L'aspect du champ de bataille

HB 63
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Re: L'aspect du champ de bataille

Message par HB 63 »

Bonjour,

Si j'avais sollicité la republication de "Une vue oblique de la Main de Massiges lors de la préparation d'artillerie du 24 septembre 1915 à la veille de la grande attaque en Champagne", ce n'était pas pour faire une bataille d'experts grincheux mais juste pour avoir une opportunité de visionner ce que notre GO avait pu peut-être entrevoir lors de sa disparition à Beauséjour le 30 septembre 1915.

Cordialement,
Christian
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Mike010
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Re: L'aspect du champ de bataille

Message par Mike010 »

Merci Guy-François pour les photos et pour contributions toujours enrichissantes !!!!

ALVF
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Re: L'aspect du champ de bataille

Message par ALVF »

Bonjour,

Voici une des très nombreuses photographies obliques prises par le lieutenant Pinard de l'Escadrille 50 au cours des semaines précédant l'attaque du 20 août 1917 à Verdun:
-d'abord une photographie panoramique du Mort-Homme et du Bois des Corbeaux au début de la préparation d'artillerie, prise à 4000 mètres d'altitude.Les arrières allemands sont soumis au tir de l'A.L.G.P et la haute colonne de fumée indique la destruction d'un important dépôt de munitions tandis qu'à gauche de cette colonne, on distingue nettement sur la photographie originale les détonations d'une salve entière d'obus de 270 mm:
Image
Le Mort-Homme, le Bois des Corbeaux et le Bois de Forges le 12 août 1917 à 16h30.

-une pensée pour le lieutenant Pinard et son pilote le lieutenant Roget qui ont pris ces clichés exceptionnels à bord d'avions Letord et Sopwith en août 1917, tandis que leur chien, le fidèle "Cadorna", attend impatiemment le retour de l'équipage qui passe plusieurs heures par jour au-dessus de ces parages, rendus malsains par l'abondance de la "Flak" et l'agressivité de la chasse allemandes.Ici le lieutenant Pinard pose devant son Letord équipé d'un appareil de focale F: 1,20 m panoramique:
Image
Lt Pinard devant son Letord équipé d'un appareil panoramique, août 1917.

-une image d'un détail plus tragique, l'entrée du "Gallwitz Tunnel" photographié par le lieutenant Pinard quelques minutes avant le déclenchement d'un tir d'obusiers de 400 mm dont les monstrueux obus de 900 kg avec fusée retardée vont écraser une des entrées en provoquant la mort de plusieurs dizaines de soldats allemands.L'équipage Pinard-Roget a photographié journellement les entrées du "Gallwitz Tunnel" du 12 au 20 août 1917 afin de renseigner le commandement et l'artillerie de la progression des destructions:
Image
L'entrée du tunnel de Cumont "Gallwitz Tunnel" le 18 août 1917

-le 25 août 1917, dans les lignes conquises, les aviateurs peuvent vérifier sur place l'efficacité de leur travail, ici une des entrées du Tunnel du Bois des Corbeaux dans le Ravin des Caurettes.Le paysage environnant est devenu méconnaissable et une solitude écrasante entoure ces paysages de mort où des centaines de soldats allemands ont péri dans leurs abris avant même l'arrivée de l'infanterie d'attaque:
Image
A l'entrée du Tunnel du Bois des Corbeaux dans le Ravin des Caurettes le 25 août 1917.

-une image moins spectaculaire témoignant du travail quotidien de l'escadrille 50, une vue verticale, prise à 3000 mètres avec l'appareil de focale F: 1,20 m, de la Tranchée de Poméranie au nord-est de Cumières, photographiée le 9 août 1917.Les deux abris de mitrailleuses sous abri sont désormais condamnés, dans les jours suivants, une batterie de mortiers de côte de 270 mm et plusieurs batteries de 155 C vont niveler cette tranchée et ces deux abris qui deviennent à peu près indiscernables sur les clichés pris à partir du 12 août 1917:
Image
Abris de mitrailleuses de la Tranchée de Poméranie.

On mesure à la vue de ces images le changement complet de nature d'une guerre dominée désormais par une gigantesque lutte d'artillerie.Il faudra attendre le printemps 1918 et le changement de la tactique de l'Armée allemande pour que ces concentrations apocalyptiques d'artillerie perdent une partie de leur efficacité.
Cordialement,
Guy François.
humanbonb
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Re: L'aspect du champ de bataille

Message par humanbonb »

Merci bien pour ce complément et bonne journée à tous.
Bien cordialement Julien.
ALVF
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Re: L'aspect du champ de bataille

Message par ALVF »

Bonjour,

Une photographie du 17 août 1917 prise à 1000 mètres d'altitude seulement au-dessus du Bois des Corbeaux et de la Côte de l'Oie.
On distingue bien les points forts du dispositif ennemi pris à partie par l'artillerie, il s'agit bien de tirs de destruction appliqués sur des objectifs majeurs (d'où la nécessité absolue d'obtenir de bons renseignements) et non pas de tirs sur zone que l'artillerie britannique continue encore assez stupidement à employer dans les Flandres en 1917.Depuis 1916, les artilleries allemandes et françaises ne pratiquent plus, même sur des fronts étroits, que des tirs de destruction ciblés.Bien entendu, au moment des attaques d'infanterie, le tir de barrage roulant sera la règle sur toute la largeur du front attaqué.
On peut dire qu'avec cette méthode, l'architecture du front ennemi est brisée, ruinant l'essentiel des points forts de la défense, on distingue particulièrement au centre de la photographie à l'ouest de la route un point du front ennemi particulièrement bouleversé....et il reste trois jours de préparation, encore beaucoup plus intense.
L'aspect "calme" du front est trompeur, la photographie est prise à l'heure "H" d'une préparation d'artillerie, sur le cliché original, on peut distinguer à l'agrandissement les détonations d'une douzaine d'obus en trois points, dans quelques minutes, la fumée va obscurcir le champ de bataille et le champ de vision des observateurs.
Image
Bois des Corbeaux et Côte de l'Oie le 17 août 1917.

