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Re: Déserteurs et insoumission à la mobilisation
Publié : jeu. nov. 07, 2013 6:46 pm
par Charraud Jerome
Bonsoir
Sur le sujet, j'invite à la lecture du livre "La grande guerre des gendarmes". Le thème est très bien documenté.
Cordialement
Jérôme Charraud
Re: Déserteurs et insoumission à la mobilisation
Publié : jeu. nov. 07, 2013 7:20 pm
par Eric Mansuy
Bonsoir à tous,
Intéressante question, Eric. Je n’ai pas connaissance du texte auquel vous faites allusion, mais serais heureux, moi aussi, si quelqu’un le dénichait et le mettait en ligne.
Quelques exemples pris dans le cadre de la 21e Région, ci-dessous :
1) Louis Eugène B., du 152e régiment d’infanterie.
Accusé de désertion à l’intérieur en temps de paix pour un délit du 31 janvier 1914 (ne s’est pas présenté à son corps le 30 décembre 1913, ni dans le mois qui a suivi le jour fixé pour son retour).
Condamné le 29 septembre 1914 à un an de prison.
Jugement suspendu jusqu’à la fin des hostilités par décision du général commandant la 21e Région, en date du 30 octobre 1914.
Louis Eugène B. a été tué le 6 septembre 1916 à Soyécourt, dans les rangs du 149e régiment d’infanterie.
2) Maurice C., du 4e régiment de chasseurs à cheval.
Accusé de désertion à l’intérieur en temps de paix pour un délit du 10 mars 1914 : s’est absenté de son corps en garnison à Epinal du 9 février 1914 au 14 septembre 1914, date à laquelle il s’est présenté à la Place d’Avignon.
Condamné le 29 septembre 1914 à un an de prison avec sursis (le condamné a spontanément cherché à contracter un engagement volontaire).
Maurice C. est mort le 11 juin 1916 dans une ambulance de Dugny, dans les rangs du 2e régiment de zouaves.
3) Paul Eloi G., réserviste.
Accusé d’insoumission à la loi sur le recrutement de l’armée en cas de mobilisation pour un délit du 8 août 1914 (ne s’est pas rendu le 5 août 1914, ni dans les deux jours qui ont suivi, à la destination fixée par son fascicule de mobilisation).
Condamné le 19 octobre 1914 à trois ans de prison.
Par décret en date du 7 février 1919, remise du restant de la peine a été accordée au soldat G. Paul Eloi.
4) Albert Constant B., sergent territorial.
Accusé d’insoumission à la loi sur le recrutement de l’armée en cas de mobilisation pour un délit du 6 août 1914 (ne s’est pas rendu le 3 août 1914, ni dans les deux jours qui ont suivi, à la destination fixée par son fascicule de mobilisation).
Condamné le 28 octobre 1914 à deux ans de prison.
Jugement suspendu jusqu’à la fin des hostilités par décision du général commandant la 21e Région, en date du 30 octobre 1914.
5) Camille Auguste C., soldat territorial.
Accusé d’insoumission à la loi sur le recrutement de l’armée en cas de mobilisation pour un délit du 5 août 1914 (ne s’est pas rendu le 2 août 1914, ni dans les deux jours qui ont suivi, à la destination fixée par son fascicule de mobilisation).
Condamné le 20 novembre 1914 à deux ans de prison.
Jugement suspendu jusqu’à la fin des hostilités par décision du général commandant la 21e Région, en date du 22 novembre 1914.
Suspension de jugement rapportée par décision du général commandant la 21e Région en date du 14 décembre 1914, C. étant inapte à faire campagne.
Remise du restant de la peine le 13 juillet 1916 par décret présidentiel.
6) Louis Anatole T., soldat territorial.
Accusé d’insoumission à la loi sur le recrutement de l’armée en cas de mobilisation pour un délit du 9 août 1914 (ne s’est pas rendu le 6 août 1914, ni dans les deux jours qui ont suivi, à la destination fixée par son fascicule de mobilisation).
Condamné le 20 novembre 1914 à trois ans de prison.
Jugement suspendu jusqu’à la fin des hostilités par décision du général commandant la 21e Région, en date du 22 novembre 1914.
Remise du restant de la peine accordée par décret du 27 décembre 1918.
Bien cordialement,
Eric Mansuy
Re: Déserteurs et insoumission à la mobilisation
Publié : jeu. nov. 07, 2013 8:40 pm
par Jean RIOTTE
Bonsoir à tou(te)s,
Je reviens sur les distinctions à faire et le vocabulaire relatif aux déserteurs et insoumis.
"Dans le langage courant, la notion d'insoumission est souvent confondue avec celle d'objection de conscience ou celle de désertion.
L'objection de conscience est un refus préalable de se soumettre à l'assujettissement au service militaire.
L'insoumission, elle, est un refus d'exécuter "l'ordre de route", à sa réception. Le délai accordé pour l'exécution de cet ordre est de 8 à 15 jours en temps de paix et selon la loi de 1913, tout homme mobilisé qui n'a pas rejoint son corps dans un délai de 2 jours est déclaré insoumis. Celui qui n'a pas respecté ce délai, l'insoumis, est passible du conseil de guerre, et risque des peines d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à 5 ans. De plus les insoumis sont privés de leurs droits civiques. La loi prévoit aussi des sanctions pour ceux qui emploient, cachent, encouragent les insoumis ou font de la propagande en leur faveur.
