne rendra pas la vie au 13 soldats du 3° Zouaves brûlés dans leur sommeil dans un hangar du port et aux 3 civils tués en ville.
Si le télemètre de la batterie d'El-Kantara avait été opérationnel,le Goeben ne serait pas sorti intact de cet affrontement.
-pour en revenir aux R.A.P,la réorganisation d'avril 1914 a réparti certaines batteries des régiments dissous dans ceux subsistants ce qui complique
la tâche de l'historien....
-à la mobilisation,les R.A.P. multiplient leurs batteries actives en les dédoublant ou même en les détriplant,le personnel d'active se répartissant dans toutes les unités.En principe,les unités dédoublées ont le numéro de la batterie active augmenté de dix.
Exemple:la 1° batterie se dédouble en 11° batterie,si elle se détriple la troisième prend le numéro 11°bis.
En plus de ces dédoublements,les R.A.P. créent aussi à la mobilisation des batteries Territoriales qui se numérotent à partir de 1.
-lorsque les R.A.P. ont été touchés par la réorganisation de 1914,l'affaire se complique,car les livrets de mobilisation n'ont pas pu être modifiés dans tous les régiments entre avril et août 1914.
Exemple:La 4° Batterie du 6° G.A.P.A a été dissoute le 1° avril 1914 à Philippeville.A la mobilisation,il était prévu de créer une 14° Batterie par dédoublement,cette batterie devenant opérationnelle au 4° jour de la mobilisation.Compte-tenu de la dissolution,les personnels prévus pour la 14° batterie furent désormais rattachés à la 12° Batterie bis provenant du détriplement de la 2° Batterie active d'Alger.Les personnels de réserve étaient encore mobilisés à Philippeville mais le noyau actif provenait de la batterie d'Alger,ceci explique que le Goeben fut tout de même canonné grâce à l'initiative du LT Cardot, venu de Sétif dès le 1° jour de la mobilisation et qui réussit à convaincre ses chefs de se préparer sans délai!Voilà un lieutenant qui n'a pas volé son galon de Capitaine un peu plus tard!
-On pourrait prendre des exemples identiques dans la pluspart des R.A.P.,il y en a de plus étonnants:à la dissolution du 2° R.A.P.,les deux batteries actives du Havre furent ramenées à une seule intégrée au 1° R.A.P.Par contre,les fascicules n'ayant pas été modifiés,les batteries territoriales conservèrent un temps leur ancienne appellation,il y eut ainsi une malheureuse 13° Batterie Territoriale du 2° R.A.P.créée au Havre et envoyée à Maubeuge.Son capitaine fut tué en essayant de fuir après la capitulation mais des militaires de cette unité purent rejoindre Dunkerque et seront intégrés à la 54° Batterie du 1° R.A.P.
J'ai essayé de rendre claire une organisation très compliquée,je ne sais pas si le but est atteint!
En tout cas,celui qui donnera la référence d'un document décrivant la mobilsation de l'artillerie française,notamment à pied,sera accueilli
"Musique en tête"!
Je donnerai des réponses aux questions posées dans des prochains messages.
Cordialement,G.F.