Cordialement,
Guy François.
humanbonb
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Re: L'aspect du champ de bataille

Message par humanbonb »

Bonsoir et merci pour ce nouveau cliché.
Une fois les équipages rentrés, comment se deroulait le travail concernant les clichés pris ? Y avait il des impressions sur de plus grands support ou tout s'effectuait il avec ces photos relativement "petites" ?

Cdlt Julien.
ALVF
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Re: L'aspect du champ de bataille

Message par ALVF »

Bonsoir,

Dès l'atterrissage de l'avion, les photographies sont immédiatement développées et tirées dans le "labo" de chaque escadrille de reconnaissance et diffusées aux échelons concernés.Pour une offensive près du Mont-Kemmel en 1918, des photographies prises le matin par l'escadrille 50 étaient dès l'après-midi entre les mains des commandants de régiments et de bataillons chargés de l'attaque d'infanterie du lendemain matin.
Il y a bien sûr des agrandissements des parties importantes du terrain, par exemple les entrées du Gallwitz Tunnel en août 1917 ou des emplacements de batteries, casemates, emplacements de mitrailleuses.Des dessinateurs reprennent aussi les photographies aériennes pour établir des schémas plus lisibles pour les personnels peu habitués à lire et interpréter les photographies aériennes, les officiers observateurs de l'escadrille 50 ont ainsi rédigé des études relatives aux Minenwerfer de Vauquois, très détaillées et très lisibles pour les officiers d'artillerie chargés ensuite des tirs.
Il y a enfin des montages par juxtaposition de photographies, agrandies ou non.Les albums d'officiers dont proviennent ces photographies contiennent ainsi un "dépliant" du Mort-Homme en 1917 qui fait près d'un mètre de long!
Cordialement,
Guy François.
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ninon37
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Re: L'aspect du champ de bataille

Message par ninon37 »

Bonsoir ,

Extraordinaire reportage , merci

Ninon
Ils sont tombés silencieux sous le choc , comme une muraille .( monument au Colonel Driant )
breizh820
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Re: L'aspect du champ de bataille

Message par breizh820 »

Bonsoir à tous et merci Guy-François,
Je constate qu'il fallait quand même bien connaitre le terrain pour pouvoir exploiter ces photos.
Les nids de mitrailleuses de la tranchée de Poméranie ne sont pas évidents à trouver même en agrandissanr énormément l'image!
De même pour l'entrée du Gallwitz tunnel.
Peut-on en conclure que le but des photos était plutôt de constater les dégats occasionnés par l'artillerie que de découvrir des obstacles nouveaux ou des travaux de l'ennemi?
L'armée a longtemps utilisé les capacités de peintres et dessinateurs comme Mathurin Méheut pour représenter le champ de bataille et repérer les tranchées et obstacles ennemis en vue des attaques futures. Les observations aériennes ont bien amélioré cette technique mais l'étendue de la zone visualisée nécessitai,t pour l'utilisateur,une connaissance approfondie de ces lieux qui, en de très nombreux endroits, ne ressemblaient plus aux cartes d'état major.De même, le repèrage de la zone à photographier ne devait pas être simple pour le pilote au dessus de ces paysages lunaires.
Merci pour ces photos et leur présentation.
Kénavo.
Louis
ALVF
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Re: L'aspect du champ de bataille

Message par ALVF »

Bonjour,

A partir de 1915, c'est bien la photographie aérienne qui permet de découvrir les organisations ennemies et surtout qui permet la mise à jour des Plans Directeurs.Les Groupes de Canevas de Tir (G.C.T) en liaison avec le Service des Renseignements de l'Artillerie (S.R.A) mettent à jour, parfois journellement dans les secteurs "agités", les plans directeurs.L'interprétation des photographies aériennes est un art difficile, des dessinateurs reprennent ensuite les schémas des organisations complexes mais c'est avant tout la reconnaissance qui est à la base de la connaissance du dispositif de l'ennemi.
Les aviateurs des escadrilles de reconnaissance ont joué un rôle majeur dans la préparation des offensives, des deux côtés du front, leur travail est ingrat, il implique de passer des heures au-dessus des lignes ennemies, les équipages étant exposés au tir de la Flak et aux actions de la l'aviation de chasse.Il faut également préparer longuement les missions à accomplir par la lecture de la carte, des rapports et des travaux déjà effectués et connaître le terrain dans ses moindres détails.
Les missions de contrôle des tirs sont plus secondaires mais nécessaires, elles permettent de constater l'état des défenses ennemies et les progrès de la destruction lors des préparations d'artillerie.
Enfin, les missions de réglage des tirs sont capitales mais le nombre des batteries en action ne permet que peu de tirs réglés par l'aviation (il y en a plus de la part des ballons, reliés par téléphone aux commandants de batteries).Le réglage des tirs depuis les avions est prioritairement réservé à l'Artillerie Lourde à Grande Puissance et aux pièces lourdes d'action lointaine.Les difficultés des liaisons par TSF et les conditions climatiques ne permettent pas une grande proportion de tirs entièrement réglés par l'aviation.
Les tirs "vitaux" et prioritaires, tels que la destruction des grands tunnels allemands, impliquent pour le réglage la participation simultanée des observatoires terrestres, des ballons et des avions.La coordination de ces liaisons n'est pas une mince affaire!
Cordialement,
Guy François.
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