La désertion ne concerne que les militaires en service et abandonnant leurs postes en temps de guerre comme de paix. Il y a une gradation dans la désertion. La désertion à l'intérieur est moins grave que la désertion à l'étranger: le soldat, volontairement ou non, ne quitte pas le territoire français. Ne pas rejoindre son unité après une permission, la quitter pendant une période de repos, loin de l'ennemi, ne constituent pas les infractions les plus graves. Abandonner son poste devant l'ennemi, refuser d'obéir et déserter au front sont des actes lourds de conséquences. La désertion à l'ennemi reste le cas le plus rare et aussi celui dont la sanction est la plus lourde: les soldats sont passibles de la peine de mort par contumace."
Sources: Déserteurs et insoumis de la Grande Guerre (1914-1918) sur la frontière des Pyrénées-Orientales, de Michel RUQUET, éditions Trabucaire, 2009 -
Cordialement,
Jean RIOTTE
Re: Déserteurs et insoumission à la mobilisation
Publié : jeu. nov. 07, 2013 9:08 pm
par Jean RIOTTE
Re-,
Quelques chiffres. Même source que ci-dessus.
L'insoumission et la désertion sont des phénomènes marginaux et largement minoritaires en chiffres dans l'armée française de 14-18.
Le pourcentage d'insoumissions à la mobilisation serait de 1,5% (Raoul GIRARDET, Marc FERRO, Jean GALTIER-BOISSIERE, Guy PEDRONCINI) et le nombre de déserteurs pour toute la guerre de 63000, soit 0,75% des mobilisés. Le SHAT, dans sa statistique donne le chiffre de 15745 désertions en moyenne par an (AFGG, tome V, volume 2, page 194).
Cordialement,
Jean RIOTTE
Re: Déserteurs et insoumission à la mobilisation
Publié : jeu. nov. 07, 2013 9:18 pm
par Eric Mansuy
Bonsoir Jean,
Des désertions à l’intérieur, désertions sur un territoire en état de guerre, désertions à l’étranger, désertions à l’ennemi ? Cela me semble faire peu, surtout quand on voit le nombre d'affaires soumises aux conseils de guerre des D.E.S., et de la hausse du nombre des désertions en 1918, sans parler du cas, plus complexe, des "requalifications" d'articles 213 en articles 219.
Vaste sujet...
Bien sincèrement,
Eric
Re: Déserteurs et insoumission à la mobilisation
Publié : jeu. nov. 07, 2013 9:22 pm
par Alain 57
Bonsoir à toutes et à tous,
Pour répondre à Eric, tapez sur Google : séance du mardi 4 août 1914, Assemblée Nationale
La réponse se trouve me semble t-il vers la fin (18° adoption)
Bonne lecture, et dites moi s’il s’agit bien de cela.
Merci
Cordialement
Alain
Re: Déserteurs et insoumission à la mobilisation
Publié : jeu. nov. 07, 2013 9:22 pm
par Charraud Jerome
Bonsoir
Dans le livre de Louis Panel, celui-ci fait référence à Philippe Boulanger (la France devant la conscription, histoire d'une institution républicaine), il donne 1,22% d'insoumis pour l'année 1914. Il rappelle que nous sommes bien loin des 10% annoncés à la Chambre par Messiny en 1913.
Cordialement
Jérôme Charraud
Re: Déserteurs et insoumission à la mobilisation
Publié : jeu. nov. 07, 2013 9:45 pm
par Alain 57
Bonsoir tout le monde,
Pour compléter l’information de Jérôme, source Wikipédia :
« En août 1914, l’Etat-major de l'armée française escomptait 13 % de réfractaires ; il n'y en eut que 1,5 %. Le nombre des condamnations pour désertion augmente brusquement pendant et après les mutineries de 1917»
Bonne soirée
Alain
Re: Déserteurs et insoumission à la mobilisation
Publié : jeu. nov. 07, 2013 10:05 pm
par Jean RIOTTE
Bonsoir Jérôme,
1,22% pour 1914. Je pense que tu fais allusion aux insoumis de la mobilisation.
Si c'est le cas, nous restons dans la fourchette donnée par les auteurs de la source que j'ai consultée.
Exact: les plus pessimistes allaient jusqu'à 20% de défections! Ce fut "une divine surprise"... et la non mise en application du Carnet B.
Bonsoir Eric,
Moi aussi j'ai été surpris par ce chiffre, mais c'est celui qui est avancé. Et n'ayant pas étudié spécialement ce problème je suis dans l'incapacité d'en dire plus et donc de t'éclairer.
Bien cordialement,
Jean RIOTTE
Re: Déserteurs et insoumission à la mobilisation
Publié : jeu. nov. 07, 2013 10:17 pm
par Charraud Jerome
Bonsoir Jean
J'ai modifié mon message, il s'agit bien des insoumis.
Concernant le carnet B, voici le télégramme "clé" envoyé par le ministère aux préfectures:
1er août 1914 - 14 heures 35
Intérieur A Préfets France
N'appliquez pas intégralement même en cas d'ordre de mobilisation instructions sur application du carnet B l'attitude actuelle des syndicalistes et des cégétistes permet de faire confiance à ceux d'entre eux qui sont inscrits. Exercez seulement à leur égard surveillance attentive mais discrète en ce qui touche anarchistes inscrits prenez dès l'ordre de mobilisation mesures individuelles qui vous paraitraient absolument indispensables à l'égard de ceux qui vous semblent constituer un danger réel immédiat surveillez étroitement les autres en ce qui concernent étrangers inscrits. Appliquez instructions demain matin sauf contre ordre
Cordialement
Jérôme Charraud